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DICTIONNAIRE
ÉTYMOLOGIQUE
DE
LA
LANGUE GASCONNE
AVEC
LA
RACINE CELTE OU GRECQUE DE CHAQUE MOT GASCON
SUIVI DU
MOT
LATIN
ET FRANÇAIS
PAR
ALCÉE DURRIEUX
AVOCAT
ALA
CHEVALIER
AUTEUR
DE
las Obros
LA
D'APPEL
LÉGION
DE
DE
TRADUCTION
P.
DE
ET
CARROS,
PARIS
D'HONNEUR
las Belhadós de Leitouro
AVEC
DE
COUR
DE
ET
DE
L'ÉDITION
COMMENTAIRES
POÈTE
DE
JEANNE
DE
NAVARRE
Les savants font les langues qui brillent,
et les peuples celles qui durent.
Premier volume
AUCH
IMPRIMERIE
ET
LITHOGRAPHIE
1899
GASTON
FoiX
��Tiré à
IOO
exemplaires
12
��DICTIONNAIRE
ÉTYMOLOGIQUE
DE
LA
LANGUE GASCONNE
RACINE CELTE OU GRECQUE DE CHAQUE MOT GASCON
SUIVI DU MOT LATIN ET FRANÇAIS
ALCÉE DURRIEUX
AVOCAT
A LA
CHEVALIER
AUTEUR
DE
las Obros
LA
D'APPEL
LÉGION
DE
TRADUCTION ET
P.
DE
GARROS,
DE
PARIS
D'HONNEUR
las Belhados de Leitouro
AVEC
DE
COUR
DE
ET
DE
L'ÉDITION
COMMENTAIRES
POÈTE
DE
JEANNE
DE
NAVARRE
Les savants font les langues qui brillent,
et les peuples celles qui durent.
du
AUCH
IMPRIMERIE ET LITHOGRAPHIE GASTON FoiX
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XIX- 209-<L
�PRÉFACE
COMMENT
CETTE ÉTUDE A ÉTÉ
— NÉCESSITÉ
Au
POINT
L'INTÉRÊT DE
ENTREPRISE
DE LA CONSERVATION DES
LA
DE
VUE
RACE
ET SUIVIE.
DIALECTES
PATRIOTIQUE
DANS
CELTO-GRECQUE.
????
Nous avons dit ailleurs comment le hasard nous
conduisit à l'étude des langues Méridionales, après
un demi-siècle de séjour ininterrompu à Paris. Ce
travail, objet d'abord de récréations dans une
société de Gersois Parisiens, éveilla notre curiosité,
lorsque nous crûmes reconnaître clans le Gascon,
ce prétendu Patois, des éléments Grecs nombreux,
�dont trois mille ans de durée n'ont pu altérer
l'évidence. Vérification faite, nous n'hésitâmes pas
à le classer parmi les langues Celto-Grecques.
D'où pouvait procéder cette invasion des mots
Helléniques, plus de cinq cents ans peut-être avant
la fondation de Rome, dans nos contrées Pyrénéennes, isolées par la mer, ses grands fleuves, et
des montagnes inaccessibles. Nous avions énoncé
nos présomptions à cet égard, dans la Préface de
Las Belhados.
Mais la préparation de l'Edition du Pey de
Garros, le vrai classique du Gascon au xvie siècle,
nous confirma dans la conviction, que nos langues
Aquitaniques avaient emprunté aux Grecs peutêtre plus de la moitié de leurs mots; qu'il en
fallait dire autant d'ailleurs de celles d'Espagne,
de Portugal et d'Italie.
Je me souvins alors des confidences de mon vieil
ami H. Schliemann, l'infatigable pionnier de l'Archéologie.
Lorsqu'il voulut découvrir les ruines de Troie,
il rencontra d'abord celles d'une ville Arabe, puis
celles d'une ville Latine : Il fouille plus profon-
�dément, et soulève les décombres d'une ville Asiatique plus récente que celle d'Homère. Sans se
décourager, il descend plus bas encore, et cette fois
il arracha du sein de la terre le trésor de Priam.
Tel est le vrai système des vaillants et des bien
avisés; celui qu'il faut recommander surtout aux
chercheurs d'Etymologies. C'est sur le tuf des langues primitives que gît la vérité de leurs origines.
Sans doute il est plus commode et plus simple de
s'arrêter aux ruines Latines : mais alors le Trésor
d'Ilion n'est pas conquis : et les vérités Historiques
et Philologiques restent enfouies dans les décombres de la fausse science. Ce livre vaudra surtout
comme indication de la vraie Méthode à suivre par
les philologues sérieux.
Nous avons pris pour modèle l'intrépide Archéologue, et fouillé d'abord l'histoire jusque dans
ses profondeurs. Le résultat de ces recherches
constitue la première partie de notre étude.
Mais dès les premiers pas, nous nous sommes
heurtés au savant Gaston Paris et à sa nombreuse
Ecole. Il enseigne, en effet, qu'il n'y a pas plus de
race Romane que de race Latine : et nous sommes
�bien d'accord jusques là. Mais nous nous séparons
de lui lorsqu'il affirme, après Raynouard et quelques autres; sans la moindre preuve d'ailleurs,
que les Celtes, Ligures, Ibères, Illyriens, etc., etc.,
abdiquèrent tout ce qui leur était propre, et notamment leurs langues nationales, pour adopter les
Institutions et la langue de Rome ; et qu'ils acquirent ainsi le nom dépeuples Latins.
Nous nous attachons à prouver au contraire :
i° Que leur parenté ne fut pas établie il y a quelques siècles, d'une façon artificielle, par le sacrifice,
inventé récemment, de leur Nationalité, sacrifice
insuffisant d'ailleurs pour la constituer : mais qu'ils
étaient unis, de temps immémorial, par les liens
du sang puisé à la source Celto-Grecque commune
à tous;
2° Que les Institutions de notre vieille Aquitaine, dont nous analyserons les principales encore
bien vivantes, sont celles de nos aïeux Grecs et
Celtes, et qu'elles ne doivent rien à celles de Rome;
3° Et dans la partie Philologique, la deuxième
du volume, que le Verbe Gaulois, dont la conservation est historiquement établie jusqu'à la fin du
�x5 siècle, se retrouve, dès le lendemain, dans les
Chants de ses premiers Poètes, et dans les documents contemporains exhumés, chaque jour de la
poussière des vieilles Archives.
Quant au Vocabulaire contenu dans le deuxième
volume de notre oeuvre, il en rend la conclusion
irréfutable.
§ II
Nos différents Dialectes Aquitaniques, suivant
les vœux d'une petite Eglise, doivent-ils abdiquer
leur originalité, pour se ranger humblement sous
la bannière du Provençal ?
11 nous suffira de rappeler que l'Ionique, porté
aux honneurs suprêmes par le Divin Homère
d'abord, et plus tard par la Pléiade immortelle
d'Athènes, n'éleva jamais la prétention d'imposer
silence au Dorien, à l'Eolien, non plus qu'aux
autres Dialectes qui vécurent à côté de lui, dans
leur souveraine indépendance. Or, les Provençaux
attendent leur Homère, et n'ont pas encore fait
�pâlir le rayonnement littéraire de la patrie de
Périclès. Nous savons, depuis trop longtemps,
hélas ! que la modestie ne fleurit qu'à regret
dans nos
climats Méridionaux :
mais il n'est
jamais inutile de rappeler qu'elle figure parmi les
vertus appréciées.
Nous établirons, bientôt, que la variété des
Dialectes est nécessaire; que d'ailleurs Y unification
rencontrerait une résistance impossible à vaincre.
Que chacun vive en liberté dans sa tradition,
et travaille dans son atelier Historique et Philologique;
Que chacun produise de beaux vers et de la
bonne prose, ce véritable agent de la propagande
utile. Eliminons avec soin les éléments étrangers
qui altèrent la pureté de la langue. Grâce à l'identité de la Grammaire, et aux vaillants efforts de
la Phalange déjà illustre des Méridionalistes, le
rapprochement s'opérera peu à peu, si nous bannissons, sans pitié, tous mots ne justifiant pas
d'une naissance authentique. Et la petite Patrie se
réjouira des travaux de ses enfants,
�§ ni
Mais la Grande, pourrait-elle s'en désintéresser?
Nous sommes voisins et victimes d'un peuple
nombreux et aguerri, qui a remis en honneur la
maxime favorite d'Attila : La force prime le Droit.
Fidèle à son principe, à cette heure, il étend sa
main formidable sur la Bohême Slave, que les
savants de Berlin lui désignent comme terre Germanique. Après nous avoir arraché, sous le même
prétexte, l'Alsace et la Lorraine, il dresse les
Cartes de son Empire futur, qui doit englober
une partie de la Suisse, la Hollande, la FrancheComté, la Champagne, la Bourgogne et la Flandre.
D'autre part, la guerre récemment déclarée à
l'Espagne par les Etats-Unis, prouve que la doctrine chère aux Pirates, développe ses racines
ailleurs qu'en Allemagne.
Ainsi le Droit des
Nations, étranger à la loi éternelle de la morale,
ne dépend plus que de la violence; il devient un
coupe-gorge.
Que dire, d'autre part, de l'Angleterre, grande
�Nation de proie, généralement détestée, aux appétits toujours inassouvis, qu'on rencontre menaçante, sur tous les grands chemins de la terre et
de la mer, avide de butin bien ou mal acquis. Pour
étendre le champ de ses déprédations, elle veut
s'allier avec l'Amérique, Anglo-Saxonne comme
elle, lui promettant sa part des dépouilles du
Monde dévalisé à frais communs.
En face de ces éventualités redoutables, que
doivent faire les Méridionaux ayant une idée au
cerveau, et au cœur l'amour de la Patrie ? Travailler sans relâche à relier, par des nœuds indissolubles, Français, Espagnols, Italiens et Hellènes,
la grande famille Celto-Grecque, tous également
menacés dans leurs territoires, dans leurs colonies, et dans leur existence même; prouver la
communauté d'origine, que l'Histoire et la Philologie rendent évidente; chercher dans leurs alliances indissolubles la garantie de l'indépendance
pour tous; et abriter leurs intérêts économiques
sous des traités équitables. Après les Croisades
religieuses, celles du Droit, pour le salut commun
des honnêtes gens opprimés ou menacés par la Force.
�A l'Œuvre donc, MM. les Provençaux, du côté
de l'Italie qui s'obstine dans sa misère, conséquence de ses erreurs : mais laissez-nous notre
Dialecte, que les Héroïques Espagnols lisent déjà
à livre ouvert. N'affaiblissons pas l'organe naturel
qui nous rapproche de nos voisins. Espérons que
cent millions de Celto-Grecs, solidaires dans la
bonne comme dans la mauvaise fortune, serrant
la main fraternelle de cent millions de Slaves,
calmeront enfin ces ambitions sans mesure; et
nous affranchirons l'Europe d'appréhensions incessantes,sans parler d'un sacrifice annuel, également
ruineux pour tous, de cinq ou six milliards gaspillés en moyens de défense.
§ iv
Certes, le Félibrige arrivé à ces hauteurs, est
déjà respectable. Mais il doit monter encore plus
haut. En effet, si nous étudions l'histoire de la
Civilisation en Europe, comment ne pas reconnaître qu'elle a constamment obéi à l'influence de
notre race. Elle est purement Grecque dans l'anti-
�quité, Greco-Latine plus tard; déjà Française au
xiiie siècle, Gréco-Italienne après la prise de Constantinople par les Turcs, jusqu'au jour où notre
éblouissante Renaissance,faisant de Paris l'Athènes
nouvelle, jeta sur le Mondela Civilisation moderne.
Frères, confondons nos cœurs et nos bras: dressons
la Citadelle imprenable de la Civilisation de l'avenir, menacée par le matérialisme des races de proie.
L'Allemagne armera des régiments, l'Angleterre
construira des vaisseaux; mais sur nulle page de
leur Histoire, elles n'inscriront des Siècles comme
ceux des Périclès, des Auguste, des saint Louis,
des Léon X, des François Ier, des Louis XIV, et
des Révolutions comme celle de 1789, où la France
joua sa vie pour assurer au Monde les bienfaits de
la liberté. Soyons encore et toujours les soldats du
Droit et de l'Idéal.
Aux menaces et aux brutalités de la force, n'opposons que la loi de Justice, celle de notre race;
mais devenons invincibles pour la faire triompher
partout et toujours.
Et voilà pourquoi le vieil Octogénaire entreprit
son étude.
�Courage donc, vaillante jeunesse Méridionale;
faisons de l'Histoire et de la Philologie pour l'honneur de la grande et de la petite Patrie : Et que,
grâce à nos efforts, la noble famille Celto-Grecque
marche bientôt, comme un seul homme, pour son
indépendance, pour sa gloire, et pour la Civilisation universelle dans l'avenir. — Gesta Dei per
Gallo-Graecos.
TULLE,
par
LECTOURE,
dans la 80e année.
12 octobre 1898, jour de mon entrée
��PREMIÈRE PARTIE
EXPOSÉ HISTORIQUE
CHAPITRE
LANGUES.
—"
— POLYBE
Ier. —
COMMENT
—
TITE-LIVE
— DIODORE DE SICILE
AMMIEN MARCELLIN
CÉENNE
—
SE FORMENT
LES
ORIGINE DES LANGUES AQUITANIQUES
—
EXAMEN
—
—■
CÉSAR
—
STRABON
COLONIE DORIENNE —
JUSTIN
DES
—
COLONIE PHO-
TEXTES
ET
LEURS
CONSÉQUENCES.
????
On répète, depuis des siècles, que les animaux
traduisent leurs sensations par des émissions de
voix parfaitement reconnaissables, tantôt gaies ou
tristes, plaintives ou effrayées; tantôt terribles
comme le rugissement du lion en fureur, ou mélodieuses comme le chant du rossignol à la saison
des amours.
L'homme a du commencer comme les bêtes. Il a
�d'abord traduit ses sensations par des émissions
de voix simples, inarticulées, faciles à noter, parce
qu'elles étaient uniformes et peu nombreuses.
Mais dès que le groupe Humain s'est accru,
dans les cavernes ou sous les abris de feuillages,
les sons expressifs vont se multiplier, comme les
besoins. Cette langue élémentaire d'émission de
sons sera monosyllabique, et suffira longtemps à
cet embryon de société. L'histoire atteste que la
nature a partout procédé de la même façon; seulement les inflexions de la voix varièrent suivant
les territoires, leurs climats, leurs ressources, leurs
accidents, et la constitution des habitants.
Et voilà pourquoi les langues Méridionales sont
si profondément différentes de celles du Nord.
Mais l'homme obéit fatalement à la loi du progrès. Les incertitudes de la vie de Chasseur lui
feront préférer l'état Pastoral d'abord; puis la multiplication de l'espèce le conduit à la Culture du
sol, à l'édification des Bourgs et des Villes, c'està-dire à des besoins de tout ordre.
Sa voix, vrai Protée, modulerades variations sans
limite, articulées ou non, suivant le développement
des idées : et ces sons simples ou composés prennent enfin une signification certaine, et déterminent la création d'une langue fixe, ce premier
besoin de toute vie sociale.
�— i5 —
Or, dès que le mot figurant l'idée est accepté
pour l'oreille, il lui faudra pour l'œil, un signe qui
le matérialise. Et voilà comme la variété des écritures a suivi celle des langues. Chaque peuple a
procédé sans un ordre préétabli, dans sa souveraine indépendance, et suivant son génie particulier. Ainsi s'explique toute la gamme des mots et
des signes graphiques, depuis les Hiéroglyphes
jusqu'à l'Ecriture manuscrite ou imprimée.
Supposons maintenant un peuple barbare ou à
peu près, envahi par un autre peuple également
barbare : vil bétail conduit par un Pasteur bourreau, le vaincu subira toutes les violences de la
force brutale, jusqu'à la perte de sa personnalité.
Admettons même que ces deux peuples se mêlent
sans se heurter, leur fusion ne leur profitera guère
au point de vue ou nous sommes placés; deux barbaries ne valant pas mieux qu'une.
Mais si un peuple qui en accueille un autre en
ami, est déjà en possession d'une langue plus ou
moins rudimentaire, tandis que le nouveau venu
dispose de la sienne déjà formée, claire, harmonieuse, souple aux organes; chacun des deux pourra
garder sa langue. Mais le Vocabulaire de chacun
adoptera inévitablement quelques-uns des mots
de sa voisine. Ainsi se trouveront confondus les
deux éléments National et exotique, dans des
�— i6 —
proportions inégales sans doute, mais suffisantes
pour affirmer le rapprochement des deux races.
Voilà comment notre langue Gasconne, d'essence Celte, toujours régie par la Grammaire
Celte ou Gauloise, justifie de l'origine Grecque
d'une partie de son Vocabulaire. Par contre, il
est facile de reconnaître dans le ^eÇi^òv les emprunts
faits par les Grecs au Celtique, mais dans des
proportions moindres. Chemin faisant nous en
signalerons d'assez nombreux exemples.
Ce qui est vrai pour les mots l'est également
pour les signes qui les représentent. Ils se modifieront par l'usage, jusqu'à l'abdication des plus
compliqués au profit des plus simples. Ces procédés naturels de l'esprit humain ont du être universellement suivis.
Enfin, et pour épuiser toutes les hypothèses,
un peuple en pleine possession de lui-même,
ayant sa langue, son écriture, une religion, des
institutions libres, une organisation sociale complète, et des richesses de tout ordre, est attaqué
brutalement, pillé sans vergogne ( i ) et succombe
après dix ans d'une lutte héroïque.
Il ne doit au conquérant que sa haine. Tout ce
(i) Suet.-Caesar — g 54 —In Gallià fana templa que Deum
donis referta ezpilavtt, urbes diruit soefius ob praedam quam
ob delictum.
�—
17 —
qui émane de lui doit lui être odieux. Il repoussera
surtout sa langue détestée, comme le collier de
servitude, et gardera pieusement la sienne dans
laquelle il retrouve le génie et l'indépendance de
la Patrie livrée aux Proconsuls et à leurs violences. Voilà ce qu'indiquent la nature et le simple
bon sens.
Nous allons voir que les choses se sont passées
ainsi dans les Gaules, après l'établissement des
Colonies Grecques d'abord, et conquises plus tard
par les Légions victorieuses de Rome. Mais avant
d'entamer cette discussion, nous approuvons hautement l'affirmation des Hagiographies, que la
haine du Gaulois pour son vainqueur, activa puissamment les progrès du Christianisme si cruellement persécuté par les agents de César, jusqu'à
l'avènement de Constantin. La doctrine Chrétienne, mère de l'Egalité, sera toujours la favorite
des hommes libres : et le matérialisme la religion
des tyrans de tout ordre.
§
er
i
.
—
POLYBE (i)
César a confirmé d'une façon explicite ce que
Polybe (2) indiquait incidemment, à l'occasion de
(1) Un siècle et demi avant Jésus-Christ.
(2) Histoire générale lib., § 17.
2
�— i8 —
la paix qui mit fin à la première guerre Punique
(286 avant Jésus-Christ). Les Carthaginois avaient
engagé entre autres auxiliaires, un grand nombre
de Ligures, Celtes et Ibères, c'est-à-dire des Gaulois
Cisalpins, Transalpins et Espagnols, et encore des
Grecs et des Africains. La paix conclue, ces mercenaires, qui formaient une armée, devinrent un
immense danger pour Carthage.
Ils élevèrent de telles prétentions qu'elles ne
purent être accueillies.
Et l'Auteur ajoute (1). « Il n'était pas possible à
)) un seul homme de les réunir tous dans une
» même assemblée, pour leur donner de com» muns conseils; et tout autre moyen de les
» haranguer était impraticable. Comment s'y
)) prendre ? Le Général pouvait-il connaître le
» Dialecte de chacun ? Avoir recours à des inter)) prêtes, et revenir ainsi quatre ou cinq fois sur le
» même discours, était une difficulté plus grande
» encore. »
Que résulte-t-il de ce passage très clair?
Que les cinq variétés de mercenaires avaient chacune leur langue ou leur Idiome; et voilà pourquoi
le même discours aurait du être répété quatre ou
cinq fois : ce qui veut dire que, près de deux cents
(1) Histoire générale lib., § 67. Traduction Bouchot, 1847.
Paris, Delahays.
�— 19 —
ans environ avant César, les Gaulois d'Italie, de
France et d'Espagne parlaient des Dialectes différents. Ils avaient donc une langue. L'indication de
Polybe était déjà formelle.
César ira bien plus loin, lorsqu'il affirmera de
auditu, que les seuls- Gaulois de France en parlaient trois : c'est-à-dire trois variétés de la même.
§ II.
TITE LIVE
Tite Live lève tout doute à cet égard.
Annibal a passé le Rhône, et arrive au pied des
Alpes. 11 envoie quelques Gaulois en avant pour
servir de guides et d'éclaireurs à son armée; leur
langue et leurs mœurs étaient à peu près celles des
montagnards, d'ailleurs comme aujourd'hui. Ils se
mêlent à leurs entretiens, et apprennent ainsi que
les défilés n'étaient gardés que pendant le jour. Le
Général prit ses dispositions en conséquence ( i).
Or, Annibal avait recruté ses Gaulois un peu
partout; et lorsqu'il arrive sur les bords du Pô,
ceux d'Italie reconnaissant leurs frères d'au-delà
( i) Tit. Liv. lib. 21, C 22 ; tum per eosdem Gallos haut seine
multum linguà moribus que abhorrentes, cum se immiscuissent
conloquiis montanorum, edoctus interdiu tantum obsidere
saltum, etc., etc.
�— 20 —
des Monts, lui fournirent des vivres en abondance
et des soldats intrépides.
Que les Néo-latins le veuillent ou non, l'exactitude de l'indication fournie par Polybe se trouve
aujourd'hui vérifiée par le fait, comme l'affirmation
de Tite Live et de César lui-même : Les Gaulois
et les Alpins parlent des Dialectes d'une même
langue.
§ III. —
CÉSAR
Il fut le Conquérant et le premier Historien
Latin des Gaulois, trop désintéressé de leurs origines. Il les trouva divisés en trois groupes principaux : Aquitains, de la Garonne aux Pyrénées et à
la mer Landaise; Celles, jusqu'à la Seine et à la
Marne; Belges, jusqu'au Rhin et à la mer: Et il
ajoute ( i ) hi homines lingua institutis et legibus inter
se differunt. Malgré cette variété, ils n'en sont pas
moins les uns et les autres de la grande famille
Gauloise, parlant la même langue, comme les
Gascons, les Provençaux, les Limousins, etc., la
parlent encore aujourd'hui, à l'état de Dialectes
différents (3).
(1) Com. lib. i, C. 1.
(2) Id.. lib. 5, C. 68.
(3) Strab. lib. 4, C. 1.
�21
—
Il nous fait savoir cependant que les Nerviens,
peuple féroce de la Gaule Belgique, étaient venus
récemment de la Germanie : ce que Tacite confirme
d'ailleurs dans l'admirable histoire qu'il lui a
consacrée. Et à ce propos, César nous conte une
petite anecdote très précieuse à retenir. Son lieutenant Cicéron, était assiégé par ces sauvages; son
chef averti, lui adressa des instructions écrites en
Grec pour que ses ordres ne fussent pas surpris,
les ennemis ignorant cette langue.
Nous verrons bientôt qu'il n'aurait pas risqué sa
dépêche en Aquitaine dans les mêmes circonstances. En effet, il constate la co-existence de deux
langues, ou plus exactement, l'emploi de deux signes
chez les Celtes et chez les Aquitains ; les uns certainement primitifs et d'origine Gauloise, très compliqués, réservés aux choses saintes, utilisés dans le
secret des sanctuaires Druidiques, notamment pour
instruire les jeunes hommes destinés au Sacerdoce; les autres, ou lettres Grecques, litterœ, employés à l'usage profane, par exemple, aux contrats
privés, et aux nécessités administratives. Il nous
raconte, en effet, lui-même, qu'ayant arrêté les
Helvètes au moment où ils envahissaient la Gaule :
« In Castra Helvetiorum TABULOE repertœ sunt
» LiTTERis GROECIS
CONFECTOE, et ad Cœsarem
» relatce; quitus in tabulis nominalim ratio confecta
�— 22 —
)) est, qui numcrus domo exisset eorum, qui arma
» ferre possenl, et item sefaratim fueri, senes, mu» lieresque ( i ). »
Voilà des barbares ressemblant singulièrement
à des civilisés : La précaution prise par les chefs
des Helvètes serait exactement la même aujourd'hui. Qu'un audacieux se mette à la tête d'un
groupe nombreux d'émigrants de tout âge et de
tout sexe, vers les régions inoccupées de l'Afrique
ou de l'Amérique; son premier soin sera certainement de dresser les Tabulée nécessaires, pour
prendre ses dispositions en conséquence. Et ce
peuple qui procède avec tant de sagesse et de
mesure, attendait les Romains pour avoir une langue, d'après les Savantissimes Néo-latins(i).
Nous
voilà
déjà bien certain que
avaient envoyé des Colonies
de
longs siècles,
au
moment
les
en Gaule
de
Grecs
depuis
la conquête
Romaine.
Les nouveaux venus portèrent avec eux la langue
la plus belle qui ait été parlée en Europe, 1400
avant Jésus-Christ; et une écriture simple, rationnelle, dont se serviront les peuples les plus civilisés
de l'Orient pendant des milliers d'années. L'arrivée de pareils Colons dans les tribus d'un peuple
(1) Com. lib. C. 29.
�— 23 —
en formation, devait inévitablement produire cette
double conséquence : la création d'un Vocabidaire
nouveau par le mélange des mots Grecs et Celtes,
et la préférence assurée aux caractères écrits sur
les signes hiéroglyphiques. La quantité de mots
Grecs, verba, que nous retrouverons dans le PATOIS
Gascon, après vingt-cinq siècles de durée, justifiera par le fait la vérité que nous affirmions sur
l'attestation des Historiens. Quant aux figures
alphabétiques litterœ, l'Alphabet Gaulois a été
reconstitué d'une façon certaine par les Epigraphistes(i). Inutile d'ajouter que les caractères
Grecs y occupent la plus large place.
§ IV.
—
STRABON
Après César interrogeons Strabon, contemporain de Tibère; il dépose (2) que la ville de Marseille avait été fondée par une Colonie de langue
Grecque, et qu'elle prit bientôt de larges proportions : que de son temps, la ville étant restée fidèle
à son origine, ses riches habitans cultivaient avec
soin les sciences philosophiques et l'éloquence.
Indicio sunt res ipsœ ut, hoc tempore, constitutœ
(1) Traité des monnaies Bouteroue. et plusieurs autres.
(2) Lib. 4.
�— 24 —
;
sunt : Aam pr mores urbis ad eloquenciœ et philosophandi artis verlunlur.
Il constate,comme César, que les contrats y sont
rédigés en Grec. Lesquels? peut-être ceux que les
marchands urbains passaient entre eux; et ceux-là
furent l'exception. Mais leurs affaires les plus
nombreuses se traitaient avec les Gaulois producteurs ou consommateurs de l'intérieur des terres,
avec les ouvriers et gens de mer, bûcherons et
charpentiers, tous de langue Gauloise. Nous accepterons difficilement que ce personnel généralement
si méfiant, eut la bonhommie de rédiger ses
contrats en une langue qu'il n'aurait pas comprise.
Nous ajouterons avec le très savant Scipion Dupleix, résumant Strabon, lui aussi (i) :
))
»
»
))
« Que les Aquitains célébraient leurs mariages
à la façon des Grecs, et qu'ils avoient des villes
basties à la Giecque, ce qui ne doit pas sembler
estrange, d'autant que les Grecs ont anciennement couru les Espaignes. »
Il ajoute : « Que les Laconiens ont tenu une
)) partie de la Cantabrie ou Gascoigne. y estant
» venus par mer.
» J'avois remarqué et réduit en ardre Alphabé)) tique plus de 1,200 dictons Gasconnes purement
(1)
Mémoire des Gaules, liv. 4. C. 8.
�— 25 —
» Grecques, ou dérivés de la langue Grecque. »
Dupleix était originaire de l'Armagnac.
Malgré toutes nos recherches, il nous a été impossible de découvir la moindre trace de ce précieux Lexique, soit dans les Bibliothèques de Paris
ou de Province, soit même dans les Archives de la
famille de l'Auteur consultées par l'ami Noulens :
ce qui nous laisse supposer, que le manuscrit n'a
jamais été imprimé, et qu'il se sera sans doute
égaré.
Voilà déjà quatre témoignages de la plus haute
gravité, parfaitement concordants, qui ne constituent pas une preuve complète sans doute... Mais
continuons notre Enquête.
§ V. —
DIODORE
DE SICILE
Diodore et Strabon ont fait du Gaulois un portrait qui devait être ressemblant. Ils nous le montrent porteur d'un grand sabre, maOn, la spado des
Espagnols, Yespaso des Gascons, ou armé de la
>«v/j), la lanso, avec laquelle il dormait, vêtu de
braies, BpU%o;, las Bragos Gasconnes, et portant
pvrraS, moustachous. Tels étaient bien nos Aïeux.
Mais reprenons notre démonstration.
On raconte qu'autrefois, un Roi fameux de la
�— 26 —
Celtique avait une fille d'une taille et d'une beauté
extraordinaires. Cette Princesse, que ces avantages
rendaient très fière, ne jugea digne d'elle aucun de
ceux qui la recherchaient. Hercule, qui faisait la
guerre à Géryon, s'était alors arrêté dans la Celtique, où il bâtissait la ville d'Alesia (i).
))
»
»
))
»
»
« La Princesse ayant vu que le Héros surpassait le commun des hommes, autant par la
noblesse de sa figure et par la grandeur de sa
taille, que par son courage, elle fut éprise d'un
violent amour pour lui, et ses parents y consentant avec joie, elle reçut Hercule dans son
lit (2)... »
Elle engendra Galatès qui fut un roi Conquérant ;
il donna son nom aux Gaules et aux Gaulois.
Diodore conte-t-il ainsi le mariage réel d'une
Princesse et d'une Héros, ou une Légende dans
laquelle les Druides, suivant la coutume des Sanctuaires, auraient attesté l'événement de l'union
des deux peuples Grec et Gaulois? Qu'importe, l'un
vaut l'autre au point de vue historique.
Mais nous insistons sur cette circonstance que
les Grecs sont venus, non pas en conquérants, mais
en amis.
(1) Plus tard la ville Sainte des Gaulois.
(2) Histoire univeiselle, Iib. 5, C. 8, 5, C. 30. — Strab.,
lit. 4. C. 4-§5-
�— 27 —
Il n'est pas douteux pour nous, que les Grecs
avaient emprunté leur Hercule-Dieu à la Phénicie
ou à l'Egypte. L'imagination de leurs Poètes aura,
si l'on veut, tressé la légende des merveilleux exploits
légitimant sa Divinité Mais il est certain, d'autre
part, qu'un Hercule Grec s'était incarné, à une date
fort ancienne, puisque les Heraclides, ses descendants, ont dominé la Grèce pendant une série de
siècles : qu'il fut un Héros illustre et hors de pair;
qu'il franchit les Colonnes qui prirent son nom, traversa l'Espagne et la Gaule, détruisit les tyrans de
deux pays, y bâtit des Villes, établit des colonies
jusqu'en Italie. On ne fonde pas des Dynasties
pareilles à coup de plumes, même avec beaucoup
d'imagination. Nous admettrons volontiers que la
vanité Royale de sa postérité embellit ses exploits
héroïques, ou ses œuvres gigantesques, ou même
en augmenta le nombre; mais son existence n'en
sera que plus certaine. Et remarque fort curieuse,
si on réfléchit qu'il commandait une armée composée surtout de Doriens. Or, les milliers de mots
Grecs relevés dans notre Lexique appartiennent
principalement à leur Dialecte.
Nous recommandons cette observation aux Hellénistes (i). Cet Hercule, suivant les calculs de
(i) La remarque avait été faite avant nous par le très savant
Abbé Espagnolle.
�28 —
e
certains Chronologistes, existait dans le xiv siècle
avant Jésus-Christ ( 1 )!! ! Ainsi nous sommes en
avance de six à sept cents ans sur la fondation de
Rome, si l'histoire de Diodore est exacte. Heureusement pour la vérité, que son attestation, déjà si
importante, ne reste pas isolée. Rappelons d'abord,
d'après Schlosser (2). que la race Dorienne porta
son action surtout vers l'Occident, et que dans
toutes ses Constitutions, le peuple conserve le
droit de suffrage; qu'il vote la paix ou la guerre,
et que la loi ne devient obligatoire, qu'avec son
consentement.
Le témoignage qui va suivre nous semble plus
grave encore, à cause des précautions dont s'entoura le consciencieux Ecrivain.
§ VI. —
AMMIEN MARCELLIN
Il était de race Grecque, et portait les armes
sous le Règne de Constance Chlore, comme Lieutenant d'Ursicus, Général fameux, à la fortune
duquel il s'était attaché. Il le suivit en Gaule pour
faire la Guerre à Sylvanus qui avait détourné de
(1) Hérod. lib. C. CXLV. Edition Larcher.
(2) Hist. univers., trad. Golbery,
tome 1, pages 382-412.
1828.
Paris, Levrault,
�— 2Q —
l'obéissance la Colonie des Ubiens (Territoire de
Cologne).
Nous nous sommes souvenu en lisant son livre,
de la façon dont P.-L. Courrier guerroyait en
Italie, dans l'armée de Bonaparte, beaucoup plus
curieux des vieux manuscrits à déchiffrer, des
raretés bibliographiques de ses Archives ou de ses
Palimsestes, que de la fortune des Combats.
Ammien consulte les Erudits, pénètre, grâce à son
titre, dans les Sanctuaires secrets, foyers de toute
science, dépôts des traditions Nationales, à la
découverte de cette vérité historique dont il était
avide. Nous renonçons à résumer cette page
étincelante, ou le Narrateur montre à la fois sa
science, et les scrupules de l'honnête homme (i).
« Les anciens auteurs, faute de données précises,
» ne nous ont transmis, sur l'origine des Gaulois,
» que des notions plus ou moins incomplètes.
» Mais plus récemment, Timagène, Grec par Vacti)) vité d'esprit comme par la langue, parvint à ras)) sembler un grand nombre de faits longtemps pérît dus au milieu des livres obscurs dont il les avait
)) tirés. Je vais m aider de ses recherches, en y ajou)) tant la Méthode, et en tâchant de mettre chaque
)) chose dans son ordre et dans son jour. D'Après
(i) L. 9, C. 15.
�— 30 —
»
))
»
))
))
le rapport des Contemporains, les Aborigènes de
cette contrée étaient un peuple appelé Celtes, du
nom d'un Roi de mémoire chérie, ou Galates, du
nom de la mère de ce même Roi. De ce dernier
nom les Grecs ont fait celui de Galles (Gaulois).
)) Une colonie de DORIENS, suivant d'autres, y
)) était venue, à la suite du plus ancien des Hercule,
» former un ÉTABLISSEMENT SUR LE LITTORAL. Selon
)) les Antiquités Druidiques, la population de la
)) Gaule n'est indigène qu'en partie, et s'est recrutée
» à diverses reprises, par l'incorporation d'insulaires
» étrangers VENUS D'AU-DELA DES MERS, ET DE PEU)> PLADES TRANSRHÉNANES chassées de leurs foyers,
)) soit par les vicissitudes de la guerre, état per» manent de ces contrées, soit par l'invasion de
» l'Elément fougueux qui gronde sur les côtes.
» D'autres disent, qu'une poignée de Troyens
)) échappés au sac de leur Ville, et rencontrant
» partout les Grecs dans sa fuite, vint occuper ces
)) régions alors sans habitants. L'opinion soutenue
» par les naturels, et LEURS MONUMENTS EN FONT FOI,
» estqu Hercule,fils d'Amphitrion, destructeur rapide
)) de Geryon et de Taurisque, l'un tyran del'Espagne,
)) l'autre de la Gaule, eut de son commerce avec
» diversesfemmes, des plus nobles familles de CE DER» NIER PAYS, un grand nombre d'enfants, dont chacun
n donna son nom au Canton soumis à ses lois.
I
�— 3i —
» La même tradition veut qu'une émigration de
» Phocéens d'Asie, fuyant l'oppression d'Harpale,
)) satrape de Cyrus, ait d'abord pris terre en Italie, et
)) fondé la ville Lucanienne de VELIA : puis soit allée,
)) avec le reste de son monde, élever Marseille dans
)) la Gaule Viennoise; établissement qui devint pros)) père, et aurait, à la suite des temps, couvert le pays
)) de nombreuses Colonies. »
Ce n'est pas tout; car au Chapitre X il fait honneur à Hercule de l'ouverture du premier Chemin
praticable dans les Alpes Cottiennes (vers Briançon) et de la fondation de Monaco.
Hâtons-nous, avant toute discussion, d'insister
sur la double hypothèse proposée par le scrupuleux
historien : i° la Colonisation par les Doriens
d'Hercule sur le littoral Océanique; 2° l'Emigration des Phocéens d'Asie fuyant l'oppression
d'Harpale, et fondant Marseille.
La suite va prouver qu'elles sont également l'expression de la vérité.
§■ 7. —
JUSTIN (1)
Il composa un abrégé de l'Histoire Universelle
de Trogue Pompée malheureusement perdue.
(1) Lib.43, §3.
�Justin raconte l'émigration Phocéenne dont il fixe
la date au règne de Tarquin l'Ancien.
Suivant lui, les voyageurs abordèrent d'abord à
l'embouchure du Tibre, et firent alliance avec les
Romains : puis remontant sur leurs vaisseaux, ils
allèrent ionder Marseille, entre la Ligurie et le pays
des féroces Gaulois, et feras génies Gallorum Massiliam condidit.
Séduits par la beauté du climat, ils appelèrent de
nouvelles émigrations. Et nous allons voir se renouveler la scène d'Hercule avec la Princesse dédaigneuse de la Celtique, c'est-à-dire l'alliance des
deux peuples par un mariage, mais cette fois avec
la couleur locale.
Les nouveaux venus étaient commandés par
Simos et Protis, qui voulant fonder une Ville sur
les frontières de Nannus, Roi des Sigobriges,
vinrent lui demander son amitié. Ce Prince préparait alors les noces de sa fille Gyptis, qui devait
épouser, suivant l'usage de ce peuple, celui qu'elle
choisirait elle-même pendant le festin.
Tous les prétendants assistaient au banquet; et
les chefs des Grecs y furent invités. Nannus appelant sa fille, lui ordonne de présenter la coupe à
l'Epoux de son choix.
La Princesse se tourne, sans hésiter, vers les
Grecs, et l'offre à Protis. Ainsi devenu le gendre
�du Roi, il en reçut les terres nécessaires à fonder
une Ville.
Que d'enseignements en peu de mots?? Ce
peuple asperus, audax, bellicosus, ferox, laisse aux
jeunes filles le choix de leurs époux? Je vois poindre
déjà notre glorieuse Chevalerie. Les nouveaux
venus ne sont pas des Conquérants, mais des amis
qui obtiennent gracieusement les terres qu'ils
demandent: et qu'en résulta-t-il ? Adeo que magnus
et hominibus et rébus impositus est nitor, ut non
Graecia in Galliam emigrasse, sed Gallia in Graeciam translata videtur (i). Et nous verrons bientôt
certains Savantissimes, affirmer que les Grecs n'eurent jamais rien de commun avec les Gaulois! ! !
Nous savons parce qui précède, que le problème
de nos Origines n'est pas nouveau, puisque déjà
Timagène, Grec subtil, chercheur infatigable, encouragé d'ailleurs par Auguste, essayait de le
résoudre, 55 ans avant Jésus-Christ. Ammien nous
propose le résumé de ce travail : mieux encore, il
le recommence et le contrôle.
Après ces précautions prises, il enseigne en
toute sincérité, qu'au point de départ nous nous
appelons Celtes et Galates, nom dont les Grecs
firent celui de Galles ou Gaulois. Ainsi les Grecs
(0
§4-
�— 34 —
auraient donné aux Gaulois leur nom définitif, de
l'aveu des Dépositaires de leurs Archives. Diodore
dit à peu près la même chose, puisqu'il en fait
honneur au fils d'Hercule, premier fondateur de la
colonie des Doriens.
Toujours suivant les mêmes témoignages, la
population se recruta dans la suite, et à diverses
reprises, par l'incorporation d'insulaires venus de la
Mer. Justin nous avait appris déjà, que les Colons
de Protis appelèrent de nouvelles immigrations.
Ainsi les Naturels du pays affirment le fait attesté
par Diodore et Justin, et leurs monuments font foi
de la vérité du témoignage. Mieux encore : ils distinguent avec soin, les deux sources de la population; et comme César, ils signalent la venue des
peuplades Transrhénanes que celui-ci a reconnues
dans la Gaule Belgique. Or, nul ne conteste plus
aux Phocéens la gloire de la fondation Massaliote.
De quel droit diviserions-nous les affirmations
des Historiens les plus graves de l'Antiquité, les
reconnaissant véridiques sur l'origine de Marseille,
et entachées d'erreurs sur la venue d'Hercule et de
ses Doriens dans le bassin Océanique, surtout
lors qu'Ammien a reconnu, après de scrupuleuses
recherches, que les monuments Gaulois certifiaient
l'exactitude du fait allégué.
�— 35 —
Nous ne voyons pas, quant à nous, de circonstance historique plus solidement établie.
L'affaire est entendue, comme on dit au Palais,
saut pour les Néo-latins, qui traitent l'Histoire de
la même façon que la Philologie. Ainsi les Gaules
ont reçu une première Colonie Dorienne vers
l'Océan, et une seconde Phocéenne sur la Méditerranée.
Enfin, nous sommes certains que le succès des
premiers établissements provoqua des immigrations nombreuses. Quand on réfléchit à l'état
d'anarchie de la Grèce pendant plus de 500 ans, à
la facilité de déplacement de ses peuples tantôt
conquérants et tantôt conquis, essaimant sur leurs
vaisseaux dans toutes les directions pour fonder
des Colonies; débordant sur l'Italie, sur l'Espagne,
sur les Gaules, en Orient et en Occident, il n'est
pas possible de révoquer en doute les Traditions
Gauloises soutenues par un faisceau de preuves
aussi évidentes.
Or, ce que racontent les Historiens de l'antiquité
n'est qu'un exposé de ce qui devait se renouveler
plus tard en Amérique.
Et quels peuples furent jamais plus que les Grecs
avides d'aventures?
Ainsi l'Histoire moderne justifie les Successeurs
ou les élèves des Druides racontant à Ammien les
�- )6 recrutements successifs de la population des Gaules
par les insulaires venus de la Mer, en Espagne
comme en Gaule ou en Italie. Et alors des faits
qui semblaient singuliers, s'expliquent naturellement.
Les Gaulois, pétris de bonne heure par le génie
Grec, enrichis des trésors d'une Civilisation relativement avancée, prennent un rôle considérable en
Europe. Gens aspera, audax, bellicosa, quœ prima
post Herculem, cui ea res virtulis admirationem et
immortalitatis fidem dédit (i). Ils y promènent en
tous sens leurs armes victorieuses, s'élançent sur
l'Asie où ils fondent des Colonies formidables, des
Etats et des Royaumes, et tiennent en échec la fortune Romaine pendant des siècles. Gallorum autem
nomen quod semper Romanos terruit (2).
Ils ne succombèrent que grâce au génie et à
l'obstination de César aidé par la trahison. Il a
lui-même constaté de visu que les Gaulois se servaient des lettres Grecques, litteraœ pour leurs
affaires courantes; mais il ne dit rien des mots
Aquitains ou Celtes verba, que très certainement
il ne connaissait pas. Il constate seulement la différence des Dialectes Aquitain, Celte et Belge. Si
l'un des trois avait parlé le pur Grec, que ne le
(1) Just. lib. 24, § 4.
(2) Id., lib. 38, § 3 et Salust.
�— 37 —
disait-il, lui, si subtil en cette langue, que dans la
conversation il en reconnaissait les différents Dialectes. Mais il ne le pouvait pas sans manquer à la
vérité. Car à ce moment, les Gaulois avaient une
langue Nationale divisée en un certain nombre
de Dialectes, également sortis du mélange de
leurs mots propres, et de ceux, importés, par les
Doriens d'Hercule, les Phocéens de Protis, et les
immigrations successives venues par la mer. Et
tandis que l'opulente Marseille, fidèle à son origine
Phocéenne, cultivait la philosophie et l'éloquence
dans la langue d'Homère pour ses lettrés, rari
nantes, les pâtres de nos montages, les cultivateurs
de nos plaines, les bûcherons de nos forêts, avaient
créé la langue populaire qu'ils parlent encore
aujourd'hui, ainsi que notre Vocabulaire l'établira
malgré ses lacunes. Les Conquérants Romains devaient être impuissants à supprimer leurs mots, non
plus que leur Grammaire. Il est juste de reconnaître
cependant, que le Gaulois primitif s'enrichit d'un
certain nombre de vocables latins qui, chose singulière, font le plus souvent et pour la signification,
double emploi avec les anciens conservés (i).
Mais soyons prudents avant d'affirmer l'origine
des uns ou des autres; nous souvenant qu'ils ont
(i) Voir au chapitre xiv le tableau spécial.
�-
38
-
été puisés également à la source commune CeltoGrecque. Je ne puis que signaler, sans la voir malheureusement, la nuance quia distingué le Dorien
de l'Eolien : le Dorien qui versa dans la langue
Gasconne une si large contribution : et l'Eolien
sur lequel, suivant les Philologues Romains, et
notamment Varron le plus savant d'entre eux, la
langue Latine avait été formée.
i
�CHAPITRE II
LES
— FONDATION DE L'EGLISE
des Apôtres de langue Grecque
TROIS PREMIERS SIÈCLES — LA
HAGIOGRAPHES
GAULOISE PAR
PENDANT
LES
LANGUE LATINE ÉTRANGÈRE A
LEUR APOSTOLAT.
— LEURS TÉMOIGNAGES.
????
Nous avons cherché d'abord dans les Historiens
de l'Antiquité les plus dignes de foi, la solution de
notre problème. Leurs témoignages concordants
nous semblaient déjà suffisants pour justifier une
conviction définitive.
Mais fidèle à la méthode suivie par les Maîtres
du xvie siècle, nous avons voulu, à leur exemple,
interroger les Hagiographes de l'époque où les
Saints engagèrent la lutte de destruction contre le
Polythéisme. Elle est postérieure à Gésar d'une
�— 40 —
centaine d'années environ. Nous espérons qu'après
avoir produit leurs attestations décisives, aucun
doute ne pourra plus subsister Historiquement,
sur l'origine de la partie Grecque de notre Vocabulaire Gascon.
L'homme-Dieu vient d'expirer, suspendu au
gibet des esclaves, sur une Montagne alors inconnue de la Judée. Il a légué à ses Disciples, choisis
parmi des ouvriers de la condition la plus humble,
l'Univers à convertir aux doctrines qu'il leur avait
enseignées. Et chose bien digne de remarque, c'est
le moment où le Droit Romain, cette raison écrite,
a commencé la transformation qui lui assurera ses
glorieuses destinées. Pour obéir au Maître disparu, ils doivent anéantir des Religions vieillies,
dégradées, asseoir les Puissances et les Autorités
de tout ordre sur des bases nouvelles, changer de
fond en comble les Principes des relations des
hommes entre eux, faire table rase du vieil Edifice
social, chancelant aux mains du Césarisme.
Dans ce vaste Empire opprimé par une Caste
féroce, qui se délecte dans le sang humain répandu
à flots suivant ses caprices (i), ils enseignent audacieusement la Doctrine de l'égalité des hommes
devant Dieu leur auteur commun, leur solidarité
(i)
Voir les annexes.
�— 4i —
dans la bonne comme dans la mauvaise fortune;
au torrent d'un matérialisme abject, ils opposent
la glorification de la Pauvreté et de la Douleur, le
sacrifice des Sens à toutes les prostitutions, l'Idéal
de la Justice immanente à la Violence; ils opposent
à l'orgueil l'Humilité, à la haine le Pardon des
injures, et l'Amour jusqu'à la mort.
Mais comment vont-ils procéder ces Conquérants
de nouvelle espèce, dont le verbe est l'arme unique
de combat, dans ce Monde n'obéissant qu'à la force
brutale ! Ils oseront parler : ils sauront se faire comprendre, et mourir dans les supplices le sourire
aux lèvres. La Foi pouvait seule opérer ces merveilles; le scepticisme étant condamné à tout jamais
aux basses œuvres.
Chacun, suivant la nature des choses, portera
son effort chez les Peuples où les affinités de race
et de langue doivent lui assurer des sympathies et
un accueil favorable. A toi les Juifs, à moi les
Gentils, avait dit Paul à son chef Pierre. Les Grecs
instruiront la grande famille Grecque ou ses Alliés,
les Asiatiques et les Africains évangéliseront l'Asie
et l'Afrique Idolatres. On peut à peu près affirmer,
à l'origine de l'Apostolat, que la Nationalité ou la
langue de l'Apôtre constitue une quasi certitude
de la nationalité ou de l'Idiome du peuple confié
à ses soins. Un Anglais ou un Allemand qui essaie-
�— 42 —
rait de haranguer des Espagnols en sa langue,
n'aurait que peu de chances de succès, surtout si
l'Orateur voulait les décider à détruire les Temples
séculaires des Dieux Nationaux et dresser sur leurs
ruines des Eglises en l'honneur d'un Charpentier
Nazaréen, mort du supplice des esclaves, en vertu
d'une décision, irréprochable en apparence, et
prononcée par une autorité compétente.
Voilà ce qu'indiquent la raison, et le bon sens
vulgaire.
Or, que voyons-nous pendant les trois premiers
siècles de notre Ere! le pays Gaulois envahi par des
Missionnaires illustres, héroïques, tous, ou à peu
près, de langue Grecque. Le Pape, au moins pour
lui, semble résider en Orient, et non à Rome;
car c'est bien de l'Orient que lui vint la lumière
Evangélique, portée par des Grecs vaillants toujours, et de Génie quelquefois; ils fondèrent chez
nos Aïeux la plus, part des Eglises dont la France
est si légitimement fière encore aujourd'hui.
Les Historiens de l'Antiquité nous ont déjà
révélé la cause de cette préférence. La langue Gauloise, d'origine Cello-Grecque, devenait bientôt et
sans grands efforts, familière aux Orientaux. Il
nous reste à faire connaître quelques-uns de ces
Soldats intrépides, Canonisés à juste titre, et qui
presque tous ont attesté sur les chevalets ou sur
�— 43 —
les bûchers, sous la hache, ou sous la dent des
fauves, la vérité de la Foi nouvelle.
PREMIER SIÈCLE
Nous croyons, sauf erreur, que Saint Trophime
(r/Myipof) fondateur de l'Evêché d'Arles,
amena
dans les Gaules la première phalange des Apôtres
qui entreprirent leur conversion. Nous signalerons
dans le nombre : i° Sernin ou Saturnin, fils d'Egée
Roi
d'Achaïe,
premier
Evêque
de
Toulouse,
l'Apôtre de notre chère Gascogne. Après avoir
reçu le Baptême des mains de saint Jean-Baptiste,
il s'était attaché à la personne du Divin Maître
dont il devint l'Apôtre infatigable. Il mourut pour
sa Foi, traîné par un taureau furieux dans la rue
historique du Taur de l'Antique Cité.
2°
Saint Front ou Fronton de Lycaonie avait
aussi suivi le Messie; il devint le premier Evêque
de Périgeux.
3° Sidoine (SÍSWVIÒ?) ou Célidoine dont le nom
suffit à établir l'origine, était aveugle; Jésus lui
rendit la vue; par reconnaissance, il prit le nom
de Restituí, et fonda l'Eglise de Saint-Paul-TroisChâteaux ;
4° Démêtre (Aupirpioí)
premier Evêque de Gap ;
disciple des Apôtres, et
�— 44 —
5° Parmi eux brillait encore Créssant, élève de
Saint Paul, apôtre duDauphiné, et premier Evêque
de Vienne. Au point de vue où nous sommes placé,
il mérite une mention moins sommaire que celle
de ses glorieux Compagnons.
Saint Paul, le Génie puissant qui a contribué
pour une si large part à la fondation du Christianisme, envoya d'abord son Disciple évangéliser
dans la Gallo-Grèce (i) de VAsie-Mineure, où il
obtint un succès immense. Mais le Maître, traversant notre Gaule pour se rendre en Espagne, n'eut
pas de peine à reconnaître dans nos Aïeux les
Gallo-Grecs d'Occident, ressemblant aux Orientaux
comme la ruche à l'essaim. Aussi n'hésite-t-il pas
à dessaisir Créssant de sa conquête Asiatique, pour
en essayer une nouvelle qui devait être non moins
glorieuse. Et c'est ainsi qu'il devint l'Apôtre du
Dauphiné, et fonda l'Evêché de Vienne. Ce fait,
bien simple en lui-même,nous semble décisif pour
la Thèse que nous soutenons. Dans notre Gaule,
rien n'était changé pour Créssant que le champ de
bataille; la race et la langue étant identiques dans
les deux contrées Orientale et Occidentale.
En rappelant cette Communauté d'origine,Saint
Jérôme proclamait, ironiquement les aptitudes des
(i) L'association de ces deux mots est topique.
�— 45 —
Gaulois pour ce genre d'éloquence, qui non tam
ad regionis diligentiam quam ad rhetoricorum clamorem pertinet; pardonnons-lui pour la raison qu'il
en donne : Maxime cum Aquitania Grœci se jactel
origine. Ainsi les Grecs ont engendré les Gascons (i). Nous leur devons d'excuser leurs travers
ataviques.
6°, 7" Citons encore les deux Eutropes (Evrponoç
EvTjüoyoí),
premier et second Evêque d'Orange.
8° Aphrodise («yfoSto-ioî) premier Evêque de Béziers.
Nous répétons que nous n'avons pas voulu faire
une énumération complète, mais indiquer seulement quelques-uns de nos glorieux Apôtres Grecs
du premier Siècle. Nous procéderons de même
pour le suivant.
DEUXIÈME SIÈCLE
A tout Seigneur tout honneur.
Denis l'Aréopagite, le Saint de Paris par excellence, était né à Athènes dont il présida dit-on, le
Tribunal Suprême, avant de devenir son Evêque.
Apôtre de l'antique Lutèce, il y arriva suivi de
vaillants Compagnons bien dignes d'un tel Chef.
Un Oratoire par lui érigé sous le vocable du pre(i) Prol. in lib. 2. Comment Ad. Galatas. Le Saint illustre,
avait-il lu Diodore de Sicile?
�-
6 -
4
mier Martyr, Saint Etienne, fut appelé jusqu'en
1789 Saint Etienne des Grecs, en souvenir de la
nationalité de son Fondateur et de ses Disciples.
i° Lucien qui évangélisa le Beauvoisis, était
Romain; mais hâtons-nous d'ajouter, qu'il possédait si bien la science des langues, qu'il avait servi
d'interprète à Saint Pierre. Il fut le premier Evêque
de Beauvais.
20 Saint Rieul, originaire d'Argos. prit la succession de Saint Trophime à l'Evêché d'Arles.
0
3
Nicaise (vi^aço;) Athénien comme Saint
Denis, dut comme lui sa conversion à Saint Paul.
Il évangélisa la Normandie, et devint le premier
Evêque de Rouen.
40 Exupère, Romain, issu d'une très noble
famille, avait reçu l'éducation la plus brillante :
c'est dire que la langue Grecque lui était familière,
comme à toute l'Aristocratie Romaine de son
temps. La Basse Normandie fut confiée à son
Apostolat : il mourut premier Evêque de Bayeux.
Denis avait gardé Lutèce pour sa part, et dut, à
cause de son âge, s'adjoindre Eleuthère EIIÙTI^WÏ
et Rustique ses deux amis fidèles. Malgré ses
82 ans, à l'heure où ils subiront le Martyre, sur le
mons martyrum, (Mont Martre) il leur donnera
l'exemple de la constance et de la sérénité dans la
mort.
�— 47 —
Voilà bien les Fondateurs de l'Eglise de Paris.
Sachons ce qu'il faut penser de celle de Lyon.
Elle se considère comme d'origine Grecque par
son premier Evêque Saint Pothin
(KOBZI-JOÇ),
le bien-
aimé de l'illustre Polycarpe (woltïxapmç) Evêque de
Smyrne, et Disciple
lui-même
de
Saint
Jean
l'Evangéliste.
Arrivé à la limite d'une longue vie, consacrée
aux pénibles travaux de l'Apostolat, Pothin s'adresse
à son Maître, lui demandant des Ouvriers pour la
vigne Lyonnaise. Celui-ci lui envoya une phalange
intrépide, dirigée par un Grec de l'Asie Mineure,
Grand par le cœur autant que par la science : Il
s'appelait Irénée (EipevaTos). La nationalité de ses
Compagnons ne saurait être douteuse; car lui-même
signale parmi les victimes de la persécution déchaînée par Marc-Aurèle, Attale de Pergame (*rrnh;),
qui, dit-il, fut la plus solide colonne de l'Eglise de
Lyon; Alcibiade
(AX/iíiaSïíf)
austérités; Alexandre
Orientale; Epipode
renommé
(A).e?av5f o;)
(EirmoSoç)
pour ses
médecin d'origine
né à Lyon, mais dont
le nom indique suffisamment la race.
Les Hagiographies, qui écrivent sans autre préoccupation que celle de la gloire de leurs Athlètes
Héroïques, vont, dans leur narration naïve, nous
apporter le témoignage probant, irréfutable, de la
vérité que nous cherchons.
�-
48
-
« Les Chrétiens trouvèrent les Saintes Reliques
)) (des victimes de Marc Aurèle) miraculeusement
)) réunies dans un lieu qui s'appelait Athanaco,
» nom que nous avons traduit par celui d'Aynay.
)> Suivant quelques auteurs, Aynay viendrait de
)) A<hv» à cause du concours d'éloquence établi par
)) Caligula à l'Autel d'Auguste : d'autres font déri» ver Aynay de AQuvuzoç immortel : d'où vient que
» les premiers Martyrs de Lyon sont appelés Atari nacenses ». Est-ce clair?
Ainsi tout est Grec dans le Lyon du deuxième
siècle; non pas les Apôtres seulement, mais la population comme la langue elle-même; si bien que les
concours littéraires établis en l'honneur d'Auguste
se font en Grec, la langue des lettrés du pays. Il
est vrai que le Texte spécifie : certamen grcecœ
latinœ que facundiœ (i) : Un rôle était réservé à la
langue Officielle, comme il l'est aujourd'hui au
Français dans les Fêtes félibréennes de Tarascon, de
(i) Sueton. Calig. § 20. Ces concours étaient certainement
imités des Grecs. Mais voici ce que César avait ajouté aux
conditions de la lutte. Les vaincus donnaient les prix aux
vainqueurs, et étaient obligés défaire leur éloge. Quant à ceux
qui avaient le plus mal réussi, ils devaient effacer leurs écrits
avec une éponge, ou avec la langue, sous peine de recevoir des
coups de férule, ou d'être plongés dans le fleuve voisin. Leur
sort semble encore préférable à celui des mauvais Acteurs,
dont la Plèbe exigeait le châtiment. Ils étaient immédiatement
livrés aux lorarii (fouetteurs) toujours prêts derrière la scène.
�— 49 —
Montpellier ou de Toulouse où ils se font principalement en Provençal, Languedocien, ou en Parladuro Moundino.
Reposons-nous un instant de ces démonstrations arides, en rappelant le souvenir de deux
Héros superbes, quoique bien différents de ceux
qu'immortalisait Homère : Un vieillard de 90 ans,
Pothin, et une enfant de 15 ans à peine, défiant,
avec un égal courage, la férocité des bourreaux,
et recevant, le sourire aux lèvres, les palmes du
Martyre. Blandine, avec sa foi naïve et sa pudeur
Angélique, avec son énergie indomptable, rayonne
dans le Martyrologe Gaulois comme dans notre
Histoire de France la Vierge de Vaucouleurs (1).
Iréhée a échappé à la mort. Sa tâche n'était pas
encore achevée. Les sectaires, Grecs pour la plupart,
les Gnòstiques notamment, infectaient les vallées
du Rhône de leurs doctrines impies. Le Docteur
illustre engage la lutte contre ces téméraires, et
(1) La lettre circulaire adressée par les Eglises de Lyon et
de Vienne à celles d'Asie et de Phrygie, contenant le récit
du martyre de Saint Pothin et de ses quarante-sept compagnons, était écrits en langue Grecque, Elle nous a été conservée par Eusèbe Pamphile, Evêque de Césarée, en partie tout
au moins.
Histoire de Saint Pothin, page 382 aux notes. Petits Boll.,
tome vi°.
4
�triomphe de l'Hérésie dont il préserva son troupeau. Mais le sol avait conservé la semence de
l'erreur qui germa dans les siècles suivants. Ainsi
prit naissance la secte des Cathares (%ur«poi) qui
attira de si effroyables malheurs sur nos contrées
Méridionales, au xuie siècle. Cette bataille doctrinale entre des Grecs, en plein pays Gaulois, ne
vaut-elle pas la plus claire des démonstrations ?
La langue Gauloise était si bien impreignée d'Hellénisme, qu'elle servit à Irénée, malgré sa rudesse,
dans sa lutte contre les Hérétiques (i). Le Glorieux
Soldat chargé de lauriers, méritait enfin de recevoir sa récompense : il avait dépassé l'âge de
82 ans lorsqu'il fut Martyrisé.
Bégnigne, Grec Ionien et disciple de- Polycarpe,
devint l'Apôtre de Langres, d'Autun et de Dijon
où il fut décapité sur l'ordre personnel de Marc(1) Préface dédicatoire placée par Saint Irénée en tête du
premier livre du traité contre les Hérésies : cité par G. de
Cassagnac à la page 144 de l'Histoire des origines delà langue
française.
« Vous n'exigez pas que moi qui vis parmi les Gaulois, et
» qui n'ai pu travailler le plus souvent qu'en employant une
» langue barbare, j'use des artifices du langage, artifices que
» je n'ai point appris... mais l'ouvrage que j'ai écrit pour
» vous, avec simplicité, avec vérité, et en langue vulgaire
» [ítìm\i"/S>c ypctfivTX idiome local; mais avec un esprit de
» bonne volonté, vous l'accueillerez avec des dispositions
» également bienveillantes. »
�— 51 —
Aurelle. Il en faut dire autant des Saints Andoche
(avSo/tov) et Thyrse (Qvpooç) venus aussi de l'Orient.
Arrêtés sur le territoire de Saulieu, en Bourgogne,
ils y périrent par la main du bourreau comme
leurs Compagnons d'Apostolat.
Andéol, Disciple de Polycarpe comme Benigne
et Irénée, évangélisa pendant 40 ans, en Provence,
en Dauphiné et dans la Franche-Comté; il se fixa
à Bourg-Saint-Andéol qui prit son nom; il eut la
tête tranchée, en exécution d'une sentence prononcée par l'Empereur Sévère lui-même.
TROISIÈME SIÈCLE
Saints Féréol et Ferjeux, fondateurs de l'Eglise
de Besançon, étaient, ainsi que la plupart des
Compagnons de Saint Irénée, d'origine Orientale,
et élèves des Ecoles d'Athènes. Comme leur Maître,
comme leurs Condisciples, ils moururent pour
leur foi.
Nous trouvons au tome vi, page 358 des Petits
Bollandistes (1) (d'où nous avons tiré ce Chapitre
en entier), sous le nom de Saint Riverien, Evêque
d'Autun (273) ce passage que nous transcrivons
(1) P. Guérin, Paris, Blount et Barrai, 1882, très beau travail en 17 volumes.
�— 52 —
textuellement; car il est le résumé fidèle, véridique,
saisissant, de la fondation du Christianisme dans
la Gaule entière, par les Missionnaires d'origine
Grecque.
« On distingue trois périodes dans l'histoire pri)) mitive de l'Eglise d'Autun. La période Aposto'l) lique commence avec la première explosion de
» l'Evangile au Cénacle. Apôtres et Disciples se
)) partagent le Monde, l'envahissent, se croisent
)) sur toutes les routes, sillonnent les Gaules, et
)) jettent déjà la semence Evangélique jusques
)) dans les familles Sénatoriales d'Au gusto dunnm
)) (Autun).
» La seconde période, Gréco-Orientale, com» mence à l'arrivée J'de Saint Pothin et de ses
)) Compagnons (i).
» Une Eglise Grecque se forme en Gaule, et
» grandit rapidement au milieu des violences.
)) Son centre est à Lyon d'abord, jusqu'à la
)) grande persécution qui emporta Irénée, et
)) ensuite à Autun, qui recueille les malheureux
» fugitifs de la Cité noyée dans le sang. Elle
)) devient la ville Augustate, ouvre son sein aux
)) Apôtres comme au Rhéteurs, parle la langue' des
(i) Nous avons établi qu'elle s'ouvrit dès l'origine pour la
Gascogne, la Provence et le Languedoc.
�— 53 —
»
»
))
»
))
))
»
»
»
»
))
))
»
Hellènes, et prend en quelque sorte une physionorme Orientale. Puis cette Eglise semble s'effacer dans l'histoire. La série des Evêques
connus est interrompue à Autun comme à Lyon,
jusqu'à Saint Révérien, envoyé de Rome par le
Pape Félix, au temps d'Aurélien. C'est la troisième période, ou période plus spécialement
Romaine ! D'après toutes les traditions écrites,
l'origine latine et la mission immédiatement
Romaine des hommes de zèle venus dans ce
pays vers la dernière moitié du troisième siècle
sont parfaitement distinctes de l'origine Jonienne
des premiers fondateurs de cette Eglise. ))
Mgr de Voucoux auquel, croyons-nous, appartient le texte cité, en nous racontant l'Origine de
VEglise Eduenne, nous montre, comme dans un
fragment de miroir, celle de l'Eglise Gauloise
toute entière, avec cette différence, que pour nous,
Aquitains, la période qu'il appelle Jonienne avait
commencé à la période Apostolique.
Nous savons déjà pourquoi.
Qui donc se doutait de la langue Latine dans la
Gaule des premiers siècles de l'Ere Chrétienne ?
Quelques soldats peut-être, quelques rares lettrés,
des gouverneurs ou administrateurs, et c'est tout.
Mais le peuple parlait la langue Gauloise, ou
Celto-Grecque, la langue qu'il parle encore aujour-
�— 54 —
d'hui, des Pyrénées à la Loire, de l'Océan Landais
jusqu'aux Alpes; langue parfaitement reconnaissable malgré les 3,000 ans qui la séparent de son
point de départ.
Voilà pourquoi les Missionnaires Grecs, ou
familiers de leur langue, pouvaient seuls utiliser
la langue Gauloise (Gallo-Grecque), et semer avec
elle la bonne parole Evangélique. Ce ne fut donc
pas, grâce au hasard d'une persécution, qu'on employa le Vocabulaire des Hellènes, à Autun, après
le Martyre de Saint Irénée: il y était, plus ou moins
mêlé à la langue Nationale, comme à Lyon, comme
à Toulouse, comme à Marseille, dont les Facultés
Grecques étaient depuis longtemps célèbres. Que
le Conquérant se soit hâté de rendre sa langue
Officielle devant les tribunaux, et dans l'administration? C'est exactement ce que nous avons fait
nous-même dans nos Possessions récentes d'Asie
et d'Afrique. Les Soudanais et les Annamites
auraient-ils changé de langue ? en changeront-ils
jamais !
Rapprochement étrange et curieux, surtout au
point du vue historique. Hercule et ses Doriens
apportent en Gaule les premiers éléments de la
Civilisation Grecque, quatorze siècles avant notre
Ere. Au moment où va s'ouvrir la Civilisation
Chrétienne, cette fois encore des Grecs, fidèles à la
�— 55 —
tradition du fils d'Amphitrion, non plus Héros du
champ de bataille, mais Martyrs destinés aux
Arènes, lui apportent la Doctrine nouvelle dont les
Gaulois devaient être les Disciples fervents, les
Apôtres intrépides, et les Chevaliers sans peur. La
voix Grecque faisant retentir les échos de la Gaule
à quinze siècles de distance ! ! !
Après ce coup d'oeil rapide sur l'Hagiographie,
demandons-nous, sans parti pris, ce qu'il faut
penser de la prétendue mission Civilisatrice de
Rome, en étudiant son action sur la Gaule seulement. La conquête, opérée par la perfidie autant
que par la violence, valut au vaincu une servitude
intolérable, aggravée sans interruption, par les
spoliations et les brutalités de son vainqueur.
Et, d'autre part, ce fut malgré lui, que la Gaule
devint Chrétienne. Aveugle qui ne voit pas que la
Doctrine Nouvelle frappait au cœur le grossier, le
féroce Romain, adorateur du glaive, le tyran impitoyable des Nations, le bourreau systématique de
l'Humanité (i). Il fut le premier à le comprendre;
et voilà pourquoi, jusqu'à Constantin, nos Apôtres
Héroïques, ces vrais agents de la Civilisation du
Droit contre la Force, de l'Idéal contre la Matière,
tous ou à peu près d'origine Hellénique, périrent,
(i) Voir aux Annexes.
�-
56
-
si nombreux, dans les supplices ordonnés par César,
digne Maître du peuple-Roi.
La Gaule était déjà Chrétienne, et le Sénat
Romain immolait encore des victimes sur les autels
Idolâtriques.
Nous ne parlons pas seulement des Gallo-Romains conquis au dogme nouveau grâce à l'héroisme
des Martyrs, favorisés par la haine des vaiicus contre
leurs oppresseurs, mais encore des Barbares nouveaux venus, mystérieusement convertis dans leurs
forêts (i), et dont le droit de conquête légitima
l'établissement sur le sol Gaulois. Les Visigoths
d'abord, puis les Burgondes. Leur Roi Gondioc,
père de la Reine Clotilde, était Chrétien : Les
Francs qui de leur plein gré, reçurent le baptême
des mains des Saint Rémy, le lendemain de la victoire de Tolbiac (496); et grâce à l'action féconde
de l'Episcopat, la Nation Française se trouva
constituée avec le Christianisme, l'élément Civilisateur par excellence, ne gardant de la Rome détruite que ses chefs-d'œuvres pour la Caste dominante et lettrée.
Or, il ne faut pas oublier que, même en présence
de Théodose, le glorieux Paladin de la pure ortho(1) Ozanam. La Civilisation Chrétienne chez les Francs
(]. Lecoffre, 1849), chapitre 1«.
�— 57 —
doxie, un grand Pontife des Dieux du Capitole, un
Prince du Sénat, Symmaque, revendiquait à la fin
du ivc siècle, dans une lettre restée fameuse, le
rétablissement de l'Autel de la Victoire (i). Il
n'accepta que par ordre la doctrine Evangélique
(396). Voilà comment les Romains apportèrent en
Gaule, en même temps que leur langue, la Civilisation d'abord, et le Christianisme plus tard. Mais la
force exerce un tel prestige sur les hommes, qu'ils
s'inclinent respectueusement devant ses prétentions les plus extravagantes. D'ailleurs les lettrés
superficiels, les plus nombreux, boivent les eaux
de la science en courant, comme les chiens d'Egypte
celles du Nil, pour échapper aux crocodiles. Puis
ils nous proposent leurs imaginations invraisemblables pour vérités démontrées. Il n'est pas
défendu, fort heureusement, de les dépouiller de
leurs oripeaux : seul moyen de les apprécier suivant leurs mérites.
Lorsque nous nous sommes engagé dans l'étude,
pour nous si nouvelle, des Bollandistes, nous
n'avions pas compté sur la riche moisson que nous
(1) L'Autel delà victoire avait été érige par Auguste, après
la b.itaille d'Actium, et la statue en avait été apportée de
Tarente. Elle recevait les serments de fidélité aux lois. Gratien
abattit cet Autel, et se saisit des revenus destinés à l'entretien
des sacrifices... (Fin du ive siècle.)
�-
58
-
venons d'utiliser. Nous ne voulons pas terminer ce
Chapitre, sans exprimer les sentiments d'admiration et de profond respect que nous ont inspiré nos
Saints des trois premiers siècles. Certes, les hommes illustres de l'Antiquité prennent des proportions quelquefois Epiques sous la plume du judicieux Plutarque. Mais combien inférieurs à nos
Héros Chrétiens !
�CHAPITRE III
SYSTÈME DE SISMONDI
DE LA
DANS
LANGUE
LES
—
PRÉTENDUE SUBSTITUTION
LATINE
GAULES
AUX DLALECTES LOCAUX
DÉSERTES,
ET REPEUPLÉES,
APRÈS LA CONQUÊTE CÉSARIENNE, PAR DES COLONIES ITALIENNES
—
SÉRIE D'ERREURS RECTIFIÉES.
????
Il était réservé à Sismondi le Grand Historien,
Néo-latin convaincu, de nous montrer à quel excès
d'aberration peut conduire le parti-pris systématique.
Il faut, vaille que vaille, que nos langues Méridionales dérivent du Latin. C'est entendu. Et voici
sa démonstration de cette contre-vérité. Six siècles
de domination suffirent aux Romains pour substituer leur langue aux Idiomes nationaux des Gaules
définitivement disparus!!! Tandis que les Teutons, après une occupation de quatre cents ans à
peine des mêmes Contrées,avaient oublié la langue
qui leur était propre, et adopté les dialectes Romans.
�— 6o —
Il cherche la raison de cette différence éclose dans
son génie trop fécond; et voici ce qu'il propose (i.)
Après avoir établi le caractère féroce de l'invasion de César, ses brutalités et ses exactions, qui
menacèrent de convertir le pays en un vaste désert,
les rares survivants échappés au naufrage, renoncèrent à tout, même à leur langue, terrorisés par
cette tyrannie implacable.
Les Francs auraient procédé de toute autre façon.
Leur bienveillance relative inspira confiance aux
conquis. Les nouveaux venus, paisibles possesseurs de la part des terres qu'ils s'étaient faite,
ne tardèrent à se mêler aux Gallo-Romains, et se
confondirent avec eux; si bien qu'au bout de
quatre siècles, ce rapprochement avait produit
un peuple nouveau, parlant une langue unique
appelée Romane (2).
(1) Précis de l'Histoire de France, chapitre Ie*.
(2) Ce nom nouveau, dont on a trop abusé, mérite quelques
mots d'explications.
Les Francs viennent de conquérir une Province Romaine.
D'autre part, Antonin le Pieux ayant accordé la qualité de
Citoyen Romain à tous les hommes libres de l'Empire, cette
Province était donc habitée par une population libre de
Citoyens Romains. La langue parlée par les conquis devait
prendre pour les Conquérants le nom de la terre et de
ses habitants Romains, et s'appeler Romaine par opposition à la langue Teutone qu'ils parlaient eux-mëme. Mais
nous établirons dans la partie Philologique de notre étude,
�— 6i —
Autant d'énonciations, autant d'erreurs.
i° Et d'abord, sur la foi de quels Historienspeutque les lettrés, connaissant son origine indélébile Celto Grecque, continuèrent à l'appeler de son vrai nom, Celtique ou
Gauloise, jusqu'à la fin du x1 siècle, ou plus de cinq siècles
après la conquête Francque; car les lettrés de cette époque
parlant les langues Latine et Gauloise, savaient très bien,
qu'elles étaient absolument différentes.
AT.-D. La note qui précède était faite, lorsque nous eûmes la
bonne fortune de découvrir le texte suivant, tiré des Etymologies d'Isidore, Evêque de Séville, de sang Espagnol, mort
en 636 :
« Atque inde sensim invaluit vulgaris illa Romana lingua,
» quas et si aliquid Latinitatis redoleret, latina tamen non
» esset, ut quai et bàrbara non agnosceret vocabula, et longe
» aliis grammaticœ regeretur. Ea propter jam NON LATINA lin)) gua cxpit appellari, sed ROMANA; quod Romani qui in Gal» liis et Hispaniis post septemtrionalium nationum irruptio» nem remanserant, eà uterentur. »
Nous avions traduit ce texte sans le connaître. Que dit-il
en effet? Que la langue des Gaules et de l'Espagne différait
du Latin par les mots, vocabula bàrbara, et par la Grammaire.
Nous n'avons pas dit autre chose.
D'autre part, quant à la raison du changement de nom du
Gaulois, le savant Evêque confirme notre affirmation, qu'il
fut appelé Romain après les invasions des hommes du Nord,
parce que les anciens habitants qui n'avaient pas quitté le
pays, Romains pour les nouveaux venus, continuèrent à parler
leur langue Nationale. En présence de ce témoignage si net,
que doit-on penser des Sismondi, des Raynouard, et de tant
d'autres savants, affirmant que le Latin avait été accepté sans
difficulté, dès les premiers temps de la conquête Romaine,
et que sa substitution au Gaulois était à peu près complète
au temps de Charlemagne! ! ! Sic itur ad Academias.
�il affirmer la quasi dépopulation des Gaules, par la
férocité des Conquérants ! Mais le syllogisme avait
besoin d'une majeure !
2° Les Romains ne comptaient plus dans les
Gaules dès le ve siècle. Or, le Celtique et le Gaulois y sont encore en usage cinq cents ans plus tard !
(995). La prétendue substitution opérée pendant
leur occupation est donc simplement inventée.
3° D'autre part, qui donc aurait enseigné le latin
aux Provinces conquises ? Pas les soldats des
légions assurément. En effet, dès le temps de la
destruction de Carthage, elles ne sont plus recrutées à Rome ou dans son territoire, mais dans les
villes Italiennes qui avaient obtenu le droit de Bourgeoisie. Or, elles parlaient des Dialectes différents,
étrangers au Latin à peine formé. Plus tard, Auguste
voulant repeupler l'Italie ravagée par la guerre
civile, l'exonère du service militaire, et le reporte
sur les autres Provinces de l'Empire.
Pour rester dans la vérité il faut dire, que pas
un soldat sur mille ne parlait latin, en dehors
des chefs.
4" L'objection est la même pour les Colonies,
fort rares d'ailleurs, celles de la Provence exceptées.
Qui donc enseignera le latin jusqu'à sa substitution aux Dialectes Gaulois?
50 Quant au pillage et au massacre comme
�- 63 moyens de propagande, ils ont tout au moins le
mérite de l'originalité. En effet, quels sentiments
ces procédés abominables auraient-ils pu inspirer
aux vaincus décimés ? la haine, d'autant plus
intense qu'elle était muette, et attisée, chaque jour,
par de nouveaux attentats. Singulier état d'âme de
l'élève pour apprendre la langue de son bourreau.
11 fallait dire au contraire, pour respecter
l'histoire, et suivre les indications du bon
sens, qu'au moment de la tourmente, dont Sismondi a d'ailleurs singulièrement exagéré les ravages, les envahis, en grand nombre, cherchèrent
leur salut sur les montagnes escarpées, dans les
forêts profondes, dont le pays était alors couvert,
loin des Villes et des chemins, dans les Cantons
sauvages et misérables dont la pauvreté protégeait
les réfugiés. Et tous ceux-là parlaient Gaulois.
Le calme revint après l'orage. Quelques-uns des
fuyards, partisans irréductibles de la liberté, s'établirent dans leurs retraites inaccessibles. Ils en
redescendront plus tard, terribles, armés du glaive
et de la torche, pour reconquérir leur territoire, et
en chasser l'étranger. Les autres, s'inclinant sous
la loi du vainqueur, tombèrent en servitude; et
la population se reconstitua peu à peu, grâce à
l'énergie de la race.
Mais cette génération nouvelle aurait-elle oublié
�- 64 la langue des aïeux? Non, cent fois non. Pareil
oubli serait contre nature. Et la preuve qu'il n'en
fut pas ainsi, résulte de cette circonstance décisive,
que la grammaire Gauloise nous est parvenue
intacte, avec le plus grand nombre de ses vocables,
bravant les conquêtes et les Conquérants, les occupations et les invasions successives.
Or, nous ne cesserons pas de répéter, que la
Grammaire est de l'essence des langues, et constitue
leur individualité : que les mots au contraire, matériaux accessoires, venant de toute origine, ne sauraient y porter atteinte. Notre Dictionnaire établira
d'ailleurs bien authentiquement la source CeltoGrecque de nos mots Gascons.
Enfin la langue Gauloise était si bien vivante,
au moins au nc siècle de notre Ere, que les Colonies, en majorité Gauloises, fondées par Trajan
en Moldavie et en Valachie, la portèrent dans ces
pays nouvellement conquis. Or, après dix-sept
siècles écoulés, elle s'y trouve parfaitement reconnaissable encore aujourd'hui. Est-ce probant ? Si
le grand esprit de Sismondi n'avait pas été aveuglé
par les systèmes Académiques, s'il avait appris nos
langues Méridionales vingt-cinq fois séculaires, et
si nettement originales,s'il avait appris leur Grammaire, pour la rapprocher de celle des latins, il
aurait dit :
�- 65 La Gaule avec son sol fertile et son climat tempéré, avec sa position privilégiée entre deux Mers,
nouveau jardin des Hespérides, a tenté tous les
les peuples du Nord et du Midi : et tous se sont
rués sur elle, avides de s'en emparer. Elle a été
conquise deux fois au moins en totalité, par les
Romains et par les Francs, quelquefois en partie,
notamment par les Visigoths, parles Bourguignons,
les Normands, etc., etc. Mais ce sol, mais ses Indigènes étaient doués d'une telle puissance d'absorption, qu'après quelques siècles écoulés, les nouveaux occupants, malgré les différences radicales
d'origine, de mœurs, de religion et de langue qui
les séparaient des conquis, disparaissaient confondus dans la population Autochthone, pour ne former
avec elle qu'un tout bien homogène.
Or, l'assimilation à laquelle les Teutons ne
purent résister, devenait plus facile avec des Colons
Italiens; car vainqueurs et vaincus, branches également détachées d'un tronc commun, parlaient non
pas le Latin, mais des langues qui différaient seulement comme des Dialectes, et dérivées des mêmes
sources que le Latin lui-même. La circonstance de
l'absorption des Teutons par les Gaulois suffirait,
même isolée, à rendre évidente l'erreur commise
par le grand Historien.
Nous sommes donc bien de la famille Celto5
�— 66 —
Grecque, héritiers de ses mérites et de ses travers,
de ses aptitudes et de ses goûts, de ses Coutumes
pieusement conservées, comme nous l'établirons au
chapitre ve, mais surtout de sa langue dont le
Français sera fait plus tard. Fils ignorant autant
qu'ingrat, iFva chercher aujourd'hui ses mots nouveaux à l'étranger, certain de s'enlaidir; tandis que
l'héritage maternel dispose d'inappréciables trésors : Ils ne périront pas, quoique décident les
Académies : Elles se heurteront contre notre Patriotisme, que leurs systèmes arbitraires et erronés ne
découragera pas.
Recommencez la guerre et les invasions, si le
cœur vous en dit; brûlez nos villes, pillez encore
une fois nos richesses, réduisez nos campagnes en
déserts blanchis d'ossements, constituez un régime
économique dévorant nos herbes jusqu'à la racine,
nos fruits jusqu'au noyau; et ce qui échappera aux
massacres ou aux feux des incendies, fuyant sous
les haillons de la misère, gardera ses goûts, ses
Coutumes, ses préférences et sa Langue imagée et
sonore.
L'Abbé Grégoire nous en fera bientôt'connaître
les raisons (i).
(i) Voir chapitre vie, son Rapport à la Convention.
�CHAPITRE IV
RAYNOUARD ET SES IMAGINATIONS
langue Romane
— LES
LITTRÉ
—LA
PRÉTENDUE
— SES ORIGINES SINGULIÈRES —
GAULOIS FURENT ET SONT INVIN-
CIBLEMENT FIDÈLES A LEURS DlALECTES.
????
Après avoir exposé la vraie doctrine Historique,
nous croyons devoir l'hommage d'une explication
spéciale au grand Prêtre du Néo-latin.
Raynouard (i), chercheur persévérant, a toute
l'ingénuité d'un savant égaré dans ses rêves. Le
Latin, suivant lui, fut, après la conquête Romaine,
adopté sans difficulté dans l'Europe Méridionale,
jusqu'au jour où elle subit le choc Germanique. Alors
se produisit un trouble d'abord, et puis un mélange
(i) Lexique Romain. — Introduction, page 2 et suivantes.
�— 68 —
insensible des deux langues en lutte, partout identiquedansses effets, modifiant lesmots en même temps
que les formes grammaticales. Ce travail d'évolution très avancé au temps de Charlemagne, aurait
duré jusqu'en l'an iooo. A cette date, un Latin
nouveau, qu'il appelle Romain, s'était définitivement
constitué, et produisit des Dialectes et sous-Dialectes nombreux,notamment l'Espagnol,le Portugais,
l'Italien et nos langues Aquitaniques.
Littré, que nous retrouverons plus bas, conteste
l'éclosion de ce phcenix Latin, qu'il affirme n'avoir
jamais existé (i).
En effet, sur quoi s'appuient ces propositions de
haute fantaisie, qui offensent l'histoire autant que
le bon sens.
i° Que sont donc devenues les langues Celtique
etGauloise? Quoi! volatiliséespar leseul battement
des ailes des aigles de César : et, elles duraient
depuis des milliers d'années ! Premier miracle.
2° Dans laquelle de nos langues Aquitaniques,
l'auteur a-t-il découvert ce grand nombre de mots
d'origine Germanique indiqué par son hypothèse ?
Nous n'avons pas su les voir, malgré dix années de
recherches.
3° Enfin quelles sont ces nouvelles formes gram(i) Dictionnaire
v°
Roman.
�- 6Q -
maticales différant de celles du Celtique, invariable
depuis vingt-cinq siècles ? Est-ce trop exiger que
de demander qu'on nous les montre? Si cette première hypothèse ne vaut rien, en voici une seconde
qui ne vaut pas davantage : mais elle est honorée
des faveurs Officielles.
Dès les vne et vme siècles des mots Celtes et
Francs s'introduisirent dans le Latin avec des désinences Latines, qui disparurent plus tard, parce
qu'on ne savait pas les varier (i). Et voilà comment
auraient été fondées insensiblement les langues
Romanes encore parlées dans le Midi de l'Europe.
On croit rêver quand on lit de pareilles énormités.
Voyons plutôt.
i" Si l'infiltration alléguée était vraie, nos langues Méridionales seraient régies par la Grammaire
Latine, si profondément différente de celle des
Celtes: car l'introduction de certains mots étrangers,
ne changeant rien aux règles syntaxiques, elle devait
seulement enrichir le Vocabulaire de ce nouveau
Latin avec ses prétendues conquêtes. Or, la Grammaire Celtique a été conservée, à peu près intacte,
par les langues modernes de tous les peuples Méridionaux Européens, sans nous en excepter.
Première preuve évidente que les Gaulois, ont
(i) Dictionnaire Bescherelle, v° Roman.
I
�pu adopter certains mots Latins, mais sans rien
perdre de leur Grammaire, c'est-à-dire de l'élément
essentiel de leur langue primitive.
Donc l'hypothèse proposée est purement gratuite.
2° D'autre part, le savant Fauriel cherchait
anxieux, comment il serait possible d'expliquer
cette évolution du langage, identique et simultané
dans toute l'Europe Méridionale? Second Miracle
que le savant critique ( i ) signale, mais en se gardant
bien d'y croire.
Raynouard veut bien reconnaître chez les Méridionaux l'art de créer avec les éléments Latins les
mots convenables, pour exprimer plus clairement
ou plus rapidement les sentiments et les idées (2);
et plus bas : « Qui ne serait convaincu de,
» l'ancienneté de la langue Rustique primitive,
» quand on reconnaît que dés cette époque (842)
)) elle employait un mécanisme aussi simple et aussi
» ingénieux, et surtout aussi utile à la clarté du
)) discours ».
Certes, le voilà bien près de la vérité quand il
proclame l'antiquité du Rustique primitif, et son ingénieux mécanisme grammatical : mais il ne doit pas
(1) Bibliothèque de l'Ecole des Chartes, tome n, page 213
et suivantes.
(2) P. 6,
�la découvrir, parce qu'il a sur les yeux le bandeau
d'un système impossible.
En Gaule, pour ne parler que d'elle, les langues
Nationales se trouvaient en mesure de prêter au
latin bien plutôt que de lui emprunter. Nous savons
qu'elles y furent faites exclusivement de Celte
d'abord, additionné de Grec apporté plus tard par
les Colonies. Or, le Latin devait être composé avec
les mêmes matériaux, à une date relativement
récente. Donc à l'heure de l'invasion Romaine, le
Latin retrouvait dans le Midi Européen ses éléments Originaires, pétris par une Civilisation fort
ancienne, et disciplinés par une Syntaxe si parfaite
que les Méridionaux modernes l'ont acceptée sans
changement.
Nous voilà déjà bien certains que les Gaulois ne
prirent jamais leur Grammaire aux Latins, car les
deux sont absolument différentes. Ils se tinrent
pour satisfaits avec celle qu'ils nous ont transmise
intacte, qui est leur œuvre d'ailleurs bien personnelle, et identique en Gaule, en Italie, en Espagne,
en Portugal.
Et d'autre part, ils se trouvaient plus] riches de
mots que les envahisseurs eux-mêmes, par leur
hardiesse à les dériver plus nombreux de la même
racine : si bien qu'un grand nombre de mots Gaulois ne peut être traduit en latin que par des péri-
�phrases. Pour nous le Latin serait débiteur mais
non créancier de nos langues Gauloises. Et si on y
reconnaît certains de ses mots, leur fonction de
simple doublure, le plus souvent (i), est celle de
véritables annexés venus après coup.
En résumé, si nous dégageons les naïvetés de
Raynouard de ses assertions erronées,nous dirons :
que nos langues Méridionales, plus anciennes que
le Latin, et comme lui d'origine Celto-Grecque,
n'eurent rien à lui emprunter, puisqu'elles créèrent
avant sa naissance les mots convenables au discours, avec les éléments dont elles se servaient depuis des milliers d'années : etque le mécanisme aussi
simple qu'ingénieux par elles employé pour la clarté
du langage, n'était que la Grammaire Gauloise inébranlable comme les mots qui constituent encore
ces langues. Ainsi le fameux Roman, créé par l'imagination des Néo-Latins, doit être laissé pour
compte à ses inventeurs (2).
(1) Voir les tableaux comparatifs, à la fin du chapitre irv*.
(2) Voir Chap. vi, §2, Preuv. Hist.
�CHAPITRE V
QUELQUES COUTUMES ET INSTITUTIONS GASCONNES
ER
D'ORIGINE GRECQUE ET CELTE — § I
MARIAGE—
§2 FUNÉRAILLES—§3 RÉJOUISSANCES—§4 DANSES
ET CHANTS —■ §
5
HESTONNAOU OU
FÊTE
LOCALE
— § 6 LAGUILANNEUF OU LÀGUILHOUNÈ — § 7 LE
SOLEIL VAINQUEUR— FÊTE DE LA SAINT-JEAN —
ROGATIONS
§9
— § 8 CHARIVARI
LE MU.NICIPE
OU
LA
OU
BRENADO —
COMMUNE — §
10 LA
RELIGION GRECQUE ET LA PHILOSOPHIE PYTHAGORICIENNE EN GAULE ANTÉRIEUREMENT A LA
QUÊTE
ROMAINE
—
§
11
CON-
DROIT CIVIL GASCON
— Lois
— MARIAGES — SUCCESSIONS —■
PROPRIÉTÉ, ETC., ETC. — § I2CHARONDAS (444 AV.
J.-CH.)— INSTRUCTION GRATUITE ET OBLIGATOIRE
— SERVICE OBLIGATOIRE — ASSISTANCE GRATUITE.
D'ORIGINE GRECQUE ET NON PAS ROMAINE
CIVILES USUELLES
????
Serait-il possible de retrouver quelques traces
de nos Origines dans nos Coutumes actuelles, malgré les siècles écoulés. La Philologie et l'Histoire
�— 74 —
marchent la main dans la main, se prêtant aide et
assistance sur la voie qui conduit à la vérité.
Nous allons rechercher d'abord ces empreintes
ineffaçables du passé, dans les trois circonstances de la vie où elles se conservent avec le
plus de persistance : le Mariage, les Funérailles,
les Réjouissances. Nous promettons une très ample
moisson à qui voudrait s'adonner à ce genre de
recherches, si intéressantes d'ailleurs.
g i". — MARIAGE
Nous ne parlerons ici que de sa célébration extérieure, ayant consacré un paragraphe spécial au
Droit Grec(i) proprement dit.
Les Fiançailles d'abord, ont authentiqué les
consentements des futurs et de leurs parents, et
réglé le contrat dotal, condition essentielle qui distingue (2) l'Union légitime du Concubinat.
Plus tard, au jour fixé d'avance, les époux se
présenteront à la maison de l'Officier public, qui
dressera leur acte de mariage. La jeune fille s'avance,
parée de bijoux, sous ses vêtements les plus beaux;
(1) § 11 de ce chapitre.
(2) La condition est si
bien
essentielle
que le futur doit
reconnaître un apport dotal alors même qu'il ne reçoit rien,
�— 75 —
sa chevelure parfumée, arrangée avec art, supporte
une couronne de plantes consacrées à Vénus chaste.
Elle monte à côté de son fiancé sur un char fleuri,
et l'équipage nuptial se dirige vers le Temple. Ils y
sont reçus par le Prêtre, qui remet à chacun d'eux
une branche de lierre, symbole des liens indissolubles. Puis, il les conduit à l'Autel, ou une génisse
est immolée, à Diane immaculée, à Minerve toujours Vierge, et pour obtenir son pardon du sacrifice exigé par l'Hymen, à Vénus mère de l'amour
légitime. Le Prêtre, après avoir consulté les entrailles de la victime, déclare que les Dieux approuvent
le mariage. De son côté, le Chef de famille dit à
l'Epoux : Je vous accorde ma fille, afin que vous
donniez à la République des citoyens légitimes : et
les mariés se jurent une fidélité inviolable. A leur
sortie du temple, le peuple répand des fleurs, et
chante Hyménée, Hyménée... Ainsi l'union des
corps et des âmes est devenue parfaite, grâce à
l'intervention des hommes et des Dieux.
La mariée, accompagnée de son escorte de jeunes
filles et de jeunes garçons en liesse, est conduite
à la maison conjugale, ornée de fleurs pour la circonstance, et qui devient la sienne.
Les parents et les amis iront s'asseoir au Festin
des noces, suivi de danses et de chants nuptiaux
(eoS>i $Tcêoàoiy.ioç). Le lendemain, les époux échan-
�- 76 geaient leurs présents, et recevaient ceux que
parents et amis étaient heureux de leur offrir : et
ces cadeaux demeuraient exposés à la curiosité des
visiteurs.
Telle fut la célébration du mariage en Grèce,
suivant l'Abbé Barthélémy, l'illustre Auteur du
Voyage d'Anacharsis, chef-d'œuvre de science et de
méthode, dont nous avons résumé quelques pages( i ).
Qu'est-il besoin de changer dans cette élégante'
peinture pour lui donner les allures Gasconnes?
Peu de chose, en vérité. Encore aujourd'hui, les
époux préludent à leur union par les Fiançailles :
leur contrat est le même que chez les Grecs, c'està-dire : dotal. Ils passent de la maison de l'Officier
public à l'Eglise. La mariée continue d'être parée
de ses plus beaux atours; et ses cheveux parfumés
supportent toujours la couronne symbolique.
Les époux montent ensemble sur le même cheval,
ou en voiture découverte, pour affirmer publiquement
leur union, aux yeux de tous; c'est encore l'une des
différences qui distinguent les Justes Noces du Concubinat. Lorsqu'ils mettront pied à terre, ils fouleront la jonchée de fleurs et de feuillages; et las
Dounzelos{2)chanterontHyménée en leur langue. Le
Prêtre ne leur offre plus le rameau de lierre; il
(1) T. iv, p. 368 et suiv. Ed. 1822. Paris Ledoux.
(2) Demoiselles d'honneur dans le Nord.
�— Illes lie par l'anneau consacré qu'il leur passe aux
doigts. A l'Autel, le sacrifice a changé; mais il
donne à la conscience la même satisfaction; le Ciel
a l'union pour agréable. Comme jadis, la maison
nuptiale sera décorée de guirlandes et de couronnes
de fleurs; le repas sera splendide; on y chantera
des vers de circonstance, talamous, avant et après
que la mariée aura été conduite au lit conjugal; et
la jeunesse animera la fête par des danses joyeuses.
Les époux échangent encore leurs présents, et
reçoivent ceux de leurs parents et de leurs amis;
ils sont encore exposés à la curiosité des visiteurs.
La fête a même conservé son lendemain.
J'ai regretté, je l'avoue, de ne pas trouver dans
notre Auteur la circonstance si curieuse de la main
tendue par le Chef de famille à la nouvelle venue,
pour l'aider à franchir le Seuil de la maison où elle
fait sa première entrée. Le Seuil était en effet le
protégé du Bto; ifirtiot, du Dieu du Foyer; et la
mariée devait éviter de l'offenser en le heurtant, ou
en le foulant aux pieds. Peut-être ce scrupule, très
certainement religieux, venait-il d'une autre origine. Mais il est resté Gascon.
Les Romains eurent d'abord un tout autre idéal
du Mariage.
Nous savons comment la Cité naissante manquant de femmes, s'en procura en organisant des
�-
78
-
jeux où les Sabins furent conviés, et leurs femmes
enlevées comme un butin de guerre. Le Droit garda
cette empreinte indélébile du point de départ.
A Rome, le mariage a sans doute les apparences
d'un Contrat, mais de vente rigoureuse : la volonté
du père est dominante, à cause de son droit de propriété sur sa fille dont la tradition ne dépend que
de lui seul. Il en dispose au même titre que d'un
meuble ou d'un animal. Quant à la mère, privée de
toute puissance, son consentement était considéré
comme inutile.
Le jour de la célébration des Noces, la tête de la
fiancée passait sous le joug, jugum, conjugium;
elle tombait ainsi in manu de son mari, qui acquérait sur elle le droit de vie et de mort, quasi fili a :
Et ces Paysans grossiers, et ces Soudards brutaux
auraient civilisé l'Univers! ! !
Nous sommes bien loin de la jeune Gauloise
au banquet des Prétendants, offrant la coupe à celui
qu'elle préfère, serait-il un étranger; ou de la
Vierge Grecque libre de son choix, et devenant la
compagne et'non la chose du mari.
Sans doute, ces brutalités Quiritaires du point
de départ disparurent lentement sous l'heureuse
influence Hellénique. Mais jusqu'à nouvel ordre,
c'est aux Celto-Grecs que nous reportons l'honneur
de la création de nos Coutumes Matrimoniales.
�— 79 —
§ 2«. — FUNÉRAILLES (i)
Le Chef de famille a rendu le dernier soupir.
Son corps sera lavé, parfumé d'essences, enveloppé dans une robe précieuse, le visage couvert d'un voile, et la tête ornée d'une couronne. 11
emportera dans la main, un gâteau de farine et de
miel pour apaiser Cerbère, et sur les lèvres,
l'obole (2) dont il paiera le funèbre passage au
Nautonier du Styx (3).
A la porte de la maison se dresse un vase d'eau
lustrale; le corps déposé sous le vestibule, entouré de
cierges allumés, reçoit l'expression des regrets de
ceux qui l'aimèrent vivant; les femmes versent des
pleurs, leurs gémissements éclatent. Puis, enfermé
dans un cercueil de bois de Cyprès (4), le corps est
posé sur un char, et porté jusqu'à la place ou se
dresse le bûcher. Les hommes formant le cortège
(1) Anachar., tome n, page 12g et suivantes.
(2) Froment de Beaurepaire, l'homme de lettres, m'a affirmé
que cet usage était encore suivi dans la partie montueuse du
Quercy.
(3) Les habitants de la ville d'Hermione s'abstenaient de
placer l'obole dans la bouche des morts, suivant Strabon.
Caron, le Nocher du Styx, n'exigeait pas d'eux son salaire, parce
que leur Ville était consacrée à Proserpine.
(4) Parce qu'il activera l'incinération.
�— 8o —
marchent les premiers, suivis par les femmes, tous
également vêtus de noir, les yeux baissés vers la
terre. Des musiciens font entendre des chants lugubres.
L'incinération achevée, les invités prennent part
au repas funèbre très sobrement servi... et des
aumônes sont distribuées aux pauvres. Parents et
amis se réuniront encore le neuvième et le trentième jour, pour rendre de nouveaux hommages
aux mânes du décédé. Chaque année, au jour de sa
naissance, ils viendront pleurer sa porte comme si
elle était récente.
S'agissait-il d'un homme Illustre, d'un Savant,
d'un Philosophe renommé, ses disciples et ses admirateurs renouvelaient le triste Anniversaire par
les manifestations de leur douleur.
De plus, les morts avaient leur fête générale
Annuelle, qui se célébrait pendant le mois Athistérion ( i ).
Supprimons d'abord de ce tableau toute la partie
religieuse. Cerbère est mort de faim depuis longtemps déjà; et l'avide Caron a brisé ses rames à la
même époque. Nous n'incinérons plus les corps,
nous en reposant sur la nature du soin de les restituer à la terre.
(i) Février suivant les uns, ou Novembre suivant les autres.
�— 8i —
Après ce qui précède, point n'est besoin d'insister
pour établir que l'Aquitaine moderne honore ses
morts comme ils furent honorés dans la Grèce
antique.
Le corps du décédé, soigneusement enveloppé,
est encore confié à un cercueil, exposé dans le vestibule de la maison, entouré de cierges allumés; à ses
côtés se trouve/euase d'eau lustrale avec une branche
de buis sacré, agitée par chacun sur le cadavre, en signe
de purification. Puis il est déposé sur un char,ou tout
autre véhicule, escorté par les assistants jusqu'à la
tombe. Les hommes marchent en avant, suivis par
les femmes, tous également habillés de noir, la tête
inclinée, les yeux en larmes. Les Prêtres prennent
la tête du Convoi, chantant tristement et àdemi voix,
l'Hymne superbe de l'espérance : In Paradisum deducantteAngeli... La cérémonie religieuse terminée,
les invités vont s'asseoir à lasNossos tristos, au repas
funèbre (mourtailhos), donné par la famille en deuil.
On n'y servira généralement que delà morue salée,
le plat par excellence des jours de mortification, et
rarementde la viande, maisalors bouillie seulement :
car si le défunt se trouvait par malheur condamné
aux supplices de l'Enfer, les viandes rôties aggraveraient ses peines (i). Parents et amis se réuniront
(i) Am. Thierry rappelle^qu'au temps du Paganisme ces
repas étaient donnés aux parents et aux amis sur la tombe
6
�— 82 —
encore au bout du mois et de l'an en l'honneur du
mort; et les croyants adresseront de nouvelles prières pour son salut au Dieu de Miséricorde.
Comme jadis, les Hommes Illustres ont le privilège mérité de réunir autour de leur tombe leurs
Admirateurs ou leurs Disciples soucieux de glorifier
leur mémoire. D'autre part, la fête annuelle des
morts compte toujours parmi les plus solennelles :
Elle est peut-être la plus respectée dans nos Cités
si profondément infectées de scepticisme.
Une chose a fort heureusement changé depuis
quatorzesiècles,laReligion. Mais la nouvelle venue,
en nous apportant la Liturgie qui lui est propre,
laissa subsister, intactes, des Coutumes trop nobles
pour lui porter ombrage.
Et cependant on nous conteste encore nos Origines ?
§ 3«. — RÉJOUISSANCES
Heureux peuple Grec/venu de l'Orient, comme
tous les Messies, il passa sur le Monde, l'éclairant
du mort; et de larges aumônes étaient distribuées aux pauvres; le Christianisme consacra cette coutume Païenne. Il
raconte les prodigalités du repas funéraire donné par Pammachius à propos de la mort de sa femme Pauline, fille de
Paula, la dernière descendante des Scipion, et l'amie célèbre
de Saint Jérôme.
Saint Jérôme, liv. to, page 368 et suivantes.
�- 83 de ses flammes de météore : Disparu pendant près
de mille ans dans la nuit de la barbarie, il remontera sur l'horizon, nouvelle Etoile miraculeuse,
conduisant encore les Pasteurs jusqu'au berceau
divin de la Civilisation moderne. Rien de ce qui
le touche n'est indifférent aux Gascons, pas même
ses façons de se réjouir.
Nous ne faisons pas allusion seulement aux Jeux
solennels, à périodes fixes, où les Rois et les César
ne dédaignaient pas de disputer les couronnes; ou
le Père de l'Histoire fut acclamé, Eschyle porté en
triomphe, jusqu'à la venue de Sophocle son heureux rival. Nous voulons parler seulement de ces
joies intimes de chaque jour, qui attestent chez lui
le bonheur de vivre, et de communiquer les douces
émotions auxquelles il était prédisposé par une
imagination ardente, et son extrême sensibilité.
Il en devait être ainsi, sous un Ciel dont le soleil
revêt tous les objets de couleurs éclatantes, sur une
terre salubre et gracieusement accidentée, dont la
stérilité fut corrigée par le travail imposé à tous
les citoyens sous peine d'infamie, par l'habileté de
ses ouvriers, le génie de ses Artistes, de ses Savants,
de ses Philosophes, par le labeur de ses nombreux
esclaves (i), et l'activité de Marins, aussi intrépides
(i) 15 esclaves pour un homme libre d'après Pausanias.
�- 84 à la manœuvre, qu'habiles aux finesses du négoce.
En remontant aux origines de son Histoire, où
elle se confond avec la Légende, nous trouvons des
Héros du champ de bataille sans doute, mais encore
Orphée, fils d'Apollon, dont la voix mélodieuse
faisait accourir les animaux farouches, et sut fléchir
jusqu'aux décrets inexorables des Dieux Infernaux :
Amphion qui bâtit la ville de Thèbes aux accords
de sa lyre. Les pierres, rendues sensibles, se plaçaient spontanément les unes au-dessus des
autres : ainsi s'élevèrent les murailles des maisons,
et les'remparts de la Cité ( r) : Terpandre, étranger
chez les Lacédonniens indomptables, qui par
les mêmes moyens, éteignit des dissensions menaçantes : Tyrtée, le chanteur boiteux et borgne,
dont la voix belliqueuse ranima leur courage
abattu par la défaite, et sut leur ramener la
victoire. Est-ce légende ou vérité? Nous l'ignorons, mais en affirmant que nul autre peuple
n'en produit de semblables. Elle établit, que ses
Grands Hommes comprirent de très bonne heure,
par une faveur spéciale des Dieux, l'influence irrésistible de l'Art sur les âmes; qu'ils s'empressèrent
de les utiliser pour adoucir les mœurs féroces de
leurs contemporains, et les convier par les nobles
(i) Id., tome m, page 60 et suivantes.
�- 85 jouissances àvivre en société.Peut-être nos Conquérants Coloniaux ont-ils trop dédaigné l'emploi de
ces moyens qui ne coûtent la vie à personne, et qui
domptent les hommes les plus rebelles par le
simple attrait de l'Art, ce vrai Civilisateur de tous
les temps.
Nous préférons Amphion à Pizare.
Ainsi la Musique et la Poésie associées pendant
des siècles, avec la Lyre pour auxiliaire, imprégnèrent la Grèce si profondément, qu'elles devinrent
l'élément indispensable de toutes manifestations,
tristes ou joyeuses, publiques ou privées, civiles ou
guerrières. Elles durent varier leurs allures pour
s'adapter aux sentiments dont elles devenaient l'expression. Et voilà pourquoi leurs formes se multiplièrent suivant les besoins. Nous verrons un peu
plus bas comment les Celtes surent profiter de leurs
leçons.
§ 4' — DANSE, CHANT
La Danse est si naturelle à l'homme qu'on la
trouve chez les peuples les plus sauvages. Les
Grecs surent en faire un art admirable, à l'usage
du Guerrier chargé de ses armes, du grave Magistrat s'avançant vers son tribunal, du Prêtre officiant dans le Temple, de l'Amoureux égaré par ses
�— 86 —
emportements, de l'Affligé succombant sous le
poids de sa douleur (i).
Telle fut l'Ecole à laquelle se formèrent les
mœurs de notre Gascogne. Elle chante comme ses
Maîtres chantèrent, les Dieux, la Patrie, et ses
Hommes Illustres; elle chante à la ville et à la
campagne, aux banquets des noces, ou chacun,
jeune ou vieux, doit chanter à son tour. Elle a des
Chansons des moissons et des vendanges, de deuil,
d'amour, et du berceau; et cependant les plus nombreuses sont les chansons à danser.
Ainsi nous n'avons rien à envier à la Grèce.
Nous apprîmes docilement tout ce qu'elle voulut
nous enseigner.
Mais aussi quels danseurs intrépides que nos
Gascons ! ! ! Dès que la jeunesse se trouve réunie, à
l'occasion des récoltes de toute nature, aux noces,
aux fiançailles, aux veillées, filles et garçons se
prennent par la main.
L'un d'eux entonne sa chanson favorite, la ronde
s'ébranle, et tous à l'unisson reprennent le refrain
(retoc).
Si nous nous souvenons de la ronde échevelée
des Bacchantes, de la ronde grave et mesurée des
fêtes des Déesses chastes, sculptée sur le bouclier
(i) Id., t. u, p. 469 et suiv.; t. m, p. 313 et suiv,; t, vi,
p. 73 et suiv.
�d'Achille, nous pourrons facilement désigner celui
qui le premier sut unir la musique et la poésie à la
danse; et voilà pourquoi sans doute opyja opyjarat
signifiait également danser, et faire danser (i).
Mais la chanson ne prit pas pour elle tout le
mérite de diriger les pas, et de marquer la mesure;
les Grecs dansèrent aussi accompagnés en cadence,
au son des instruments. Ainsi faisons-nous encore
aujourd'hui, avec un orchestre un peu primitif
peut-être, mais précieux au point de vue où nous
sommes placés. Un Artiste y suffit.
Il tient de la main droite un flageolet à trois trous,
la flutte de Pan si vous voulez; et son bras supporte
un instrument dont le nom va authentiquer nos
recherches, Lou tympanoun, Tú/«rávof. Il consiste en
une planche de bois de 0.80 centimètres de long
(1) Je trouve dans un
article du journal \a Patrie du 20
avril 1897 intitulé CHANTS POPULAIRES CRETOIS, la phrase qui
suit, écrite par un Français qui avait vécu dans le pays :
« Outre la poésie héroïque, on trouve en Crète une foule de
» chants qui célèbrent l'amour et les passions du cœur humain.
» Les poèmes d'amour sont généralement composés de disti» ques (mantinadès), et on les entonne en dansant; les hom)) mes et les femmes se tenant par la main et formant la
» chaîne, avancent et reculent d'un pas rythmique. »
Quel est le Gascon qui, en lisant cette description sommaire
des mœurs Cretoises, ne reconnaîtra pas la Ressegado de nos
chers paysans?
Qu'ils la conservent longtemps encore, par respect de la
tradition Gréco-Celte.
\
�— 88 —
environ sur 0.25 de large. Des cordes sonores,
quelques-unes métalliques, fixées aux deux extrémités de la planche, sont tendues sur deux chevalets; et l'Artiste bat la mesure sur les cordes avec
une baguette de bois, tandis que le flageolet chante
la mélodie. Le nom de l'instrument révèle assez
son origine, et sa forme rudimentaire son antiquité.
Telle était la musique du premier bal auquel j'assistais, conduit par ma nourrice : bal public et fort
animé, qui se tenait chaque dimanche, après Vêpres, sous la Halle aux grains de Lectoure.
Les temps sont bien changés depuis quelques
années. On danse beaucoup moins en Gascogne,
et on n'y chante guère plus. J'en sais bien les raisons; mais ce n'est pas ici que je dois les exposer.
§ 5. — LA HESTONNAOU OU FÊTE LOCALE
La Grèce, profondément religieuse, croyait qu'un
bon Génie s'attachait à l'enfant, dès le moment de
sa naissance; qu'il présidait à toutes ses actions, et
le protégeait jusqu'au tombeau.
Les Villes et les Dêmes espérèrent le même
avantage en se plaçant sous le patronage d'une
Divinité de leur choix. Athènes avait adopté celui
�- 89 de Minerve(i). Une fête célébrée, chaque année,
en l'honneur du Dieu tutêlaire, devait assurer à la
Cité toutes ses faveurs (2). Or, la Danse était un
élément essentiel de ces solennités religieuses. Les
Saints prirent la place des Dieux exilés; et la Fête
locale a continué de subsister, pour honorer le
nouveau Patron de la Ville ou du Village.
§ 6. — LANGUILANNEUF
Voilà bien des Coutumes Grecques confondues
depuis des milliers d'années dans celles de la
Gascogne.
Mais avant de terminer ce Chapitre, nous voulons
en examiner quelques autres d'origine peut-être
différente.
Etudions un peu Languilanneuf, ou Laguilhounè
comme on dit dans le Gers, fête Solsticiale d'hiver,
religieuse par conséquent, mais civile en même
temps, et conservée à ce titre. C'était de l'avis
unanime des Historiens, une Coutume Gauloise et
si profondément descendue dans les mœurs,qu'elle
subsiste encore... Faisons des vœux pour qu'elle
(1) Celles
que
les Athéniens
appelaient simplement
la
Vierge. (Pausanias, Voyage historique, chapitre t2.)
(2) Les Panathénées ou fête de Minerve, Déesse tutêlaire,
était la plus magnifique d'Athènes.
�— 90 —
ne tombe jamais en oubli. Son antiquité doit lui
valoir ce privilège.
Si nous en croyons Rouché de Cluny (i) le Soleil
était honoré chez nos aïeux, comme Père de la
lumière, Vainqueur des ténèbres,et Souverain dispensateur des fruits de la terre qu'il féconde de
ses rayons : Les Druides furent les premiers à
connaître son évolution exacte. Ils composèrent le
mot Bel-en-os de trois mots Celtes (loin au-dessus
de nous) qui devint le symbole du mouvement
solaire, et -déterminait la période des cérémonies
usitées dans toute la Celtique. L'échéance arrivait
le 25 décembre, au Solstice d'hiver: premier jour
à la fois de la renaissance du Soleil et de la Nouvelle
année. Il va devenir l'occasion d'une double fête
religieuse et purement humaine. C'était pendant
cette nuit solennelle que se célébraient les mystères Druidiques dans les profondeurs des forêts
sacrées, avec une mise en scène lugubre. Voilà le
fait religieux historique. Qu'en est-il resté? rien,
que la promenade de nuit de nos jeunes gens.
Nous avons suivi Laguilhounè pendant notre enfance, et voici en quoi elle consiste.
Quelque temps avant les fêtes de Noël, une élite
de la jeunesse se présente, le soir, devant les
(1) Les Druides, page 111 et suivantes.
\
�— 9i —
fermes hospitalières de la Commune, et sans frapper à la porte, chante à l'unisson des vers consacrés,
exprimant des sentiments religieux, et des vœux
de prospérité et de bonheur pour la famille. La
porte s'ouvre de l'intérieur, et la maîtresse de la
maison offre le feu pour réchauffer les visiteurs, le
pain et le vin pour les réconforter. Puis elle glisse
discrètement des œufs dans leur panier, et de la
farine dans leur sac : voilà bien nos étrennes du
Jour de l'An, acquittant l'expression des bons souhaits. Qu'importe la nature de l'objet donné? Ces
approvisionnements amassés de maison en maison,
seront convertis en un immense gâteau, que le Curé
bénira pendant la messe de minuit, pour être distribué à tous les assistants.
Telle est la coutume de Languilanneuf devenue
Chrétienne.
Mais d'où lui vient ce nom ?
Si nous en croyons nos artistes en étymologies,
nos pères étaient animés d'un tel enthousiasme
pour la langue Latine, qu'ils s'en servirent loooans
avant la fondation de Rome : Ad viscum annus
novus! ! ! l'année nouvelle au Guy! ! !
Ovide constate, en effet, que les Druides avaient
la coutume de clamaré ad viscum, de faire appel au
Guy sacré, tandis qu'ils allaient le couper solennellement sur les chênes des forêts avec une serpe
�— Q2 —
d'or. C'était la célébration religieuse du Solstice.
Mais il serait aussi juste de la confondre avec la
fête des étrennes, que de la faire consister plus tard
dans la Messe de Minuit. S'il en était ainsi, Laguilanneuf aurait disparu avec la religion Druidique.
Or, Duchesne constate en ses Antiquités de France,
que de son temps, les enfants criaient Aqui lan neuf
à Dreux et autres lieux, au jour de l'an, pour
demander les étrennes! tt nous prouvons que la Coutume subsiste encore dans notre vieille Aquitaine.
La fête religieuse du Guy a disparu avec la religion Druidique : et la fête humaine des étrennes du
jour de l'an est plus que jamais en honneur. Constatons d'ailleurs que la disgrâce du Guy n'a été que
relative. En effet, si vous visitez les Eglises, de
Paris notamment, le jour de la fête de Noël, vous
en trouverez les portes assiégées par de braves gens
empressés à vous vendre des bouquets de Guy que
chacun achète, et emporte dans sa maison après
qu'ils ont été bénis; comme les croyants emportent
les buis de la fête des Rameaux. Est-il nécessaire
de faire remarquer que c'est en souvenir de ce jour
consacré aux étrennes par les Gaulois, que les
enfants placent encore leurs souliers sous les cheminées la veille de la naissance du petit Noël, pour
que celui-ci, toujours généreux, puisse y déposer
les joujoux qu'ils convoitent.
�— 93 —
La religion Druidique était certainement oubliée
au viie siècle, mais non la fête humaine du jour de
l'an. Nous allons voir, en effet, par un passage de
la Vie ( i ) de Saint Eloi, évêque de Noyon, qu'il en
est encore à redouter la confusion pour ses ouailles;
car il leur disait :
<( Que nul ne fasse aux Calendes de Janvier des
)) choses défendues, ridicules, antiques; et déshon)) nêtes, soit en dansant, soit en tenant table ouverte
» PENDANT LA NUIT, soit en se livrant aux
» excès du vin... »
Voilà bien le RÉVEILLON traditionnel, ou fête très
humaine de la renaissance de l'Année ou du Soleil.
Les scrupules du Saint deviennent évidents lorsqu'il ajoute :
« Que nul, à la fête de la Saint Jean ou à cer» taines solennités des Saints, ne célèbre LES
)) SOLSTICES, par des danses, des festins et des
)) chants diaboliques... »
Toutes ces recommandations étaient sages, car
les supertitions sont tenaces au moins autant que
les Fêtes traditionnelles.
Mais quelle est donc la racine du mot que nous
cherchons?
(i) Ecrite par Saint-Ouen, archevêque de Rouen, cité aux
Curiosités de l'histoire et croyances propres du moyen âge, par
Jacob. Paris, 1850. Delahaye. P. 12 et suiv.
�— 94 —
Le savant abbé Espagnolle, Prêtre aussi vénérable que savant scrupuleux et modeste, rétablit
la vérité sur ce point comme sur bien d'autres (i).
Ky-çt-liv-viof, le Gascon traduit par aki-l'an-naou,
voici Van nouveau. Tous ces mots sont encore de
notre langue courante, bien que datant de vingtcinq siècles. Ainsi les Grecs donnèrent un nom,
parvenu jusqu'à nous, parfaitement reconnaissable,
à une Coutume des Gaulois, la Fête du jour de l'An.
Nous avons ainsi un avant-goût du savoir-faire des
extracteurs de quintessence latine.
Après nous avoir prouvé que nos pères parlaient
latin quelques milliers d'années avant la création
de la langue, ils pourront établir avec une égale
évidence, que les Romains, après la conquête de
notre Aquitaine, se hâtèrent d'y semer à pleines
mains du Grec, spécialement Dorien, dont nous
aurions paraît-il retenu quelques mots ! risum
teneatis...
§ y. — LE SOLEIL VAINQUEUR, OU FÊTE DE LA
SAINT JEAN (24 JUIN) — ROGATIONS
Les grandes solennités réservées aux Soltices
indiquent avec certitude que le Printemps et les
(1) L'origine du Français, 1888, Paris, Delagrave.
�— 95 —
Equinoxes devaient être aussi l'occasion de fêtes
religieuses.
Leur retour régulier mettait les Gaulois en
demeure d'honorer le Dispensateur des richesses;
et quelle époque mieux choisie que celle où la terre
fleurit sous la généreuse haleine des vents chauds,
où le flot des épis dorés ondule sur les champs. La
prière de reconnaissance après celle de supplication
et d'espoir.
Ces fêtes étaient emblématiques, et représentaient
la lutte de l'Eté contre VHiver vaincu; de grands feux
étaient allumés sur les hauts plateaux en l'honneur
du Vainqueur. Et la danse religieuse, calculée d'après les évolutions du Soleil, s'agitait au tour du
foyer, après la cueillette des plantes qui lui étaient
consacrées. Or, encore aujourd'hui, la veille de la
Saint Jean-Baptiste, à la chute du jour, un grand
feu (Halho) (skti, sD», chaleur ou éclat du soleil) est
solennellement allumé dans chaque village d'Aquitaine, par le Curé, entouré de ses ouailles; et tandis
que la flamme pétille, sa voix autorisée appelle les
bénédictions Célestes sur les récoltes et sur les
troupeaux (i).
(i) 0. Sullivan, Irlande, Poésiesdes Bardes (1853, Glashin,
p. 79), rappelle que le Soleil fut le Dieu par excellence des
Mandais; que la Fête principale du Dieu du Feu se célébrait
à VEquinoxe du Printemps, et encore aujourd'hui à la Saint
�-
96
-
Encore aujourd'hui, le paysan Gascon, va cueillir
pendant la nuit mystérieuse, les germandrées
connues de lui : Il les disposera en forme de croix,
et les fixera sur la porte extérieure des Etables.
Ainsi les animaux seront préservés, pendant toute
l'année, des maladies contagieuses, ou de la funeste
influence des Maléfices (i).
La fête des Rogations avait, elle aussi un équivalant dans les Gaules. Mais le Soleil fut, dans
toute l'Antiquité, un objet de vénération universelle; et nous retrouvons son Culte, bien souvent
uniforme, notamment chez les peuples agriculteurs.
Par exemple, les Fratres Arvales, (de arva champ),
le front couronné d'épis, conduisaient, deux fois
par an, le peuple recueilli, autour du territoire de
Rome, appelant les faveurs des Dieux sur les fruits
de la terre. Aussi n'oserions-nous pas nous en prévaloir au profit de notre thèse.
Les faits qui précèdent sont d'ailleurs assez probants par eux-mêmes.
Jean; que la Coutume des feux de joie à la mi-août est toujours suivie en Irlande.
*
C'est donc bien une Coutume d'origine Celte et non pas
Romaine.
(i) Il est bon de rappeler que chez les Grecs, comme plus
tard en Gaule, les solennités commençaient, après le coucher
du Soleil, la veille des jours de Fête (per vigilium).
�— 97 —
§ 8«. — CHARIVARI — BRÉNADO
Le Charivari serait-il d'origine Hellénique, comme plusieurs Auteurs l'ont soutenu ? Son nom,
Français d'abord, semble dérivé de £«/»)6oáM (avoir
la tête rompue par des craiailleries), d'où xapvêápia.
D'autre part, son nom Gascon Brénado, pourrait
encore le faire croire; car ce mot dérive tout naturellement de Vpouáfaç (bruyant). D'autres en font
honneur à la Celtique (choary, jeu, plaisanterie), et
■vari pour mari (chagrin). Les Néo-Latins le revendiquent, de leur côté, avec le mot barbare chalybarium, emprunt évident à une langue étrangère, mal
dissimulé sous une forme latine.
Sur la Coutume en elle-même, à laquelle chaque
peuple a pu donner un nom particulier, elle doit
être aussi ancienne que la répugnance que provoquèrent les secondes noces, répugnance dont la
brénado, fut la manifestation publique. Et les législateurs n'ont pas échappé au même sentiment :
car les lois de toutes les époques se sont montrées
sévères contre les remariages, dans l'intérêt des
enfants du premier lit, et quelquefois de la pudeur
publique.
LeCharivari consiste en un attroupement bruyant
à la porte des coupables. Les artistes sont munis
7
�-
98
-
de cornes et sifflets, de poêles, chaudrons et bassinoires, instruments ordinaires de cette sorte de
concerts. Il n'est pas rare même d'y entendre
des Couplets de circonstance, qu'il serait quelque
fois imprudent de proposer comme des modèles de
bon goût; c'est le Vulgus exerçant lui-même les
fonctions Censoriales.
Plusieurs peuples de l'antiquité, notamment ceux
d'origine Asiatique, d'accord avec la loi Quiritaire,
réservaient toutes leurs faveurs à la femme univira,
c'est-à-dire qui n'a connu qu'un seul homme.
Celle-là, la vraie materfamilias ou matrona, était,
vivante ou morte, entourée de tous les hommages (i). Le Charivari vengeait la conscience
publique de celle qui l'avait offensée, en se remariant. Mais il ne respecta pas ces limites étroites.
Il se manifeste aussi à la porte du veuf qui convole.
Et cette circonstance nous suffit pour lui dénier une
origine Latine. Il a même l'indiscrétion de retentir
jusque devant la maison des maris trop peu soucieux
de la fidélité de leurs femmes, ou qui se laissent
battre par elles; ce qui lui donne quelquefois un caractère irritant, et nécessite l'intervention de l'Autorité, souvent impuissante à prévenir des accidents.
(i) Ce scrupule se trouve aussi chez les Athéniens. La
femme du Roi des sacrifices doit être univira, npaTOiroviç
(femme d'un premier mari).
�— 99 —
Quoi qu'il en soit de son origine, le Charivari de
toutes les époques se montre le gardien des bonnes
mœurs, et l'exécuteur spontané de qui les offense.
§ 9°. — LA COMMUNE
La Gaule était primitivement occupée par des
Tribus nombreuses, fort jalouses de leur indépendance ! Elles en avaient pris l'habitude dans le
désordre de leur vie nomade, dont la durée est
restée inconnue. De cet état confinant à l'anarchie,
et après leur halte définitive, résulta l'inconvénient
de guerres intestines à peu près incessantes, cause
de faiblesse au jour de l'invasion, et qui favorisa,
malgré des vertus héroïques, l'action des Romains
habiles à profiter des dissensions Nationales.
Les Tribus n'étaient pas séparées seulement par
des Administrations indépendantes, mais encore
par des nuances de langage de Canton à Canton,
encore reconnaissables malgré leur nombre, pour
les initiés au secret de nos vieilles langues Méridionales.
Or, les colons Doriens apportèrent en Gaule,
avec une Civilisation plus avancée, des Institutions
purement démocratiques; car à côté même d'une
�— 100 —
Caste supérieure, ils gardaient le droit de suffrage ( i ),
la Loi ne devenant obligatoire chez eux, que par le
Vote du peuple. La paix comme la guerre dépendait
de sa seule volonté. Telle était l'organisation politique des Gaulois au moment de l'invasion
Romaine. Par où l'on voit, que la Constitution du
Municipe, devenue d'abord si odieuse et si fatale à
ses Chefs spoliés, ne fut que l'utilisation d'une vieille
Coutume nationale, dans un intérêt de fiscalité.
Mais les Institutions démocratiques, comme l'or
pur, conservent toujours leur valeur, malgré les
abus qu'on en peut faire.
Valentinien en créant les Défenseurs des Cités,
donnait déjà un Protecteur aux faibles contre les
forts.
Le Breviartum des Visigoths confirma l'innovation, et accorda le Droit d'élire les Agents des Administrations locales. Il put résister aux Invasions des
barbares, et prouver ainsi sa vitalité, sans parler
des services nombreux par lui rendus.
Pendant le moyen âge, les Municipes, Jurades,
Communes, etc., etc., offrirent à la liberté individuelle et à la propriété privée sa condition essentielle, une protection qui assura leur salut par le
sentiment de la solidarité.
(i)
Schlosser. Histoire universelle de l'Antiquité, tome
C. 9, livre 15, page 382.
I,
�L'Aquitaine leur dut d'abord une prospérité
relative, qu'anéantit la guerre des Albigeois au
xine siècle, et au xvie celle de la Réforme religieuse.
Elle dut encore à la pratique des mœurs Municipales, et à son Droit civil, de traverser la période
Révolutionnaire de 1793 sans éprouver les déchirements terribles qui ensanglantèrent la plupart de
nos Provinces du Nord.
La liberté Municipale, si essentiellement CeltoGrecque, nous a graduellement conduits à la
conquête du gouvernement Parlementaire... Mais
son oeuvre restera incomplète, tant que nous ne
jouirons pas de la décentralisation la plus large
assurant à la Région le droit de s'administrer à son
gré, et suivant ses besoins. Elle est en effet la
conséquence naturelle du droit Municipal, et son
complément nécessaire. Nul ne croit plus que le
despotisme Centraliste ou Bureaucratique constitue
la sauvegarde de l'unité Nationale. Il nous a conduits à la privation de tout Gouvernement, et à
l'indifférence sinon au dégoût de la Politique et des
Politiciens.
§ 10= — RELIGION GRECQUE ET PHILOSOPHIE
PYTHAGORICIENNE EN GAULE
César fut très surpris de trouver la Religion
Grecque dans la Gaule Méridionale, jusqu'à la
�— 102 —
Saône et l'Allier (i). Est-il nécessaire, de demander qui l'y avait importée?? Il y rencontra beaucoup
mieux : la philosophie de Pythagore.
Ce grand homme naquit à Samos six siècles avant
Jésus-Christ. Il fut le fondateur de l'Ecole Italique,
et le premier qui donna son nom à la Philosophie.
Son génie, sous toutes les formes, a plané sur
l'Italie et sur la Grèce, sur l'Espagne et sur la
Gaule, dont les peuples vivaient rapprochés
par des relations incessantes, par des besoins
identiques, et par leurs langues, ne différant
(i) De (Diis) tandem fere quam reliquat gentes habent
opinionem. (Bel, Gai, yi-17.)
Am. Thierry, Hist. des Gaul., p. 478 et suiv.
Le culte des Dieux de la Grèce avait pénétré de bonne heure
dans la Gascogne. En voici la preuve : La fontaine Municipale de Lectoure (Gers) est encore appelée Hounthèlio (rilioç,
soleil). Elle coule dans une vaste salle carrée taillée dans le roc
exposée au Midi. La tradition a conservé le souvenir du Temple
du Soleil dont l'enceinte parfaitement intacte a seulement changé
de destination. Elle établit encore, que Saint Clair ou Clerc,
vénéré dans le pays, avait été lapidé au pied de ce rocher, pour
avoir refusé de sacrifier aux Idoles. Les lettrés locaux donnent
aussi à cette fontaine le nom de Diane, Déesse de la Lune. On
peut supposer, sans violer aucune vraisemblance, qu'Apollon
avait gracieusement offert l'hospitalité à sa sœur dans son
temple : et les deux noms sont également justifiés. Di-a-nos,
jour et nuit en langue Celte.
Le lac de Toulouse, dont le Consul Cépion pilla le trésor,
était consacré au Soleil, comme le Coq réveille-matin : le Coq
Gaulois.
�— 10? —
que comme de simples Dialectes. Il enseignait
l'Immortalité de l'âme (i), et sa migration dans
un corps nouveau, après la mort : forme originale
de la sanction de la Divine justice.
Cette doctrine était suivie dans les Sanctuaires
Gaulois si publiquement, qu'on a prétendu que
Pythagore leur avait empruntée (2). En tous cas,
son voyage chez les Druides n'est pas contestable.
Nous préférons dire, avec Hérodote, que
l'honneur de l'invention appartient aux Prêtres de
l'Egypte. Ils l'enseignèrent à Pythagore en sa
qualité d'initié à leurs mystères (3).
Mais ces discussions, de simple curiosité
historique, sont pour nous sans intérêt. Il nous
suffit d'établir les relations intimes de la Grèce
avec la Gaule Antique, et la confusion de leurs
âmes dans une Foi commune, la plus noble qui
ait fleuri dans ces temps reculés.
(1) Massiiias mœnia egresso, vêtus Me mos Gallorum occurrit, quos memòria proditum est, pecunias metuas, quce his
apud Inferos redderentur, dare solilos, quia persuasum habuerunt, animas hominum immort aies esse : dicerem stultos, nisi
idem Braccati sensissent quod Palliatus Pythagoras credidit.
(Val. Maxim lib. 26-10.)
(2) César, lib. 6, § 15. Diod., lib. 5, § 28. Strabon, lib. 4.
Bouché de Cluny soutient que les préceptes Religieux et
Moraux, comme la science Astronomique d'Egypte, étaient
d'origine Celte. (Les Druides.)
(3) Hérod. Euterpe, lib. 2, c. 123.
�— 104 —
§
ii
—
DROIT CIVIL GASCON D'ORIGINE GRECQUE -
LOIS CIVILES USUELLES — MARIAGES —
SUCCES-
SIONS — PROPRIÉTÉ, ETC., ETC.
Nous ne faisons pas œuvre de Jurisconsulte,
nos recherches tendant uniquement à mettre
en évidence l'origine Celto-Grecque de notre
langue Gasconne. Mais il doit nous être permis
d'affirmer, malgré l'enseignement Officiel, que les
lois Civiles, encore suivies en Gascogne, lui furent
apportées par les Hellènes, en même temps que
leurs Coutumes et leur Vocabulaire, que leur
Philosophie et leur Religion.
Il sufit, pour s'en convaincre, d'indiquer en
quelques mots, les lois Organiques de la Famille et
de la Propriété dans la Grèce antique, l'Institutrice
bien authentique de la Gaule.
i" Le régime dotal, avec la distinction des biens
en dotaux et Paraphemaux;
Ce Régime, d'origine incontestablement Grecque,
avait été adopté par les Celtes bien antérieurement
à la Conquête Romaine. César atteste, en effet, au
moment où il s'empare de leur pays, que la femme
Gauloise, en se mariant, apportait une dot qui devenait INALIÉNABLE, et dont le mari avait l'admi-
�— 105 —
nistration(i). Ils n'attendirent donc pas les Romains
pour pratiquer la dotalitè.
2° L'Egalité des partages des successions entre
les enfants légitimes (filles ou garçons), du Chef
de famille, sans autre différence que celle qui
résulterait d'une disposition testamentaire;
3° Part modique attribuée à l'enfant naturel ;
4°
Partage égal des successions collatérales
entre parents au même degré;
5° La propriété constitue un droit personnel,
dépendant de la seule volonté du possesseur de la
chose, qui en dispose à titre gratuit ou onéreux,
l'exploite, la transforme, ou la donne en hypothèque suivant son intérêt ou ses calculs;
6° Le testament, dont Solon a imposé les
conditions de validité, toujours les mêmes depuis
vingt-quatre siècles (2).
Nous n'ignorons pas que les Romains copièrent
servilement cette Législation, dont ils se firent
honneur; et nul n'osa les contredire, parce qu'ils
étaient les plus forts. Mais leur sommes-nous
redevables de cette importation Juridique??
Ci) I.ib. 6, ch. 19.
(3) Anliq. Grec, ou Tableau des mœurs, usag-, et instil.
des Grecs. (Paris, Didot, 1837, 2 vol. in-8. L'Anglais Robinson traduit sans nom d'auteur.)
�— io6 —
Nous ne le croyons pas. En effet, s'il en était
ainsi, elle aurait dû s'effectuer simultanément dans
les Provinces du Nord et du Midi de la Gaule.
Or, tandis que dans les premières, sa durée se
mesure à peine à celle de l'occupation Romaine,
ce Droit persista, indélébile, dans les secondes,
et les protégea efficacement contre les exigcances d'un Clergé avide, et les usurpations
d'une Noblesse orgueilleuse. Le Nord en fut
réduit à créer des coutumes, variant de Ville à Ville,
avec des Droits Seigneuriaux, d'Aînesse, de
Masculinité, de sujétion sous toutes les formes,
Services, Redevances, Tailles, Corvées, et Dîmes
prélevées jusques sur la pudeur des jeunes mariées :
toutes charges aussi incompatibles avec l'indépendance de la propriété qu'avec la dignité des
personnes.
Il est vrai qu'une fleur germa sur ce fumier;
fleur bien digne de l'âme Gauloise, la Communauté
des biens entre époux.
Notre malheureuse Aquitaine dut subir, comme
ses voisines du Nord, toutes les vicissitudes des
invasions, des conquêtes successives, des guerres
incessantes, les partages des terres avec les
nouveaux venus, jusqu'aux Sarrasins, les derniers
en date. Mais elle garda fidèlement son Droit Grec
dont le Législateur moderne a fait une Loi générale.
�— 107 —
Le Code Civil fut, pour certaines Provinces du
Nord, l'une des principales Conquêtes de la
Révolution de 1789 : tandis qu'il n'a rien changé
d'essentiel à notre vieux Droit Aquitanique, Grec
avant de s'appeler Romain ou Français.
L'Hellade démocratique s'était fait des lois
nécessaires à son essence. Les Lycurgue, les
Charondas, les Solon, ne pouvaient naître que
chez un peuple noble par le cœur, supérieur par
le génie, doué d'aptitudes exquises, qui lui
donnèrent en Philosophie des Pythagore et des
Platon, des Aristote dans les Sciences, des Poètes
du nom d'Homère et d'Eschyle, des Artistes
comme Praxitelle et Phidias. Tel était bien le milieu
dans lequel devait s'élaborer l'application à la vie
Sociale des principes philosophiques et scientifiques éclairée par le sentiment de la Justice.
Les Grecs, vrais créateurs du Droit, le révélèrent
au monde après l'avoir expérimenté. Et les Gaulois
en firent leur profit.
Villemain avait dit excellemment (1) avec sa
profonde connaissance de l'Histoire, et sa haute
raison :
« Les Romains, il faut le dire, comparés aux
)) Grecs, ne furent jamais que des saunages civilisés,
(1) Sur la Répub. de Ciceron, t. n, p. 91,
�— io8 —
))
))
»
))
))
des barbares pleins d'un admirable talent d'imitation, instruits à force d'art dans une urbanité
qui ne passait pas jusqu'au fond de leurs mœurs,
et qui polissait leur langage sans humaniser leur
nature. ))
Tertulien va justifier l'exactitude de l'appréciation.
Il nous fait assister à une représentation du
Cirque, d'assez longue durée. La nature avait ses
exigeances au Théâtre comme ailleurs ! Sic evenit,
ut qui in publico, vix necessitate vesicce tunicam levet,
idem in Circo aliter non extollet nisi totum
pudorem in faciem omnium inlentet ! ! !
Ces exhibitions écœurantes et habituelles, empêchèrent certains Empereurs d'assister aux spectacles; ce sentiment de dégoût leur fait honneur.
Et ces Sauvages auraient civilisé les Gaules ( i ) ! !
— CHARONDAS — INSTRUCTION GRATUITE
ET OBLIGATOIRE — SERVICE OBLIGATOIRE —
ASSISTANCE GRATUITE.
§ 12'
Combien de nos lecteurs seront étonnés d'apprendre que, hier encore, nous empruntions à la
Grèce les Institutions généreuses dont notre
troisième République se montre si légitimement
fi ère.
(i) Voir aux Annexes.
�— 109 —
Ecoutez plutôt.
Après la destruction de Sibaris par les Crotoniates, une Colonie Grecque vint bâtir une
nouvelle Ville près delà fontaine de Thuris (i),
et choisit Charondas pour lui donner des Lois
(444 ans avant J.-Ch.). Citons-en quelques-unes.
Il exclut de toute fonction publique celui
qui donnait une belle-mère à ses enfants. Est-il
nécessaire de demander l'origine de la Coutume des
Charivaris contre les voeufs remariés??
Il confiait les biens de l'Orphelin à la famille
paternelle, et sa personne aux parents de la mère;
sage précaution que les législations postérieures
ont eu le tort de ne pas prendre. Il rendit l'instruction gratuite et obligatoire; obligatoire aussi le
service Militaire : celui qui refusait de porter les
armes, ne subit pas la peine de mort, comme dans
la plupart des Républiques de son temps; il
l'exposait sur la place publique en habits de femme.
Le Législateur avait compris que la mort est
moins pénible que le déshonneur : Obligatoires
encore les soins à donner aux malades, les médecins
étant devenus des fonctionnaires payés par le trésor
Public, comme les Pédagogues.
(1) Diod. Sic, lib. 12, § 6, etc., etc., aujourd'hui Torre
Bodognato.
�— 110 —
Ainsi, instruction gratuite et obligatoire, service
obligatoire, médecine gratuite, voilà ce qu'un
Législateur Grec avait institué deux mille trois
cents ans avant la troisième République Française.
Et nunc erudimini.
Nous appelons de tous nos vœux au Ministère de
l'Instruction Publique, un Jurisconsulte soucieux
des progrés de la science des Lois. Il n'hésiterait
pas, s'il était éclairé, à créer une chaire spéciale
à l'Etude des Institutions de la Grèce, si purement
démocratiques. Elle serait au moins aussi féconde
que ses voisines du Droit Romain.
Ai-je besoin de justifier ce long chapitre? Il est
clair que si nous avons suivi, depuis les temps
préhistoriques, les Institutions et les Coutumes
Celto-Grecques, la cause n'en peut être ailleurs,
que chez nos aïeux; elles nous appartiennent
comme le sang qui coule dans nos veines; et nous
avons conservé pieusement ce précieux héritage.
Cette fidélité inaltérable aux Traditions immémoriales, témoigne de leur antiquité d'abord; de plus
qu'elles donnaient satisfaction aux besoins, aux
croyances, aux délicatesses d'un Peuple resté luimême depuis des milliers d'années.
Et ce Peuple aurait oublié sa Langue et ses Institutions pour adopter celles d'un conquérant détesté,
cinq ou six cents ans après son expulsion du sol
�qu'il couvrit de meurtres et de ruines ! ! ! Ce choc en
retour peut amuser des Académiciens, et nous valoir
les ingénieuses découvertes de leur imagination
féconde.
Mais ils auront beau faire, on ne supprime ni
l'Histoire, ni le bon sens, même avec les complicités
Officielles.
��CHAPITRE VI
DESTINÉE DE NOS DIALECTES APRÈS CÉSAR
PREUVES
juridiques
— § i"
DE LEUR CONSERVATION ININ-
TERROMPUE JUSQU'AU VI' SIÈCLE — § 2 PREUVES
historiques DE LEUR CONSERVATION JUSQU'À LA FIN
DU xc SIÈCLE — SAINT IRÉNÉE — SIDOINEAPOLINAIRE — SULPICE-SÉVÈRE — LES CONCILES,
ETC.,
ETC.
—
§3
RAPPORT
GRÉGOIRE A LA CONVENTION
AU
DE L'ABBÉ
NATIONALE
(1794)
NOM DU COMITÉ DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE.
AVEUX PRÉCIEUX
— § 4 Ou
—
RAISONNEMENTS SINGULIERS
NOUS EN
SOMMES
—
LES DIALECTES
GAULOIS PLUS QUE JAMAIS VIVANTS REVENDIQUENT
LEURS DROITS.
????
Nous espérons, après ce qui précède, qu'il ne sera
plus contesté, qu'avant l'intervention Germanique,
deux influences avaient agi successivement sur les
Gaules.
Les Grecs, les premiers en date, s'étaient mêlés et
8
�— ii4 —
confondus fraternellement, à une époque immémoriale, avec la population indigène. Ils lui apportèrent
avec ses Institutions civiles et religieuses une très
large contribution dans le Vocabulaire de ses Dialectes définitivement constitués; et le temps a vainement essayé sur eux ses expériences destructives.
Quand arrivèrent les Lieutenants de César, la
place était absolument prise; la langue CeltoGrecque et l'écriture fonctionnaient comme
monnaie courante et Nationale. Le Latin ne
pouvait plus jouer qu'un rôle effacé, accessoire,
surtout si on tient compte des brutalités de la
conquête.
En effet, quelle fut sa conséquence immédiate
et dès le temps d'Auguste? La constitution de la
grande propriété au profit des envahisseurs, ou de
leurs rares complices traîtres à leur pays. Le
cultivateur dépossédé, réduit à l'état de Colonus,
engage sa personne et ses biens à un maître,
moyennant un abri, la vie sauve, et une bouchée
de pain noir pour lui et sa famille (i). Attaché à la
glèbe, inséparable du fond de terre, il en suit la
condition quand il est aliéné. L'Etat ne se souvient
de lui que pour lui arracher un impôt personnel
(i) Sur cette question, voir l'Essai hislor. sur le Colonaten
Gaule. F. Blanc. Blois, Géraud, 1866. Il indique les sources
et cite les textes.
�la Capitation qui deviendra plus tard le prétexte à
des extorsions révoltantes. Dioclétien supprimera le
droit de propriété à son préjudice, en lui interdisant
de disposer même de son pécule, qui devra appartenir exclusivement au maître. Constantin aggrave
encore cette situation avilie.
Si le Colon veut échapper, par la fuite, aux
exigences ou aux vexations d'un tyran trop cruel,
celui qui l'aura recueilli devra rendre le fugitif
à sa terre, et payer une indemnité à son maître.
De plus le Colon est frappé d'incapacité de porter
les armes, d'occuper une fonction publique. Il lui
sera interdit par Valentinien d'entrer dans le Clergé,
ou d'aspirer aux Ordres sacrés. La plupart de ces
Institutions, bien dignes de la Rome triomphante
assurément, furent appliquées dans la Gaule du Nord
jusqu'au xvmc siècle, date à laquelle Voltaire stigmatisait ceux qui s'en prévalaient encore (i).
(i) En prenant le Ministère des Finances en 1776, Necker
trouva le main-mortable encore soumis au droit de tènuement; ce qui veut dire, que le Serf ne dispose ni de sa personne
ni de ses biens. Voulait-il, en effet, aller s'établir en pays
franc, en sacrifiant au profit du Seigneur tout ce qui lui appartenait : grâce au droit de suite, son maître le replaçait en une
servitude plus dure que la première. Par un Edit de 1779,
Necker n'osa supprimer l'Institution que dans les domaines
Royaux seulement. La Constituante acheva l'œuvre de réparation. Et voilà comme les Romains avaient apporté la Civilisation dans les Gaules.
�— i r6 —
Ainsi le malheureux Gaulois vécut opprimé sous
le poids d'un esclavage abominable, mal dissimulé
sous un nom hypocrite.
Les Néo-Latins nous prouveront certainement,
que tandis que les Législations successives s'attachaient à dégrader les Conquis de plus en plus,
ses Vainqueurs s'empressèrent de mettre à leur
disposition des Professeurs de Latin! !!!
Admettons, si l'on veut, cette hypothèse ridicule;
elle serait inutile. En effet, à cette heure encore,
notre jeunesse lettrée consacre huit années à
l'étude ingrate de cette langue enseignée cependant
avec art et méthode. Combien sont-ils, non pas qui
la parlent, mais qui puissent en expliquer
seulement les Auteurs à livre ouvert? Et les
Gaulois, réduits en un esclavage implacable
comme celui des Ilotes, l'auraient apprise et adoptée avec empressement, prompts à oublier, par
reconnaissance sans doute, la langue maternelle, la
langue de la liberté ! Non. cent fois non. Le Gaulois
garda sa langue, et dès qu'il eut reconquis un peu
de son indépendance, il reprit ses Institutions et ses
Coutumes parfaitement reconnaissables encore
dans nos Provinces d'Aquitaine.
Où donc ces MM. ont-ils étudié la nature
humaine? Pas assurément dans la Gaule Méridionale. Au xme siècle les épreuves recommencent
�— 117 —
atroces, comme en pleine barbarie. Malgré des proscriptions et des violences inouïes, elle a gardé la
langue des aïeux, et la cultive plus que jamais avec
amour.
Les Légions victorieuses pouvaient ravager une
Province, brûler les Villes, détruire quelques
Forteresses, réduire les vaincus à l'état de bêtes de
somme : maisl'anéantissementd'unelanguesuperbe
et opulente échappait à l'action violente de Mars,
Dieu des Armées.La force est impuissante à les changer. Elle a besoin de l'adhésion spontanée du peuple : et on n'en trouve pas d'exemple dans les Archives de l'histoire, parce qu'elle n'est pas possible.
D'autre part, quel intérêt les Conquérants,
avaient-ils à supprimer la langue d'esclaves auxquels ils ne demandaient que l'obéissance passive,
le travail servile et ses profits dont ils lui abandonnaient, bien juste, de quoi ne pas mourir de faim.
Toutes les folies ont traversé les cerveaux
déséquilibrés des Césars. Mais nous n'avons
jamais vu nulle part qu'ils aient essayé de soumettre l'Univers à l'usage d'une langue unique.
L'histoire aurait-elle omis d'enregistrer cette entreprise irréalisable? Qu'on nous dise alors, pourquoi
les Gaulois de France, d'Espagne et d'Italie,
auraient été condamnés par exception à renoncer
à leur Diàlectes? Quoi! Seuls dans tout l'Empire!
�— m —
Où en est la cause ? ? Où en est la preuve ? De quels
textes résulte-t-elle? Où sont les Senatus Consultes, les Edits, et les actes d'exécution?
Ils durent subir le Latin comme langue
Administrative ou Juridique, rayonnant également
sur toutes les Provinces de l'Empire. Des Interprètes nombreux résidaient dans chacune d'elles pour
faciliter les relations, soit avec les habitants, soit
avec la Métropole, sans rien de plus; affirmation
la plus claire de la persistance des langues
Nationales, après les conquêtes. Et nous en
trouvons la preuve dans cette circonstance, que
Claude raya de la liste des Juges un Magistrat des
plus considérables de la Grèce parce qu'il ne savait
pas le Latin !
Splendidum virum Grcecice que Provinciœ principem (i). Fut-il le seul de son espèce? Nous ne le
pensons pas; mais il dut sa destitution à l'élévation
de ses Jonctions incompatibles avec son ignorance
de la langue Officielle.
D'autre part, Aulu-Gelle (2) raconte qu'un
Avocat plaidant à Rome pour un très pauvre
Chevalier, le montrait mangeant du pain de son,
(apludae), et buvant du vin corrompu (fioces).
Les auditeurs prenant ces mots barbares pour
(i) Suet. Claud, § 16.
(3) Lib. 11, C. vu.
�— Hg —
Toscans ou Gaulois (Tuce aut Gallice) éclatèrent
de rire.
Il existait donc vers le milieu du ne siècle, une
langue Latine d'abord, et tout au moins les deux
précitées; la première Italique, la seconde Gauloise,
sans compter les autres; nous allons les voir, grâce
aux nécessités sociales, monter à l'assaut du Latin
Officiel; et les dérogations se produire successivement au profit des Dialectes Provinciaux.
Citons d'abord celle qu'obtenait Ulpien (i) au
commencement du me siècle, dans l'intérêt de la
partie secrète des testaments : Fidei-commissa
QUOCUMQUE sermone relinqui possunt; non
solum Latina Vel Graeca lingua, sed etiam et
PÚNICA vel GALLICA, vel ALTERIUS CUJUS
GENTIS. Qui donc oserait limiter la généralité de
la dernière disposition?? En tous cas, nous
sommes désintéréssés dans l'Interprétation, le
GAULOIS se trouvant précisé par son nom dans
le texte.
Voilà une loi authentiqne, établissant : i° Qu'au
commencement du 111e siècle les Peuples conquis
avaient conservé l'usage de leurs langues Nationales; 2" Que les Gaulois, suivant le Droit commun,
étaient en pleine possession de celle qui leur
(i) Fidei com. Digest., lib. xxxu, § xi.
�— 120 —
appartenait;
30
Qu'elle existait si bien,
que le
Législateur concède à ceux qui la parlent la faveur de l'utiliser pour les fidei-commis; 40 Que le
Latin, peut-être en usage dans la Caste lettrée ou
Fonctionnaire, était ignoré de la masse du peuple.
Car on ne fait une loi générale que pour la généralité des citoyens; 50 Ainsi disparaît l'équivoque
familière aux Néo-Latins; et chacun reste dans sa
ligne; les Privilégiés, avec leur latinité, devenant de
plus en plus basse; et les Gaulois avec leur langue
Nationale que les Conquérants n'ont pu entamer.
Le déplacement du siège de l'Empire, établi en
plein
Orient
occupé par les peuples
de
race
Grecque, devait entraîner, comme conséquence, la
substitution de leur langue à la Latine, pour les
Orientaux tout au moins. En effet, elles sont mises
d'abord
sur
le
pied d'égalité (397). Plus
tard
Justinien s'appropriera toutes ces concessions, en
les consignant dans les Pandectes : il ira même
beaucoup plus loin; car il valide les obligationes
verborum en toutes langues (529).
Utrum autem Latina, Grœca, VEL QUALIBET
ALIA LINGUA stipulatio concipiatur, NIHIL 1NTEREST, scilicct si uterque stipulantium INTELLECTUM EJUS LINGILE HABEAT : ncque necesse est EADEM LINGUA UTRUMQUE UTI (1).
(1) Institut, lib. m, c. xvi, § 1".
�— 121 —
La disposition cette fois est absolue comme
en matière de Fidei-commis. Toutes les langues
serviront également à lier valablement les contrats,
alors même que celle employée ne serait pas
comprise par chacun des contractants. Le Latin
n'est plus que l'égal des Dialectes Provinciaux,
dans le commerce et les nécessités de chaque jour.
Où donc était, pour les Gaulois, l'urgence à
apprendre le Latin???
Voilà des textes qui échappèrent aux recherches
des Sismondi, des Raynouard, et de leurs Disciples.
Mais peut-être que l'heure de la mort fut pour
le Latin comme pour les Martyrs, celle du
triomphe???
§ 2' — PREUVES HISTORIQUES
Quelles étaient les langues de
la
Gaule au
commencement de notre Ere???
Ceux qui les surent et les parlèrent, en distinguaient deux : la Celtique et la Gauloise. Nous
avons déjà vu l'illustre Evêque de Lyon, l'une des
Gloires de notre Eglise Nationale (fin du 11e siècle),
Irénée (i) traiter la première comme un idiome
(i) Préface de ses discours citée plus bas.
�122
barbare, que l'art oratoire
ne
saurait
utiliser.
Sidoine Apollinaire, Evêque de Clermont. en
Auvergne (ivc siècle), qualifiait le Celtique, parlé
dans son Diocèse, de langue aux dures écailles,
QUE LES GENTILSHOMMES DOIVENT SE
HATER DE REJETER (i). Ils la parlaient donc
comme le bas peuple lui-même?? La distinction
est déjà bien nette. Elle va s'accentuer.
Dans le premier Dialogue sur Saint
Martin,
Sulpice Sévère, le Saluste Chrétien, originaire des
Gaules,
dont
il
connut les Dialectes
dès son
enfance (vers l'an 390), fait dire à l'un des interlocuteurs : « Quand je pense que Moi, Enfant de la
» Gaule, je vais m'entretenir avec des Aquitains,
» j'appréhende que mon langage RUSTIQUE n'of» fense vos oreilles urbanisées.
A
quoi l'autre Interlocuteur répond : « Parle
» celtique, ou, si
tu l'aimes mieux, GAULOIS,
» pourvu que tu parles de Martin !
)) Dum cogito me hominem Gallum inter Aquita» nos verba facturum, vereor ne offendat vestras
» nimium urbanas aures SERMÓ RUSTICUS ?
)) Tu vero Celtice vel si mavis Gallice loquere,
)) dum modo Jam Martinum loquaris : ainsi c'est
» bien le Celticus qui est qualifié de rusticus. Le
(1) Sermonis Celticisquammam depositura nobilitas (tit. 3,
lib. 3).
�— 123 —
premier Interlocuteur ne dit pas, qu'il craint de n'être
pas compris; il était sùr du contraire, les deux langues ayant une origine commune, etdifférant comme
deux Dialectes seulement; l'un squameux, l'autre plus
châtié; mais il craint d'offenser les oreilles urbanisées
des Aquitains : Méridionaux délicats, ils avaient
déjà éliminé de leur prononciation les écailles qui
déparaient le Celtique rusticus. Or, à cette date,
l'occupation Romaine datait de plus de cinq siècles
et devait cesser bientôt.
Nous voilà donc renseignés par Irénée, Sidoine
Apollinaire, et Sulpice Sévère, sur le Celte, la vraie
langue RUSTIQUE, à laquelle ses duretés avaient
valu son nom. Les témoignages qui précèdent ne
peuvent laisser subsister un doute à cet égard. Il
faut donc porter au compte de l'ignorance, ou d'un
parti-pris systématique, l'invention d'un Latin rustique à l'usage des populations Gauloises.
C'est bien le Celtique seul qui est rusticus et
squamosus (i).
(i)
F. Brunet, maître des Conférences à la Faculté des
Lettres de Paris, qui ne connaît certainement pas nos Langues
Aquitaniques, cite ce passage dont la traduction l'a foit embarrassé. Aussi se livre-t-il aux suppositions les plus singulières. 11 sera bien surpris d'apprendre que le Dialogue serait
aujourd'hui ce qu'il fut au ive siècle si un Auvergnat des hauts
plateaux voulait parler à des Toulousains en son Dialecte. Il
est encore et toujours Rusticus, squamosus; et les oreilles des
�— 124 —
La situation est évidente à la fin du ive siècle,
et encore au vne. date à laquelle Isidore de Séville
explique fort clairement que la population conquise
a conservé l'emploi des vocabula bàrbara et grammaticam (i), c'est-à-dire de sa langue.
Sachons si elle était changée dans les âges postérieurs. Et d'abord l'ordre adopté quelques années
après, au Concile de Tours (an 813), va nous la
montrer telle qu'elle était précédemment. Il décide
en effet : « Que les Homélies seraient expliquées
)) par les Evêques, dans les deux langues tudesque
» et rustique (Celte) afin que tout le monde put les
)) comprendre (2). »
L'Exposé des motifs de cette disposition nous
semble bien simple. La précaution ordonnée visait
le troupeau Chrétien alors bilingue par ses origines
Franke et Gauloise. Car ils auront beau faire, le
Rusticus a été trois fois défini. C'est bien le Celticus
squamosus qui d'ailleurs existe encore. Si le Latin
était la Langue du Peuple, la précaution devenait
inutile d'ailleurs.
Toulousains, comme leur Dialecte, sont urbance. Et cependant
la langue est bien la même, pour les uns et pour les autres.
Sidoine-Apollinaire reconnaîtrait encore le rusticus de ses
Ouailles. (Histoire de la langue Française, de Petit de Juleville. A. Collin, Paris. Introduction, xxiv.)
(1) Voir le texte au Chapitre III.
(2) Hist. ecclés., Fleury, liv. 46, ch
�D'autre part, G. de Cassagnac (i) a reproduit le
récit d'Albéric, moine de l'Abbaye des TroisFontaines, sous la rubrique de l'année 987.
Théodorinus, Duc des Moselliens (c'est-à-dire de
Nancy), conduisit leLégatchez son cousin leRoi des
Francs (Hugues Capet), parce qu'il l'avait reconnu très adroit dans ses réponses, habile et très
disert dans la langue GAULOISE ! ! !
Elle n'était donc pas oubliée à cette date, même
à la Cour Royale ? ? Elle était donc autre que la
langue Latine?
Il cite encore ce passage de Labbe (Consilior, t.
ix, anno 995—4 juin).
Un grand nombre d'Evêques et de Comtes se
réunissent à Mouson. Le célèbre Gerbert
archevêque de Reims y assistait. « Lorsque le
» silence fut rétabli, et que tout le monde se fut
)) assis, Aymon, Evêque de Verdun, se leva et
harangua l'assemblée en GAULOIS ... Gallice ! ! !
est-ce bien possible?? la Langue Gauloise employée
en si Noble compagnie ! !
Récapitulons ces témoignages enchaînés par
leurs dates, et qui éclairent les ténèbres de 1000 ans.
Nous sommes d'abord bien certains, avec Sulpice
Sévère, de la co-existence des deux Dialectes à la
(1) Hist. des Orig. de la langue Française, p. 50.
�— I2Ó —
e
fin du iv siècle, puisqu'il les oppose l'un à l'autre.
Non moins certains, avec Isidore de Séville et le
Concile de Tours, de l'existence du Rustique (Celte)
au commencement du ixe siècle.
Enfin, le Gaulois est encore en usage en 987, et
employé même à la Cour du Roi; à plus forte raison
dans les villes et dans les campagnes de son
Empire. Et quelques années plus tard (995),
l'Evèque de Verdun harangue un concile, GALLICE. Donc, à la fin du dixième siècle, la langue
Gauloise est encore parlée même par la classe dirigeante et lettrée. Donc les Néo-Latins ont apprécié
son Histoire comme les aveugles les couleurs.
Or, au lendemain de ces dernières dates, les
Poètes des régions Gauloises entonnent leurs
premiers chants sur leurs Idiomes Nationaux.
Il est cependant une remarque Historique si
simple, qu'elle aurait dû naître dans l'esprit des
Savants que nous combattons.
La conquête Romaine s'est étendue sur la plus
grande partie de l'Europe, de l'Asie et de l'Afrique.
La langue Latine fonctionna également partout,
comme Officielle et Jurique.
Des Colonies, des Ecoles y furent fondées, quelques-unes célèbres. On n'a jamais signalé un Latin
Rustique en Allemagne, en Angleterre, en Grèce,
dans les Provinces Asiatiques ou Africaines.
�— 127 —
Où donc serait la cause du phénomène spécial à
la Gaule ? ì
Les Néo-Latins n'ont pas voulu voir que les
Gaulois, Italiens, ou Espagnols, sont les branches
du même tronc Celto-Grec, influencées sans doute
d'une façon particulière par des événements
différents. Mais toujours fidèles à leur origine
commune, ils en ont gardé la moelle, atavique,
sans que le Latin, fabriqué après coup, par une
Aristocratie éphémère, avec les mêmes éléments,
put rien changer à la langue primitive. Notre
Dictionnaire doit faire cesser toute hésitation sur la
solution proposée.
En résumé, après la Conquête des Gaules,
comme aujourd'hui, la Caste privilégiée apprit et
parla peut-êtreleLatin, langue savante qu'elle avilit,
mais sans que le Peuple en eût jamais rien su.
Devenue le Verbe du Sanctuaire, seul Orthodoxe
dans la bouche du Sacerdoce, nos paysans allèrent,
comme ils vont encore, écouter pieusement la
Messe récitée en Latin, mêlant leurs voix au
chant des hymnes, qui sont de l'Hébreu pour eux.
Ils parlaient alors, comme ils avaient parlé depuis
plus de mille ans, comme ils parleront dans l'avenir,
notre cher Gaulois, fils du sol, miroir fidèle de son
âme audacieuse, impressionnable, et de son tempérament énergique et tendre tout ensemble.
�— 128 —
§ 3* — RAPPORT DE L'ABBÉ GRÉGOIRE
A LA CONVENTION (1794)
Dés le v' siècle, Rome n'a plus grand'chose à
voir dans les Gaules : Elles n'ont pas cessé de
parler leur langue Nationale. Et les Romains,
plus méprisés encore que vaincus, impuissants
à les défendre d'ailleurs, auraient opéré la fameuse
transformation lorsqu'elles obéissaient déjà à de
nouveaux Maîtres d'origine Germanique.
C'est après leur expulsion définitive qu'ils établirent cette preuve de leur passage ! !
Ces solutions fantaisistes, en opposition formelle
avec la raison, plus encore qu'avec l'histoire, ne
sont pas admissibles.
Des Conquérants barbares fondaient de nouveaux royaumes avec les Provinces de l'Empire
détruit.
Les pays qui viennent de changer de Maîtres, et
notamment, l'Espagne, la Gaule, et l'Italie, également peuplées d'hommes de sang Gaulois, avaient
conservé l'usage de leurs Dialectes nationaux, forts
nombreux, sans prépondérance marquée de l'un
d'eux sur ses voisins.
D'autre part, les nouveaux venus portaient avec
�— 129 —
eux une langue barbare rudimentaire, absolument
inconnue de leurs sujets de fraîche date.
Or, un Etat, quel qu'il soit, doit être administré,
et il a besoin d'une langue légale rayonnant dans
toute son étendue.
Le Latin, en possession de ce rôle depuis des
siècles, devait le garder en s'effritant de plus en
plus contre le granit Gaulois; il ne pouvait pas en
être autrement, grâce d'ailleurs à l'influence du
Clergé si profondément Romain.
Mais un jour vint où le Dialecte de l'Ile de
France, monta, comme un soldat de Fortune, au
rang suprême de langue Nationale.
Que MM. les Néo-Latins nous permettent ici
d'insister sur un fait puisé dans notre propre Histoire.
Il est autrement probant que leurs syllogismes et
leurs Dictionnaires Etymologiques, trop souvent
baroques.
Dès les premières années du treizième siècle, la
langue Française avait pris un tel développement,
que même les lettrés étrangers la préféraient à toute
autre. Elle sera adoptée plus tard par la Diplomatie, et par la Caste bien élevée de toute l'Europe.
Le Latin n'eut jamais de plus grands succès (i).
(i) « Car tout ainsi quand une Dame auroit acquis la repu» tation d'estre parfaicteet accomplie en tout ce qu'on appelle
» sa bonne grâce, celle qui approcheroit de près de ses façons
9
�Or, à la date du 4 juin 1794, dans un Rapport
présenté à la Convention (1) par l'Abbé Grégoire,
au nom de la Commission de VInstruction Publique,
se trouve la statistique suivante :
« Il n'y a qu'environ QUINZE départements de
)) l'intérieur (sur 83), où la langue Française soit
)) exclusivement parlée, encore y éprouve-t-elle des
» altérations sensibles soit dans la prononciation des
» mots, soit par l'emploi des termes impropres et
» surannés, surtout vers Sancerre, où l'on retrouve
» une partie des expressions de Rabelais, Amyot et
» Montaigne (c'est-à-dire Gauloises).
» Nous n'avons plus de Provinces, et nous
)) avons encore TRENTE PATOIS, qui en rappel» lent les noms ! !
)) On peut assurer sans exagération, qu'au moins
)) 6,000,000 de Français, surtout dans les Campagnes
)) ignorent la langue Nationale : qu'un nombre égal
»
»
»
»
auroit le second lieu : ainsi ayant tenu pour confessé que la
langue Grecque est la plus gentile et de meilleure grâce
qu'aucune autre, et puis ayant monstré que le langage
François en suit les jolies, gentiles et gaillardes façons
H de plus près qu'aucun autre : Il me sembloit que je pouvois
» faire seurement ma conclusion, qu'il méritoit de tenir le
» second lieu entre tous les langages qui ont jamais esté, et .
« le premier entre ceux qui sont aujourd'hui. » (Hen. Estien.,
Le Précellence..., Ar. Colin, Paris, 1896, p. 34.)
(1) Inséré au Moniteur du 6 juin 1794.
�—
»
»
))
»
))
i3i
—
.
est incapable de soutenir une conversation suivie;
qu'en dernier résultat, le nombre de ceux qui la
parlent purement, n'excède pas y.000,000, et
probablement le nombre de ceux qui l'écrivent
correctement est moindre ! !
Or, à cette date, lapopulation s'élevait au nombre
de 25,000,000.
» Ainsi, avec TRENTE PATOIS différents, nous
» sommes encore pour la langue à la Tour de
» Babel, tandis que pour la Liberté nous sommes
» à l'avant-garde des Nations. ))
Voilà donc le chemin parcouru après cinq siècles
de la création de la Langue Nationale, d'origine
bien authentiquement Gauloise, et nous tenant aux
entrailles comme notre fille légitime. 11 rappelle
que le 14 janvier ijgo l'Assemblée Constituante
ordonna (( que ses Décrets seraient traduits en Langue vulgaire. Pourquoi cette précaution? Parce
qu'elle était seule comprise de la très grande
majorité de la Nation. Mais il ajoute : « Le Tyran
» n'eut garde de faire une chose qu'il croyait utile
» à la Liberté!!! » (Malheureux Louis XVI et
pauvre Grégoire...)
Où donc est la raison de cet échec colossal du
Français ? le Rapporteur nous la livre sous forme
d'objection. « Pensez-vous, m'a-t-on dit, que les
» Méridionaux se résoudront facilement à quitter
�.
-~ 132 —
»
»
»
»
»
»
))
))
))
))
»
»
une Langue qu'ils chérissent far habitude et par
sentiment. Leurs Dialectes, appropriés au Génie
d'un peuple qui pense vivement, et s'exprime de
même, ONT UNE SYNTAXE où l'on rencontre
moins d'anomalies que dans notre langue : par
LEURS RICHESSES ET LEURS PROSODIES ECLATANTES, ils rivalisent avec la
douceur[de l'Italien, et la gravité de l'Espagnol:
et probablement, au lieu de la langue des
Trouvères, nous parlerions celle des Troubadours,
si Paris, le Centre du Gouvernement, avait été
situé par de là la Loire ! !
Que va-t-il répondre à ce coup droit terrible;
il comparera d'abord, et assurément fort mal à
propos, Dastros et Goudoulin, dont il n'a pas lu un
seul mot, à Pascal et Fénélon (1), deux Poètes à
deux Philosophes. Puis il déclare que l'Europe a
prononcé sur cette langue qui, tour à tour embellie
par la main des Grâces, insinue dans les cœurs le
charme de la vertu, et qui, faisant retentir les accents
de la liberté, porte l'effroi dans la TANNIÈRE
DES TYRANS.
(1) L'abbé Grégoire ne prit pas garde que Pascal venait
d'Auvergne, et Fénélon du Quercy. Les deux maîtres par lui
choisis étaient donc d'origine Aquitanique, comme Dastros de
Gascogne, et Goudoulin, de Languedoc.
Il a manqué un nom à sa citation : celui de Montesquieu,
de Guyenne.
�— 133 —
Voilà certes une période superbe! Mais elle
laissera froid un Logicien qui vécut de syllogismes
pendant un demi-siècle. Déclamer n'est pas
répondre. Et l'objection reste entière; car en
linguistique comme en amour, celle qui plaît est la
la plus belle. Or un argument, même très solide, est
impuissant à détacher l'amoureux de celle qu'il
aime. Que pouvait-ii donc espérer de ses artifices
de Rhéteur.
Il s'en défie bien un peu, et il ajoute :
« Ne faisons pas à nos frères du Midi l'injure de
)) penser qu'ils repousseront aucune idée utile à la
» Patrie. Ils ont abjuré et combattu le Fédéralisme
» politique; (Il ne faut pas trop s'y fier.) ils
» combattront avec la même énergie leurs préfé» rences pour ces Idiomes ! ! ! »
Les Méridionaux ont cru remplir leur devoir
envers la France, en apprenant sa Langue
Nationale. Elle ne peut pas exiger davantage. Ils
sont et seront bilingues, quoi qu'on fasse; le
sentiment est ici décisif, malgré l'affirmation de
l'Abbé Sans-culotte. Il a pris soin d'ailleurs d'établir lui-même que les Belles Lettres Françaises
n'avaient rien à y perdre.
En veut-on une nouvelle preuve ? Jasmin, l'un
de nos grands Poètes Gascons, la produisait
saisissante, lorsqu'il disait dans sa belle Ode
�— 134 —
adressée au Ministre de Louis-Philippe, Dumont,
adversaire décidé de nos Idiomes, quoique
Agenais :
» Rapela-bous Moussus Lacueyo è Lacepedo,
» Que quand fusqueron bieils, al se de la grandou,
» Nou poudionestehuroux qu'en se parla Gascou (i).
Lacuée, l'ami fidèle du Grand Carnot, et membre
de l'Institut; Lacépède, l'élève préféré de Buffon,
son continuateur, et l'héritier de sa gloire,
appartenait aussi à l'Institut comme son compatriote et ami Lacuée. Deux Académiciens : proh
pudor!! Leurs cœurs de vieillards entretenaient
une amitié demi-séculaire au foyer du Verbe
maternel inoubliable; l'amour du pays et de sa
langue, étant la qualité maîtresse des Méridionaux
de tout rang et de tout état.
Nous demandons d'abord aux Néo-Latins :
pourquoi
l'objection du rapport de Grégoire,
irréfutable pour les Gascons de 1794, n'aurait-elle
pas eu la même valeur pour les Gaulois leurs
aïeux? Certes, ils défendirent leur indépendance
avec héroïsme pendant dix longues années, contre
les armées les plus redoutables du monde,
(1) Souvenez-vous de MM. Lacuée et Lacépède qui, lors
qu'ils furent vieux, au soir de la grandeur, ne pouvaient être
heureux qu'en se parlant Gascon.
�— 135 —
commandées
l'Histoire.
par
Leur
le
plus
Langue
grand
Capitaine de
n'aurait-elle pas
été
appropriée au génie de ceux qui la forgèrent à leur
usage ? Ne valait-elle pas leurs préférences et leur
affection? Leur Prosodie devait-elle fléchir devant
celle des Latins, hérissée de dificultés, d'anomalies?
Les procédés des Vainqueurs pouvaient-ils décider
les vaincus à des sacrifices spontanés, surtout au
plus pénible??
Au treizième siècle, lorsque le Nord se précipita
sur les Provinces d'Oc, plus brutalement que les
conquérants les plus féroces, il voulut anéantir
leurs libertés sans doute, mais surtout leur langue
qu'il
accusait d'être
Heredjo
(i);
elle
n'avait
que le tort de servir d'instrument à une Civilisation supérieure à la sienne, et de lui abhorrée.
Or, en 1539, François Ier, suivant l'exemple de ses
prédécesseurs, en était réduit à nous imposer la
langue de Paris par Ordonnance, tout au moins
dans les actes Officiels. Et malgré les Edits Royaux
souvent renouvelés, nous connaissons par le Rapport de l'Abbé Grégoire la mesure des succès
obtenus.
La petite patrie
dépend de la grande,
notre
France glorieuse et bien aimée, comme le Commu-
(1) Hérétique.
�— 136 —
nier de son village, ou le Soldat de son régiment. Que dirions-nous d'un Colonel contraignant ses hommes à renier leurs mères, pour
prouver leur dévouement au drapeau ! ! Notre Aima
Mater, la Terre Gasconne, a conservé son Histoire
personnelle, ses Coutumes naïves et charmantes, sa
Langue originale, ses Traditions ataviques, et les
gardera longtemps encore comme un précieux
héritage de famille.Tous les guerriers du Nord, aidés
par tous les pédants, sans en excepter les cuistres,
en les supposant aussi ignorants que prétentieux,
n'effaceront pas des souvenirs ou des sentiments
vingt-cinq fois séculaires.
Quelques esprits atteints d'une timidité réelle
ou affectée, semblent s'alarmer de nos efforts pour
sauver nos Dialectes, et faire revivre les OEuvres de
nos Ecrivains Nationaux. A les entendre, le but
secret de ces entreprises serait le démembrement de
la France : nous voulons nous rendre indépendants
et vivre d'une vie particulière, au préjudice de
l'Unité qui a fait la grande Patrie forte et glorieuse.
Nous prennent-ils donc pour des imbéciles ? Ce
serait la première fois que nous serions l'objet d'un
pareil soupçon.
Nous avons appris à l'école de l'Histoire, qu'un
peuple émietté devient bientôt la proie des voisins
puissants. Nous ne tendons pas encore les bras
�— 137 —
aux chaînes de la Conquête. Nous nous résignerons
de moins en moins à perdre les avantages de la
Patrie une et indivisible, et à délaisser la large part
de son honneur et de ses gloires que nous avons
payée de notre sang et de notre génie. Mais l'unité
riestpasl'absorbtion, l'abdication de toute initiative,
l'asservissement réel, sinon apparent. Nous revendiquons les libertés Provinciales. Le groupe Aquitanique, composé de 15,000,000 de bons Français,
ne veut plus être comme un bâton ou comme un
cadavre, ferinde ac cadàver, aux mains des intrigants, pour rester Parlementaire, qui trônent en
maîtres souverains sur les ronds de cuir de la
Centralisation. Assez de JacobinismeMonarchique,
Impérial ou Républicain. Nous sommes les Soldats
de la liberté, aujourd'hui comme au treizième
siècle. Nous la voulons dans la mesure de la justice
et de la sécurité Nationale; et nous finirons par la
conquérir. Le Despotisme bureaucratique peut seul
s'alarmerde nos prétentions légitimes; etvoilà pourquoi la question de la Décentralisation est aujourd'hui reprise plus ardemment que jamais. Et elle
sera résolue; car si la Convention tendit les ressorts
du Gouvernement jusqu'à les rompre, elle eut pour
excuse les nécessités du moment. L'effet ne doit
pas survivre à la cause.
L'Abbé Sans-Culotte, et grand ami des Juifs, qui
�-md'ailleurs devait plus tard porter la livrée Sénatoriale, ne pouvait pas clore décemment son rapport,
sans nous montrer le Clergé et la Féodalité associés
pour épaissir les ténèbres sur les yeux du peuple, et
lui barrer l'accès du Sanctuaire de la liberté : le
premier dans un intérêt de Domination, le second
pour le salut de ses Privilèges surannés. Ainsi
parlait un Jacobin violent qui contribua pour sa
très large part à l'organisation du pire des despotismes, et dont la France n'est pas guérie depuis
un siècle. Il ignorait d'ailleurs que jamais dans le
Midi, pays de Droit Hellénique, ne fut admise la
vieille maxime Coutumière : nulle terre sans
Seigneur.
§ 4= — OU NOUS EN SOMMES
Si M. l'Abbé avait dressé le compte exact de nos
Patois, il en aurait trouvé non pas trente mais plus
du double. Un siècle s'est écoulé depuis 1794, et
ces patois sont plus que jamais vivants. Les efforts
d'un enseignement puissament dirigé, ont été
réunis pour effacer ces Dialectes charmants, échos
lointains de la Tribu primitive.
Qu'en est-il résulté ? Qu'ils se sont mis en
défense sans que le Clergé s'en mêle, plus que
�— 139 —
la Féodalilé défunte. Voyez leur situation à cette
heure !
Jamais, à aucune époque, ils ne se sont montrés
avec des allures plus fières, plus belliqueuses,
soutenus par des Sociétés puissantes, dirigés par
des Poètes, quelques-uns illustres, et des Prosateurs
renommés, défendus par des Revues et des
Journaux innombrables. Et ils nous disent : Je
produis de beaux vers, et une prose harmonieuse,
un public de plus en plus nombreux nous applaudit
et nous parle dans les cinq parties du monde; donc
je suis; et les voilà, non seulement faisant obstacle
à l'absortion dont on les menace, bien inutilement
d'ailleurs, mais revendiquant leur place au soleil
de l'Enseignement Officiel. Tels nous sommes
depuis six cents ans aux prises avec une langue
superbe, et bien Gauloise, Dieu merci; et les Romains, nos ennemis abhorrés, sur un signe de leur
volonté, qui, d'ailleurs, ne fut jamais prouvé,
auraient anéanti nos Dialectes Nationaux, avec non
plus de difficulté qu'ils n'en éprouvèrent à voler l'or
des Temples de Toulouse.
Miroirs fidèles du sentiment, de la pensée, et du
génie des peuples leurs créateurs, les langues participent de leur nature, et sont impérissables comme
eux. L'évolution n'est pas la mort, mais bien la vie
sous une autre forme. Voilà ce que l'Abbé Grégoire
�— 140 —
semble avoir ignoré; voilà pourquoi il n'a pas
répondu à l'objection consignée dans son Rapport;
et tout autre n'aurait pas été plus heureux. Ne
nous lassons pas de répéter la très juste observation
de Denis d'Halicarnasse : un peuple qui garde son
territoire ne perd jamais sa langue; elle se modifie
sous l'action du temps, mais en adhérant au sol
comme la lèpre à la peau. Et la Gaule en offre un
saisissant exemple. Proie des Conquérants et des
envahisseurs de toute origine pendant près de
1,000 ans, elle se ressaisit enfin, suit ses Coutumes
ataviques, et parle encore sa vieille Langue aux
allures transformées sans doute, et cependant
identique dans sa Grammaire comme dans ses
autres éléments essentiels, à celle de son Héros
Vercingétorix.
V
�CHAPITRE VII
% %
RÉSUMÉ ET CONCLUSION DE LA PARTIE
HISTORIQUE
? f? ?
Nous avons essayé d'établir que notre Gascogne,
appelée d'abord Armorique (al^vpo;, eau salée), et
plus tard Aquitaine
(Aiya-ravta,
pays de l'eau), avait
reçu des Colonies Grecques, mille ou peut-être
quatorze cents ans avant l'Ere Chrétienne.
Les premières abordèrent dans le bassin de l'Océan
avec les Doriens d'Hercule; et les secondes, dans
celui de la Méditerranée, avecles PhocéensdeProtis,
mais toujours en amies; et des territoires leur furent
volontairement abandonnés par les Aborigènes
�— 142 —
avec lesquels les nouveaux venus ne tardèrent pas à
se confondre.
11 arriva, ce qui était inévitable, que les Grecs
disposant de la plus belle des langues, d'une écriture simple, d'une Civilisation relativement avancée,
exercèrent une influence considérable sur le Vocabulaire, sur les Institutions, et sur les Mœurs des
Celtes, encore à l'état primitif, et leur imposèrent
leur empreinte indélébile.
Les siècles avaient définitivement consacré les
effets de la fusion des deux races, lorsque les légions de César débordèrent sur les Gaules. Nous
avons vu les Grecs arrivant en amis et la main
tendue : L'invasion, cette fois, sera celle de soldats
grossiers, pillards, féroces, avides d'esclaves et de
butin, faisant subir aux vaincus toutes les horreurs
d'une conquête violente, impitoyable. Les révoltes
incessantes qui en furent la suite, témoignèrent
suffisamment des sentiments inspirés aux Gaulois
par leurs nouveaux maîtres.
Dès l'année 417, les Visigoths les chassèrent de
la Gaule Méridionale. Ils y fondèrent une Monachie
qui s'étendit jusqu'en IBERNIE (1) ou Espagne.
C1) Le nom à'Ibernie a-t-il été porté en Espagne par une
Colonie Phénicienne, Carthaginoise, ou de toute autre ori-
�— 143 —
Leur Empire éphémère disparut lui-même sous le
flot de nouvelles invasions.
Mais après l'expulsion définitive des Romains, la
Gaule parlait encore deux langues, ou, plus exactement, le Celtique et le Gaulois, deux Dialectes
d'une origine commune. Ils résistèrent donc l'un
et l'autre à l'influence de la Conquête Latine malgré
les cinq siècles de sa durée.
Le Celtique persista au moins jusqu'au neuvième siècle, et le Gaulois jusqu'au dixième, puisque
des actes authentiques nous les montrent encore
en usage à ces dates.
gine, antérieurement à la venue des Celtes? ou bien a-t-elle
dû ce nom à sa situation Géographique?
O. Sulivan {Mande. Poésies des Dardes, p. 57, à la note)
nous fait savoir qu'il y eut des Iberi au Sud de l'Irlande, et
voici la raison qu'il en donne :
Hannon, Général
Carthaginois, après avoir franchi les
Colonnes d'Hercule, fixa pour limite de ses Conquêtes Chernaa, qui signifie dernière habitation. Supprimez le C, il reste
Heme ou Jeme, premier nom de l'Irlande.
Le savant Bochard le dérive d'Ibernae, dont le sens esi
conforme à l'étymologie Phénicienne. Le Promontoire nommé
par Strabon Jeme est situé à l'Ouest, sur la cote la plus éloignée d'Espagne, qui, elle-même, porta ce nom. Elle le dut à
sa situation, parce qu'elle était la dernière terre connue dans
cette direction; Iberi, Celtiberi, habitant l'extrémité du monde
alors connu.
�— i44 —
Mais certains Néo-Latins veulent nous faire
admettre que l'évolution vers le Latin fut ajournée
jusqu'au onzième siècle, date à laquelle il aurait
émergé, comme d'une boîte à surprises, assez puissant pour détruire le vieux Verbe Gaulois.
Or, depuis le cinquième siècle jusqu'au diziême,
l'Aquitaine fut un grand chemin sur lequel se
succédèrent les Goths, les Burgondes, les Germains, les Sarrasins, sans compter les Normands
pillards et ravageurs. Tous ces peuples parlaient
des langues différentes du Latin. A des guerres sans
fin succédait l'anarchie tout aussi funeste. Qu'on
nous montre donc l'agent mystérieux travaillant au
profit de cet enfant du miracle, jusqu'à son prétendu
triomphe définitif dans ces épouvantables désordres ?
Quoi ! ! Cinq ou six siècles d'incubation latente,
dans ce pays bouleversé, au profit de la langue
d'un conquérant jadis odieux et bien définitivement oublié !!! Mais la Philologie serait-elle exclusive des simples notions du bon sens?? Oui, les
Lettrés, les Clercs, les Fonctionnaires, se servirent pendant ce long espace, d'une de plus en
plus basse latinité dans les Ecoles de Toulouse,
�— 145 —
dans leurs Couvents, ou dans leurs Chartes :
mais était-elle parlée sur nos montagnes, dans
nos forêts, et den las Coumos de l'Aquitaine??
Pas
d'équivoques,
ce moyen des
mauvaises
causes.
Après avoir résisté à la conquête Latine, nos
Dialectes résistèrent aux invasions Gothique, Germanique et Sarrasine. Ainsi la Gaule Méridionale
garda sa langue Nationale, si riche et si originale,
toujours reconnaissable malgré les Conquérants et
les envahisseurs successifs.
Ce n'est pas tout. Au treizième siècle, les hommes du Nord se jetèrent sur le Midi, féroces comme
les barbares venus des Palus Méotides. Ils s'en
prirent spécialement à nos chers Dialectes, châtiés,
harmonieux, qu'ils accusèrent d'être les serviteurs
dévoués et dangereux de l'Hérésie Albigeoise : Et
les calomniés triomphèrent de l'épreuve, d'autant
plus aimés qu'ils avaient été persécutés.
Mais dès cette époque, ils se trouvèrent aux
prises avec un ennemi bien autrement redoutable
que les armes offensives, ou les violences des
hommes de guerre : Je veux parler de la création
de la langue Française, idiome Gaulois du Nord,
�— 146 —
qui grandit jusqu'à devenir la langue Nationale
des anciennes Gaules, bientôt adoptée par la Caste
lettrée de toute l'Europe.
Que vont devenir nos modestes Rustiques sous
les coups de ce triomphateur irrésistible ? L'épreuve
durait depuis six siècles au moment où l'Abbé
Grégoire déposait son Inventaire sur le bureau de
la Convention, en 1794. Or il en résulte que nos
Dialectes avaient gardé leurs positions, accordant,
à côté d'eux, une place à peine perceptible d'ailleurs à la nouvelle venue. Qu'y a-t-il de changé
depuis 100 ans?
La langue Française a fait d'immenses progrès
dans nos Provinces Méridionales, sans que le Gaulois
ait perdu un seul de ses fidèles. Obéissant à l'appel
Patriotique du Rapporteur Grégoire, les Gascons
sont devenus bilingues, car ils tiennent à la farladaro mayralo comme à leur Soleil généreux, comme
auxTraditions les plus glorieuses de leur beau pays,
comme aux Œuvres de leurs grands Ecrivains. Jamais notre cher Rustique ne put compter sur plus
de sollicitude et d'amour : jamais armée plus vaillante ne fut rangée autour de son drapeau.
Après l'Exposé des preuves Historiques, nous
�— '47 —
proposerons celles que nous offre la Philologie
proprement dite. Et nous espérons enfin que le
Dictionnaire, contenu dans notre second volume,
et malgré ses lacunes, mettra fin à toute controverse.
��DEUXIÈME PARTIE
EXPOSÉ PHILOLOGIQUE
CHAPITRE
VIII.
—
ORIGINE
CELTO-GRECQUE
DES LANGUES MÉRIDIONALES. — ERREUR DE
SCIENCE OFFICIELLE, QUI LES DÉRIVE
LA
DU LATIN,
ÉTABLIE D'ABORD PARLA DIFFÉRENCE RADICALE DES
GRAMMAIRES
CELTE ET
LATINE.
????
Notre Gascon fut créé, au temps] ou la Légende
se confond avec l'Histoire, par le mélange de deux
éléments principaux, Celte d'abord, et plus tard
Hellénique. Dérivent-ils l'un et l'autre d'une même
langue antérieure ? Nous ne le pensons pas; car
�leurs Grammaires, base essentielle de la Communauté d'origine, sont différentes.
D'autre part, les Pélasges qui ont traversé l'histoire de ces temps reculés, comme un géant fantastique, sans laisser nulles traces de leur halte
définitive, se seraient-ils confondus en tout ou en
partie avec les premiers occupants de notre sol
Gaulois ? Celui-là serait bien audacieux qui risquerait une réponse affirmative sur cette question.
Malgré cette lacune, nous n'en sommes pas
réduits aux conjectures, ainsi qu'on a pu s'en
convaincre par ce qui précède. Notre origine, bien
authentiquement Celte, doit suffire à justifier la
Grammaire d'abord, et puis les mots si nombreux
venus de cette source. Ils ont constitué le fond
même du Gascon.
Nous nous en expliquerons spécialement dans le
Chapitre qui suit. Mais le problème dont nous poursuivons l'examen est le suivant : comment et pourquoi les mots à racine Grecque se trouvent-ils par
milliers dans notre langue Gasconne? Nous avons
essayé d'en montrer la raison historique, dans la
première partie de cette étude. Cherchons ailleurs
des preuves nouvelles, en attendant que notre Dictionnaire ait authentiqué cette ingérence Hellénique.
Nous sommes plein d'espoir que si notre démonstration semblait incomplète, nos vaillants Félibres
�— i5i —
s'attacheront à réunir les preuves qui nous auraient
échappé, pour l'honneur du pays, et pour celui de
la vérité historique et scientifique.
Il doit être compris d'ailleurs, que lorsque nous
parlons de la langue Gasconne, le mot s'entendra
lato sensu, et s'appliquera également à celle du
Languedoc, de l'Auvergne, de la Provence, du
Limousin, etc., etc., à celle des quinze millions de
Français qui, malgré des orthographes ou des
prononciations diverses, sont restés fidèles au verbe
Gaulois : et ce que nous disons de nos Dialectes,
est également vrai de l'Italien, de l'Espagnol, du
Portugais dérivés de la même source. Ainsi en
remontant à l'origine commune par les mots et les
Grammaires, nous pouvons espérer reconstituer,
au moins dans une certaine mesure, le sentiment de
la famille et de la solidarité dans la vieille race
Gauloise; et ce succès aurait son prix.
La science Officielle de l'heure présente veut
bien, pour nous honorer sans doute, reconnaître
que notre Patois germa sur la basse latinité, à
l'époque de la dissolution de l'Empire Romain, et
de l'invasion des barbares, ou peut-être à une date
postérieure de cinq siècles; car chacun a son système.
Suivant ces Patriotes, en us, la langue Française se
serait épanouie sur le même fumier.
En effet, leur groupe redoutable par le nombre
�et quelquefois par la science, a décidé que le Celte
et le Grec s'étaient absolument désintéressés de la
création de nos Dialectes et de leur développement.
A les en croire, la Grèce ne fut jamais en relations
avec les Gaules; et ils traitent de fables Patriotiques
les admirables travaux des H. Etienne, des
J. Périon, de Dom. P. Pezron et de tant d'autres
Philologues de premier ordre. Leur démonstration
irréfutable de l'affinité des deux langues Grecque et Française ne seraient qu extravagances
(sic)(i).
Quand aux deux grammaires Latine et Gauloise
si profondément différentes, ils ne s'y arrêtent
même pas : ne prenant pas garde que l'individualité,
le génie d'une langue n'est pas dans les mots qui la
composent, mais dans la façon dont elle les utilise.
Tous les sculpteurs peuvent également tailler un
bloc de Carrare; mais chacun imprimera sa per(i) Brachet, introduction. — Dictionnaire
chapitre iv, page 42.
))
n
»
»
il
»
Etymologique,
« La langue Grecque n'a rien fourni ou presque rien au
Français lors de sa formation populaire. Il ne pouvait en
être autrement. Les Gallo-Romains et les Grecs ne furent
jamais en contact : et toutes les fables patriotiques qu'ont
inventées H. Etienne, Joachin Périon et Ménage pour
démontrer l'affinité de notre langue et de la langue Grecque
ne sont qu'extravagances. »
Brachet nous semble aussi fort en Histoire, qu'en Philologie
et en politesse.
�— 153 —
sonnalité sur sa statue; ainsi du génie des peuples.
Voyons plutôt.
La Langue Gauloise et toutes celles qui en dérivent, notamment la Française, l'Italienne, l'Espagnole et la Portugaise, divisées en dialectes nombreux, prennent dans leur Grammaire commune un
cachet de famille qui les distingue radicalement de
toutes autres. Citons quelques-unes de ces particularités : i° leur substantif indéclinable s'emploie avec
l'aide d'articles ou prépositions qui en indiquent les
cas successifs, au contraire du Latin qui les individualise avec des flexions; méthode très certainement empruntée de la langue Grecque.
Par exemple :
Le temple Templ-wm — Lou temple
Du temple TempW
— Don temple
Au temple Templ-o — Aou temple
Le Gascon a comme ses Congénères, deux genres
et deux nombres : le masculin et le féminin, le singulier et le pluriel.
2° Le verbe des Dialectes Gaulois ne procède
qu'avec des auxiliaires, tandis que le Latin s'en
affranchit, en donnant à chaque temps sa valeur et
sa portée par des terminaisons variables.
�— 154 —
Par exemple :
J'ai
aimé
Tu as aimé
// a
aimé
Ama-w'
— Qu'ay aimât
Ama.-visti — Qu'as aimât
Ama.-vit — Qu'a aimât
On voit, par ce simple échantillon, que la forme
passive reste propre aux langues à flexions, les
autres n'en ayant pas besoin. Nous insistons encore
sur l'emploi de la préposition que, invariable devant
chaque personne de chaque temps, sauf l'impératif,
et remplaçant l'article, très souvent sous entendu.
Les Conjugaisons sont au nombre de trois :
i° en A; 20 en E; 30 en I.
3° Enfin dans le groupe Gaulois, la phrase se
présente comme la pensée : c'est-à-dire qu'elle est
construite en ligne droite, du substantif au verbe et
au régime. Ainsi procèdent les langues forgées par
le Peuple, simples et claires. Le Latin au contraire
sacrifie cette clarté à l'harmonie : les mots mêlés et
confondus arbitrairement, obligent le Lecteur
à construire d'abord la phrase, avant de la comprendre. Par exemple : Le bon vin réjouit le cœur de
l'homme; le Latin dira indifféremment : Bonum
vinum Ixtificat cor hominis; ou bien : Cor Hominis
bonum vinum lœtijicat; ou bien : Lœiificat cor hominis bonum vinum; ou bien : Vinum cor hominis lœtificat bonum, etc., etc. Ces différences capitales, sans
�— i55 —
parler de quelques autres (i), suffisent à établir que
deux génies bien distincts ont présidé à l'éclosion
des unes et de l'autre, et qu'il est inutile de leur
chercher des relations de filiation.
L'une fut engendrée par le peuple Celte, et l'autre,
par les beaux esprits de Rome.
Messieurs, les Néo-Latins ont cependant réussi
à faire entrer par surprise leur cheval de Troie dans
nos murs; mais il est vrai, en démolissant les
portes : Il en sortira tôt ou tard par la même
brèche.
Quant au Vocabulaire, matière première livrée
sans réserve aux exigences grammaticales, il sera
pétri et façonné au gré de leurs lois rigoureuses;
car ces lois constituent l'essence même des langues.
Voilà comment certaines d'entre elles, malgré des
origines diverses, et un génie différent, peuvent
avoir accidentellement un grand nombre de mots
communs : Telle est la langue Anglaise, dont plus
de la moitié des mots serait d'origine Normande.
La Conquête de Guillaume le Bâtard justifierait
cette singularité.
Les Gaulois, procédant comme les Anglais, prirent des milliers de mots au colonies Grecques,
mais conservèrent leur langue Nationale c'est-à(i) Voir la préface de las Belhados.
�- i56 -
dire leur grammaire. Les Romains au contraire
leur prirent tout à la fois.
Et voilà pourquoi le Latin, de création relativement moderne, et purement artificielle, ne pouvait
pas aspirer à la pérennité d'une langue sortie des
entrailles du peuple.
Les habiletés Académiques n'assureront jamais
une fortune égale au carton peint, et au bloc
sculpté par la main des siècles.
T
�CHAPITRE IX
LES CELTES — OPINIONS
ORIGINE
— ERREUR
§ i. —
DIFFÉRENTES
— SCIENCES — ETAT
DES
—LEURS
INVASIONS
— TABLEAU
GUES :
COMPARATIF DES
CELTE,
LEUR
NÉOLATINS.
DOM P. PEZRON — ORIGINE
— LEURS
SUR
—LANGUE
POLITIQUE
GRECQUE,
DES
CELTES
COLONIES EN
MOTS
DE
—
EUROPE
CINQ LAN-
GASCONNE,
LATINE,
FRANÇAISE.
§2. — P. DUPLAN — LE CELTE
FUT
LA
LANGUE
PRIMITIVE COMMUNE A TOUTE L'EUROPE — FORMATION
DES
TION DU
LANGUES
CELTE
EUROPÉENNES — CONSERVA-
DANS
LATINE,
BIGOURDAN — TABLEAU
LE
COMPARATIF DES MOTS DE
6
LANGUES :
BIGOURDANE,
ITALIENNE, ESPAGNOLE, PORTUGAISE
—
FRANÇAISE — CONCLUSION.
9999
On a tant et si souvent écrit sur les origines des
Celtes, et les solutions proposées par les savants
se contredisant presque toujours, il semble bien
difficile de s'arrêter à une opinion précise.
�- i58 Les Celtes se détachèrent-ils de la grande famille
Aryenne, à une époque fort ancienne, pour déborder sur l'Europe ?
Leurs invasions furent-elles successives ? Les
groupes d'émigrants arrivèrent-ils purs de tout
mélange ?
Portèrent-ils avec eux une langue qui leur fut
propre, ou au contraire dérivée d'une langue primitive? Tel a été le champ principal de la polémique.
D'autres prétendent (i) que l'Aquitaine fut l'un
des berceaux de l'humanité, antérieurement au
déluge : qu'au moment du cataclysme, les Autochthones trouvèrent leur salut sur les hautes montagnes des Pyrénées (2) et en redescendirent dés
que la plaine fécondée par ses eaux redevint abordable: qu'ils constituèrent alors un corps de Nation
devenu peu à peu assez puissant, pour refluer sur
l'Europe centrale, et jusque sur l'Asie et l'Afrique.
Si bien que le Savant Géographe Cluvier(3)
enseignait au xvic siècle, que les Nations qui peuplèrent l'Illyrie, l'Espagne, les Gaules, l'Allemagne
(1) Boucher de Cluny. Les Druides. Martinon, Paris, 1844.
(2) Diod. de Sic. appelle
Celtes les peuples habitant vers
les Pyrénées; et Gaulois ceux qui habitent au Nord. (Lib. 5 § 2 1.)
(3) Né à Dantzick en 1570.
Peloutier (Hist. des Celt.) reconnaît que Cluvier a prouvé
(t. 1, p.
21) que les Celtes occupèrent l'Illyrie, la Germanie,
les Gaules, l'Espagne et la Grande-Bretagne.
�— 159 —
et la Bretagne insulaire, étaient des Celtes, et parlaient la même langue.
Si les dissentiments sont absolus sur les origines (i), l'accord se rétablit quant à l'état de société
constituée par les Celtes devenus Gaulois. Or, il
importe d'en dire quelques mots pour aider à la
compréhension de ce qui va suivre.
Au point de vue Politique d'abord, leurs Coutumes, inspirées par le sentiment de la liberté,
rayonnaient sur un Gouvernement Démocratique,
ayant l'Egalité à sa base, avec le droit pour chaque
groupe d'élire ses Chefs. D'autre part, les intérêts
Généraux du pays étaientexaminés dans des Assemblées Nationales convoquées annuellement. Ils
n'attendirent donc pas les Romains pour organiser
leur administration locale ou générale avec le principe de l'Election et de la Souveraineté du Peuple.
Au point de vue Religieux, les Druides admettaient un Dieu unique, Esus, très haut, lumière
(i) Hérodote enseignait déjà que les Celtes occupaient la
Bretagne, l'Espagne et les Gaules.
0. Sullivan va plus loin (p. 41). Les Celtes, les vrais ancêtres de l'Europe, furent les Pelasgi de la Grèce, les Siculi et
les Aborigènes de l'Italie, les IBERI ou Celtiberi de l'Espagne,
les Celti de la Gaule, et les Britanni des Iles Occidentales.
Strabon (lib. 1, c. 2) dit que les habitants de tout l'Occident
portèrent le nom de Celtes. Le Centre de la Celtique proprement dite était situé en Gaule.
�— i6o —
suprême, le çeúf-Dios des Grecs sans doute, et
dont l'existence n'excluait pas des Dieux inférieurs
pour le vulgaire. Ils auraient craint d'offenser sa
Toute-puissance en l'enfermant dans des murailles.
L'Univers, qu'il arracha des entrailles de la nuit,
était son œuvre. Il habitait la Forêt, son temple, au
milieu des grands arbres qui lui étaient consacrés.
Les Druides croyaient à l'immortalité de l'Ame;
le Guy, que produit le chêne auguste, en devint le
symbole, parce qu'il est toujours vert, et résiste aux
intempéries des saisons. Leur système de la
Métempsychose, moyen compréhensible de la Divine
justice, leur permit de promettre les récompenses les plus précieuses aux courageux, et de
menacer les lâches des peines les plus terribles.
Leurs connaissances Astronomiques étaient très
étendues. Les Celtes s'adonnaient à l'agriculture et
à l'industrie.
Ne soyons pas surpris de l'hommage, à peu près
unanime, rendu à ce grand Peuplepar toute l'Antiquité (i). La valeur de ses Guerriers inspira la terreur aux Romains pendant plus de six siècles. D'autre
(i) Nous dirons après De La Villemarqué :
Qui donc pourrait ajouter foi aux accusations atroces accumulées par certains Historiens Romains contre nos aïeux?
Nous n'y saurions voir qu'un système de calomnies inventées
par les Conquérants pour excuser ou dissimuler leurs brigandages.
�— m —
part, Aristote lui fait honneur de la naissance de la
Philosophie et des Sciences : Saint Clément d'Alexandrie nous montre Solon, Thalès, Phérôcide
etPytagore, allant s'instruire à l'école des Druides.
Cicéron signalait, parmi les grands hommes de son
temps, le Gaulois Divitiacus, brillant par son esprit
supérieur, et par sa vaste science.
Mais insistons sur cette circonstance, que les
Druides ne confièrent leurs Dogmes, leur Science
ou leurs Traditions qu'à la mémoire, pour les cacher
au vulgaire. Et voilà pourquoi sans doute, leurs
Séminaristes ne franchissaient les degrés du Sanctuaire, qu'après 20 ans de pénibles études ( 1 ). Nous
découvrons ainsi la raison qui nous a privés de la
partie la plus intéressante de l'Histoire de nos
aïeux, et qui explique les contradictions des Auteurs
de toutes les époques. Les Celtes ne se servirent de
l'écriture que pour les contrats, l'administration, et
les besoins de chaque jour : et cette écriture était
Grecque. Un peuple, si évidemment supérieur à ses
voisins, devait avoir une Langue, et même fort
riche, pour exprimer clairement les idées politiques, religieuses, morales et scientifiques dont
ses Prêtres tenaient école. Mais après que Tibère
eût fait procéder au massacre des Druides, les sur(1) César de Bel. Gai. lib. 6, c. 13 et 14.
�IÓ2
vivants n'en furent que plus réservés. Le Gaulois
ainsi frappé à la tête, trouva son salut dans le
peuple qui avait contribué à sa création.
Comment des savants à talons rouges, en extase
devant le Latin, cette statue aux pieds d argile, se
seraient-ils abaissés jusqu'à l'étude des MÉPRISABLES PATOIS de peuples grossiers? Ils n'avaient
pas compris que le Français ne fut, à l'origine, que
l'un de ces PATOIS, qui, en se transformant, a
gardé i° sa grammaire, 2° et le plus grand nombre
de ses mots : qu'en les dédaignant, ils jetaient au
ruisseau la clef de la porte qu'ils voulaient ouvrir.
Ils crurent y pourvoir, en barbouillant de Latin
les vocables de nos antiques Dialectes, avec
l'appellation déshonorante de Basse latinité. Et
comme ces Dialectes indestructibles vivaient bien à
l'aise dans la race énergique dont ils étaient l'œuvre,
ces ingénieux Linguistes crurent les détruire en
inventant le mot de ROMAN. Car, vaille que vaille,
ils tiennent absolument à prouver l'impossible,
c'est-à-dire que les langues modernes, le Français notamment, descendent de leur favori en ligne
directe.
Fiers de leur science de convention, ils se sont
dressés triomphants, en mesurant ce monument de
leur imagination, et se sont écriés :
Et moi aussi je suis peintre!! Etourdis par leurs
�- .63 clameurs, nous les avions crus d'abord sur parole.
La Savantissime Allemagne ayant accéléré le mouvement, nos Philologues Nationaux se précipitèrent
à sa suite, avec des gestes admiratifs.
Et nous voilà définitivement Romanisés ! Un peuple ancien, résistant et glorieux comme le Gaulois,
ne pouvait créer sa Langue moderne qu'avec les
riches matériaux de ses anciens Dialectes. Que
fallait-il donc faire pour découvrir la vérité des origines? Fouiller curieusement ces vieux PATOIS
plus que jamais vivants, et en pleine révolte contre
les Académiques. Car nous sommes jaloux du patrimoine de nos aïeux : et il ne périra pas. Après ces
notions générales, rapprochons-nous de la solution
du problème, d'abord avec Dom, P. Pezron. Ses longues et précieuses recherches dans les livres Sacrés
et Profanes, l'évidence de ses preuves, imposent
une entière confiance.
�t
— 164 —
§ i". — DOM P. PEZRON
Pezron (1) enseigne que les Celtes ou Gaulois
sont issus de Gomer, fils aîné de Japhet et petit-fils
de Noé; ses descendants, après avoir changé
plusieurs fois de nom, exécutèrent en Asie des choses prodigieuses sous le nom de Titans (tit, terre;
ten, homme, ou enfants de la terre, terrigenœ).Leurs
Rois Uranus, Saturne, Jupiter, Mercure, etc., etc.,
placés dans l'Olympe par l'admiration des Mortels,
furent adorés comme Dieux jusqu'à la venue de
J.-Chr. A-t-il raison î Peu nous importe; ayons la
patience d'écouter jusqu'à la fin. Ils avaient soumis
à leur puissance, non seulement une partie de
l'Asie, mais, de plus, ils conquirent l'Europe presque entière, semant des Colonies sur ses contrées
les plus riches, la Grèce, l'Espagne, l'Italie, les
Gaules, la Grande Bretagne, l'Allemagne, etc., etc.
Ils parlaient une seule langue qui leur était propre.
(1) Antiquité de la Nation et de la langue des Celtes. Paris1
Marchand et Martin. In-ia. 1703.
Nous n'entendons pas prendre pour
notre compte l'ensei-
gnement de Pezron sur l'origine des Celtes.
�- .65 Elle se serait conservée chez nos Armoricains Bretons, et chez les Gallois d'Angleterre.
Ainsi Pezron se trouve d'accord avec Cluvier et
son Ecole, sur la circonstance capitale de l'invasion
vde l'Europe par les Celtes.
Mais il n'a pas étudié leur histoire seulement :
Familier de leur langue, il a dressé une table sommaire des mots Grecs, Latins, Allemands, dérivés
du Celte. L'Extrait qui suit, et que nous composons en substituant le Gascon à l'Allemand, donnera une idée exacte de ce travail comparatif, et
de son utilité.
«
�— i66 —
CELTE
GREC
GASCON
ayre
aur-or-au
api<u (labourer araya (labourer)..
la terre). .. aray (charrue).. . .
amarro-amarra.. .
Amar
ancro
ay%ypa. .
Ancor
brounch
&pc/ýjiv....
Brenc
bras-brach
Brech
brido-bridoun.. . .
ÇpvTÌp . .
Brid
bal-baloucha
6«)Jt|(û..
Bail
buou
ëo\iç . . . .
Bu
bac
G«%r).. . .
Bac
bico
Sri'/ri. • . .
Bicq
can
Ki-Kun-Koun. KOwv . . .
carr-earretoun-caireto
Kâppov . .
Carr
gat
KÚ.-CT0Ç. .
Cat
canebo
KavvàÇij-.
Canab,
coq
Coq
cungn
Kwvos. . .
Cuen
capoun
Cabon
candelo
Cantol
ciro
Y.vpi; . . .
Coir
caoulet-câoulo. ..
xavlo;. ..
Caul
corno-cournet.. ..
y.ùpvov.. .
Corn
duno
Sovvo; . .
Dun
Iagremo-lermo. ..
oixpvov ,
Daigz
dio
Siç'Sto; .
Di
annous
êvvoç. . . ■
Henn
oli
s),«iou ...
Eli
hen-hièro
six
Hei
hour-hournèro. . .
Forn
, fopi;... ,
héro-heràou
tfipov . . .
Foir
géant
Giant
77"? • • • ■
Aer
Aur
Ar (terre)..
avpo-J
�V
— 167
—
FRANÇAIS
LATIN
aer
aurum . ..
air.
or.
aratrum..
vinculum.
anchora..
branchias .
brachium.
frœnum ..
tripudio. .
bos
ponto
capra
canis
currus....
catus
canabis...
gallus....
cuneus...
cappo
candela...
cera.
caulis
buccino ..
collis. ...
lachrima .
dies
annosus.
oleum....
fenum... .
furnus.. .
forum....
gigas
araire-charrue.
amare-lien.
ancre de navire.
ouïes-bronches.
bras.
bride.
bal-baladin,
bœuf.
bac (à passer l'eau).
chèvre-bique.
chien.
char- charrio t- charrette.
chat.
chanvre.
coq.
coin (à fendre).
chapon.
chandelle.
cire.
chou.
trompette de corne, cornet.
dune.
larme.
jour.
ancien-vieux,
huile.
foin, meule de foin.
four.
foire.
géant.
�— i68 —
GREC
CELTE
Greunen...
Lamen
Lampz
Lard
Lin
Lot
Milin
Mintis
Mu
Mante
Mesperen..
Nos
Nerven
Neu
Orgoüil...
Paour
Pour
Pic
Porc
Placq
Roch
Rid
Rabes
Raïer
Rigol
Saye
Scubelen..
Taul
Taru
Tumbe....
Tec
Teth
Termen ...
ypavov. ..
látíva. . ,
lapLTUpÔç .
lapSoç. ..
/tvov.. . .
ptvXr).. . .
jotiv6« . . .
UXJO) . . . .
^tàv^úïî . .
f*£07TtXoV .
vùi;
VEU^OV. .
.
véoç . . . .
opyilo; . .
7r«0poç . .
TXOppOÇ . .
TTl/^OÇ . . .
nopyo; . .
TTXKÇ. . . .
P<A,
pvriç . . .
péfavoç..
pam . . , ,
piyo;.. . .
iruyo;. . ,
ayjjêu'j.o;
ravyn. . .
ruvpo; . ,
zvuSoç . ,
Ttyoç...
TÍTOIÍ
.
.
Tspuovec
GASCON
gran-grano
lamo
lampo
lard
lin-linet
lot-louti
moulin-molo....
mentho
mut
mantou
mesplo
neit
nerbi
naou
orgulh
paoure-praoube.
porro
pic
porc
plako
arroc-roco
ride
arrabo-rabo
raya
rigou
sago
escoubilhos
taoulo
taoure
toumbo
tet
tètè-titha
terme
�—
LATIN
mola-molendinum. ...
16g
—
FRANÇAIS
grain.
lame.
lampe.
lard.
lin, linet.
lotir, lot.
meule, moulin.
menthe.
muet.
manteau.
nèfle.
nuit.
nerf.
neuf, nouveau.
orgueil.
pauvre.
porreau (plante).
pivert.
porc.
plaque.
roche-roc.
ride.
rave (plante).
rayer-effacer.
rigueur (du froid).
saie (vêtement).
balayures.
table.
taureau.
tombeau.
toit.
mammelle-téton, tèter.
terme.
�— 170 —
Ce Tableau établit jusqu'à l'évidence la parenté,
au moins par les mots, des cinq langues comparées.
Or, la Celtique étant incontestablement, la plus
ancienne, l'invasion de la Grèce par les Celtes se
trouve ainsi justifiée. Nous allons voir la même
certitude ressortir des travaux de P. Duplan sur
l'occupation des contrées Méridionales de l'Europe
par les mêmes conquérants.
§ 2= — P. DUPLAN
II était originaire du Bigourdan, et consacra une
vie longue et studieuse à l'enseignement des langues, en Europe et en Amérique.
Il publia d'abord un Vocabulaire de six langues (i ),
où il établit la filiation des mots de chacune d'elles,
en commençant par la racine Celtique commune à
toutes.
Il a donné plus tard (2) en un volume de 200
pages, in-4», le PATOIS CELTE DE BIGORRE,
(1) Tarbes, 1891, Larrieu.
(2) Tarbes, 1897, Croharc.
�—
i7i
—
langue génératrice de huit langues Aristocratiques,
Savantes ou écrites. Il avait enfin préparé une Grammaire de six langues que malheureusement la mort
ne lui a pas permis de publier.
Il s'attache à prouver d'abord, que le Celte, la
plus ancienne des langues Européennes, s'est conservé intacte ou à peu près dans la Bigorre. Qu'il
fut cette langue primitive de l'Europe vainement
cherchée depuis des siècles : qu'elle a produit les
langues principales qu'on y parle aujourd'hui, sans
en excepter l'Anglaise et l'Allemande; que formée
par le peuple Celte, elle s'est conservée depuis des
milliers d'années; tandis que le Grec et le Latin,
créés par des Castes privilégiées, ont disparu avec
elles. Il rapproche leur durée éphémère de la résistance notamment de l'Espagnol, Dialecte Celte, qui
malgré l'occupation de leur pays par les Maures
pendant sept siècles, neleurapaspris trois douzaines
demots. Plus hardi que Cluvier, mais d'accord avec
Pezron, il reconnaît l'influence Celtique jusque
dans la formation du Grec classique lui-même. Le
Français est resté la plus Gauloise des langues
modernes : aussi n'est-il pas sérieux d'aller cher-
�— I72 —
cher la racine de ses mots partout ailleurs que dans
nos vieux Dialectes nationaux.
Quant aux procédés de formation de la langue
primitive : l'homme, dit-il, a, comme l'enfant, balbutié d'abord des monosyllabes. Aussi abondent-ils
dans nos Dialectes Méridionaux.
A mesure que l'état social se développe, se
complique, les monosyllabes s'allongent, se combinent entre eux, et se modifient, pour suffire aux
besoins nouveaux : car les langues se sont formées,
non par apocope, mais par agrandissement des
mots; tandis que suivant les Latinophiles, nos Provinces Méridionales auraient procédé à rebours.
D'autre part, les mots primitifs furent prononcés
différemment, puis écrits conformément à ces prononciations variées, avec changement de lettres.
Elles-mêmes furent transposées; ainsi commença la
confusion.
Elle s'aggrava par la modification du sens d'origine, par la pluralité de noms pour le même objet,
par l'adoption des.mots étrangers, et par des accidents de tout ordre.
Mais dès que les peuples sesont groupés indépen-
�— 17? —
riants les uns des autres, les savants s'appliquèrent
à donner aux mots une physionomie originale. La
plupart oublièrent que les langues sont faites pour
l'oreille et non pas pour les yeux. Ils voulurent une
langue Nationale coûte que coûte. Ainsi surgit et
se développa cette variété dans laquelle les plus
habiles ont de la peine à se reconnaître aujourd'hui,
malgré la communauté d'origine. Dans cette concurrence passionnée des vanités Nationales, la langue
primitive n'a pas disparu fort heureusement. Elle
est encore parlée par les Bigourdans
(i).
Voilà certes un système simple et fort séduisant
pour nous familiers des Dialectes Méridionaux. Il
a de plus ce grand mérite à nos yeux de ne rien
coûter à notre Patriotisme.
Nous serions donc tout disposé à l'admettre, car
il se rapproche singulièrement de celui que nous
soutenons depuis dix ans, àsavoir, que notre Langue
Française n'a jamais été qu'un Dialecte Celte fortement imprégné de Grec, comme ses frères aînés.
( i ) La langue de Bigorre n'est, sauf des nuances, que celle qui
est parlée en Gascogne, Béarn, etc., etc, des Pyrénées à la
Garonne.
�— i74 —
Mais nous ne cesserons pas de soutenir, avant tout,
que la Grammaire étant de l'ESSENCE des Langues, il n'y a communauté d'origine que là où elle
est attestée par son identité; qu'elle seule peut établir la légitimité de la filiation, sans égard d'ailleurs
à la quantité des mots communs employés par
chacune d'elles.
Voilà pourquoi nous affirmons depuis dix ans
la fraternité légitime du Français, de l'Espagnol,
du Portugais et de
l'Italien;
notre conviction
s'appuyant sur leur Grammaire à peu près identique, plus encore que sur l'énorme quantité des
mots venus de la même source, c'est-à-dire CeltoGrecqae.
Mais nous protestons contre l'affirmation de
l'Auteur, que la Langue Grecque serait de création
postérieure à celle de la Langue Latine. Il avait
oublié sans doute qu'Homère chanta son Iliade et
son Odyssée neuf cents ans avant notre Ere, ou cent
cinquante ans environ avant la fondation de Rome.
Or le peuple qui s'enorgueillit de pareils Chefsd'œuvre possédait assurément la plus belle des
Langues.
�— 175 —
Ces réserves faites, voyons la -méthode de P.
Duplan en action.
Nous croyons qu'une centaine de mots doivent
suffire pour l'indiquer clairement aux yeux même
de ses contradicteurs systématiques.
�— 176 —
EXTRAIT DU VOCABULAIRE DE P. DUPLAN
BIGOURDAN
Alh
Arc
An
Bea fi)
Bé-bés
Bé-beye-bede .
Bec
Bent
Berd
Besc
Bet-bel
Bi-bin
Bia
Bieilh
Bigna
Biou
Blet-bleta
Bot
Boun-bon..
Bouch
Bras-brach....
Brut
Ca-can
Cap-caboca...
Car-carné
Caye-cade
Caoùd-caoùt ..
LATIN
alli-um. ..
arc-us
ann-un..
ven-a
bona
videre
bec-us
vent-us ..
viridus .. .
visc-um . .
bell-us ...
vin-um. . .
via
vetul-us ..
vinea
viv-us ...
blit-um...
vot-um ...
bon-us...
bux-us....
brachi-um
brut-us. . .
can-is
cap-ut
caro-nis ..
cad-ere...
calidus .. .
ITALIEN
aglio
arco
anno
vena
beni
vedere
becco
vento
verde
vischio
bello
vino
via
veglio
vigna
vivo
bieta
voto
buon
bosso
braccio
bruto
cane
capo-capocchia.
carro
cadere
caldo-calido
(1) Le v n'existe pas en Bigorre; le b le remplace comme
en Gascogne.
�— 177 —
ESPAGNOL
PORTUGAIS
alho
,
ajo
arco
arco
anno
ano
veia.
vena
bens
bienes
ver
ver
pico
... bico
vento
viento
verde
verde
visgo
visco
bello
bello
vinho
vino
via
via
velho
viejo
vinha
vina.
vivo
vivo
bredos
blédo
voto
voto
boum,
buen
buxo
boj
braco
brazo
bruto
bruto
can
can-perro
cabeza-cabezorra cabessa-cabeçorra..
carro
carro
cair-cahir....
caer
calido-caliente.. calido-quente.
FRANÇAIS
ail.
arc.
an.
veine.
biens (fortune).
voir.
bec.
vent.
vert.
glu-gui.
beau-belle.
vin.
voie-chemin,
vieux,
vigne,
vif.
blette-bette (plante)
vœu.
bon.
buis.
bras.
brut-e.
chien.
caboche-tète.
chair-charnier,
choir-tomber.
chaud.
�- i78 BIGOURDAN
Ceou-cel
Cent
Cla-clar
Claou
Co-cor
Cot-col
Cop-colp
Corn-Corna....
Cos-cors
Da-douna
Dent-den
Dia-dio-die.
Diou
Dit
Dole
Doun
Dous
Du-dur
Faous
Fet-heit(i)
Flac-phlasc....
Flou-eslou. .. .
Fraï-fraïre ... .
Yerman-german
Red-fred-phret.
Frut-heruta....
Gat
LATIN
ITALIEN
cel-um
'cielo-ciel....
cent-um
'cent-o
,
clar-us
xhiaro
cla-vis
^hiave
cor-cordis
cor-cuore.. .
coll-um
'col-collo
colp-us
colp-o
corn-u
corn-o
corp-us
corp-o
da-re dona-re . . :dare donare.
den-s-dentis.. :dent-e . .
di-jiorno.
die-s-i
deus
dio.
dit-o, digito.
dig-itus
dole-re
dole-re
don
don-um
. ,'dolce
dul-cis
dur-o-a.
dur-us...
fals-o...
fals-us. .
fatto ...
fact-um.. .
flace-o..
flacc-idus
fiore... .
flo-s-ris . .
frat-er-fratellus. frat-e-fratello.
german-o.
german-us.
freddo
frigid-us.. .
fruta
fruct-us.. . .
cat-us
Igatto
(i) Le Gascon pur écrit et prononce l'F non élidée très souvent comme le f grec, ou P aspirée, quand il ne la supprime
pas : Heruta pour fruta — Heslou pour flou.
s
�— '79 —
PORTUGAIS
ciel-o
chien-chiento..
claro
clavo
cor-o
cuelh
golpcuern
cuerp-o
dar-donar....
dient-e
dia
dios
dedo
doler
don
dulce
dur-o-a
fals-o
hecho
flojo
flor
frai-frate
hermano
frio
.
fruta
gato
ceo
cem-cent-o..
claro
cravo
cor-coraçào ,
collo
golp-e
corno. .-.*».
corp-o
dar-donar..
dent-e
dia
deos
dedo-digito,
doer
don
doce
dur-o-a....
fals-o
feito
flacc-ido...
flor
frei-freire..
irman
frio
fruta
gato
FRANÇAIS
ciel.
cent.
clair.
clef-clé.
cœur.
cou-col.
coup.
corne.
corps.
donner.
dent.
jour.
Dieu.
doigt.
éprouver do la douleur.
don.
doux-ce.
dur-e.
faux-sse.
fait.
flasque.
fleur.
frère.
frère germain.
froid-froide.
fruit.
chat.
�— i8o —
BIGOURDAN
LATIN
gUSt-US....
Goust
Goy-goig. ..... gaud-ium..
Gra-gran-gras. gran-um..
gran-dis. .
Gran
crass-us
Gras-sa
gross-us-a
Gros-sa
Gris-pardous.. (B. L.) grisius..
Hame-fam ... fam-es
Haou-hay (i).. fag-us
alt-us
Haout-alt
saturaré . ....
Sadoura
fen-um
He-hen-fe
fac-ere
Hè-ha-fa
Hagot-fagot... - fasciculus
Herr-ferr
, ferr-um
Filh-hilh-fil.... fili—us .....
fil-um
Hiou
Hort-fort-a.... fort-is
foc-us
Houec-foc
Hount-foun .... fon-s-tis
Hour-four-forn. furn-us
Hum-fum-huma fum-us
Hus-fus-huset .. fus-us
fust-is
Hust-fust
Keriet-kriet .... cribrum
las-sus-a
Las-sa
lac-tis
Leit-layt
lin-um
Li-lin
..
loc-us
Loc
ITALIEN
gust-o.
iioia.. .
grano ..
gran-de.
grass-o . .
jgross-o-a
jgrigio
ifarne.
alto
satollare
fien-o
far-fare
fagotto-etto ...
ferro
figlio
fil-o
fort-e
foc'co
fon-te-fon-tana.
forn-o
fummo
fus-o
fusto-fusta....
crivello.......
las-so
latte
lin-o
loc-o
(i) Nos Dialectes Gascons sont antipathiques à la lettre F
et la remplacent par H ou tous autres moyens de l'éviter.
L'Espagnol a la même tendance.
�—
ESPAGNOL
guSt-0
gozo
grano
gran-grande...
gord-o-a
grues-o-a
gris-pardo ....
hambre
haya
alto
saciar-hartar .
hen-o
hacer-facer....
fagote-faginita.
fierro
hijo
hil-o
fuert-e
fouego
fuente
horn-o
humo
hus-o-fus
fuste-fusta ....
criba
las-sado
lèche
lin-o
lugar
I8I
—
PORTUGAIS
FRANÇAIS
goût.
gost-o
joie-plaisir.
gozo
grain.
gra-o
gran-grande... . grand-e
;gras-se.
gordo-a
gros-grosso.. . jgros-se.
'gris.
gris-pardo
'faim.
fome
jhêtre (V. F.) fau
faia-fau
haut-e.
alto
saciar-hartar .. . souler-saturer.
|foin.
feno
Taire.
fazer
fagot-lacinefeixinho .... 'petit
iagot-faisceau.
!
fer.
ferro
Ifils.
filho
fil.
fio
fort.
fort-e
leu.
fogo
fontaine,
fon-te
four,
forn-o
fumée,
fumo
fuseau.
fus-o .
fuste-fusto-fusta bois-bâton-futaie.
crible.
crive
las-se.
las-so
lait.
leite
lin.
linho
lieu.
lugar
�— l82 —
BIGOURDAN
Loup-loub....
Louy-louen ...
Luts-lutz
Lusc-a
Ma-man
May-mayre
Meou-mel
Mes-mez
Moud-mod....
Mil-mela
Moun-mounde.
Mount-moun..
Mour-mourt.. .
Mud-mut
Pared-paret...
Mur-murralha.
Nan-nen
Nou-naou
Nas (nazie)...
Neou
Niou-nid
Ner-nere
Nud-a
Os ossis
Ouelh-ulh
Pa-pan
Payre-pay
Pur
Puy-pugn
LATIN
ITALIEN
lupo..
lup-US
lunge
longe
luce
lux
lusc-o-a
lusc-us
man-o
man-us
madre-matre ...
mater
mele-miele
mell-is
mensis
, mese
molle
moll-is
mil-le-millia.... mille
mond-us
, mondo . «
monte
mons
morte
mor-s-tis
mut-o-mutulo ..
mut-us
paret-e
parie-s-tis
mur-us-maceria mur-o-muraglia.
nan-o
nan-us
nov-o-a
nov-us-a
nas-o
nas-us-i
neve
nix-nivis
nidio-nido
nid-us-i
nero-ra
.
nig-er
nud-o-a
nud-us-a
os-ossis........ oss-o
occhio
ocul-us
pane
pan-is
padre
pater-tris
par-o
purus
pugn-o
pugn-us
�- i83 -
ESPAGNOL
PORTUGAIS
lobo
lobo
longe
legos
luz
luz
lusc-o-a
lusc-o-a
mao
man-o
maï-mare
madré
mel
miel
mez
mes
molle
muelle
mil
mil
mundo
mundo
mont-e
mont-e
morte
muerte
mudo
mudo
pared-e
pared
muro-muralha .. mur-o-muralha.
enan-anao
enan-o
nov-o-a
nuev-o-a
nariz
nariz
neve
nieve
nicho
nido
nero-ra
negro-a
nu-a
nud-o-a
oss-o
hues
olho
ojo
pan
paô
pai-pae
padre
pur-o
pur-o
punh-o
pugn-o
FRANÇAIS
loup-louve.
loin.
lumière.
louche.
main.
mère.
miel.
mois.
mou-mol.
mil-mille.
monde.
mont-montagne.
mort.
muet.
paroi-muraille.
mur-muraille.
nain.
neuf (adj. quai.).
nez-narine.
neige.
nid.
noir-e.
nu-e.
os-ossement.
œil.
pain.
père.
pur-e.
poing.
�-mDe ce tableau de cent mots, qui pourrait être
continué indéfiniment, il résulte :
i° Que le Bigourdan ou Celte a procédé par monosyllabes comme toute autre langue primitive;
2°
Qu'ils sont bien les racines incontestables des
dérivés comparés;
3° Que ces mots existant avant la fondation de
Rome, elle les emprunta aux peuples Celtes fixés
depuis un temps immémorial en Gaule, en Espagne
ou en Italie, et parmi lesquels elle recruta sa population;
4° Que nos langues Méridionales dérivent donc
du Latin, comme Charlemagne était issu des
Capet; que le Latin en effet, langue purement
aristocratique et savante, plus Jeune que le Celte
peut-être de 2000 ans, et de 600 ans au moins
postérieure à nos langues Méridionales, s'est constituée avec des matériaux Celto-Grecs; et qu'elle
est morte d'ailleurs sans avoir jamais été parlée
par aucun peuple,
non pas d'Italie seulement.
mais même du Latium;
50 Enfin, il indique la nécessité de suivie la
méthode étymologique dans nos Ecoles Méridio-
�- (85 nales. Elle assurerait à nos enfants le double avantage de se perfectionner dans la pratique du Dialecte maternel, et d'être initiés sans fatigue, à la
connaissance du Français, ou des autres langues
dérivées, suivant leurs préférences.
��CHAPITRE X
LE JÉSUITE PHILIPPE LABBE NÉOLATIN CONTRE LES
JANSÉNISTES GRÉCOPHILES
QUERELLE
PAR
—
ORDONNANCE
SOLUTION
DE LA
SUIVANT
LES
NÉOLATINS, LE VOCABULAIRE DE LA LANGUE FRANÇAISE FUT COMPOSÉ
DANS LES
LITTRÉ,
A
L'AIDE
CINQ PARTIES
ETC.
—
ET
D'EMPRUNTS FAITS
DU MONDE
SUIVANT
—
NOUS,
BRACHET
AVEC
NOS
DIALECTES PROVINCIAUX SEULEMENT.
????
Point n'est besoin de remonter aux origines,
pour apprécier les mérites et la valeur du NéoLatin.
Il nous suffira d'observer l'un de ses Patriarches
du xvii" siècle en plein combat, frappant d'estoc et
de taille avec une verve endiablée. Ses disciples,
d'ailleurs, n'ont pas ajouté grand'chose à ses démons-
�—
i88 —
trationshumoristiques.il s'appelait PhilippeLabbe,
Jésuite de son état, et Philologue moins encore que
Sectaire.
Il eut le premier tort de ne pas éclairer sa lanterne; car il ne mentionne même pas les Grammaires Latine et Gauloise, ne semblant pas se douter
plus que ses Elèves de notre temps, que les langues
s'individualisent far les règles qui leur sont propres.
Son examen ne porte en effet que sur les mots, verba,
simples matériaux acceptés par l'usage, et que les
Grammaires pétrissent à leur gré. Mais avançons
dans la voie que ses disciples ont suivie avec l'édifiante soumission du MAGISTER dixit.
Il explique (i) à l'Académie qu'il lui est tombé
dans les mains un petit livre intitulé le Jardin des
racines Grecques mises en François, avec un traité
de prépositions et autres particules indéclinables, et
un recueil alphabétique des mots François tirés de la
langue Grecque, et imprimé l'an 1647 (2) • Œuvre
des Jansénistes, pour servir aux quelques petites
écoles par eux fondées, et dont ils conservaient la
direction. Il s'aperçoit de leur ignorance en plusieurs points très importants, de leur témérité à
(1 ) Des Ktymologies de plusieurs mots Français contre l'abus
de la secte des Hellénistes de Port-Royal. 1661. Paris, Guil. et
Simon. B. N. 4420, L. 1427.
(2) Il nous a été impossible de nous piocurer ce livre.
�— i8g —
débiter de très grandes bévues. Il veut préserver la
jeunesse du poison de ces nouveautés.
Ainsi les étymologies Grecques se trouvent à
l'Index, Schismatiques au moins, et dégageant une
forte odeur d'Hérésie. Nous y arrivons.
« MM. de Port Royal, sous prétexte d'apprendre
)) du Grec à leurs Escoliers, les jettent dans des
)) absurdités et ignorances insupportables qui nous
)) eussent enfin rendus ridicules et méprisables aux
» étrangers (!!!)
» Mais Dieu s'est opposé à leurs pernicieux desseins:
» ayant inspiré à notre très Chrétien Monarque
)) Louis XIVe la résolution de défendre et empescher
)) toutes les assemblées illicites de cette Secte, où la
» jeunesse était instruite dans les doctrines dange» reuse du Jansénisme, et suceoit, dés le berceau
» pour ainsi dire, le lait d'une des plus damnables
» Hœrésies qui ait jamais attaqué l'Eglise. » Ainsi
fut résolu le problème de l'origine des langues :
Moyen expéditif et sans réplique.
Mais poursuivons la citation, non plus Dogmatique, mais Scientifique seulement.
(( La source des fautes de ces nouveaux Hellé)) nistes, et celle qui est la plus universelle, consiste
» en ce qu'ils ont avancé, que plusieurs mots de
» notre langue Françoise ont été pris et tirés immé» dia tement de la langue Grecque, quoi qu'il soit
�— 190 —
))
»
»
»
))
»
»
constant parmi les personnes intelligentes au
secret des élymologies, que nos ancêtres les ont
empruntées de la langue Latine ou du langage
des anciens Gaulois, des bas Bretons, des Allemands, des Anglais, des Italiens, des Espagnols
ou autres peuples voisins, ou qu'ils les ont ingénieusement inventés sur la ressemblance du
» son ».
L'énumération du Révérend Père a semblé,
malgré son ampleur, incomplète à ses dignes élèves :
et l'un d'eux se hâte d'y ajouter le Grec, non pas
ancien mais moderne, le Hongrois, les langues
Slaves (Russe et Polonais) (1). Nous serions encore
redevables aux idiomes sémitiques, Hébreu, Turc,
Arabe, ainsi qu'aux langues de \Tnde, de la Chine
et de la Malaisie; les Colonies Américaines ont
importé dans notre langue quelques termes spéciaux. Il n'a rien dit des Soudanais, des Tonkinois
et des Malgaches, et c'est vraiment dommage.
Peut-être les réserve-t-il pour une nouvelle
Edition.
Ces prétentieux omniscients nous rappellent, en
nous reportant vers les Philologues immortels des
xvie et xvne siècle, le très savant Docteur du Gilblas, qui se heurta, sur la place publique, à la
(1) Brachet. Dictionn. Etymol. Introd. Liv. 1", p. 17.
�—
IQI
—
foule béante devant son ancien valet, assailli par
les malades avides d'Orviétan.
Voilà bien dans toute sa pureté la théorie de nos
Philologues Officiels, non plus Jésuites, mais
Juifs, Positives, ou Athées à l'occasion.
Les voilà tous également d'accord pour dédaigner les Grammaires, leur signification et leur
portée décisives, et nous montrer à la quête des
mots à classer dans un Vocabulaire à l'état d'indigence; recevant l'aumône même des Turcs et des
Chinois ! ! !
Et de cette macédoine nauséabonde serait sorti
le Chei-d'ceuvre du Génie Français, la langue
Nationale! ! !
Grâce à ce système, emprunté à la Cour des
Miracles, et ingénieusement utilisé, Molière et
Racine, Bossuet et Fénélon purent écrire quelques
pages qui, dit-on, ne manquent pas d'un certain
mérite.
Nous ne sommes ni assez Chrétien ni assez
libre-penseur pour accepter ces théories humoristiques, dont le moindre inconvénient est de représenter le Génie national en bâtard paralytique,
couvert de guenilles, assis sur la borne du chemin,
et le chapeau tendu, implorant la pitié des passants.
Nous prétendons, au contraire de ces Docteurs,
dont l'extravagance n'aura pas, cette fois, l'excuse
�— 192 —
du patriotisme, que notre langue fut formée avec
les richesses de nos Dialectes Provinciaux, mine
inépuisable et trop peu connue.
Leur enseignement méthodique mettra tôt ou
tard à la disposition du Français ces trésors de
famille, qu'il pourra utiliser sans scrupule.
Si le Père Labbe et consorts avaient suivi d'abord
les indications de l'Histoire, s'ils avaient ensuite
examiné la Grammaire Gauloise, et appris enfin las
Parladuros de nos aieux, dont 15,000,000 de bons
Français se servent encore aujourd'hui, peut-être
auraient-ils abrégé la liste de nos créanciers en
philologie, et renversé les rôles.
L'Histoire leur aurait appris le mélange des deux
familles Grecque et Celte; l'étude des éléments leur
montrait notre Grammaire avec ses différences
essentielles de celle des Grecs et des Latins, et la
source bien authentique Celto-Grecque de nos
Vocables : peut-être se seraient-ils ainsi préservés
de l'erreur.
Mais écoutons la fin. Le Révérend abrégera sa
harangue à l'Académie « pour ne pas abuser du
» loisir qu'on sait être si nécessaire pour la per» fection de cet admirable Dictionnaire que la
» France attend depuis si longtemps. » Ainsi il
déclare admirable avant la lettre, ce Dictionnaire à
peine commencé. Deux cents cinquante ans se sont
�— 193 —
écoulés depuis cette génuflexion anticipée : et nous
attendons encore l'Edifice si prématurément arrosé
d'eau bénite.
N'est-ce pas charmant???
Il ne comprenait pas, que lui et ses pareils, en
dévoyant les ouvriers avec leurs imaginations
bizarres déguisées sous de faux semblants Scientifiques, rendaient l'oeuvre impossible.
Elle ne sera menée à fin que le jour où nos Académies remonteront résolument vers nos Origines
Gauloises, à la source du génie National, et de la
langue, sa fille. Et c'est pour les y aider que nous
écrivons ce livre. Il aura contre lui tous ceux qui
croient savoir avant d'avoir étudié, et décident avec
le bandeau des idées préconçues sur les yeux. Mais
qu'importe; la vérité d'abord, surtout si le Patriotisme doit y trouver son compte.
Donc, suivant les Néolatins, ce peuple Gaulois,
si avide de discours, qui posa sur ses autels des
Dieux aux lèvres d'or, bien avant la conquête de
César ( i ), seul entre tous, oublieux de sa langue Na(i) Nous rappelons le passage de Lucien, si souvent cité
par les Auteurs qui ont écrit sur les Origines Gauloises
Il avait vu en Gaule l'image d'un Dieu portant le nom à Oyfuoj
(oyfisùw, tirer en ligne droite), sous l'apparence d'un
faible vieillard, traînant à sa suite une foule nombreuse avec
■3
�— i94 —
tionale, se serait empressé d'en reconstituer une
nouvelle avec les détritus de celle d'un vainqueur
détesté.Et celui-là sera grossièrement ignorant, Hérétique, ou débitant des bévues, qui ne s inclinera pas
avec respect devant ce Canon grotesque fabriqu é par
le Concile Infaillible de la Philologie Officielle!
Nous avons déjà protesté dans las Belhados contre
ces solutions aussi blessantes pour la vérité que
pour notre Patriotisme. Et comme un coup de
marteau ne suffit pas à enfoncer un clou dans le
cœur de chêne, toute occasion nous sera bonne de
reprendre notre thèse, et assurer son succès.
Engager des discussions théoriques contre la
Citadelle du parti-pris, serait temps perdu et peine
inutile.
Que faire en cas pareil?
Opposer à des théories arbitraires des faits Histojdes chaînons presque imperceptibles, dont l'un des bouts
était attaché aux oreilles de ceux qui lui faisaient escorte, et
l'autre à sa langue.
Un Savant Druide lui apprit que cette image représentait
VHercule Gaulois, qui, au contraire de celui des Grecs, n'était
pas le Dieu de la Force, mais celui de l'Eloquence!!!
Que dites-vous de ces Sauvages ?
Et ce Peuple, si sensible à la puissance de la parole, aurait
renoncé à sa langue!!!
Voilà bien encore un Dieu purement Gaulois, portant un
nom authentiquement Grec.
Est-ce clair ?
�— 195
riques, incontestables; et achever la démonstration
avec des matériaux non suspects, c'est-à-dire en
plaçant face à face les mots eux-mêmes, établissant
ainsi leur filiation identique bien souvent en Grec
ou Celte, Gascon, Latin et Français. Avec ces précautions la vérité doit luire aux yeux les moins
claivoyants.
��CHAPITRE XI
AU
RÉPONSE
RÉVÉREND
PRIMITIVE DE
ROME
PLUTARQUE —
PÈRE — LE GREC,
—
DENIS
LANGUE
D'HALICARNASSE —
PoLVBE — VALÈRE
ClCÉRON —
MAXIME — AULU-GELLE — ETAT DU LATIN AU
vie SIÈCLE DE ROME — SENATUS CONSULTES PROHIBITIFS DE L'ENSEIGNEMENT
DE
— TOLÉRÉ
AU TEMPS
ClCÉRON — VESPASIEN LE REND OFFICIEL —
SON FILS LE SUPPRIME DANS TOUTE L'ITALIE
LATIN
CRÉÉ PAR L'ARISTOCRATIE
ROMAINE
RAÎT AVEC ELLE COMME LANGUE PARLÉE
—
—
LE
DISPAIL NE
FUT JAMAIS EMPLOYÉ PAR AUCUN PEUPLE, MÊME DU
LATIUM
BIEN
— Nos
DIALECTES,
QU'ANTÉRIEURS DE
CRÉATION
DE
LA
TOUJOURS
PLUS
DE
1000
EN USAGE,
ANS A
LA
LANGUE LATINE.
9999
Suivant Denis d'Halicarnasse (i), les premiers
habitants de Rome se composaient d'un mélange
(i) Antiq. Rom., tome i, lib. i, § r, a, 3.
�— iç8 —
d'Aborigènes, de Sicules, de Pélasges, de Troyens
venus avec Enée après la guerre de Troie, à'Arcadiens sortis de la ville de Palantion, et des descendants des soldats qu'Hercule avait laissés dans le
Latium en revenant de l'Erythrée. Evandre avec les
Arcadiens, fonda Palation sur l'une des sept collines
comprises plus tard dans l'enceinte de Rome (nions
Pallatinus); tandis que les compagnons d'Hercule
occupèrent le mons Saturninus appelé plus tard
Capitolin.
Le grave Historien affirme que l'élément Grec
fournit le plus large contingent à la Ville naissante.
Elle se serait ainsi trouvée la proche parente de la
Grèce dès les premiers jours de sa fondation.
Il veut bien reconnairre cependant (i) que les
Etrangers de toute origine y furent admis plus
tard; et il est surpris qu'elle ne soit pas devenue complètement barbare, après avoir reçu les
Marses, les Samniles, les Tyrréniens, les Brutiens, plusieurs milliers d'Ombriens, des Lygures, Ibères, Celtes, et autres peuples venus d'Italie,
et même des autres pays, tous de langues différentes, et de mœurs absolument opposées. Il est
pour nous sans intérêt que le mélange se soit
opéré le jour de la fondation de Rome, ou le len(i)
Den. d'Halic, lib.
i,
c.
22,
§ 3.
�demain : sa population n'en sera pas moins recrutée parmi des hommes de tous pays et de toutes
races, notamment Celtique; puisque nous savons
déjà qu'elle occupait à peu près la totalité de l'Europe Occidentale. Ne soyons pas surpris si la langue
Grecque fut d'abord seule en usage dans une ville
ainsi peuplée ( i ). Romulus avait d'ailleurs une raison
personnelle pour qu'il en fut ainsi. En effet, si nous en
croyonslemêmeauteur(2), Faustule, lebergernourricier des deux frères Romulus et Rémus, Arcadien
d'origine, les conduisit à Gabie (3) où ils furent instruitsaux sciences etaux exercices delà Grèce.x\ussi
Plutarque (4) peut-il affirmer, sans invraisemblance,
que la langue Grecque dont se servaient alors les
Romains et les Albains, n'avait pas été corrompue
par un mélange de mots étrangers.
C'est encore lui qui nous enseigne que du temps
de Numa (5). les mots Grecs étaient les plus nombreux dans la langue Latine. Il nous fait assister
ainsi à la fusion insensible, à l'élaboration qui
produira plus tard la langue nationale des
Romains.
(1)
(2)
(3)
(4)
Plutar. V. de Rom., § 26.
Lib. xvi, c. 19, § 6.
Ville du Latium, Colonie d'Albe fondée par des Grecs.
Loc. Cit.
(5) Vie de Numa, § 64.
�— 200 —
Après ce qui précède, écoutons Cicéron : Il va
nous apprendre un événement dont il apprécie luimême l'importance.
« Pour la première fois, à cette heure, Rome va
)) s'éclairer par l'influence d'une civilisation adopti tive.
» Ce ne sera pas, en effet alors un faible ruisseau
» détourné dans nos murs, mais un fleuve immense
» qui nous apportera par torrents les sciences et les
» arts de la Grèce. Un Corinthien, est-il dit à ce
» sujet, Démarate, le premier homme de son pays
» par la considération le crédit et la richesse, ne
» pouvant supporter le joug de Cypselus, tyran de
grands trésors, et
» était venu à Tarqtiinies, ville très florissante de
» l'Etrurie. Instruit bientôt que la domination de
(i) Cicer. De Repub., lib. n, § 19.
Sed hoc loco primum videtur insitiva quàdam disciplina
doctior facta esse civitas. Influxit enim non tenuis quidam e
Grseciâ rivulus in hanc Urbem, sed abundantissimus amnis
illarum disciplinarum et artium. Fuisse enim quemdam ferunt
Demaratum, Corinthium et honore et auctoritate et fortunis
facile civitatis suas principem, qui cùm Corinthiorum tyrannum
Cypselum ferre non potiusset, fugisse cum magna pecunia
dicitur, ac se contulisse Tarquinios in urbem Etruria; florentissimam. Cùm que audiret dominationem Cypseli confirmari,
defugit patriam vir liber ac fortis. et adscitus est civis Tarquiniensibus, atque in eâ civitate domicilium et sedes collocavit.
Ubi cùm de matre familias Tarquiniensi duos filios procreavisset, omnibus eos artibus ad Grxcorum disciplinant erudiit.
�1
— 201
w
»
»
»
»
»
))
»
—
Cypselus ne faisait que s'affermir, en homme
libre et courageux, il abandonna pour jamais sa
Patrie, se fit admettre au nombre des citoyens
de Tarquinies, et fixa dans cette ville sa fortune
et sa demeure. Ayant eu deux enfants de son
union avec une femme de cette ville, il les instruisit dans toutes les sciences, sur le modèle de
l'éducation Grecque.
Or il arriva que l'un de ces enfants, Grec par le
sang comme par l'éducation et par la science, alla
s'établir à Rome. Son affabilité et ses largesses lui
valurent la confiance du peuple; si bien qu'à la
mort du Roi Ancus, il fut élu pour lui succéder
sous le nom de Lucius Tarquin. Voilà donc un
Corinthien d'origine illustre sur le trône, 614 ans
avant J.-Ch. L'histoire l'a appelé Tarquin l'Ancien.
Ce n'est pas tout.
Ecoutons encore Cicéron :
Un enfant d'une femme esclave de Tarquinies se
trouvait engagé au service de ce Roi; son intelligence précoce et ses brillantes qualités lui valurent
ses préférences. Or voici ce qu'il en advint.
)) Tarquin, qui n'avait que des fils au berceau, le
» prit en telle affection, que Servius passait géné» ralement pour son fils : et il l'instruisit avec un
» soin extrême DANS TOUTES LES SCIENCES
« qu'il possédait lui-même et SUR LE PLUS COM-
�— 202 —
)) PLET MODÈLE de l'éducation Grecque (i).
Tel fut Servius Tullius, le premier Législateur de
Rome après le pieux Numa, de l'aveu de tous les
Historiens; celui qui déchaîna sur sa Ville les premiers torrents des sciences et des arts de la Grèce.
Mais le mouvement de l'inondation dut être lent
et pénible, et la langue Grecque subir de singulières avaries, même chez les Patriciens qui eurent
la prétention d'en conserver l'usage.
La raison en est simple :
La Rome des premiers siècles était un camp de
plus en plus redoutable, où les pensées, les travaux,
et les efforts se concentraient vers le but unique de
la guerre. Tout autre soin que celui des armes, seul
digne d'un citoyen, et de l'administration intérieure,
y fut abandonné aux affranchis et aux esclaves :
Condition assurément peu favorable à la création
d'une Langue nouvelle, et au développement des
sciences et des arts.
Nous en voyons une première preuve dans les
plaintes de Polybe qui, écrivant son Histoire (2), ne
( 1) Loc. cit., § xxi.
Itaque Tarquinus qui admodum parvos tum haberet liberos, sic Servium diligebat, ut is ejus vulgo haberetur filius;
at que tum fummo studio omnibus iis artibus, quas ipse didiscerat, ad EXQUISITISSIMAM CONSUETUDINEM Grœcorum erudiit.
(2) 150 ans environ avant J.-Ch.
�— 20} —
put trouver dans la Cité un homme capable de
traduire le Traité de paix qui mit fin à la première
guerre Punique; il datait de la fin du 111e siècle de
Rome. D'autre part, la mésaventure de Postumius,
personnage Consulaire, envoyé en ambassade à
Trente (281 av. J.-Ch.), ne sera pas moins probante (1). Il est admis à exposer l'objet de sa mission devant le Peuple assemblé. Malgré la gravité
des circonstances (car il s'agissait d'un casus belli),
sa harangue en langue Grecque fut si pitoyable,
qu'il n'obtint qu'un succès de quolibets et de railleries. Les Trentins le traitèrent de barbare! Où
donc était passé t1 abondantissimus amnis de
Cicéron? Et qu'avai-t-il produit?
Ce n'est pas tout.
Denis d'Halicarnasse établit que la plupart des
Villes Italiques avaient été fondées par des colonies
Lacédémoniennes; les Sabins notamment devaient
leur existence à l'une d'elles.
D'autre part, nous savons par Suétone (2) que
les Vétérans, en fouillant les vieux tombeaux de
Capoue, découvrirent celui de Capis son fondateur.
Il contenait une table d'airain écrite en caractères
et en mots Grecs, verbis et litteris : Et l'Italie
(1) Val. Max. Lib. 2, C.
(2) Suet., J. Cés., § 8,
2.
�— 204 —
Méridionale finit par prendre le nom de Grande
Grèce. Nous ne serons pas surpris si la langue Latine s'appropria la grammaire des Grecs, et plus de
la moitié de leurs mots dont ils changèrent la forme :
l'exposé qui précède en rendra la cause évidente.
Mais que firent les Romains pour la création d'abord, et ensuite pour la propagation du Latin???
Nous allons être en mesure d'apprécier ce qu'il
pouvait être, en l'an 592, de Rome dans une Ville
dont le Sénat s'oppose itérativement à l'enseignement libre de la philosophie et de l'éloquence, et le
repousse comme une nouveauté dangereuse. Le fait
semble si étrange que nous croyons devoir le
justifier par le texte lui-même qu'Aulu-Gelle (1 )
nous a conservé.
« Le Préteur M. Pomponius a consulté le Sénat
)) sur ce que l'on proposait contre les philosophes
» et les Rhéteurs, lisez Professeurs d'Eloquence.
)) L'avis du Sénat s'est trouvé le même que celui
» du Préteur, et l'Assemblée a ordonné à M.
)) Pomponius de les bannir de Rome, ainsi qu'il
)) croyait la mesure dans l'intérêt de la République
» et du devoir de sa charge.
Il ne s'agissait alors que de l'enseignement
en langue Grecque, le Latin n'existant encore qu'à
(1) T. 3, Lib. 1 5. C. 11. Noct. att.
�— 205 —
l'état rudimentaire, et destitué d'ailleurs de toute
littérature. Ainsi privés des modèles à proposer à
leurs élèves, les maîtres Grecs en furent réduits à
les chercher chez eux, où ils avaient l'embarras du
choix (i). Les Patriciens les mieux avisés prirent
des Instituteurs Grecs pour diriger l'éducation de
leurs enfants. Telle fut la précaution prise par
Paul Emile, surnommé le Macédonien, le vainqueur de Persée. Il s'adressa directement aux
Athéniens pour en obtenir un de leur choix, et ils
lui envoyèrent Métrodore. L'Elève devait être digne
du Maître : il s'appelait Scipion l'Emilien, père du
vainqueur d'Annibal. Mais généralement les familles
riches envoyèrent leurs enfants aux Ecoles d'Athènes si sagement réglées par Platon.
A l'exemple de son maître Socrate, il y fit enseigner la philosophie morale, pour procurer à la République des citoyens versés dans la connaissance
des lois et des principes de Justice. Ainsi, Rome put
s'enorgueillir d'Orateurs comme Hortensius et Cicéron, de Généraux et d'Hommes d'Etat comme les
Fabius et les Scipion, des Magistrats et des Sénateurs qui ont brillé d'un si vif éclat dans sa glorieuse
histoire.
Quelques années plus tard, les Censeurs Lucinius
(i) Suéton., De clarib. rhet., C, § 2.
�— 206 —
Crassus et Domitius iEnobarbus prennent l'alarme
à propos d'une nouvelle manière d'enseigner, pratiquée par certains Rhéteurs qui ont pris le nom de
Latins. La jeunesse se porte en foule à leurs Ecoles ;
c'était sans doute la première envolée de la Langue
Nationale. Cette innovation fut réprouvée comme
contraire aux mœurs anciennes, et aux usages des
aïeux.
Le Latin, à cette époque, était encore en formation. Comment se serait-il répandu même dans la
Cité, puisque le Sénat, d'accord avec les Censeurs,
fermait systématiquement les portes des Ecoles?
Enfin, nous savons par Cicéron que la Rhétorique en langue latine fut enseignée seulement à l'epoque de sa jeunesse : ce qui veut dire sans doute,
que la loi de bannissement édictée contre les Professeurs, ne fut plus appliquée. Une peut d'ailleurs
être question que d'un enseignement dû à l'initiative privée, car il ne devint Officiel que sous
Vespasien. Le texte de Suétone (i) lève tout
doute à cet égard ; Primus è fisco Latinis Grcecis
que Rhetoribus annua Centena Constituít. Voilà donc
les Professeurs appartenant enfin à Y Instruction
Publique avec un appointement annuel de 20,000
francs. La victoire ne fut pas définitive, puisque
(1) Suét., Vespas, § 18.
�— 207 —
le second fils du Fondateur, Domitien, renouvela
les proscriptions antérieures, et les étendit à toute
l'Italie. Ainsi le Sage Epictète en fut réduit à
demander asile à la ville deNicopolis, en Epire (fin
du premier siècle de notre ère).
Or, à cette date, les Dialectes d'Espagne, d'Italie
et des Gaules existaient depuis 1200 ans au moins.
La nouvelle venue était trop jeune et insuffisamment armée pour les vaincre. Cénac Montcaut a pu
établir, avec une compétence indiscutée (1), qu'à
l'époque de Cicéron et de Virgile, les ouvriers et
les pâtres de la campagne de Rome continuaient
àrparler Osque, jusque dans Pompéia, la Versailles
fastueuse où se coudoyaient les Lettrés et les Grands
Seigneurs de leur temps (2).
En effet que pouvait savoir le peuple Italien, même du Latium, d'une langue fort difficile, à peine
éclose dans la serre chaude des beaux esprits de sa
Métropole et si jaloux de leur œuvre, qu'ils en prohibent l'enseignement comme dangereux ? Pourquoi le peuple se serait-il intéressé à cette création
(1) Revue d'Aquitaine, 1857, septembre et suiv., 3 art.
Strabon affirme la même chose. Lib. v, c. 3, § 4.
(2) Micali cité par Galli [Le nom et la langue des anciens
Celtes. Silint-Etienne, Janin, 1843) établit que plusieurs
inscriptions trouvées à Pompéia, ont prouvé que l'Osque était
encore la langue du peuple au temps de la catastrophe qui
l'engloutit (an 79 de notre ère).
�— 208 —
destinée à tous autres qu'à lui qui n'utilise que le
verbe de son choix, et dont seul d'ailleurs il assure la
durée. Nous savons d'autre part, que l'enseignement
de la nouvelle venue ne s'organisa que plus tard,
vers la fin du premier Siècle, et au profit exclusif
des Privilégiés de la naissance ou de la richesse. En
sorte que du jour de son éclosion jusqu'à sa mort le
Latin a plané dans les sphères supérieures, inaccessibles aux deshérités de la fortune. Sans doute
il en laissa tomber un certain nombre de mots que
la langue vulgaire mit à profit; encore est-il probable qu'il lui avait empruntés : et ce fut tout.
Mais l'argument, déjà suffisant pour le peuple
Italique, prend une bien autre importance pour le
Gaulois conquis. Comment une langue étrangère,
purement aristocratique, odieuse, parce qu'elle
appartient à un vainqueur féroce, aurait-elle pu le
détacher des Dialectes Nationaux?
Avant comme après la Conquête Romaine, avant
comme après les invasions des Barbares, avant
comme après la création du Français, il se servit
et il se sert encore aujourd'hui des Idiomes par lui
créés à son usage dans sa pleine indépendance :
en Italie de l'Osque, de l'Etrusque, de l'Ombrien,
du Toscan, etc., en Gaule du Gascon, de l'Auvergnat, du Limousin, etc., etc., tous également sortis
delà source commune Celto-Grecque.
�Quand donc nos Docteurs en Philologie voudront-ils comprendre qu'en matière de langues
populaires les Nourrices ont une puissance de résistance et de propagande que rien ne peut neutraliser; et voilà pourquoi vous ne détruirez les Dialectes qu'en supprimant jusqu'au dernier ceux qui
les parlent. La mamelle généreuse de la mère
l'emportera toujours sur la Chaire des Lettrés si
éloquente soit-elle, sur le glaive sanglant, ou sur
la torche incendiaire des brigands armés.
La petite Eglise vouée au culte du Latin, dont le
centre résidait à Rome, bientôt dispersée ou détruite par la guerre civile et l'invasion, l'infortuné ne
fut plus parlé par personne. Adopté comme langue
officielle par les Conquérants barbares,par le clergé
qui le constitua dépositaire de ses Dogmes, par les
jurisconsultes continuateurs de l'OEuvre superbe du
Droit Romain: il s'arrête et meurt; sa destinée était
accomplie, et ses héritiers ainsi bien indiqués et
forcément limités. Il ne trouva pas même dans le
Latium, dont il avait pris le nom,un refuge pour
l'empêcher de s'éteindre à la fleur de l'âge. Le
peuple, étranger à sa naissance, devait rester indifférent à sa fortune.
Langue artificielle, greffée sur celle des Grecs
par des Lettrés, elle fut, dès son origine, condamnée à végéter dans les Bibliothèques pour la satis-
M
�faction des Savants; mais à ne jamais descendre
dans la rue, même déguisée sous forme de PATOIS.
Les Savants font les langues qui brillent, et le
Peuple celles qui durent.
Pour nous, qui avons bégayé le Gascon sur les
genoux de notre nourrice, et qui apprîmes les
langues mortes au Collège, nous sommes convaincus de plus en plus, que le Gascon est antérieur de bien des siècles aie Latin : qu'il fut créé
avec des matériaux Celtes et Grecs par nos aïeux,
par ces Gaulois formidables qui imprimèrent à
leur œuvre son caractère indestructible :
Que cette langue, personnelle à la race, a gardé
son individualité, malgré la conquête, malgré les
invasions, malgré la guerre déclarée aux Idiomes
Provinciaux, accidentellement par les César euxmêmes; malgré les fureurs des hommes du Nord
qui vinrent nous piller et nous égorger au xnie siècle
sous des prétextes Religieux; malgré la proscription
prononcée par la Papauté
qui dénonçait notre
chère langue comme Heretjo; malgré les Ordonnances répétées de nos Rois depuis le xve siècle ( i ),
(i) La première Ordonnance prescrivant l'emploi de la langue Française dans la rédaction des Actes Publics, fut portée
d'abord en 1490 par Charles VIII, et renouvelée en 15 10 par
Louis XII. En sorte que l'Ordonnance de Villers-Cotterets de
juillet 1538 de François I" n'était qu'une répétition.
�— 211 —
persuadés qu'il est aussi facile d'effacer une Langue
que de saccager une Ville, ou de voler une Province; et malgré les efforts courageux d'une armée
d'Instituteurs garantis aussi obligatoires que laïques, A quoi ont abouti ces mesures, trop souvent
violentes, se succédant depuis près de 2,000 ans?
Pas une Ville, pas un Hameau, pas une Ferme,
pas un Gascon n'a perdu l'usage de la Langue maternelle. Et nous sommes fier de la parler correctement après un séjour ininterrompu de 64 ans à
Paris. Honneur à nos vaillants Paysans, la forteresse inexpugnable du Patriotisme, ici comme
ailleurs, comme toujours.
Sans doute la langue Aquitanique a subi, sous
l'action du temps, et à travers des promiscuités
inévitables, des modifications appréciables. Beaucoup de ses vieux mots superbes ont disparu de
l'usage, cédant la place à des vocables d'origine
douteuse : Cependant ils durent, pour recevoir
leurs lettres de naturalisation, prendre l'habitus
civitatis qui les rend souvent méconnaissables.
Mais la forteresse de la Syntaxe est plus que jamais
inébranlable.
Il faut donc en prendre son parti : Notre Gascon
sorti des entrailles du peuple Gaulois, comme
d'ailleurs tous les autres Dialectes de France,
d'Espagne, d'Italie, de Portugal, assoupli aux
�212 —
exigences de ses besoins de chaque jour, ménager
des délicatesses de son oreille et de sa voix, miroir
fidèle de son esprit imagé, ne sera jamais vaincu
même par le Français, dialecte du Nord, compliqué
de règles grammaticales nouvelles, pour nous
pénible à bien prononcer, désagréable à notre
oreille avec ses finales muettes, et trop froid pour
nos imaginations ardentes.
Voilà pourquoi nous voulons établir l'antiquité
et la noblesse d'origine de nosto parladaro, contribuer pour notre part à l'améliorer, activer ses
progrès, jusqu'au jour où elle aura reconquis ses
droits légitimes de Bourgeoisie.
Nous y gagnerons qu'elle sera enseignée comme
le Français lui-même à nos enfants Méridionaux,
condamnés, quoi qu'on fasse, à vivre et à mourir
bilingues, au grand profit d'ailleurs de la langue
Française elle-même, branche bien authentique,
qu'on le veuille ou non, de notre vieux tronc Gaulois.
Cette ascendance nous semble assez noble pour
n'être pas reniée.
C'est encore du Midi que lui viendront les
Pascal, les Fénelon, les Montesquieu de l'avenir.
Atal sara, Moussu, d'aquelo ensourcillayro,
D'aquelo lengo muzicayro
�— 2i3 —
Nosto secoundo may : de sabens Francimans
La œundannon a mort dezumpey tres cents ans,
Ta pla biou saquela : ta pla sous mots brounzinon;
Chès elo, las sasous passon, sonon, tindinon,
E cent milo-milès enquèro y passaran
Sounaran è tindinaran (i).
(JASMIN, à Moussu Dumoun).
(i) Il en sera ainsi de cette enchanteresse, de cette langue
musicale notre seconde mère. Des savants Français la condamnent à mort depuis trois cents ans; elle vit quand même, et
quand même ses mots retentissent; sur elle les saisons passent, ils sonnent et tintent; et des milliers d'années passeront,
et ils sonneront et tinteront encore.
��CHAPITRE XII
LE BASSIN DE L'OCÉAN COLONISÉ PAR LES GRECS —
AM. MARCELLIN APRÈS TIMAGÈNE
A.
THIERRY
Grecque
DE
GAULE —
—■
TABLEAU
DES
—
H. RIBADIEU,
noms d'origine
QUELQUES ANCIENS PEUPLES
Idem
DE QUELQUES VILLES —
FLEUVES, RIVIÈRES, MONTAGNES —
Idem
DE
Idem
LA
DES
DE QUEL-
QUES-UNS DES NOMS GRECS CONSERVÉS DANS LA
LANGUE USUELLE
—
MÉTHODE GRECQUE POUR LA
COMPOSITION DES NOMS.
9999
11. Ribadieu a-t-il voulu écrire un roman ou une
histoire véridique, dans sa Brochure intitulée :
Une Colonie Grecque dans les Landes de Gascogne,
de l'an 1200 à l'an 550 avant J.-Ch. ? (1)
Un Roman, si tel est le nom que mérite une
(1) Paris, Dentu. 1863. In-8. B.
N.
L. 2, K. 1935.
�— 2l6 —
création sortie d'une imagination fertile et légère
de preuves, ou dénuée de vraisemblance : une
Histoire certaine, si les présomptions graves précises et concordantes groupées autour d'un commencement de preuve par écrit, suffisent ici, comme
en Jurisprudence, à établir la vérité.
L'Auteurexpose d'abord, avec les Historiens dont
la parole n'est pas contestée, que les Phocéens
avaient fondé Marseille près de six siècles avant
notre ère. Nous n'en sommes donc pas réduits aux
conjectures pour indiquer la source de l'élément
Hellénique dans la région Méditerranéenne. Mais
où peut-on espérer la découvrir dans le bassin de
l'Océan Gascon où cet élément brille avec le même
éclat? Nous avons d'abord le témoignage d'Ammien
qui affirme, après enquête, l'établissement sur le
littoral d'une colonie Grecque signalée par les
Druides.
Ribadieu suit la contrée voisine d'Arcachon. Il
remonte, d'une part, jusqu'à Bazas, de l'autre jusqu'à Dax et Bayonne : Il est partout frappé de la
consonnance et du caractère Hellénique des noms
de lieux qu'il rencontre sur sa route. Il en cite une
cinquantaine qui ont conservé le cachet Grec du
dialecte Dorien (i).
|i)
Voir à la page suivante quelques-uns de ces noms
�— 217 —
Partant de ces données précises, il a supposé
une flotte de ces navigateurs intrépides surprise
par la tempête, après avoir franchi les Colonnes
d'Hercule. Il nous la montre poussée vers le Cap
Phéré, et se sauvant dans le Hâvre d'Arcachon
Aptsffsov, (utilité, secours).
Elle y trouva du poisson et du gibier d'eau en
abondance. C'est en explorant ce pays que leur
GREC
LANDAIS
abydos
andernos .
arès
arrengosse.
balanos
biganos....
boos
bylos
pheret
goos
pelic
pinasse.. .
salles
sos. ..
tagon.,
tarnos.
tyros. .
udos . .
avSpeio;.
áení • ■ ■
v.ppzyaç... ,
pà),a-Joç. . .
ëtûyv.voç . . ,
00)?
TZÙÌO;
f$pt-fSp£Tt .
yw
. . .
(rà\oç.. . .
(TtMÇ
rúyo'J . . .
zapvoç. . .
TÚ00Í. . . .
vSòç
(nom de ville).
viril.
Mars.
fort.
gland.
force-éclat.
(Dor) bœuf.
(Dor) porte,pyles(ville).
courage.
gémissement.
écuelle de bois.
planche.
mouillage.
qui existe encore.
chef.
inutile.
fromage.
eau.
�— 2l8 —
avait livré le Destin, que les nouveaux venus marquèrent leur passage par des appellations en leur
langue, conservées encore intactes aujourd'hui.
Ils arrivèrent, les uns jusqu'aux Pyrénées, les
autres à l'extrémité des sables, vers le pays des
Elusates et des Nitiobriges. Ainsi serait expliquée
l'influence Grecque entre l'Adour et la Gironde.
Ce système se trouve corroboré par les quelques
lignes de Timagène conservées au 15e liv. d'Ammien Marcellin (1).
Il enseigne, en effet, que les premiers habitants
de la Gaule furent des indigènes du nom de
Celtes (2) : puis vinrent des Doriens sous le commandement d'un Hercule, qui s'établirent sur les bords
de l'Océan (3).
(1) Timagène, Historien Grec, originaire d'Alexandrie, avait
écrit avec un très grand soin une Histoire des Gaules sur les
documents anciens que César-Auguste lui avait procurés.
(2) Pausan, liv. 1", C. 3. (Voyage historique.)
« Les Gaulois dont je parle habitent les extrémités de
» l'Europe aux environs d'une grande mer que l'on prétend
» n'être pas navigable, parce que le flux et le reflux, les fré» quents écueils, et des bêtes que l'on ne trouve nulle part
» ailleurs (les baleines) la rendent fort dangereuse
» anciennement ils s'appelaient Celtes ».
Et au chap. 33, lib. 1".
« L'Océan est une mer dangereuse autour de laquelle habi» tent les Iberiens (Espagnols) et les Celtes ».
(3) Abigentes super origine prima Gallorum scriptores vete-
�— 219 —
La brochure se termine par un Glossaire de
quatre-vingt-deux noms Grecs, ayant le but très
légitime d'établir l'exactitude des affirmations du
texte.
Ammien Marcelin a déjà justifié notre foi dans le
Roman de Ribadieu.
Mais est-il donc besoin de recourir aux caprices
d'une tempête, pour expliquer la présence des Grecs
dans l'Océan Landais. A. Thierry satisfait plus
largement le sentiment historique, lorsqu'il nous
montre la Grèce débordant sur la Gaule par la
Méditerrannée, par l'Italie, par l'Océan et par
l'Espagne (i). D'autre part nous savons que les
Phéniciens d'abord et les Grecs ensuite ont exploité
des mines dans les Pyrénées (2). Nous savons
encore de science certaine, que des relations comres notitiam relinquere negocii semi planam.
Sed postea Timagenes et diligència Graecus et linguà hae
quae diu sunt ignorata collegît, et multiplicibus libris :
cujus fidem secuti obscuritate dimota, eadem distincte docebimus et aperte.
Aborigènes primos in his regionibus quidam viso esse
fïrmarunt Celtas nomine régis amabilis, et matris ejus vocabulo Galatas dictos. Ita enim Gallos sermo Graecus.
Alii Dorienses antiquiorem sequutos Herculem Oceani locos
inhabitasse confines. (Am. Marc. Rer. Gest. lib. xv, C. ix,
déjà cité.
(1) Histoire des
Gaulois, tome 1; introduction, page 5 et
suivantes.
(2) Histoire des Gaulois, page 135.
�— 220 —
merciales régulières avaient été établies entre
Marseille et Bordeaux en suivant les cours des
fleuves, reliés par des services de charrois ( i ). Nous
savons enfin que la Grande-Bretagne fournissait
au Continent diverses marchandises, et l'étain plus
spécialement. Il fallait bien traverser la Manche
pour le porter jusque dans les Gaules.
Quoi ! des marins sans peur, en relations avec
Bordeaux, n'auraient pas remonté la Gironde, ou
soupçonné l'existence d'Arcachon qui en est distant
de quelques lieues ? Et ces mêmes hommes dénués
des ressources de la marine moderne, y suppléaient, dans leurs courses aventureuses à la
découverte de nouvelles terres, en semant des
grains sur le sol à peine conquis : ils attendaient
patiemment que la récolte leur eut fourni les provisions nécessaires pour s'enfoncer plus avant dans
l'inconnu. Et nous en serions réduits à supposer
le caprice d'une rafale pour justifier leur présence
en Aquitaine?
Mais après avoir admis l'hypothèse, nous nous
trouvions à l'étroit dans les limites du territoire
exploré par les nouveaux venus, d'après Ribadieu.
Fidèles à la méthode Philologique, nous avons
voulu savoir si les Villes Landaises avaient eu le
privilège exclusif du baptême Hellénique.
(i) Diod. lib. 5, § 18-25.
�— 221
—
Un examen sommaire nous a suffi pour reconnaître que la même empreinte indélébile se retrouve
d'un bout à l'autre de la vieille Gaule. Et elle n'est
pas gravée sur ses Villes seulement mais encore
sur les noms des Peuples qui l'occupèrent dès
l'origine, des Fleuves qui la fécondaient, et quelquefois sur les noms de leurs Chefs les plus illustres.
Messieurs les Néo-Latins, il faut en faire votre
deuil : Les Grecs ont occupé les Gaules douze
siècles au moins avant la
conquête
Romaine.
Clamai tilulus.
Et ce ne fut pas sans conséquences comme nous
allons en administrer la preuve, en attendant de la
rendre plus complète un peu plus tard.
Examinons donc la série des noms
�— 222
NOMS DE QUELQUES PEUPLES DE LA GAULE
NOMS GRECS
LATINS
FRANÇAIS
Allobroges....
peuple de la Gaule (vers Grenoble).
Ambiani
Ambum .
peuple de la Gaule Belgique (Amiens).
AuSiavoi
Atrebates
Atrebates
peuple de la Gaule Belgique (Artois).
krpeGaiòt
Belgici
Belges
peuple très belliqueux de la Gaule Belgique.
Bî/yat
Bellovaci
Bellovaques
peuple de la Gaule du Nord (Beauvoisis).
BsÀ).o«^o!
ìiTovpiys;.
... Bituriges
peuple du Berry.
Bituriges.
Boii
Boyens
peuple répandu dans toute la Gaule.
Boíoi
Britanni
les Bretons.
peuple de la Gaule (Bretagne).
BpsTKwot
�RACINES
ailleurs, sortir, nouveaux venus.
s'avancer à l'intérieur.
— intrépide.
âo-co;— pain, terre à blé.
wzpETiç
6e~ko;
arme offensive, glaive, lance.
êÛ.lTOÍyril
art de confectionner les traits.
BtoTÂ
îpyarouui
vie, cultiver, vivant de culture.
bœuf, peuple pasteur.
KpiOvvoo;
qui a l'esprit solide, prudent.
�— 224 —
GRECS
LATINS
FRANÇAIS
Edui
Eduens
peuple de la Gaule (Nivernais, Bourgogne).
sSoŷoe
-.
Helvetii
llelvetiens
peuple de Gaule, vers la Suisse.
eXouot
ymSoàiXs
yjA-tuAvlzi;
.... Gabales
peuple
du Gevaudan . . ..
yakarat.
Galati
Gaulois
Galates
7K).).OI
Galli
Gaulois
ytvo8aT0(
Genuates . ... Génois (Ligures)..
Cadurci
Cadurques
peuple Celte de l'Aquitaine. (Quercy).
■/.uSovpy_oi
y.a.ova.poi.......
Cavarae
Cavares
peuple de la Gaule Narbonaise.
Celti
Celtes
peuple primitif de la Gaule qui donna naissance
aux Celto-Grecs, Celtibêres, Celto Ligures, etc.
XIITOI
�RACINES
qui aime la bonne chère.
baigner, laver, pays des eaux.
renverser, abattre.
être blanc comme du lait.
idem.
y £VVÎ
lame tranchante.
renfrogner le visage.
XKÚptMI
avoir les cheveux longs,
voyager.
�— 22Ô —'
GRECS
LATINS
FRANÇAIS
Cenomani.... Cenomans
peuple de la Gaule (Maine).
KEvoptKvot
Limovices.... Limousins
peuple de l'Aquitaine.
IsfíoSi-Aiç
Lixovici
Lixoviens..
peuple Gaulois (vers Lisieux).
h)%o6iot
Lingones
Lingons...
peuple de la Gaule (pays de Langres).
liyyoveç
peSwpatpiy.oi...
Mediomatrices
peuple Gaulois (sur la Moselle).
Medulli
peuple de la Savoie.
psSouíot
Medules...
pfMot
Medulii
peuple d'Aquitaine (Médoc).
Morini
Morins....
peuple de la Gaule (Belgique).
fioptvot
Eburones
Eburons...
Celtes de Belgique (Liège).
egoûpwvEî
ílovoi
Vivarais.
Helvii
Helviens ..
�— 227 —'
RACINES
yovoftauoi, yovitio;
fertile, prolifique.
qui vit dans un pays humide.
dissimulés, marchant par des routes obliques.
Aiyatvu
chanter d'une voix claire et harmonieuse.
pt$u-p«£op<tt — régner;
putupì — javelot gaulois, peuple guerrier.
US/.SSWVEÚS
gardien, surveillant.
où on sacrifie des brebis.
donné en partage.
BOISEIVÓÍ
du septentrion.
>/•,
S/OJ
marécage.
�GRECS
y«yvjT<;
LATINS
Nannetes
FRANÇAIS
Nanetes
peuple de la Gaule Armoricaine (Nantes).
vKVTouaroi
Nantuates.... Nantuates
peuple de la Gaule Celtique (Bas Valais).
i)irl«Speft(
Nitiobriges... Nitiobriges
peuple Celtique d'Aquitaine (Agenais).
ovùlaïoi
Vellavii
peuple de la Gaule Aquitanique (Velay).
ouEvuEToi
Veneti
Venètes
peuple de la Gaule Armoricaine (Vannes).
ovtàzai
Volcan
Volees
peuple de la Gaule Aquitanique (riverains du
Rhône).
OVO;O/OVSIOÎ.
... Voconcii
Voconces
peuple de la Gaule Narbonnaise (Die).
xvtmts
Pictones
Pictons
peuple de la Gaule Aquitanique (Poitou).
pnu-Di
Reims.
Rhemi
Remois
�— 22g —
RACINES
viu
naviguer.
VKUO)
couler (bords du Rhône),
méridional impétueux,
transparent, clair.
vivre dans la saleté.
•Âxiù;
qui traîne des iilets.
ô'vj: oyavov
corne, poignée de bouclier.
77VZ7î"J£r>
combattre avec le poing (la pique),
jeune brebis.
�— 230 —
GRECS
LATINS
FRANÇAIS
peuple de la Saintonge.
atyoataiioi
Segusiani.... Segusiens
peuple de la Lyonnaise.
ffivvovtc
Senones
Senonais
peuple primitif de la Gaule.
Katipiytç
Caturiges .... Caturiges
peuple vers Gap et Embrun (Hautes-Alpes).
erwxoàvsi
Sequani
Sequaniens
peuple de la Franche-Comté.
?ouy*ft6fot
Sugambri .... Sicambres
peuple Germain qui a souvent envahi la Gaule.
ioufTiTtoYs;
Suessiones... Soissonnais
peuple Celte (Soissons).
xa.f,iÙM
Tarbelles
ïarbais
peuple de Gascogne (Tarbes).
TKupivt
Taurinates ... Turinois
Gaule Cisalpine (Turin).
�— 2JI —
RACINES
(TKTTW, eVKxQw
équiper, armer.
avyyevnaofiai
s'assembler, porter secours.
atfivit
fier, plein de jactance.
Ke.6 opàea
regarder de haut en bas.
clore, enfermer, séparer,
bouclier pesant.
poursuivre.
Tv.fjêàieo;
qui épouvante.
Too
ou
(Gaul-) — haut lieu,
taureau, peuple pasteur.
Ttcv/Mc —
�—
GRECS
2}2
LATINS
—
FRANÇAIS
Tectosages ... Tectosages
peuple primitif de la Gaule Narbonnaise (Toulouse).
TÎXTOTCCVEÎ
Teutones
peuple de Germanie.
TÎÚTOVÍÎ
Teutons
Tricorii
Tricoriens
peuple de la Gaule Narbonnaise (Gap).
rpixofiiot
Centrones.... Cintrons
peuple de la Tarentaise (en Savoie).
XÉVT/3WV5Í
/jouTíjvoí
Ruteni
Ruténes
Salassi
Saluées
Treviri
Trevires
Rouergue.
truïatrat
le Marquisat.
rmeui^tî
Trêves.
�RACINES
orsyoî aayn
couvert de la saie {sago, vêtement Gaulois).
Twj>
— je cherche,
— qui va à la découverte.
TtuTrWoî
Tjúxoxo/ró;
qui porte trois aigrettes sur son casque.
aiguillon pour piquer les bœufs, peuple pasteur.
AÚfraevu
(GVTKÎV&>
être malpropre.
démarche fière.
trois fois beau, élégant.
�— 234 —
NOMS DE QUELQUES VILLES DES GAULES
GRECS
LATINS
Agatha
Agathensis (ses habitants).
FRANÇAIS
Agde.
Aginnum .... Agen
Aginnenses (Agenais).
icyÂv
Atyra-Area... Aire
nom commun à plusieurs villes des Gaules.
Kipui
nom de la ville
Auxois.
sainte des Gaulois,
une 2e dans la Gaule Narbonnaise (Alais).
á/Eçiàfí;
Alesia
Antipolis.... Antibes
Antipolanus (habitant d').
uvtmoÂi;
Argilla
Hautes-Pyrénées.
Argelès
Arelate
Bouches-du-Rhône.
Arles ..
apytXo;
v.pi'to.z'j.'.
Avenio
Avignon
ville de la Gaule Narbonnaise.
aOsvtov
�RACINES
bonne, courageuse,
qui dirige.
KO»}?
Dieu de la guerre.
nom d'un des fils d'Hercule.
áy-ÏGi — protéger, détourner les maux.
ville rivale.
aoyü.o:
argile.
consacrée à Mars (apnç).
av«tv.)
dessécher.
�—
GRECS
{kuz&apa
236 —
LATINS
FRANÇAIS
Biterras
Béziers
Biterrini
(habitants de)
Valentia
Valence
villes nombreuses de ce nom.
jSataTME
|SMW«
jSovwvic
Vienna
Vienne...
(Allobrogum)
(Isère)
Bononia
plusieurs villes de ce nom
Boulogne.
Bologne
Burdigala.... Bordeaux.
ville d'Aquitaine.
5o0o8ey«ia
'j-jirjv.-'ù.M-j
Vercellae
Vereeil...
Gergovia
Gergovie .
Piémont.
ytftmHm
ville des Arvernes (Clermont).
yiv«êov
Genabum.... Orléans..
ville de la Gaule Celtique.
Kv.fj'/.'ÙM*
Caballio
Cavaillon.
ville de la Gaule Naibonnaise.
�— 2?7 —
RACINES
(í'jtjporr
gouffre, abîme.
action de lancer des traits.
forcer, violenter.
où paissent les bœufs.
Sop« — nourriture.
a.iywlo; — par l'eau, que la mer nourrit.
rpa%iXa;
troglodyte.
yopSynç
impétueux, terrible.
y£VK«, s'ëijv
race, lignée, qui augmente,
habile à la lutte.
�— 238 —
GRECS
LATINS
FRANÇAIS
Cabillonum .. Châlons-sur-Saùne
/«ptça
Larissa
Larisse
nom de plusieurs villes de la Grèce et de la Gaule.
'/o-iyüouvou
Lugdunum... Lyon
capitale du Lyonnais.
í*«çá.o»
Masa
Masere
nom de bourgs, de fermes,
et de plusieurs
familles d'Aquitaine.
■j.«.<7<jctlia
Massilia
Marseille
fondée par les Phocéens 599 ans av. J.-Ch.
fi»Jtoi«vtov
Mediolanum.. Saintes,
(Santonum)
ville de la Gaule Santonienne.
Nemosus
ville des Arvernes.
vEuuaróí
oû'/Epvov
Clermont-Ferrand.
Ugernum .... Beaucaire
ville de la Gaule Narbonnaise.
�— 239 —
RACINES
Kconjkúw —
trafiquer,
mélèze, pays de bois,
prendre un bain.
ttâça,
I/.KÇ«J3QC
pâte, pain.
manger, qui procure des ressources,
régner sur.
habiter, faire paître.
ûy patvoo
mouiller.
�— 240 —
GRECS
FRANÇAIS
LATINS
Placensia .... Plaisance
nom commun à plusieurs villes de la Gaule
7rAaz£vTΫ
et autres pays colonisés par les Grecs.
Emporium .. . Emporus
nom de plusieurs villes de Gaule, d'Espagne,
tufropt»» «ton...
etc., etc.
Ji-n'ov
Setium
Cette
ville du Bas-Languedoc.
r«MtffKwv
Tarasco
Tarascon
ville de la Gaule Narbonnaise.
�—
241
—
RACINES
TTÀCOÍÍTI?
en forme de plateau.
Ipropof — marchand.
— vendre.
TTO jjsoi
nourrir, approvisionner.
troubler, bouleverser.
�NOMS DE QUELQUES FLEUVES DE LA GAULE
GRECS
LATINS
arar
tributaire du Rhône.
âpap
Spovsvrtac
Druentia
FRANÇAIS
Saône..
Durance
Aral
Atax
Aude
fleuve de la Gaule Narbonnaise.
Aturus
fleuve de l'Aquitaine.
Adour
Garomna
fleuve d'Aquitaine.
Garonne
«Toupii
yapo-jw.;
iaap
Isara
Isère
Rhenus
Rhin
qui sépare la Gaule de la Germanie.
prt-nç,
Rhodanus.... Rhône
grand fleuve du Lyonnais.
poSavir
. Sequana
fleuve de la Gaule.
o-jjzavctî
Seine
Sulgia
Sorgues
rivière au territoire d'Avignon, qui reçoit l'Ouvèze et la Nesque.
coúlya;
�— 243 —
RACINES
s'adapter, fournir.
courir vite.
déréglé, désordonné.
sans lutte, sans violence,
du mot Garu (Celte), qui signifie torrent.
ítripns — égal.
priyvúta
rompre, briser, forcer.
poBéoi
faire un grand bruit de vagues, bruyant.
<njxaçt.j
enfermer, séparer.
se baigner ensemble.
�»
— 244 —
AUTRES NOMS : D'ILES, DE MONTAGNES.
GRECS
LATINS
FRANÇAIS
Gebenna
Cèvennes.
montagne de la Gaule Narbonnaise.
xtpprMg
Jurassus
Jura
montagne entre la France et la Suisse.
lopa;
Corsica
île de la Méditerranée.
Y.optsiv.rt
Corse.. .
Lero
Lerins ...
petite île de la côte Narbonnaise.
lỳpuv
■TToivîvo?
Apenninus.... Apennins.
Pyrenasi
Pyrénées
montagnes séparant la France de l'Espagne.
Kvpu-mioç
�— 245 —
RACINES
gîte de fauve.
kpóç
sacré, admirable.
xopavio
tondre, raser.
Iripoç
bagatelle, sans importance.
TTOÎUVI?
troupeau de brebis.
TZUpnVS[iO(
qui souffle le feu.
�— 246 —
QUELQUES NOMS DE CHEFS GAULOIS
LATINS
GRECS
àvrçpOEVTWS'.
• • •
PpÎT0[tUpZOÇ . ■ . .
ovtpyvjzopiÇ..
FRANÇAIS
Aneroès
Britomartus..
. Vercingetoricus Vercingétorix
I
�— 247 —
RACINES
s'informer, s'enquérir.
êpt.6v; ptúpTVÇ
redoutable témoin.
âpeva -zuvpoç
protège taureau, défenseur des troupeaux.
«f/.a ëapt;
avec maison fortifiée.
�— 248 —
QUELQUES NOMS PROPRES
CONSERVÉS DANS LE LANGAGE USUEL (l)
GRECS
FRANÇAIS
LATINS
AXtçavSpo?
Alexander.... Alexandre
ay)ata
Aglaia
aftêpotrio?
Ambrosius ... Ambroise
avciurauia
Anastasias. .. Anastasie
Kvfyivf
Andreus
André
§a(jùtv;
Basilius
Basile
ypuyòpio;
Grégorius .... Grégoire
eiprivKioç
Ireneus
...
Aglaé
l'une des Grâces.
,'..
Irénée
Zoé
(i) Proposés ici comme échantillon
nombre est très considérable.
seulement, car leur
�— 249 —
RACINES
ulsça'Jtìpo;
fort, qui porte secours.
uyìuóç
brillant.
ttiiêpoaioç
divin, admirable.
répandre, verser goutte à goutte (la consolation).
U\IY)pilQÇ
viril.
fiaaiXívç
roi, royal.
ypriyopéa
veiller.
itp-nvri
calme, tranquillité,
vie, existence.
�GRECS
LATINS
FRANÇAIS
iiapto;
Hilarius
Hilaire
vuòlaóç
Nicolaus
Nicolas
yàmnoç
Philippus .... Philippe.....
y«>tÇ
Félix
Félix
%kûpiç
Chloris
Chloris
x/juo-óffTOftof....
Chrysostômus Chrysostôme
ïnnilvTo;
Hippolytes ... Hippolyte
Clotarius
ìûcúíàpioç
avaatao-íoí
«xtMsuî
Clotaire.,
Anastasius ... Anastase ■
...... Achillus
Achille..
�— 251 —
RACINES
ilapoç
gai, joyeux.
— vaincre.
— le peuple.
vtxàw
\a.ôç
ytXsw
titnoç
— aimer.
— cheval.
<pùo;
bienveillant.
iù.C>poç
jeune, frais, vigoureux.
— or.
— pénétrant.
y.pvaoç
ropoç
— cheval.
Mw — je délie.
tOTOf
jeunesse, vigueur.
Ava«TTa<7t?
action de renverser.
non entamé, invaincu.
�— 252 —
GRECS
LATINS
FRANÇAIS
SoipcttTo;
Damasus
Damasc.
Stlfivoç
Delphina
Delphine.
Sylia
Delia
Délie
IXtv»
Helena....... Hélène..
túSoxtcc
Eudoxia
Eudoxie..
ívaíêioç
Eusebius
Eusèbe...,
lûfDftia
Euphemia.... Euphémie.
ÇDvoSia
Zenobia.
Zénobie. ..
�♦
— 253 —
RACINES
p
\«.ltjbç
bègue ou boiteux,
dompter,
de Delphes,
de Délos.
fktvt! ,
la femme Grecque.
sùSoxôw
plaire,
pieux.
ZVféuLlK
bonne renommée.
ÇÍv j3tof
soutenant la vie.
�— 254 —
GRECS
LATINS
FRANÇAIS
Thomasius...
Theodorius...
Biòfù.oç
Théophilus... Théophile
utlutU
Melania
Mélanie ..
�I
— 255 —
RACINES
admirer.
SïoSwOlJTOf
donné par les Dieux,
agréable aux Dieux.
uîlàtviç
surnom de Vénus.
\
i
�— 256 —
Y a-t-il en France une rue de Ville ou de Bourg •
où ces noms bien Grecs ne soient pas prononcés
chaque jour? Pourquoi cette fidélité invincible des
familles Françaises à les conserver à travers les
événements terribles de notre Histoire, qui firent
sombrer tant d'autres traditions respectables! ! !
Nous avons groupé des séries de noms pris au
hasard, pour établir que les Grecs avaient occupé
la Gaule depuis les temps lesplus reculés, et contribué
ainsi dans une assez large proportion, à la création
des mots de la langue Gauloise, que nous parlons
encore aujourd'hui.
Or, les Latins conquérants, trouvant des noms
consacrés par l'usage, se contentèrent de les adopter
en les habillant à la Romaine; ils n'avaient rien de
mieux à faire. Sont-ils fondés, ainsi que le prétendent de graves Savants, à s'attribuer l'honneur de
leur création??? Evidemment non.
Ajoutons que la lecture attentive de ces noms,
nous initie à la méthode suivie par les Grecs, pour
utiliser leur langue.
Veulent-ils individualiser un Roi, un Chef
de guerre, ou tout autre personnage : Ils cherchent sa qualité dominante, l'originalité qui le
distingue, sa force, son audace, son habileté à
manier les armes ou les chevaux, sa prudence, etc.;
s'ils ont un mot traduisant exactement la pensée
�ils lui appliquent ce mot, avec une modification à
peine appréciable. Si ce mot n'existe pas, ils le
composent, juste toujours. Le procédé est le même,
qu'il s'agisse d'une Ville, d'un Fleuve, d'une
Montagne, d'une Tribu, etc.; si bien que la traduction exacte du nom nous révèle les qualités ou les
défauts de la personne ou de la chose dénommée.
11 est donc très facile de reconnaître les noms
d'origine Grecque. Mais leur signification nous
échappe quelquefois, parce que nous ignorons
la circonstance qui pourrait servir à l'expliquer.
Ces petites lacunes n'infirment en rien la preuve
évidente que les Grecs ont apporté une large
contribution à la création du Vocabulaire Aquitain;
leur trace est d'ailleurs restée indélébile ici comme
partout où ils sont passés.
��ANNEXE DU CHAPITRE XII
Après ce travail d'analyse sur les noms à racine
Grecque, nous avons essayé la même expérience
sur les dérivés du Celte. Nous trouvons un certain
nombre de mots, commun aux deux langues. Ainsi
se confirme la théorie de P. Duplan que le Grec a
fait son profit du Celte dans une certaine mesure ( i ).
Nous avons encore reconnu chez les deux peuples
unefaçon de procéder identique dans la création des
mots : c'est-à-dire que les uns et les autres recherchent la particularité propre à la chose, et la révèlent dans le vocable qui doit l'individualiser. Il
devient ainsi pour l'oreille ce qu'est la photographie
pour les yeux : le son fait image, si l'on peut ainsi
parler. Les Méridionaux pouvaient seuls prendre
de telles précautions. L'esprit froid des hommes du
Nord n'en éprouve pas le besoin. Les tableaux qui
suivent justifieront le fait allégué.
(i)
Voir le chapitre
H
spécial au Celte.
�—
2Ô0 —
NOMS DE RIVIÈRES
FRANÇAIS
CELTE
La Saône(i).
Le Doubs....
La Loire
L'Arar ...
Doubios. .
Liger. ...
Le Rhône. ..
Le Rhin
Rhodanus
Rhenus...
L'Oise......
La Meuse.. ..
La Moselle. .
La Marne . ..
La Somme. .
L'Aube
Le Cher
Le Gers
L'Isère
La Drôme ...
La Durance..
L'Aude
Le Tarn.....
Isura
Mosa
Mosella. .
Motrona..
Samara . .
Alba
Carus. ...
^Egersius.
Isarn
Drom. ...
Druant. ..
Alax
Gar
L'Adour. ....
Ature
La Garonne..
La Dordogne
Garu
Dordonia.
SIGNIFICATION
la douce, la lente.
la paisible.
la ravageuse aux
froides eaux,
le roulant,
la rivière au cours
rapide,
la lente,
la pressée,
l'abondante,
la sablonneuse,
a croupissante,
e lit blanc,
l'impétueux,
"impétueux,
le couleur de fer.
la prompte,
la mauvaise,
la bonne eau.
la rivière au grand
bruit,
la rivière qui remue
des pierres,
la très rapide,
la profonde.
(i) Extrait de Bouché de Cluny, page 234 à la note du
deuxième livie.
�261 —
NOMS DE MONTAGNES
FRANÇAIS
CELTE
SIGNIFICATION
le premier feu.
Les Vosges ..
Les Cevènes..
Les Ardennes.
montagne
aux
bœufs sauvages.
montagne à la cime
élevée.
la grande forêt.
�t
— 262 —
NOMS DE QUELQUES PEUPLES
FRANÇAIS
Troyes
CELTE
Tricasses
Chai.-s-Saône Catalaune
SIGNIFICATION
les très forts.
les braves.
Langres
Lingones
les belliqueux.
Poitiers
Pictones
Le Mans
Cenomani
hommes au gros javelot,
les esprits subtils.
qui habitent sur les
rivières.
les coureurs excelRedones
Rennes
lents.
les braves à forte
Carnutes
Chartres
épée.
lepeuple belliqueux
Auvergnats... Averna
par excellence.
Bellovaques... les hommes valeuBeauvais
reux.
le
peuple avide de
Abricates
Normands....
combats.
Nantes
Namnetes
�Après cette démonstration irréfutable par les
mots conservés depuis vingt-cinq siècles, nous
reprenons pour notre compte les affirmations des
graves Historiens cités dans les Chapitres précédents; et, confiant dans la solidité de nos preuves,
nous répétons avec eux :
Les premiers habitants de l'Aquitaine s'appelaient Celtes, Galles ou Gaulois, c'est tout un.
A une époque immémoriale, si l'on veut, des
Colonies Grecques, la première de sang Dorien,
se confondirent avec les Aborigènes, et leur firent
accepter leurs Institutions, leurs Coutumes, et plus
de la moitié des mots de leur Vocabulaire : et rappelant le mot du Christ à saint Thomas, nous osons
dire aux incrédules : Vide pedes, vide manus.
��CHAPITRE XIII
D'OU
VIENT
LE
NOM
DES
GASCONS
????
La Gascogne a tenu parmi nos Provinces une
place glorieuse : et cependant nul ne peut affirmer
qu'en hypothèse, l'origine de son nom. Strabon a
esquissé le portrait de l'Aquitain. Il ressemble
singulièrement au Gascon, bien que le fameux
Géographe apprécie que le type se rapproche de
l'Espagnol plus que du Gaulois. Nous en savons la
raison : l'Espagne avait été peuplée d'abord par les
Celtes comme l'Aquitaine elle-même (i). En effet,
Diodore, avec' Pausanias, Am. Marcellin, etc.,
appelle Ce//eslespeuples habitant vers les Pyrénées,
et Gaulois ceux qui occupent le Nord de la Celtique.
Stjabon n'est pas seul à affirmer que l'hyperbole
(i) Am. Thier., Hist. des Gaulois, p. 27.
�est la figure qu'ils préfèrent (i); ils aiment, dans les
discours, l'enflure et l'exagération. Ils sont cependant spirituels, et capables de toute Erudition.
L'auteur contrôla-t-ilavec soin son modèle avant
de le sculpter ainsi sur le vif???
Etait-il Celte ou Gaulois? Il est bien Gascon en
tout cas : erreur très excusable, les trois noms
représentant d'ailleurs la même race.
Quoi qu'il en soit, Pline fait figurer les Vassi
parmi les anciens peuples d'Aquitaine. Cependant
la plupart des Auteurs plus récents affirment l'origine
commune des Gascons avec les Vacci, cantonnés
dans la Navarre, qui eurent la ville de Pampelune
pour Capitale. Mais à quelle époque ces Navarrais
auraient-ils franchi les Pyrénées pour ocçuper une
partie de la Gaule? Les Historiens en sont réduits
aux conjectures sur le fait lui-même, comme sur sa
date.
Les siècles s'écoulent : Grégoire de Tours interrompt un long silence (2) pour nous signaler un
Duc Bladaste partant en guerre en Vasconie, où,
d'ailleurs, il perdit son armée (an 580).
Le même Auteur nous apprend, sous la date 587,
que les Vascons descendirent des montagnes, firent
irruption dans la plaine, ravageant les campagnes,
( 1 ) Diod., lib. 5, § ao.
(2) Lib. 5, c. 13.
�— 367 —
brûlant les maisons, et enlevant bêtes et gens (1).
Il n'est pas imprudent de supposer que, maîtres
primitifs du pays, ils l'abandonnèrent, fuyant devant les brutalités de la conquête Romaine, ou chassés plus tard par les Invasions barbares, et cherchèrent leur salut dans les régions Montueuses; qu'ils y
rencontrèrent le peuple pasteur qui déjà les occupait, et firent alliance avec lui dans un intérêt de
défense commune. La guerre se trouvait ainsi
déclarée entre les Conquérants nouveaux venus, et
les anciens habitants dépossédés, toujours indépendants, grâce à l'abri des montagnes.
Mais la question de l'origine de ces Vascons si
audacieux et si intrépides reste entière.
Scaliger, cité par Oienard (2), fait remonter au
siècle d'Auguste leur établissement vers le pays des
Basques. Valerius Messala leur ayant infligé une
cruelle défaite en Espagne (ne serait-ce pas plutôt
Statilius Scaurus?), ils franchirent les montagnes,
et s'établirent dans la région deDax etde Bayonne.
Cette hypothèse purement gratuite, et que rien
ne justifie, a été unanimement repoussée. Elle est
d'ailleurs inconciliable avec le texte de Pline relatif
aux Vassi.
Isidore de Séville a confondu les Vacci avec la
(1) Lib. 9, c. 7.
(2) Notit. utriusq.
Vascon.,
p.
383.
�— 268 —
bande de vagabonds que Pompée ramena d'Espagne, et établit plus tard au pays de Comminges.
Oiénard a, lui aussi, proposé son système, qui
ne vaut pas mieux que celui de ses devanciers.
Après la mort de l'Empereur Gracien (an 383),
le désordre de l'administration de l'Empire, et l'affaiblissement de ses forces, livraient les Provinces
éloignées au premier occupant.
Les intrépides Vascons se jetèrent résolument
sur l'Aquitaine, et s'emparèrent du Pays Basque,
du Béarn et de la Bigorre (de 406 à 423).
Où sont ses preuves?
M. de Marca, sans plus de raison, reporte cette
occupation à l'année 556.
Suivant le Père Daniel et l'Abbé Vely, les Vascons n'étaient pas encore établis en
Gaule au
moment où, vaincus par Thierry et Théodebert, ils
leur imposèrent le Duc Genialis, an 602. Cette nouvelle version est en contradiction flagrante avec
Grégoire de Tours.
Enfin, rappelons pour mémoire, ceux qui prétendent qu'après avoir mis un pied dans la Novempopulanie, ils s'étendirent peu à peu jusqu'à la
mort de Pépin d'Héristal (714). Des notes déjà
anciennes, mais que je crois exactes, m'ont fourni
l'Exposé qui précède.
Tous ces systèmes
contradictoires, également
�n
— 269 —
dénués de preuves, se réduisent en pures hypothèses
imaginées par les Auteurs, à défaut de documents certains, pouvant éclairer les obscurités de
nos origines. Il n'y a donc pas lieu de s'y arrêter.
Tel a été certainement l'avis de l'un des plus illustres Historiens de notre temps; je veux parler
d'Amédée Thierry.
Or, voici ce qu'il propose (1). Les Vascons,
composaient une Tribu .des bords de l'Ebre : Leur
nom devint célèbre au vie siècle, lors de l'insurrection des peuples Escaldunas contre les Mérovingiens. Le Radical anse, ose, esc, dont vase paraît
n'être qu'une forme aspirée, figure très anciennement comme nom de lieu et de Tribu, soit au Nord
soit au Midi des Pyrénées. Voilà déjà confirmée la
mention de Pline. Puis il ajoute : Les Espagnols
appellent les Basques Vascuenses, Vascongados.
Ainsi s'expliquerait le mot Vascon dans l'Histoire,
pour désigner en France et en Espagne l'ensemble
des Tribus parlant la langue Escarra! ! !
L'illustre Ecrivain reconnaissant l'impuissance
de la Méthode Historique, fait appel à la Philologie
pour le conduire à la solution du problème. Mais
un Néo-Latin, ignorant nos Dialectes Méridionaux,
ne pouvait pas en tirer profit.
(1) Histoire des Gaulois, page 76 et suivantes.
�— 270 —
La langue Basque, en efiet, absolument étrangère à l'Espagnol et au Gascon sortis d'une souche
commune, ne ressemble à rien de ce qui l'avoisine.
Son origine, à cette heure, n'est même pas déterminée. Si les Basques s'étaient emparés, à une
époque quelconque, d'une portion du territoire
Aquitanique, ils n'auraient pas, plus que les autres
envahisseurs, déraciné la langue primitive. Mais
nous retrouverions sur la partie définitivement
conquise et occupée par eux, une trace quelconque
de leur présence. Or, dans les plaines comme dans
les vallées qui s'étendent des Pyrénées à la Garonne,
nos Idiomes sont identiques, avec des prononciations et des orthographes variées, ou des applications
quelquefois différentes du même mot. Il est même
assez curieux de remarquer, que dans le Département
du Gers, ce vrai cœur de la Gascogne, la langue
affecte des allures Helléniques plus nettes encore
que chez ses voisins; preuve incontestable de son
existence bien antérieure à la conquête Romaine.
Quant au Basque, il ressemble si peu à la langue
Gasconne, qu'une vieille Légende semble avoir été
inventée pour en bien marquer la différence. La
voici :
Un Diable Gascon fut, pour ses méfaits, exilé
chez les Basques, qui lui firent fort bon accueil. A
l'expiration de sa peine, qui avait duré dix ans, il
�— 271 —
ne sut pas même leur dire MERCI en leur
langue ! ! ! Et c'était un Diable ! ! !
Reprenons donc la question insoluble pour
l'Histoire, au point de vue purement Philologique.
Nous savons comment les Grecs, en créant les
noms, soit d'une contrée, soit d'une peuplade, etc.,
s'attachaient à indiquer leurs qualités, leurs défauts
ou leurs aptitudes.
Nous en rappelons quelques-uns.
pix«àpeft(, Berry, vivant de culture — èiproc,
Artois, pain, terre à blé, —
navigateurs, etc., etc.
v«w
vivnrui, Nantes,
Or, Amédée Thierry atteste lui-même (1) que la
partie du territoire situé entre le pied des Pyrénées
et la moyenne Garonne, passait pour le meilleur, et
le mieux cultivé de toute l'Aquitaine.
Cette vertu de la terre, et les habitudes laborieuses des habitants, nous dispensent d'aller chercher bien loin un nom qui jaillit naturellement du
sol et de sa culture.
kakia cultiver, travailler avec art. Auski, habitants du pays dont Aux [2) était la Capitale. Le
Radical, ask, ausk, oskfo), est hors conteste cette fois :
Hitt. des Gaulois, p. 431.
Auch a porté le nom d Aux jusqu'à la fin du XVII" siècle.
Le changement de Vx en ch est d'hier, et Vx lui-même ne fut
que la transformation de Vsk
(3) Le k est lettre grecque, le c n'existant pas en Grec
plus que le q.
(1)
(2)
�— 272 —
et il a le grand mérite de rappeler le vassi signalés
par Pline comme un peuple primitif de l'Aquitaine. Par oû l'on voit, que les Gascons ont reçu
le baptême Grec ainsi que la plupart des anciens
peuples de la Gaule ou de ses Provinces, comme
nous l'avons précédemment établi.
Donc toutes les hypothèses ingénieuses des Historiens, s'évanouissent devant cette explication si
simple.
Les Vassi que les Grecs auraient écrit ouacrert ( 1 ),
les Vascons, occupaient, au moment de la Conquête
Romaine, le territoire des oski, qu'ils abandonnèrent; ou peut-être ne s'exilèrent-ils qu'au moment
des invasions postérieures si funestes à l'Aquitaine.
Plus tard, à une époque fixée parGrégoire deTours,
vers la fin du vic siècle, et grâce à leurs vaillants
efforts, ils reprirent le territoire dont ils avaient été
précédemment dépossédés par les Barbares, mais
sans changer de nom, ainsi que l'attestent Pline et
Grégoire de Tours à près de six siècles de distance.
(1) Le v n'existe pas en Grec plus qu'en Gascon; ce qui
faisait dire au Savant Scaliger : « Heureux pays, où vivre
» (bioue) est synonyme de boire (beove). »
�CHAPITRE XIV
QUELQUES VIEUX .MOTS GASCONS D'ORIGINE CELTOGRECQUE,
EN
REGARD
DE
LEURS
SYNONYMES
D'ORIGINE LATINE, TOUS ÉGALEMENT EN USAGE. —
DEUX
MOTS :
TABLEAUX
i°
COMPARATIFS
GREC,
GASCON,
DE
CHACUN
LATIN,
IOO
FRANÇAIS;
2° GREC, GASCON, FRANÇAIS, LATIN, GASCON. —
QUELQUES MOTS SUR LA PHONÉTIQUE.
9999
A la fin du i" Volume de Las Belhados, nous
avions groupé, exetnpli causà, sous les initiales A
et B, deux cents mots environ d'origine purement
Grecque, encore en usage en Gascogne, et que le
18
�— 274 —
Latin ne saurait revendiquer sous aucun prétexte.
Dans ce Chapitre nous renouvelons l'expérience,
avec une série d'autres mots pris au hasard. Notre
Dictionnaire rendra évidente la facilité d'étendre
indéfiniment ce moyen de preuve.
Mais plus ambitieux, cette fois, nous allons
établir par une série d'exemples, sous le § II, que
le vieux mot Gaulois persiste dans l'usage, alors
même que le Vocabulum Latin a été adopté pour
indiquer la même chose, ou exprimer la même
idée.
Ainsi l'un et l'autre se superposent comme deux
synonymes, bien que sortis de sources différentes;
et le Gascon y gagne d'avoir deux mots au lieu
d'un pour exprimer la même idée : le premier, traditionnel, celui de la race; le second, d'importation
relativement récente, celui de l'étranger. Telle est la
raison de l'extrême richesse d'une langue que des
ignorants prétentieux appellent Patoise depuis des
siècles. En empruntant sans besoin, et fort discrètement d'ailleurs, chez le voisin, elle n'abandonnait rien de son trésor accumulé, c'est-à-dire de sou
individualité Gauloise.
�Si nous n'avions pas commencé cette étude à la
limite extrême de la vie, nous essaierions certainement de rétablir la langue primitive dans sa pureté
originelle, avec ses deux principaux éléments constitutifs, Celte et Grec, en la dégageant des alluvions
facilement reconnaissables, formés à une date relativement récente.
Espérons que cette entreprise Patriotique tentera
les généreux efforts de notre jeunesse Méridionale.
�—
276
—
§ Ier
QUELQUES MOTS GASCONS
D'ORIGINE PUREMENT GRECQUE (I)
GREC
fvaìïì
.olïxo)
y
X(£MjCtg
-/.'/■I.Ç-;ZÀSÍSO,-
GASCON
Phiolo
Koula
Chikourèio
Kledo-Kléclat
<T/ini tvyiv.v.
Galop, galoupa. ....
Eskis-eskissa
--lema
Trépa, trepade
0.&«O<ma
e>jzu
Thros
Theko
Titha (Bay)
Entaouma-entamena.. .
Esklata
x«Aircg<i
Ti6tçw
svxauvw
.ixa-r/Xào-On-j
y
(1) Cent mots suffisent à la nécessité de la démonstration.
�277 —
LATIN
FRANÇAIS
Ampulla
Fiole.
Agglutinare
Coller, joindre avec delà
Intubus
Chicorée.
colle.
Crates-Cratilius
(•/íanjí, xsaTcw, contenir) Claie, clôture.
Currere
Galop, galoper, courrir.
Laceraré
Déchirure,
déchirer, la-
cérer.
Gauderè-nugari
.'..
.. Lieu
où
l'on
s'amuse,
s'amuser, se réjouir.
Pars
Morceau, part.
Siliqua
Gousse.
Lactaré
Allaiter, faire têter.
Frustum desecare
Entamer.
Dissilire
Eclater, rompre.
�GASCON
GREC
rvjng-Tvir*f
Tipo-tapo
jÇtTovtov
Koutilhoun
raya*
Estuja-estujoc
ỳjoaï
Arrat-arrata
•jcrzîko,-
Esklop
pXáoxtov
Phlaskou
(7jfivyw
Phringa
iptra
Phrounsi
xKffgrúv
Kouse-kousut
pM>»j
Bardot
Aoubardo
<7^«o«<70'!»-(7—«paya
Esperreka
jSú<û-t6va'«
Boussoua, boussoun .. ..
/u^ów
Koula
xaTÎu
Kaitiou
Kaitiouc
xvrra
Koupa
SÇuf
Hissoun
jxáayoí
'jioto)
Margot, Margasso
»
Hissa
�FRANÇAIS
LAT IX
Inconsultè
Tunicula
Occultare
Mus ([tvf-tâii)
Calceus ligneus
\ tort et à travers.
Cotillon.
Cacher-cachette.
Rat-détruire les rats.
Sabot-chaussure de bois.
Lagena
Puellas colère
Flacon.
Courtiser les filles, fringant.
Linteum in rugas cogère Froncer une étoffe.
Suere
Coudre-cousu.
Clitellus (xÍ«TÓs)
Bête de somme.
Clitellae
Laceraré
Obturaré .
ex Vendemia vinum se-
Le bat.
Mettre en lambeaux.
Boucher-bouchon.
Exprimer le suc, couler
gregare ...
Miser
le vin.
Malheureux
Pauperiês
Secare
Aculeus
Misère.
Couper.
Aiguillon d'abeille,
serpent.
Pica graeca
Attollere.
■
Pie grièche, margot.
Hisser, tirer en haut.
de
�GASCON
GREC
Dart
aoSiç
Altt-^M
Aliska
xoûfo;
Koho, Kopho (Toul).. ..
■/UIXM
zyó.luTv.
àyaSûwu
Eskalansit
Agathi
ïptt-tSos
Araderio (Béarn)
rnrttve;
Tapio
natfoo;
Pagnoto
jmfiii
Gnaphou
3TMV
Estroun
fiiityto
Abrouka
tp&f*%iç*
Embrouki
ueryytcvi
Magnigansos
Magnigansa.
Massa
Mustiga
Koussut
Lèri, Jan-lèri
filtri rnç.
Sabatò
Estama
�— 281 —
LATIN
FRANÇAIS
Dard, trait.
Exciter.
Coiffe (de femme).
Debilitatus
Affaibli.
Adoucir.
Meliorare
Contentio
Dispute.
Lutamentum
Pauvre habitation bâtie
en terre.
Sot, maladroit.
Ouvrier maladroit.
Etron, merde.
Pertundere dolium. .. . Mettre un tonneau en
perce.
Ensorceler, prendre aux
filets,
Dolos nectare
Manigancer, manigance.
Manibus tractaré
Virgis caedere
Elegans
Ineptus, stolidus. , . .
Sutor (ffxuTsúf)
Plumbum illinire. ... .
Masser.
Battre de verges.
Cossu, élégant.
Niais, sot, Jean-sot.
Savetier.
Etamer, étendre un métal
sur un autre.
�GASCON
GREC
íx-xAÙirTM ëy/.puufi«
Xaftjrpoi
Enkrumàt ......
Lambret, lambre
yiva?
^>«;-K>!OÎ
Phinas, phinassè
Plancho
Enluat
KUMXTOC
Aouratje
iptvyti
ip\iea-£ç\i<ruv
thnm
r» viam
TTzirv.
77tyti
s
pvg«
VóTÓ;
'ji-mnvj.rjx
Kxf«Tiùap«i
y.'t.oii;
Arrégaouta ...,
Karrussa
Alempia
Entekat
Pinsan
Hitza
Mèko
Laüto
Gaissouna (P).
Krakade (Land)
Kouliê
�I
— 283 —
FRANÇAIS
LATIN
Nebulosum tempus .... Temps sombre.
Fulgur, insignis
Eclair, brillant, remarquable.
Astutus
Fin, matois.
Tabula
Planche.
Mente turbatus
Lunatique, ayant la tête
troublée.
Tempestas
Qui court comme le vent,
orage.
Evomere
Vomir.
Trahere
Traîner, charrier.
Laetare
Réjouir, donner bon espoir.
Effetus
Affaibli, épuisé.
Frigilla (fyjyû.o;)
Pinson (oiseau d'hiver).
Pungere
Piquer violemment.
Ellychnum
Mèche de la lampe.
Tibia
In novos surculos reviviscere
Ilelluo
Torques
Impia verba dicere
Flûte.
Drageonner.
Débauche, ripaille.
Collier.
Prononcer
des
blasphèmes.
�284 —
GREC
GASCON
maó;
Echame
Tfàm tfjtm
Traouka
yv^im
Gouspa
ZOKVW
Eskrasa
wtuiht
Endorto
ptr/.o;
Rusko
uaXôxcot
Maladie
Mí/.·jcf.yw
Malaou
Louesa (Avey)
(5uTiv7)-jSuTiX^
Bouteilho
{
fìf>*xỳ
Braket
fcitpm
Abraka
Brama
pla-k
Blat
í-jTTv.
Busok
Sftm**-£tarYtvH
Dinna
«7TKTKM
Dupa.
sy/.u.tpo;
Enkouèro, enkaro .,...»
txfxxtjfm
Espoussa
�LATIN
FRANÇAIS
Pullities
Forare
Illinire
Essaim de jeunes abeilles.
Percer, trouer.
Enduire, étancher.
Obterere
Ramus
Alveus
Ecraser, briser bruyamment.
Branche de bois vert.
Ruche, petite boîte d'é-
Morbus (piptaSiov)
Morbosus
corce.
Maladie.
Malade.
Lutare
Lagena
Brevis
Resecare
Couvrir de boue.
Bouteille.
Court.
Raccourcir.
Clamaré
Frumentum
Bramer, crier très fort.
Blé, froment.
Milvus
Milan (oiseau de proie).
Prandeo-prandium. ... Dîner.
llludere
Adhuc
Tromper, duper.
Encore.
Anhelo
Etouffer, être hors d'haleine.
�286 —
GASCON
GREC
tx-füStu
sx avTsỳ'jj
TvjyâiH
Espaouent, espaouenta..
Empeouta
Trupha (se)
Truphandé
i#*èr£.
fam
ïtxtfrt'hntfHi
OSàt
9vpiȏ
Apasta (s )
Oustaou
Entrailhos
Hilat
Thumo, thuma
y.putiio;
S«6«?si»-S«6tn». . ..
Ganampo
Babilha, btiouard
TAvytt
Trucha
.
'«..■..
�LATIN
FRANÇAIS
Tericulum, Territare .. Epouvantail, épouvanter.
Inserere
Greffer.
Irridere
Se moquer.
Irrisor
Moqueur.
Manducare
Manger, se nourrir.
Domus
Maison.
Víscera
Entrailles.
Rete
Filet.
Arietare
Coup de tête, frapper de
la tête.
Contractio
Crampe.
Loquitari, blatero
Babiller, bavard.
Frangere
Casser, rompre.
�— 288 —
COEXISTENCE DES MOTS GASCONS
DÉRIVÉS DU GREC ET DES SYNONYMES VENUS DU LATIN
EXPRIMANT LA MÊME IDÉE OU LE MÊME OBJET
GREC
GASCON
I Iérme
íçrìuno;
FRANÇAIS
Désert, lande . .
Ilermito
Ermite
Heramou
Bête sauvage ...
jr»íií
Bilo
Ville
jSovv«r
Bougno
Tumeur
root»)
Chaîno
Chaîne
xXofW
Klocho klouchetOClochc, petite cloche
fairegrandbruit Kloukè
Clocher
■/.uëiào;
Chibaou.Cabalè Cheval, celui qui
■/.'jtj<T«-y.ci<7<rc ....
Agasso
Pie (oiseau) ....
jSjosfoî
Brech
Berceau
soigne les chevaux.
petit enfant.
yikiu
Galoi-galeja(L) Gai, se réjouir..
�I
LATIN
GASCON
Désert.
Soulet, souletat.
Haroutjo (bestio).
Ciutat.
Tumou.
Cadeno.
Campano.
Campanari.
Chibaou, Egassè, qui soigne les chevaux.
Pigo.
Cugnet.
Gaoudi, gaou.
'9
�— 290 —
GREC
GASCON
FRANÇAIS
Rusca-ruscado. Lessiver-lessive.
Bugad (Celte). ■ Bugado
Lessive
xivKvS^K
Mandre (Toul). Renard-fin
p-jŷu-piỳi;
■Kupéaaiç
Paresso-paressous
Paresse - Paresseux
irùov
Punècho
Punaise
qui sent mauvais
Ayda ..
Aider-secourir ..
Baluda (Celte).. Baluta
Blùter la farine.
«noOîiai.. ■
Apouthécari... Apothicaire.....
apio
Araya-Aray .. Labourer
Charrue
K*i-cnki;
.. (se)cala-(se)cara (se) taire
fiai-àç
Bayou (Bea)... Maillot
tendre enfance. Bayolo....... . Lisière pour emmailloter
aiStw-aiSsooiKc...
Bayoula
fïapuQpo-j
«BTOÎ
Emmailloter....
Barat-Baradou. Excavation,Fossé
Fossoyeur....
Artoun
Pain
�LATIN
GASCON
Lixivus
Lixivus
Vulpes (átómjç)
Lechiou-Lechioua.
Bugada-Bugado.
Boup.
Piger-Pigritia
Cimex
Pigre-Pigresso.
Cémic.
Adjuvare
Incernere (xpivu)
Ajuda-Ajud.
Cerne.
Pbarmacopole(f*/>f*es*svf) Phormacie-Phormacian.
Laboraré
Laoura.
Taceo (éótròv)
Panni
Taïse (se).
Panèts.
Fascia
Pannis involvere
Faisa (Lang).
Engouloupa.
Fossa
Panis
Hosso-Houssayre.
Pan.
(KÙ-JOÇ)
�— 292 —
GREC
(3joaçu
GASCON
Braso
Etre brûlant... Embrasa
FRANÇAIS
Braise
Embraser ......
païlsiv
Balejo-baleja .. Balai-Balayer...
ipoua
Ouera
Yè ouèro !
«yfiUvloç
Agràoulo. .... Corbeau (oiseau
sauvage
Regarder
Regarde donc !..
evpovç
Urous
inyj.m .
Eskio
layiç
Eskiassè.
p-ufjoi
Rèbe-rebasseja. Rève-Révasser..
Ttwpn;
Porro ........ . Porreau (excroissance sur la peau.
ULOIY.ÎÙ-/.«
Heureux
Echine
Qui a l'échiné large.
Makako-Makareou
Prostituée - celui
qui vit de la prostitution..
rtTÍpvi-vyos
Turog
Plume naissante.
iir-fo"rúi
Apasta
Nourrir-manger.
la-Tnui-iczaxv. ...
Estac-estaka... Attache-attacher
6'Mi
Tua
Tuer-Immoler ..
y.opsa
Cura
Curer-Nettoyer..
ÎCÎTTM
Hapa-Hapo.... Prendre - Saisir
vivement
�<
— 293 —
LATIN
GASCON
Carbo-Carbonarius .... Carboun-Carbouè.
Enflama-Flamba.
Scopae
(o-xojrêu)
Aspicio
Escoubo-Escouba.
Espia.
Espio tè!
Corvus
(xo/saç)
Courbach.
Beat-Beatifiat.
Renés (àppnv)
Rens, Arrénat.
Soumia-Saounéja.
Bourrugo.
Puteo
(7ru6w),
putis
Putana, putane, puto.
Plumula
Plumailhoun.
Alanducare
Minja.
Alligare
Ligo-Liga.
Occidere
Aouci.
Detergere
Netteja.
Arripere
Arrapa.
�GREC
«/5w/*a
lixouuTtw
FRANÇAIS
GASCON
Hurum
Escouta
Escouts
Odeur-Parfum..
Ecouter
Ecoute
Bréga
Blasit
Eskilhot
■imó<Trpa[xu
Soustres (B)...
6)5
Tété
Rost (Celte) gril Rousti-Roustit.
xafiîSoa
Cadièro
Ojoyí
Orgulh
Orgulhous ....
Mouiller-Laver .
Indolent-Enervé
Coquille de noix.
Litière
Téton-Mamelle.
RotirGriller Roti
Chaise-Siège...
Orgueil
Orgueilleux
Bouphareou ...
Brounikèro....
Diarreio
Lambrejous ...
Grand mangeur.
Bruit retentissant
Diarrhée
Brillant - Lumineux
Cop
Couado-Coua.
Pantou (L) ....
Coumo,Coumbo
Damo-Daouno.
Coup
Couvée
Vaurien
Vallée
Femme mariée..
/3j3£%w
pXaço)
•XÓ^XOÍ
TIT
/3oujf>a-/of
papvôyjiç
Siûppito
iàp-TTpoç
MTTtì
<àá-ioá£w»
?
JTKVTOÏ
xûf/Çoc
ISapiup
�LATIN
Odor
Audire
(avSvi)
Lavare
Languidus
Nux
Palea
Pulpa
Torrere-Tostum
Scabellum
Supèrbia
Superbus
Gulosus
Tonitrus
Fluo-fluxi (yWw)
Clarus
Trux
Nitus
Vagabundus
Vallis
Mulier
GASCON
Aoudou.
Aousi.
Aoudi.
Laoua.
Languinous.
Nogo-Nouse.
Pailhat.
Poupo.
Tousta-Touria.
Escabeou.
Superbio.
Superbious.
Goulut-Goulifraout.
Touèro Trounikèro Touet
Flouchèro (i).
Clarejous-Cla.
Truc-Truca.
Niou-Nitado-Nisarado.
Baganaoud.
Baleo.
Mouilhè-sAmouilhera.
(i) La variante serait encore plus énergique :
/jy'ti-xíyaSc.. caga, chier, cacare, caga, caguero.
�— 2Ç6 —
GREC
xif-Ioi
GASCON
FRANÇAIS
Cussouat-Cussoun
Tap (Celte).... Tap
Vermoulu-Ver..
Tertre
X<>/JTOÎ
Courtilh
Parc-Enclos....
7r«T«'/os-
Tapatge
Grand bruit ....
Crier.,
xpvçw
Crida
z/)tTo;-xjOivw
Criet-Criera ... Crible,poursépa-
rpiêùi
rerle bon grain du mauvais..
Trepi
Broyer, Fouler
ypàano;
sous les pieds.
CrassousCrasso Crasse - mal-
x«X&)s-
propre
Cable......... Cable - grosse
vavç
Naou
lúên, lúSívù). . .. Enloubi
-6ÎW
corde
Navire
Outrager Insulter
£V£O
Enhastia (s).. . Manger jusqu'au
tWXrçÇt?
Eglasi
dégoût
Effroi-terreur...
Eglasia
Effrayer
Spata (Gaul.).. Espaso.
Epée
�— 297 —
LATIN
GASCON
Vermis
Collis
(nopy.iç) porcus
Turba
Clamaré (xXéç&>)
Bermou-Bermouat. v
Coulino.
Pourcaou.
Turment-turmentiou.
Clama-clamou.
Purgaré
Pourga-Pourgos.
Obterere
Houra.
Sporcus
Enpourkit-Pourkerio.
Chorda {x°p^)
Navis-Barca
Insultaré
Cordo-Courdêt.
Nabiri-Barco-Embarca.
Ensurt, Ensurta.
Ingurgitare
Pavere
Pavor.
Gladius
S'engargassa.
Poou-Espaouri.
Glabi.
�— 2oJ —
GASCON
GREC
yv«8of
Gaoutho
Gnac-Gnaka...
.. Hagot
Hajan
Tusta-Tust.. .
Skxvu, Etoriya... .
fàr.zllos
fv.rjiavoç
runrcù
FRANÇAIS
Joue
Morsure-Mordre
Fagot
Coq
Maltraîtrer,Frapper-Coup ....
Hurgouet-Hourruga
Fouiller, Outildefouille
ï.zxxo;
•.. Lak-lakot
Amas d'eau
xoyhç
Carcolh (B).. .. Escargot
iortîty«
Estigla
Luire-Briller....
Guech (Celte).. Guèchou (L)... Louche
Guérie.
tvj.v.yj.i'jr>- .....
Marrano
Fatalité-mauvais
sort
o;0'jç,ó^uT<riM up-jy«
aú-s£futa
tSmpu
Ppiioxu
nànaai.o;
[iûraioç .
ntf>iéx;>
Ppo-'TÙM-ppo-jTn
. .
Atuka
Assommer-Tuer
Idiomo
Idiome-Langage
Broùsta
Pacager-Brouter
Pachet
Pieu-échalas. ..
Matchou-Ase(B) Sot-Imbécile...
Apriga..Envelopper
Brouni
Tonner
Brounitèro .... Faire grand bruit
�<
— 299 —
LATIN
Pullus
GASCON
Machèro.
Morde-Mourdeja.
Hèch.
Poult.
Plaga-Plago.
Limax ()ti;iaÇ)
Lucere, Luxi
Luscus
Ahounsa.
Peskè.
Limac.
Lusi.
Luscou.
Malus jactus
Mactare..
Lingua
Pasco
Palus
Pecus
Involutus
Tonare
Tonitru
Malaganso.
Amata.
Lengatje-Lengo.
Peiche.
Paou.
Péc-Peguchin.
Embouloupa.
Toua.
Tounerro.
Fodere-fossum
�— joo —
GREC
GASCON
FRANÇAIS
TCSTpOtTîÁlVÏTYlÇ . . .
Peyrossilhano..
peyrosil.
ypáoiu-yé'ypxitTai.
Gratèro-Grata . Démangeaison..
Gratter.
Echuga-Echug. Essuyer-Sec....
Trigo-Triga... Retard-Tarder ..
Tpòni)
youufKc
tjicùsvo)
■/.aipu
fùyuiva
xoyxáçu
KOYAUSOÇ
Kàmi)
a/ýofíKÍ
//■'■''/JÍ
).
KU7TS XO-J
yv.pu.yj.ti.
3
ersil-Ciguë.. ..
tremblement.
Trouilh-Trolh . Tour à presser..
Gourro
Truie
Chaliouo
Salive-Saliver ..
chalioua.
Caoumas
Chaleur lourde..
Aganit
Presséparlafaim
Cancana
Rire aux dépens
Kalhiouo
. Kaouaret
Couina
Coulak(Poisson)
Goubelet
Crogno
d'autrui
Cheville
Cabaret
Crier, se plaindre
Alose.
Vase à boire....
Contusion
Meurtrissure.
�I
— 301 —
GASCON
LATIN
Cicuta
Cecudo.
Prurigo
Prusèro-pruse.
Siccare
Tardius
Tremor
Seca-Sec.
Tard-Tarda.
Tremou.
Pressió
Porca
Scracere
Pressouér.
Porko.
Escracha-Crachi.
Calor
Famé pressus
Calou.
Ahamiat.
Maledicere
Clavus
Taberna
Gemere
Alosa
Calix
Contusió
Maoudise.
Claou.
Taouerniê, Taouerno.
Gemi.
AIoso.
Calissi, Calissado.
;.. Countusioun.
�*
— 302 —
Pourquoi nous sommes-nous appliqué à démontrer les procédés suivis par nos Aïeux, conservateurs
scrupuleux de leur langue Nationale? Uniquement
pour saper par la base cette ineptie, chère aux
Néo-Latins, qu'au xie siècle, par exemple, ils abandonnèrent leur vieux langage, comme un vêtement
démodé, pour en adopter un nouveau, taillé sur le
patron Romain.
Comment des hommes de bon sens peuvent-ils
soutenir de pareilles propositions? Voyez-vous
plusieurs peuples, hommes et femmes, enfants et
vieillards, se mettant d'accord, à un jour donné,
pour ne plus parler leur langue si belle, vingt fois
séculaire, et lui en substituer une nouvelle tirée du
Latin qu'ils ignorent; alors que les prétendus importateurs, objet de haines méritées, ont été chassés du
pays depuis plus de six siècles? Mais la difficulté
devenait plus grave qu'à la Tour de Babel, deBiblique mémoire, où on bâtissait à neuf, et sur terrain
vierge. Ceux-là n'avaient rien à oublier.
Si ces Edificateurs de systèmes appuyés sur" la
fantaisie, s'étaient dit : Avant déparier des Idiomes
�Méridionaux, peut-être serait-il convenable de les
apprendre d'abord, pour ne pas les juger comme
les aveugles les couleurs.
Cette première précaution prise, ils devaient
étudier la charpente des mots qui les composent;
ainsi leur origine Celto-Grecque ou Latine apparaissait naturellement.
Ils s'apercevaient ainsi, que loin de supprimer le
Gaulois, le Latin, ne servit qu'à l'enrichir.
D'abord il conservait sa Grammaire intacte, et les
mots lui appartenant en propre, bien que les racines
Celtes ou Grecques en fussent quelquefois communes aux deux langues. 11 conservait de plus ses
consonnances o, os, ès, ou, ous, oun, prises du Grec,
et celles qui lui étaient particulières, ec, ac, oc, cho,
cha,jo,ja, go, gar, ho, rra. 11 banissait F comme
si la lettre n'existait pas, et la remplaçait, quelquefois, quand elle n'était pas radicalement éliminée,
parle (<f)ph, et plus souvent encore par l'H aspirée,
ou par exemple i es lou pour flou.
Jamais il n'accepta l'emploi du V; et il lui substitua invariablement le B et la diphtongue ou,
�suivant la méthode Grecque. Le B lui-même est
souvent remplacé par ou. Enfin ils auraient pris
garde aux diminutifs et aux augmentatifs si fréquents chez les Gascons, et qui contribuent si largement à la grâce et à l'énergie du discours.
Nous venons de voir comment le Gaulois sut
utiliser quelques-uns des mots de son Vainqueur.
Mais le Louvre, aurait-il perdu son originalité, le
jour où il enrichit ses collections des superbes sculptures exhumées des ruines de Ninive ou d'Egypte?
Il est vrai qu'avec notre Méthode si simple et si
sûre à la fois, point n'était besoin de recourir du
haut au bas Allemand, non plus qu'à l'Américain, au Turc, au Hongrois ou au Chinois, comme
sources légitimes des mots de la langue Française.
Mais alors on n'est plus un puits de science... On ne
vaut plus un parchemin Académique.
Nos Immortels modernes ont perdu la bonne
habitude de leurs prédécesseurs de l'Olympe, qui
fréquentaient si volontiers les Bergères des vallées
et des montagnes. Ne les trouvant plus sans doute
d'assez bonne maison, ils s'engagèrent de préfé-
�— 305 —
rence au service des Grandes Dames : et mal leur en
a pris; car la plupart ont emporté de leur fréquentation toute autre chose que de la gloire. Quoi
qu'ils fassent, comme le Gascon, le Français est
surtout Gaulois; et c'est lui, ce Gaulois, qui a donné
à nos Grands Ecrivains qui lui sont restés fidèles,
ce charme irrésistible puisé à la source Nationale.
Le dédain de cette tradition glorieuse conduirait
notre chère et superbe langue à la décadence inévitable.
��CHAPITRE XV
SIGNIFICATION CERTAINE DE QUELQUES MOTS CELTOGRECS.
—DRÔLERIES
COMPARATIF
EN
5
ÉTYMOLOGIQUES.— TABLEAU
LANGUES :
GASCON, LATIN, FRANÇAIS.
—
SANSCRIT,
GREC,
CONSÉQUENCES DE
LA COMPARAISON.
9999
Nous sommes remontés aux origines quasi-préhistoriques de la Gaule, éclairés par les Auteurs les
plus graves, les plus dignes de foi : Leurs témoignages concordants, unanimes, nous ont montré
les Grecs y fondant des Colonies successives, dont
la première fut commandée par un Hercule; et nous
les avons vues exerçant sur les Aborigènes une
influence considérable.
�— 3o8 —
D'autre part, dès que les Saints Orientaux, tous
de langue Grecque ou à peu près, eurent franchi le
seuil du Cénacle, leurs groupes intrépides s'élancent héroïquement à la conquête du sol Druidique,
certains d'y retrouver, avec leur langue plus ou
moins modifiée, les descendants des colonies Helléniques confondus avec la population indigène.
Puis
nous suivons leurs traces à Toulouse,
Arles, Paris, Autun, Lyon, dans la Novempopulanie, etc., etc., et l'écho de leurs prédications et
de leurs controverses, nous renvoie, pendant plus
de trois siècles, les voix de l'Agora et du jardin
d'Académus.
C'est encore et toujours aux mots eux-mêmes que
nous demanderons leur avis; et la réponse sera
ferme et claire comme celle des Historiens et des
Hagiographes.
Si nous en croyons Pline (i), le Pays compris
entre les Pyrénées, la Garonne et la Mer, porta
primitivement le nom d'Armorique, commun
à
toute notre région des côtes de l'Océan. Qui l'avait
ainsi baptisé ? Le nom lui-même témoigne de celui
(1) Lib. 4, de Gallia.
�t
— }09 —
du parrain;
AÌftujMf
eau salée:
A\uuptçw
être dans
l'eau salée (i).
Nous pouvons affirmer déjà, qu'en remontant à
la plus haute antiquité, l'Aquitaine avait été tout
au moins visitée par les Grecs, qui lui donnèrent
un nom de leur langue. Il serait aussi raisonnable
de contester cette déduction, que de prétendre, par
exemple, que les Allemands ont baptisé l'île Bourbon. Ainsi, les Grecs apposèrent sur la Gaule un
sceau indélébile, à une époque qui échappe à l'Histoire. Pour qui connaît ce peuple avide d'aventures,
la découverte dut entraîner fatalement la colonisation, si nettement affirmée par Diodore et A. Marcelin, etc., etc.
Au moment où les Lieutenants de César envahissent notre Province, elle avait pris un autre
nom. Pline permet de penser (2) qu'elle dut ce
changement à ses eaux jaillissantes, et notamment
aux eaux chaudes de Dax : que spécialisé d'abord
(.1) On pourrait dériver le mot Grec lui-même de are, more
(devant la mer), d'origine Celte.
(2) Loc. cit. §, 66. Aquœ emicant benigne passimque in
pfùrimis terris, alibi frigidce, alibi calidce, alibi junctas, sicut
in Tarbellis, Aquitatiicá gente.
�r
— JIO —
au pays avoisinant les sources, il gagna peu à peu,
et engloba toute la Région. Il s'étendra plus tard
jusqu'à la Loire.
Les Grecs avaient le mot «ty«, eau, dont les
Latins firent aqua : il suffisait de le rapprocher de
T«vta
(région,
contrée)
(aiyaravca) pour indivi-
dualiser le pays par son phénomène, suivant la
mode Grecque : Contrée de l'eau. Voilà comment
les Romains écrivirent le nom Gaulois de la région,
Aquitania qui avait la même racine et la même
signification en leur langue. Nous ne sommes pas
assez Néo-Latin pour admettre, qu'un peuple qui
ignore une langue, lui emprunte ses mots pour
désigner ses Provinces.
Ce changement de nom, suppose que le Pays
qui en est l'objet a été visité, qu'il est connu dans
ses détails, puisqu'il perd sa dénomination primitive, pour en recevoir une nouvelle tirée d'une circonstance qui lui est propre. D'ailleurs les cours
d'eaux nombreux qui le sillonnent, suffiraient à
justifier ce nouveau nom.
J'en dis autant de celui de la montagne des
Pyrénées. Deux hypothèses sont également admis-
�©
— 311
—
sibles : ou bien des Volcans aujourd'hui éteints,
mais dont les traces subsistent encore, étaient-ils
incandescents au moment des premières découvertes; ou peut-être, les Montagnards allumaientils des feux sur les sommets, pour appeler aux
armes, ou correspondre entre eux; procédé pratiqué
dans tous les pays montueux, et notamment en
Kabylie, au moment de la conquête,
feu,
izup
irujoaûvov, brasier, irufoffOtwç, puissant par le feu.
Si je propose yapvtàs pour notre fleuve Gascon,
les Savants me répondront
que les Celtes lui
donnèrent son nom, du mot Garu tiré de leur
langue, qui signifie Torrent.
N'insistons pas : mais on ne contestera pas
hautes montagnes, pour nos Alpes.
Khctoi
Aïizztç,
dont les
Provençaux se servent encore sans altération.
11 sera bien difficile de contester que YEsus, le
Grand Dieu des Gaulois, ait une autre origine que
le çsOj le Dieu souverain des Grecs.
César, A. Marcelin, racontent, comme les autres
Historiens d'ailleurs, que les Gaulois n'avaient pas
tardé à prendre goût aux exercices de l'intelligence,
et de constituer une Caste dominante, dont faisaient
�— JI2 —
partie des Bardes, des Euhages et des Druides.
Les premiers
(§«p§u
( i ) poètes,
SKOSITOÎ
instru-
ment à corde), poètes et chanteurs, célébraient les
phénomènes de la Nature, les mouvements Célestes,
la Puissance des Dieux, ou exaltaient dans des vers
enflammés, l'audace et la vaillance de leur Guerriers fameux, en s'accompagnant aux accords de
la lyre, l'instrument Grec par excellence. Ils les
proposaient en exemple à la jeunesse, pour embraser
les âmes de la noble fureur des combats; ils préparaient ainsi les Héros de l'avenir. Leur glorieuse
tradition s'est continuée dans les Châteaux Féodaux,
jusqu'à la Renaissance. Les Trouvères. Troubadours et Jouglars ne furent que les continuateurs
des Bardes de la vieille Gaule (2).
Les Euhages,
Evayo?
(en cherchant d'une manière
habile et continue), étudiaient dans la solitude et
la méditation les évolutions du Soleil et des astres,
pour en surprendre les secrets.
Les Druides S^ùiS»;,
SpviSci
(Sfùî, chêne), prêtres
(1) Bard en Celte signifie poète et prophète.
(2) L'intervention des Poètes dans les Banquets, dans les
Fêtes solennelles et jusque dans les armées, était une très vieille
coutume Grecque avant de devenir Gauloise. Homère l'atteste
à chaque page de ses immortels Poèmes.
�0
— 313 —
fréquentant les forêts (i), investis du double caractère Sacerdotal et Judiciaire quelquefois, se consacraient dans la retraite et le silence, suivant les
préceptes de leur maître Pythagore, à la méditation des problèmes les plus ardus de la Politique
et de la Philosophie.
Ainsi les sciences comme les arts eux-mêmes
dans leur expression la plus élevée, la Musique et
la Poésie, avaient leurs écoles dans cette Gaule
transformée par les Hellènes.
Reposons-nous un instant de l'aridité de ces
démonstrations Etymologiques. Le vaillant Abbé
Espagnolle va donner la comédie sur la scène NéoLatine : asseyons-nous, et écoutons un moment :
l'affiche porte : Drôleries philologiques.
Pour un simple mortel, mouleto en Gascon,
omelette en Français, dérive du mot Grec
ApvXtcTev
(i) II n'est pas hors de propos de rappeler que le plus
ancien et le plus célèbre Oracle de la Grèce, résidait dans la
forêt de Dodone, dont les chênes avaient le caractère sacré.
Les prophéties étaient rendues par un chêne nommé l'arbre
fatidique, ou par la Prêtresse interprète du bruissement des
branches, ou du son rendu parles vases de cuivre suspendtis à
ces branches, ou du chant des colombes cachées clans les
feuilles. Les forêts de la Gaule avaient aussi leurs Druidesses.
�— 314 —
Galette, Gâteau. Ménage entrera le premier en
Scène. Cette étymologie, dit-il, est cachée, et je crois
être le seul qui l'ai découverte ! ! ! La voici :
Les Italiens
appellent anima la semence des
fruits; et ils appellent animelles c'est-à-dire petites
âmes, certains
béatilles,
comme foies,
cœurs,
rognons, gésiers, et autres parties des entrailles
des animaux dont on fait des fricassées : Or, une
omelette est une fricassée d'ceufs, à'animaletta. De
l'Italien Aima qui signifie âme, nous avons fait de
la même sorte omelette : Aima, Almula, Almuletta,
Aumelelte, Omelette, une fricassée de petites âmes!!!
C'est déjà gentil. Au tour de Littre maintenant :
Dans le xive siècle on adit, Alumelle et alumet, à
cause que l'omelette est plate comme une Alumelle !!!
c'est là que paraît être l'étymologie, amelette étant
une corruption d'alumète ou alemàte.
Scheler s'écrie enthousiasmé : c'est làqueLittré,
avec raison, trouve la solution de ce problème
culino-étymologique. Mais Duchat conteste jalousement à Littréson brevet d'invention : car il avait
dit lui-même... omelette peut aussi venir de Lame lia,
almella, altneletta, aumelette.
�0
— 3i5 —
N'est-ce pas à dégoûter des omelettes, fricassées
de petites âmes !!! et de toute la cuisine de ces Gâtesauces.
Paresse, pour nous, n'est que le nnptrit des
Grecs, ou paresso des Gascons. La racine ne
convient pas à Brachet : il la découvrit dans pigritia. Mais comment: i° parle changement de itia&n
ece; 2" de ece en esse: 30 de gr en r; 40 de i en e\
50 de e en a... c'est bien simple, comme on le
voit : Robert Oudin était plus habile.
Damoiseau, Demoiselle est le mot Grec Sapait;,
SapeWa dont les Gascons firent d'abord doumisel,
damaysèlo, damaysèleto. Littré, Brachet et Scheler
inventent un hideux barbarisme dominicellus pour
le dériver du latin.
Hagard. Gascon avant de devenir Français,
dérive d'«ypi«M, (prendre un air farouche). Brachet
préfère ce qui suit :
Quand un Faucon était pris après plus d'une
mue, il ne s'apprivoisait pas facilement; il restait
sauvage, farouche; ou comme disent les fauconniers,
Hagard. Le mot passa dans la langue
usuelle. Soit : mais la racine? Faucon sans doute!
�Danse le
Stviìertc
3.6
Grec,
devenu danso, dansa,
dansayre, en Gascon, et commun
à
toutes nos
races Méridionales, viendrait de l'Allemand Danson.
En sorte que nous aurions dansé pendant i ;oo ans,
sans savoir le dire.
Déluré qui
n'est que le Gascon délurat, le
BíîiÀ'j/io; (effronté), viendrait de Luoder, leure, ancien
ou moyen Allemand. Comment serait-il arrivé en
Gascogne? d'ailleurs un déluré n'est pas un faiseur
de dupes, mais un homme éveillé, intelligent, et peu
timide.
Agassin, venu du mot Languedocien Agacin,
cor, excroissance dure et douloureuse des pieds, est
un emprunt textuel d'Ayeeao-i», bourgeon, corps
rond, etc., etc.
Littré le dérive de Agacer. Voici pourquoi : Le
bourgeon poussé sur le bois dur a quelque chose de
hardi, et qui provoque, qui agace!! Et le cor au pied
a quelque chose d'agaçant!! Et voilà pourquoi
votre fille est muette.
Boule, bolo en Gascon, âó>lo; grec. Littré, Brachet et Scheler le tirent de bulla, ne prenant pas
garde qu'il y eut des boules quelques milliers d'an-
�— 3i7 —
nées avant les bulles. Ils pourraient répondre, il est
vrai, qu'on attendit les dernières pour baptiser
leurs aînées. Mais nous demanderons alors ce qu'il
y aurait de commun entre une boule à jouer aux
quilles, et une lettre du Pape!
Banc, banco, le même en Gascon et dans toute
l'Europe à peu près, de
SX-JY.OÇ,
siège, bras de siège,
serait venu, d'après ces Messieurs, de Pane, ancien
haut Allemand.
'
Qu'auraient-ils à répondre si je leur disais que
le Haut Allemand, beaucoup plus jeune que le
Grec, lui prit ce mot ainsi que beaucoup d'autres?
Catimini,
Gascon
aussi
bien
que Français,
serait, d'après ces Messieurs, l'un des quinze ou
vingt de nos mots d'origine Grecque. Or ils le
dérivent de xserapivtet, menstrua, tandis qu'ils avaient
sous la main
-/sú6«.
cacher, xiúfljxoc, cachette, -/£
0
Ù UUOVÎ,
dans une cachette. Mais les Savants ne sauraient,
sans déroger, se soumettre aux règles élémentaires
du bon sens suivies par ceux qui ne le sont pas.
Charade, charrado en Gascon, est un dérivé de
divertissement. Charisclats d'arride, de grands
éclats de rire, dans le Béarn.
�-
3i8
-
Littré le tire de charrette. Vous ne voyez pas l'analogie sans doute : ne cherchez pas. Il n'y a qu'un
Néo-latin pour deviner que la charade a été ainsi
nommée, parce qu'elle est une
CHARRETÉE DE BA-
VARDAGES ! ! !
Chenevis, Kctvs&c, dont les Gascons firent Canebo,
Caneboun.
Littré le dérive de Cannabisum. Brachet de
Cannabisium. Scheler de Catmabicium; comme si
trois barbarismes latins pouvaient effacer une racine
Grecque aussi évidente !
Assassiner est le mot Grec aswîtp,
aaijTttv,
sans
altération, blesser, sévir, maltraiter, dont les Gascons firent assasin, assasina.
Littré, Brachet, Scheler, le dérivent de Haschisch,
poudre de feuille d'un chanvre spécial ! Est-ce
assez joli?
Poutre, dans notre vieille langue, avait deux
significations différentes :
fvrpô;, tronc d'arbre, pièce de bois : poutro;
7TOTJ3ÍS,
pouliche, dont les Gascons firent pourio.
Ménage dérive la première de la seconde. Savezvous pourquoi? Vous ne devineriez jamais. C'est
�— 319 —
que la poutre, ou grosse solive, porte des petites solives, comme la poutre on jument porte despoidains!
Litré, Brachet et Scheler s'inclinent avec admiration devant cette étymologie si magistralement
établie!!!
JACQUELINE.
— Ah! que ça est bian dit, notre
homme!
GÉRONTE.
— Ah! que n'ai-je étudié!
Bossu n'est-que L'vêiowtf Grec dont le Gascon fit
son Boussut, adopté plus tard parle Français. Mais
à ce compte 11 dériverait du Grec, et c'est ce qu'il
faut empêcher à tout prix; car les grands Pontifes
Néo-latins, illustrés par leurs bévues Philologiques,
ont décidé que la langue Française n'a pas vingt
mots d'origine Grecque !
Littré le dérive de l'Allemand Butze, émoussé;
Brachet en déclare l'origine de lui inconnue, et
Scheler la trouve dans l'ancien Allemand Bozen,
pousser !
Brandir vient dexpaSáu ou
xpaSuivu,
brandir, bran-
ler, secouer, agiter, etc., dont le Gascon fit brandi.
D'après Ménage, au contraire, brandir vient du
latin vibraré. Et voici comment il extrait le mot,
�— 320 —
sans douleur : vibraré, vibramen, vibramentum,
vibramentire, bramentiri, brandire. Et voilà.
Voulez-vous savoir d'où vient Chenille? chanilla
dans le Languedoc; très simplement de
U«VÎVIJ
ou <r«vtx>7.
Ménage, et après lui Littré et Brachet, la dérivent de canícula, petite chienne! Mais le premier,
se méfiant un peu de sa chienne, propose aux amateurs, eruca, erncana, erucanilla, canilla, chenille.
Ça n'est pas plus difficile que çà. Saviez-vous que
Rossignol venait de Lucus? Lucus, Luci, Luciniola,
Russignola, et vous y êtes!
C'est par le même procédé que faba engendra
haricot. Faba, fabaricus, fabaricotus, aricotus, et
enfin Haricot.
Bougie, qui prend son nom de la matière dont
elle est faite, Sotov (suif de bœuf), aurait été inventée,
suivant ces Messieurs, dans la ville de Bougie, et
gratifiée du nom de son lieu de naissance !
Autant il en faut dire de Bougre, bougré dans le
Midi, dérivé de Sùypoç (infame). Il est passé, grâce
au génie de ces Messieurs, au compte des habitudes
dépravées des Bulgares! Ça doit les flatter certainement.
�— 321 —
Citons encore, et pour en finir, Bohémien, en
Gascon bouémian, de ëopuoi (aventurier), et que ces
Messieurs font venir du Royaume de Bohème! ! !
L'Epigramme du cheval d'Aceilly est assurément
bien innocente :
Alfana vient
d'Equus
sans doute :
Mais il faut convenir aussi,
Qu'à venir de là jusqu'ici,
Il a bien changé sur la route.
Revenons aux choses sérieuses.
Granier de Cassagnac, père de Paul, l'intrépide
Journaliste, a fait sur les Origines de la Langue
Française (i) un livre plein de science, mais où se
montrent trop souvent des tendances paradoxales.
Il eut l'idée excellente de dresser divers tableaux
comparatifs fort ingénieux. Dans celui qui suit, il a
placé en regard les uns des autres une quarantaine
de mots Sanscrits, Latins et Français. Nous lui empruntons ce tableau, en y ajoutant les mots Grecs
et Gascons, dont nous changeons la disposition,
conformément à l'ancienneté de chacune de ces
langues :
(i) Paris, F. Didot, 1872. In-8.
21
�— 322 —
GASCON
GREC
SANSCRIT
Dera
Inc
Diôu
Divya
Si«
Diôuin....
Carir
XTITOO
Piter
iraTnp
Mater
ftÁT»/í
Pay-Payre
M ay-M ayre
Bhrater ....
Sodari
fpa.Tup
Phray-Phrayre..
awj«.ip.o;
So-Sor
A'tma
7rvE0ua
Amo-Armo
Créadou .
Nau
vcoç
Naôu
Navica
Irirttto
Naoutés
Danam
fety*
Doun
Naptri
uSilftSov;
Neboud-do
Pad
7
Pè-Pàto
Juva
v:«v(,-
Joubo-Jôueno...
Joubancêl, Jôuen
:oví-7ró/)
Juvati
vÍ£m<T£oc
Juana
-do;
Jûuentut
Masam
un;
Mes
Dio
yoàti-j
Ceôu-Cel
Barbarya
pàpÇxpo;
Barbare
Genu
yóvu
Jouilh-Ginouilh.
Mrtyu
Morta
. . .
u.oipu
....
p-opo;
Mort
Mort-o
�— 323 —
LATIN
Deus
Divinus
Créator
Pater
Mater
Frater
Soror
Anima
Navis
Navarchus
Donum
Neptis
Pès
Juvencula
Juvenis
Juventus
Mensis
Caelum
Barbarus
Genu
Mors
Mortuus-a
FRANÇAIS
Dieu.
Divin.
Créateur.
Père.
Mére.
Frère.
Sœur.
Ame.
Nef-Navire.
Naucher.
Don.
Neveu.
Pied-Patte.
Jouvencelle.
Jeune, Jouvencel.
Jeunesse.
Mois.
Ciel.
Barbare.
Genou.
Mort.
Mort-e.
�— 324 —
GREC
SANSCRIT
GASCON
Vidava
v.tp*
Beôuso-Beôuse.
Arivi
[JÏOÇ
Riôu-Arriôu ...
Vastra
vt%ç
Besto-Besti
Sarpa
afí;
Serp....
Clame
xluu (Rac)
Clamou.
Na-No
ou-pév
No-Nou.
Te
TÙ-crov
a te-a tu
Ma
lyu-fiou
Jou-Mi..
Tarra
tpot
Altaria.. ..
OyTïiCtOV
Jugam....
çuyo?
Naza......
Terro
.....
... piç-otvo;.
ptç-pii
. Altar-Aôuta . ...
Jung-Ajôua . . .,
Naz-Nazic
Denda ........ oîovc.
Dent
Genu
yevoj
Gens
Hima
xet[uri
Hiôuèr
Gelu
Asmi
iraxvn.
Gilado
Asi
si?
Jou souy
Tu es
Asti
Mit
Et es
Siama
ujtiv
Que siam
Siastan
nxi
Que siats
Santi
tiro-»
Que soun-Esta.
,
�— 325 —
LATIN
Viduo
Rivus
Vestis
Serpens
Clamor
Non
Tibi
Ego-Me
Terra
Altare
Jugum
Nazus
Dens
Gens.
Hiéma
Gelu
Sum
Es
Est
Siamus
Sitis
Sunt
FRANÇAIS
Veuve.
Ruisseau.
Vêtement.
Serpent.
Clameur.
Non.
à toi.
Je-Moi.
Terre.
Autel.
Joug-Attacher au joug.
Nez-Narrine.
Dent.
Gens.
Hiver.
Gelée.
Je suis.
Tu es.
Il est.
Que nous soyons.
Que vous soyez.
Ils sont, Etre.
�— 326 —
Sia
Ek
Dua
Tri
Gialtur
Pantscha
Schashta
Sap ta
Aschatta
Nava
Dasha
Va
Na
Me
Astu
Criyate
GASCON
GREC
SANSCRIT
Que sia
Un-Uo
SWJ
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iÇ-tï«c
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ÓXT
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Dus
Tres
Quate
Cinq
• Siès-Chiès
Sept
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Naôu ... .
Dex
,. Tu, Bous..
Nous
Jou-Mi-Me
Este-Esta .
Créât.. ..
rpztç-TptK ......
zsrpa
ou
�s
— 327 —
FRANÇAIS
LATIN
I
Sit
Unum
Duo
Tres
Quatuor
Quinqué
Sex
Septem.
Octo
Novem
Decem
Vos
Nos
Ego-Mihi
Esto
Creatus.
Qu'il soit.
Un.
Deux.
Trois.
Quatre.
Cinq.
Six.
Sept.
Huit.
Neuf.
Dix.
Vous.
Nous.
Me-Moi.
Sois.
Créé.
�— 328 —
Ce seul rapprochement indique la première de
ces langues comme ayant servi de souche commune
aux autres, sans en excepter la Celtique.
On y voit que le Sanscrit a fourni plus des deux
tiers des racines communes aux cinq langues; que
le Grec reste isolé pour six ou sept mots qui lui
sont propres; qu'il a profité seul de deux ou trois
des racines du Sanscrit, tandis que le Gascon, le
Latin et le Français les utilisent à peu près toutes,
et n'ont en propre que deux ou trois mots.
La conclusion à tirer de ces rapprochements est
évidente. Le Sanscrit, langue certainement primitive, mais non pas unique, ou ses dérivées, furent
celles sur lesquelles les peuples de l'Europe Méridionale exécutèrent des variations plus ou moins
habiles, suivant leur génie et les besoins divers de
leur vie sociale.
Voilà pourquoi les peuples Grecs à l'esprit supérieur et hardi, qui suivirent avec tant d'éclat toutes
les branches des connaissances humaines, depuis
les sciences et les arts, jusqu'à la navigation, l'industrie et le commerce, voilà pourquoi, dis-je, ils
devaient jouer un rôle prépondérant dans l'arène
�— J29 —
du langage, et s'imposer à tous ceux qui n'eurent
ni son génie, ni ses besoins (i).
Ne soyons pas surpris si les simples mots, comme
les Historiens, comme les Hagiograph.es, établissent les relations Grecques et Gauloises en remontant à la plus haute antiquité.
Les Celtes se servirent non seulement de l'écriture, litterce, mais encore des mots verba des nouveaux venus parmi eux. Sans doute ces mots durent
se modifier en passant par les bouches des Aborigènes des Gaules. Ce phénomène fut et sera le même
toujours et partout. D'autre part, leur langue primitive versa fatalement la contribution la plus large
dans ce mélange d'où sortirent les Dialectes Aquitaniques définitifs. Mais le cachet Grec, indélébile
partout où il fut apposé, se retrouvera parfaitement
reconnaissable sur notre langue Gasconne, malgré
les siècles écoulés et
leurs
vicissitudes. Notre
Lexigot en complétera l'évidente preuve.
(i) Larcher, le Savantissime traducteur d'Hérodote, soutient
(note 132, t. 1, p. 276) que le Grec est né et s'est développé
sur son propre sol. Nous ne demanderions pas mieux que d'admettre cette opinion. Mais lorsque nous trouvons des mots
Sanscrits ou Celtes et Grecs identiques dans leur construction
et leur signification, nous en reportons l'origine aux premiers.
��CHAPITRE XVI
RÉSUMÉ
DE
LA
PARTIE
PHILOLOGIQUE
9999
Nous avons insisté d'abord sur la différence
radicale des deux Grammaires Gauloise et Latine :
l'une, d'essence purement Celtique, intacte comme
à son point de départ, est seule en usage encore
aujourd'hui, en France, en Italie, en Espagne et en
Portugal; l'autre, empruntée pour partie à la Grèce,
n'est plus connue que dans les Universités qui
enseignent les Langues mortes.
Quant aux mois, nous avons essayé d'établir que
le Celtique, porté en Europe par les premiers occu-
�— 332 —
pants, a été mis à contribution par tous les peuples
qui l'habitent, mais dans des proportions différentes.
La langue Française est, de toutes les langues
modernes, celle qui lui a fait les plus larges emprunts.
Le Latin, avons-nous dit, fut créé cinq cent cinquante ans environ après la fondation de Rome, et
sa propagation retardée systématiquement par un
Sénat ombrageux.
Langue purement Aristocratique, fort difficile à
apprendre, et qui jamais ne fut parlée par aucun
peuple, même du Latium. Perfectionnée par des
Ecrivains de premier ordre, elle devint, grâce au
Clergé, la préférée des Savants et des Lettrés.
Aveuglés par les charmes de leur favorite, ils
essayèrent d'étendre les limites de son Empire.
Ils imaginèrent alors que, cinq ou six siècles après
l'expulsion définitive de leur vainqueur, les Gaulois, oublieux des Dialectes qui leur étaient familiers
depuis des milliers d'années, se mirent à écorcher
le Latin, enfoui depuis des siècles dans les Bibliothèques des Cloîtres, comme des Collégiens arriérés
�— 333 —
de Province, pour se donner une langue nouvelle
dont ils n'avaient nul besoin.
Telle est bien la thèse dans son exactitude rigoureuse.
Nous avons dressé une série de Tableaux pour
établir que les mots qu'on pourrait prétendre en
être dérivés, existaient en Gaule, pour la plus grande
partie, bien antérieurement à la conquête de César.
Notre Vocabulaire en rendra la preuve irréfutable.
11 n'est pas contestable, d'ailleurs, que les premiers habitants des Gaules parlèrent le Celte pur;
et que les colonies Grecques l'enrichirent largement;
que nos Dialectes se trouvant ainsi définitivement
fondés sous cette double influence, le Latin n'essaya
jamais d'escalader cette forteresse imprenable.
En effet, il était venu au Monde bien des siècles
après ces résultats définivement acquis : et ce beau
fils, bercé sur les genoux du Patriciat, ne possédait
aucune des vertus nécessaires pour les détruire, et
prendre leur place.
Il est vrai qu'il employa les mêmes matériaux
que ses aînés. Mais quelles différences!
Tandis que les Gaulois avaient fondé une langue
�<
— 334 —
Populaire avec la Grammaire Celte, les Romains cultivèrentune langue Aristocratique, Savante, jalouse,
avec leur propre Grammaire, diamétralement opposée à la première. Ainsi les deux œuvres différaient
radicalement par le but, par les moyens, par les
ouvriers. La seule matière première était identique.
Voilà pourquoi le nombre des mots à racine commune n'offre plus d'intérêt. On pourrait supposer,
tout au plus, que la dernière venue s'empara de
ceux qu'elle trouvait à sa convenance dans le langage de ses aînés. Et le fait est certifié pour un certain nombre d'entre eux par les Auteurs Latins
eux-mêmes.
Il advint ce qui était fatal : nos Dialectes, créés
par le Peuple et par lui conservés, sont parvenus
jusqu'à nous, plus vivants, plus aimés que jamais;
mais le Latin ne put pas survivre aux dernières
convulsions de l'Empire d'Occident. Et tandis que
quinze millions de Français parlent couramment la
langue Gauloise encore
aujourd'hui,
quelques
Savants curieux remuent seuls les cendres de celle
de Cicéron, morte depuis treize siècles.
Puis, en plein moyen âge, l'un de nos Dialectes
�— 335 —
s'est dressé, dominant ses congénères, et a conquis
le titre glorieux de Langue Nationale. C'était là un
ennemi de l'intérieur bien autrement redoutable que
le Latin, langue étrangère, hérissée de difficultés,
manquant d'ailleurs des qualités qui constituent
celle du peuple.
Or, qu'arriva-t-il à la nouvelle venue, malgré
tout son éclat, et ses richesses universellement
appréciées? L'Abbé Grégoire a dressé, dans un
rapport célèbre ( i ), le bilan fort modeste de ses succès
de cinq siècles dans nos Provinces Méridionales.
Que MM. les Néo-Latins nous le pardonnent;
mais l'échec du Français a créé contre leur thèse un
a fortiori qui nous semble mettre fin à toute discussion.
Et nous terminerons ce résumé en rappelant itérativement l'observation si juste et si vraie de Denis
d'Halicarnasse : Un Peuple qui né perd pas son
territoire ne perd jamais sa langue : vérité dont nos
chères Provinces Méridionales sont les glorieux
témoins.
(i)
Voir Chap. VI ci-dessus.
��I" ANNEXE
Loi
DES DOUZE TABLES SUR
PRÊT A INTÉRÊT;
4"
DROIT
0
3
PRÉTORIEN
: i°
L'ESCLAVAGE;
LA PUISSANCE
D'ORIGINE
2"
LE
PATERNELLE;
GRECQUE,
LA
VRAIE SOURCE DU DROIT ROMAIN, ENCORE ENSEIGNÉ
AUJOURD'HUI.
9999
L'Œuvre des Décemvirs n'est pas arrivée jusqu'à
nous. Un Savant Jurisconsulte du xvm* siècle
(1)
en a patiemment glané et reconstitué les débris,
grâce aux Historiens et aux Interprètes. Voici un
(1) J. Gothofredi, Opera jurid., in-fol. Lugdini Batav. 1733.
22
�- 338 extrait sommaire de ce pénible travail, et le résumé
(exempli gratia) des applications que reçut le Droit
Quiritaire,
i°
Sur l'Esclavage;
2°
Sur le Prêt à intérêt;
3° Sur la Puissance Paternelle.
Il est bon que chacun puisse se rendre compte de
ces Tables fameuses dans lesquelles Cicéron avait
découvert le Code de la vraie Morale, de l'enseignement Patriotique, et l'expression la plus élevée du
sentiment de la Justice (i).
Nous pourrons ainsi apprécier le degré de confiance que méritent les Historiens ou les Moralistes
Latins, lorsqu'ils nous racontent leurs
Nationales,
ou
qu'ils
Gloires
déversent l'outrage
sans
mesure sur les peuples vaincus, et notamment sur
les Gaulois, nos Aïeux.
(i) Orat., c. 24.
�— 339 —
§ I" — L'ESCLAVAGE CHEZ LES ROMAINS
L'esclave est défini, en Droit, res, sed non
persona. Nous allons voir qu'il n'est pas l'égal de
nos chevaux de fiacre, depuis la loi Grammont.
Son maître fouette le servus, le bâtonne, le mutile,
le roue, le torture, avec des raffinements que n'avaient pas imaginés les tortionnaires les plus
expérimentés en leur art. Il le pend, le noie, le
crucifie, l'égorgé, ou le fait périr à sa fantaisie,
toujours impunément : res, sed non personna. La
femme et l'enfant de l'esclave sont soumis au même
régime d'ailleurs.
Tant qu'il est fort et robuste, l'esclave, couvert
de haillons, quand il n'est pas nu, condamné aux
travaux les plus durs, les plus pénibles, nourri
comme un animal de basse-cour, enchaîné pendant
la nuit, dormira, si c'est possible, sur la terre
humide d'une cave en sous-sol, appelée Ergaslule;
�— 340 —
et lorsque les infirmités précoces et fatales sur ce
Calvaire, paralysent ses membres exténués, il ira
mourir de faim dans l'île à'Esculape (i).
Son martyre compte parmi les voluptés favorites
du peuple-Roi. L'un le fouette pour une faute insignifiante, l'autre pour la faute à commettre. Celuici le flagelle chaque jour pour lui rappeler son
abjection, comme Caton par exemple; celui-là pour
dissiper ses vapeurs, et s'égayer un moment des
contorsions provoquées par les douleurs du supplice, en attendant qu'il soit égorgé dans un festin,
pour la plus grande joie des convives (2) : in servum nihilnon domino licere. Trempe-t-il son doigt,
lui, l'affamé, dans la sauce d'un plat vide, il sera
crucifié; si ce plat lui échappe des mains, il sera
(1) Ile déserte où était jeté tout esclave infirme qu'on ne
voulait pas égorger.
(3) P. Caton, Censeur, chassa du Sénat Lucius Flaminius,
personnage Consulaire, qui, se trouvant en Gaule, avait pris
un malheureux dans la prison, et le fit étrangler dans un festin,
pour distraire ses convives. La rigueur, au dit cas devenait
légitime, le Gaulois mis à mort n'étant pas l'esclave du
meurtrier.
�*
— 34i —
jeté vivant par Lucullus dans le vivier aux murènes, pour leur servir de pâture.
La grande Dame, un peu énervée des longs
apprêts d'une toilette laborieuse,
plongera ses
épingles dans les seins de ses servantes; peut-être
préférera-t-elle appeler un musicien ou un bouffon
pour la distraire, ou un esclave qu'elle fera martyriser sous ses yeux; et si son mari s'en étonne
ou s'en afflige, elle lui répondra, dédaigneuse :
0 démens ! i ta servus homo est
( i ).
Tel est le Droit Quiritaire.
Et l'Administration favorisait son exercice, en
prenant ses précautions, sans doute dans un intérêt
de salubrité. En effet, près de Rome, hors des
murs, était situé le champ Sestorium, forêt de croix,
sur les bois desquelles pendaient les agonisants
mêlés aux débris sanglants, en décomposition, ou
pourris, des victimes de chaque jour. Suivant le
mot de Senèque, elles n'avaient que la croix pour
li) Oh! dément! un esclave serait-il un homme?
�— J42 —
tombeau : suffixorum corpora crucibus m snam
sepulturamdejluunt. Son abominable odeur empoisonnait l'air à distance. Les plaintes, les gémissements, les cris du désespoir et les raies de l'agonie,
confondus avec les croassements ou les voix stridentes des oiseaux de proie, formaient un concert
sinistre sur ce charnier vivant, et les volées affamées de ces bourreaux à la morsure impitoyable,
l'ombrageaint de leurs ailes, comme un voile funèbre.
Le Christ, le divin Rédempteur, obtint au
moins la faveur du coup de lance dans la poitrine.
A Rome, il n'en pouvait pas être ainsi. Le supplicié,
cloué à la croix, devait expirer lentement, épuiser
la coupe des douleurs de ses affreuses blessures;
s'éteindre dans les tortures de la faim et de la soif,
et des déchirements acharnés de ses chairs pantelantes par les avides vautours. Prométhée dut
attendre son Hercule pendant
vint enfin,
des
siècles.
Il
pour le Monde asservi et décimé,
porté sur un rayon de l'Orient; et il terrassa ce
�♦
— 343 —
Minotaure insatiable cent fois plus atroce que la
peste implacable (i).
Telle était la loi des Quirites; et nous regardons
son abominable exécution, terrifiés comme devant
la porte béante des Enfers.
Voilà bien le jus proprium civitatis. Celui-là ne
fut emprunté à personne.
Que dire de cette Civilisation Latine tant vantée?
A fructibus eorum cognoscetis eos. Tels sont les
faits avoués par les Historiens Romains, cependant
si habiles à dissimuler leurs hontes Nationales,
et à calomnier nos Aïeux. Vainqueurs du monde
connu, ils pillent consciencieusement ses richesses
de tout ordre, et réduisent les vaincus à la misère
jusqu'à la mort. Ils trient parmi eux, avec grand
soin, les jeunes filles et les beaux garçons, traînés
par troupeaux dans la nouvelle Gomorre, et les jettent
en pâture à toutes les prostitutions, à toutes les
infamies. Et ces nobles Dominateurs les détruiront
(i) Voir Loiseleur, Us Crimes et les Peines. Hachette, 1863.
ln-8, chap. 3, 4, \.
�— 344 —
jusqu'au dernier, pour satisfaire leurs lubricités
monstrueuses, jamais assouvies, et leurs instincts
féroces; ils les feront dévorer par les fauves des
Arènes, et massacrer par milliers dans les combats
de gladiateurs, aux jeux solennels, à leurs fêtes
privées, à leurs repas somptueux, ou aux funérailles Patriciennes. Ainsi de grands Etats, jadis
florissants, seront réduits en déserts. Le travail
servile, même en Italie, fait au travail libre une
concurrence si désastreuse, que les citoyens pauvres, mourant de faim, ne trouvent leur salut que
dans la servitude volontaire! ! !
Et voilà, si nous en croyons les Académies,
quels furent les Apôtres de la Civilisation dans
notre chère et noble Patrie! ! !
Il leur suffit que Virgile ait chanté le pieux Enée
en beaux vers, que Cicéron ait prononcé des
harangues superbes, que Tacite ait buriné les pages
immortelles de son Histoire.
Ils s'obstinent avec raison, à proposer à notre
admiration cette œuvre d'une Caste jalouse; mais
�— 345 —
il n'est pas défendu de lever ce masque éblouissant
cachant fort mal l'égoïsme féroce, le matérialisme
abject, la brutalité bestiale de ces Civilisateurs du
Monde par eux traîné aux Gémonies.
Et cependant nous leur serions redevables de notre
Langue, de nos Institutions Civiles, Politiques
et Religieuses. Il importe de détruire ces vieilles
Légendes acceptées sur parole depuis des siècles.
Elles doivent disparaître, dans l'intérêt de la vérité
et de nos gloires Nationales. Contentons-nous de
la Tradition Gauloise; elle doit suffire à notre
orgueil. Abandonnons l'honneur de l'Ascendance
Romaine aux Italiens, cette race Caïne de notre
grande famille Celto-Grecque.
§ Il — CRÉANCIERS ET DÉBITEURS
TABLE
IIIe. —Voici encore du pur Droit Romain.
Un délai de trente jours est accordé au débiteur qui
ne se libère pas à l'échéance. Passé ce délai, le
�— 346 —
créancier s'en saisit, l'emprisonne, le charge de
chaînes qui ne devront pas, il est vrai, peser plus de
quinze livres. Le débiteur est réduit en esclavage ! !
Mais au cas de concours entre plusieurs créanciers,
il sera DEPECE, corpus rei secanto ! ! si plus minus
ve secuerint, sine fraude esto ! ! ! A moins qu'ils ne
préfèrent le transporter au-delà du Tibre et le
vendre à l'étranger ( i ) ! !
Est-ce dans l'étude de cet article 3 que s'alluma
l'enthousiasme de Cicéron pour la Loi des Douze
Tables?
Couper une tranche de la chair vive du débiteur
en retard de payer sa dette ! ! Le dépecer vivant, en
morceaux proportionnés aux droits de chacun de
ses créanciers ! Et ces conditions dignes d'un peuple
d'Antropophages durent s'exécuter à la lettre, car
tout est de Droit strict chez les Quirites. Espérons
(1) Solon défendit d'engager son corps et ses biens à ceux
qui prêtaient à usure. Antérieurement à sa législation, ceux
qui ne pouvaient payer leurs dettes, étaient réduits à servirle
créancier, moyennant un certain salaire, et jusqu'à extinction
de la dette,
�9
— 347 —
que l'intérêt bien entendu leur conseilla quelquefois
de ne pas user trop hâtivement de ces procédés de
boucherie.
Voici en effet comment les Patriciens, dignes
aïeux des Juifs de notre époque, préludaient au
dénouement fatal, si on en croit Tite-Live (i).
Toute maison noble avait son cachot et son assortiment de chaînes et d'instruments de torture, au service des débiteurs en retard de se libérer. Sachons
comment ils y étaient traités.
Un vieillard, couvert de haillons, se présente sur
la Place Publique, pâle, maigre, la barbe inculte et
les cheveux en désordre. Ancien Centurion, sa
bravoure lui avait valu d'honorables récompenses.
Il montrait sa poitrine couverte de glorieuses cicatrices. Et il dit à la foule accourue « queies Sabins
)) ayant dévasté ses récoltes, incendié sa maison,
)) enlevé ses bestiaux, il dut emprunter pour payer
» son tribut; que l'usure l'avait bientôt dépouillé
)) du champ Paternel, et de tout ce qui lui restait. ))
|i) Lib. 6, §§ 14 et 36; lib. 8, § 28; lib. 1 1, § 23.
�— 348 Que livré à son créancier, il avait trouvé chez lui
un bourreau. Puis, découvrant ses épaules, il les
montra déchirées de coups de fouets!! ! Un vieux
soldat criblé de blessures! ! ! Manlius le comprenait
autrement. Averti qu'un de ses Centurions, réputé
pour sa vaillance, venait d'être vendu comme insolvable, il accourt, paie la dette, ne voulant pas souffrir, disait-il, qu'un vieux brave, son frère d'armes,
fût traîné en servitude. Mais il était Manlius, et
une Loi odieuse tolérait que de glorieux Soldats
fussent ainsi traités (r).
La famille toute entière du débiteur répondait de
la dette de son chef; car sa femme et ses enfants
ne sont que ses membres : et voici l'application du
principe.
C. Publilius, de noble race, s'était livré à Papérius, pour répondre des dettes de son père. Jeune,
(i) Suivant Tite-Live (lib. 6, §
11),
Manlius paya les dettes
des Plébéiens pour obtenir la Royauté de leur reconnaissance : acriores quippe œeris alieni stimulos esse, qui non
egestatem modo atque ignominiam minentur,
vinculis corpus liberum territent.
sed nervo ac
�— 349 —
beau de visage, bien fait de corps, le créancier mit
tout en œuvre, promesses et menaces, pour en
obtenir de honteuses complaisances. Sa résistance
enflamme les ardeurs impudiques du créancier. Il
le fait dépouiller, et déchire son corps nu de coups
de verges. La victime échappe à son bourreau, et se
réfugie sur la Place Publique. Le peuple s'assemble
furieux, et le Sénat, pour empêcher l'insurrection
d'éclater, décide qu'à l'avenir les biens du débiteur,
non plus son corps, répondront seuls de ses dettes.
Ainsi cessèrent-ils d'être mis aux fers.
Il avait été institué des Magistrats spéciaux (an
366 deR.) appelés Mensarii, pour mettre un frein
à la rapacité des usuriers, et protéger le peuple
obéré.
Ce qui n'empêcha pas de nombreux soulèvements, dont la raison est toujours la même :
Propler ingentem vint aeris alieni.
Voilà certes qui n'a rien de commun avec le Droit
Hellénique.
Mais continuons notre intéressant examen.
�— 350 —
§ III - PUISSANCE PATERNELLE
La TABLE IVe était spéciale aux droits de la Puissance Paternelle. A Lacédémone, dont toutes les
Institutions convergaient vers le but unique de la
guerre, l'enfant, en venant au monde, subissait
l'examen de Magistrats spéciaux, qui le supprimaient si sa conformation était défectueuse. La
Cité ne voulait pas nourrir des hommes incapables
de la défendre.
Chez les Athéniens, le père, à la naissance de
ses enfants, ne consultait que sa convenance. Il les
élevait, ou les sacrifiait, suivant son intérêt ou ses
calculs. Ce droit de vie et de mort ne menaçait que
celui qui vient de naître.
A Rome, au contraire, il dure autant que le père
et les enfants.
La Puissance Paternelle n'y est pas fondée sur les
�sentiments de la nature et les devoirs qu'elle impose, mais sur l'arbitraire, et le despotisme le plus
effroyable qui fut jamais. En effet, le chef de
famille dispose à son gré des biens de ses enfants,
quellequ'ensoitl'origine. Il les exhérède sans cause,
les chasse de la maison sans raison même apparente, et met des étrangers à leur place, si tel est
son bon plaisir; il les réduit en esclavage, et peut
les vendre jusqu'à trois j'ois!!! Leur vie lui appartient
comme celle des animaux de ses étables. Il peut les
mettre à mort à sa fantaisie, sans que le Magistrat
ait le droit de lui en demander compte. Juge et bourreau impunément :]tel est le chef de la famille Romaine.
Les fils de Brutus ont conspiré pour relever le
trône de Tarquin, leur parent : le père leur fait
trancher la tête.
Le fils du Consul Manlius Torquatus, va combattre, malgré les ordres de son père, et il est livré
au bourreau.
Le fils du Dictateur Posthumius. Général de Ca-
�— 352 —
valerie, attaque l'ennemi sans l'ordre de son père,
et sa victoire ne le sauva pas de la hache.
Tel autre, dont le nom nous échappe, réduit en
esclavage son fils bègue, et adopte pour le remplacer
un étranger éloquent et beau, plus digne de continuer sa famille.
Les Instituïes ont raison d'affirmer que : nulli
enim alii sunt homines qui talem in liberos habeant
potestatem. Voilà bien du Droit Romain.
Quant au Parricide, il était d'abord fouetté jusqu'à
effusion de sang; puis cousu dans un sac de cuir,
avec un chien, un singe, une vipère et un coq, et
jeté à la mer ou dans le fleuve voisin : capite, obvoluto, culeo infusus, in aquam abjicito.
Mais quels furent les effets de ce despotisme
monstrueux?
Sénèque atteste que ces sacs étaientplus nombreux
sur les bords de la mer et des cours d'eau, que les
croix des esclaves au long des chemins (i).
(i) De Clément, lib. i, 23.
Pessimo loco pietas fuit, postquam saepius culleos quam
cruces vidimus.
�— 353
Toute tyrannie aura fatalement le couteau pour
correctif. A qui la faute, sinon au Législateur qui
l'organise ou la tolère.
Et Cicéron se pâmait d'admiration devant la
Loi des Douze Tablesl ! !
»3
��11« ANNEXE
LES
VRAIES
LOI DES
SOURCES
XII
DU
TABLES
DROIT
ET
LE
ROMAIN.
DROIT
—
LA
PRÉTORIEN
D'ORIGINE ÉGALEMENT GRECQUE.
????
Après avoir montré quelques échantillons de la
Loi des XII Tables, l'instrument par excellence de
la Civilisation Romaine, il importe d'en faire
connaître les Origines.
La Cité des enfants de la Louve avait pris d'immenses proportions, grâce à la Victoire, fidèle à ses
Légions depuis plus de trois siècles. Mais il lui
manquait les Institutions indispensables à la vie
régulière d'une Société bien ordonnée : et ses
�- 356 -
Hommes d Etat se trouvaient dépourvus des aptitudes propres à combler la lacune. Légiférer n'est
pas combattre, mais son contraire, comme le Droit
est celui de la Force.
Si nous en croyons Tacite (i), le Philosophe
Hermodore Epkésien leur conseilla d'emprunter les
Lois de leurs voisins de la Grèce. Ainsi furent
désignés dix Sénateurs, parmi les plus considérables, dénommés Dccemvirs, pour aller demander
leurs Codes à ses petites Républiques. (451 ans
av. J.-C).
Revenus de leur voyage, chargés d'une très ample
moisson (2), ils se mirent à l'œuvre, aidés par
Hermodore lui-même, et composèrent
les XII
Tables avec leurs vieilles Coutumes, et les trésors
amassés au cours de leur Ambassade.
Notre 1" Annexe nous semble largement suffisante pour discerner facilement la partie Hellénique
de cette Législation du fumier Romain, et reporter
( 1 ) A nn.,
(2)
lib.
1.
Lib. 10. C. 11, §
2.
Den. d'Halic.
�o
— 357 —
à leurs véritables Auteurs l'honneur de la partie
de ce Droit d'importation nouvelle, et vraiment
digne d'un Peuple civilisé.
Comment donc finit-il par prévaloir sur les férocités des Coutumes Nationales?
Les Prêteurs, comme aussi les Auxiliaires de
leurs Tribunaux, sortirent à peu près tous des Ecoles
d'Athènes.
Ainsi, la Jurisprudence imprégnée chaque jour
davantage delà Science et de la Morale Helléniques,
se refusa de plus en plus à l'application rigoureuse
de lois en opposition avec le Droit Naturel, et un
Droit Civil indigne de porter ce nom. Grâce à des
interprétations audacieuses jusqu'à l'arbitraire, à
l'invention de conditions sous entendues, à des
exceptions tirées de la bonne foi et de l'équité,
grâce à toutes les subtilités, à tous les subterfuges,
la Jurisprudence prit peu à peu la place de la Loi
des Douze Tables, et précipita sa désuétude.
Les Magistrats d'Athènes (i) s'étaient débar|i) Aulugelle, Noct. attic. lib. n,c.
1$.
�r
~ 358 rassés des Lois de Dracon par les mêmes procédés.
Telle fut l'origine du Droit Prétorien, Corps de
Doctrine constitué par un ensemble de Décisions,
qui deviendra plus tard l'objet des travaux de Commentateurs éminents.
Le strictum jus disparut insensiblement devant la
Loi Naturelle et d'Equité.
Nul ne dénie à l'Ecole d'Athènes sa Philosophie
sublime; et on lui contesterait la Science Juridique
par elle engendrée quasi filia a maire.
A quelle date, en effet, ce Droit Prétorien prendil sa consistance et son éclat? Après que la bienfaisante rosée de la Pédagogie Grecque eut fécondé,
pendant des siècles, le terrain de la Cité de Mars.
N'oublions pas en effet qu'Auguste ferma les portes
du Temple de Janus pour la seconde fois, depuis
l'origine de Rome.
Or, les camps ne furent jamais un terrain de
culture favorable au développement des Sciences
ou des Arts.
Citons le témoignage d'un vrai Romain, élève
�— 359 —
lui-même de l'Ecole d'Athènes, ami fidèle et protégé de Virgile. Il s'appelait Horace :
Grcecia capta, ferum victorum cepit, et artes
Intulit agresti Latio (i).
Le Stoïcisme avait trouvé dans le sentiment
Républicain un sol trop bien préparé pour ne pas
y pousser de profondes racines. Il compta bientôt
l'élite de la Cité parmi ses adeptes, et devint le
véritable moteur du développement Juridique.
Grâce à lui, la Jurisprudence nouvelle progressa,
dirigée par la pure raison, et les principes d'une
Morale austère. Ainsi la pratique étroite des arguties, des formules captieuses, et des subtilités succombait, assaillie par la Philosophie qui lui substitua la doctrine, déjà vieille de plusieurs siècles
chez les Grecs. Cette période mémorable de transformation mérite qu'on s'y arrête un instant.
Auguste eut aussi son Troplong. Il s'appelait
(i) 2. i, 156. La Grèce prise a pris elle-même son farouche vainqueur, et apporta la Civilisation dans le Latium
sauvage.
�r
— 360 —
Ateius Càpito. Esprit souple, courtisan habile,
avide de faveurs, il consacra sa Science incontestée
à défendre le vieux Droit des Formules, et des textes
judaïquement interprêtés.
Mais en face de lui se dressa un rival redoutable,
plus Savant que lui, à l'âme plus noble, au cœur
plus élevé, Antistius Labeo; Disciple convaincu de
Zénon, il enseigna que le Droit ne doit être que la
raison écrite avouée par la Conscience. La lutte se
trouvait ainsi engagée entre la Démocratie et le
Patriciat, entre la Grèce et la Rome antique.
Tacite a pu dire de Labéon :
Incorrupta liberlate etob id fama celebralior (1). Il
continue le parallèle avec son rival : Capitonis obsequium Dominantibusmagisprobatur .llli quod Praeturatn intra stetit, commendalio ex injuria; Huic quod
Consulatumadeptusest, odiumexinvidiàoriebalur{2).
(1) D'une liberté inflexible, avec une renommée plus populaire. [Annal., lib. 3, § 75.)
(2) L'obéissance de Capiton plaisait davantage aux Maîtres.
L'un ne fut que Préteur, et cette injustice le fit plus recommandable; l'autre fut Consul, et l'envie lui valut la haine.
[Ibidem.)
�Dès cette époque se trouvèrent fondées deux
Ecoles antagonistes, celle des Sabiniens, ou disciples de Capiton, et celle des Proculeiens, continuateurs du légiste Stoïcien Labéon. Les deux
génies Romain et Grec ainsi mis aux prises sous
Auguste, ne ralentirent pas la lutte après que Salvius Julianus eut composé, au temps de l'Empereur
Adrien, XEdictum perpétuant : groupement méthodique des Edits, et des Décisions des Ediles et des
Préteurs,
il devint le Code de l'avenir. Mais
bientôt après rayonna Papinien, le Jurisconsulte le
plus illustre de l'Antiquité, qui imposa ses décisions du haut de son génie et de son honneur
auquel il sacrifia sa vie : car il eut la tête tranchée
à 37 ans, sur l'ordre de Caracalla, pour avoir refusé
de faire l'apologie du César fratricide.
Il y a mieux encore : Et la Grèce ne contribua
pas à ces progrés glorieux seulement par ses Lois
divulguées, et ses méthodes Philosophiques; car
dans le nombre des Ouvriers illustres qui édifièrent
cette Législation d'emprunt, la plupart étaient ori-
�0
— 362 —
ginaires des pays de langue Grecque. Il suffit de
citer Paul, Ulpien, et Papinien lui-même, les deux
premiers.de Tyr, et le troisième de Phénicie.
Il était réservé à un Empereur de Constantinople,
Justinien, né en Mésie, encore pays de langue
Grecque, de réunir et mettre en ordre les immenses
matériaux de ce Droit épars de tous côtés, dans les
Dépôts Publics, et dans les volumes des nombreux
savants interprètes de YEdit perpétuel.
Son œuvre tient une très large place parmi celles
qui ont rendu les plus signalés services à la Civilisation moderne. Il y associa Tribonien de Pamphilie, qui choisit pour ses Collaborateurs Théophile
et Dorothée, dont les noms indiquent suffisamment
l'origine.
Il enrichit sa compilation d'un Code et de Nouvelles, dont l'imprégnation n'est plus Hellénique
seulement, mais Chrétienne cettefois. Ainsi le génie
Grec rendait un nouveau service à l'Humanité.
Après avoir pétri la Rome barbare, il se saisit de
l'Evangile, et constitua les assises définitives de la
�Civilisation universelle, avec ses Pères de l'Eglise,
non moins illustres que ses Philosophes, que ses
Législateurs, ou que ses Artistes.
Il ne serait pas juste d'oublier les puissants
Auxiliaires qu'ils trouvèrent parmi nos grands
Saints Gaulois.
Les Romains ne sont pas plus fondés à revendiquer le Droit, qui porte leur nom, que nos langues
méridionales dites Romanes. Qu'il leur suffise de se
parer des couronnes triomphales de la conquête
violente que nul ne leur conteste. Mais la gloire
du génie Civilisateur et de son œuvre ne leur
appartient pas. Ils en étaient indignes autant
qu'incapables.
��TABLE DES MATIÈRES
DU I" VOLUME
??ï?
Pages.
— Comment cette étude a été entreprise et suivie —■ Nécessité de la conservation des Dialectes, — Au point de vue
patriotique — Dans l'intérêt de la race
Celto-Grecque
PRÉFACE.
Ire PARTIE —
EXPOSÉ HISTORIQUE
Ier. — Comment se forment les
langues. — Origine des langues Aquitaniques — Polybe — Tite-Live — César —
CHAPITRE
i
�—
366
—
Pages.
Strabon — Diodore de Sicile — Ammien
Marcellin — Justin — Examen des textes
et leurs conséquences
13
II. — Les Hagiographes — Fon-
CHAPITRE
dation de l'Eglise Gauloise par des Apôtres
de langue Grecque pendant les trois premiers siècles— La langue Latine étrangère
à leur Apostolat — Leurs témoignages... .
39
III. — Système de Sismondi —
CHAPITRE
Prétendue substitution de la langue Latine
aux Dialectes locaux dans les Gaules désertes, et repeuplées après la conquête Césarienne, par des Colonies Italiennes — Série
d'erreurs historiques rectifiées
CHAPITRE
59
IV. — Raynouard et ses imagina-
tions — La prétendue langue Romane —
Les Gaulois furent et sont invinciblement
fidèles à leurs Dialectes d'origine CeltoGrecque
CHAPITRE
67
V. — Quelques Coutumes et insti-
tutions Gasconnes d'origine Grecque et
Celte — § ier Mariage — § 2 Funérailles —
§ 3
Réjouissances — § 4 Danses et chants
— § 5
Hestonnaôu ou Fête locale — §
6
La
�Pages.
Guilanneuf ou Guilhounè— § 7 Fête de la
Saint-Jean — § 8 Charivari ou Brénado —
§ 9 Le Municipe ou la Commune — § 10
La Religion Grecque et la Philosophie Pythagoricienne en Gaule antérieurement à la
conquête Romaine—§ 11 Droit civil Gascon
d'origine Grecque — Lois civiles usuelles
— Mariages—Successions—Propriété, etc.
— § 12 Charondas (444 av. J.-Ch.) — Instruction gratuite et obligatoire — Service
obligatoire — Assistance gratuite
VI. — Destinée de nos Dialectes
après César— § 1" Preuves juridiques de
leur conservation ininterrompue jusqu'au
vie siècle — § 2 Preuves historiques de leur
conservation jusqu'à la fin du xe siècle —
Saint Irénée — Sidoine-Apolinaire —
Sulpice-Sévère, etc., etc. — § 3 Rapport de
l'abbé Grégoire à la Convention Nationale
(1794) au nom du Comité de l'Instruction
Publique —• Aveux précieux —■ Raisonnements singuliers — § 4 Où nous en sommes.
— Les Dialectes Gaulois plus que jamais
vivants revendiquent leurs droits
73
CHAPITRE
113
�— 368 —
Pages.
VII. —■ Résumé et Conclusion de
la partie Historique
CHAPITRE
141
IIE PARTIE — EXPOSÉ PHILOLOGIQUE
VIII. — Origine Celto-Grecque des
langues Méridionales —• Erreur de la Science
Officielle, qui les dérive du Latin, établie
d'abord par la différence radicale des Grammaires Celte et Latine
CHAPITRE
IX. —Les Celtes — Opinions différentes sur leur origine — Religion —
Sciences — Etat politique — Langue —
Erreur des Néolatins — § 1. —■ Dom P.
Pezron — Origine des Celtes — Leurs invasions — Leurs Colonies en Europe — Tableau comparatif de mots de cinq langues :
Celte, Grecque, Gasconne, Latine, Française. — § 2. — P. Duplan — Le Celte fut
la langue primitive commune à toute l'Europe—Formation des langues Européennes.
— Conservation du Celte dans le Bigourdan — Tableau comparatif des mots de
6 langues : Bigourdane, Latine, Italienne,
CHAPITRE
149
�— 369 —
Pages.
Espagnole, Portugaise, Française — Conclusion
157
X. — Le Jésuite Philippe Labbe
Néolatin contre les Jansénistes Grécophiles :
— Solution de la querelle par Ordonnance.
— Suivant les Néolatins, le Vocabulaire de
la Langue Française fut composé à l'aide
d'emprunts faits dans les cinq parties du
Monde — Brachet — Littré, etc. —■ Et suivant nous, avec nos Dialectes Provinciaux
seulement
187
CHAPITRE
XI. — Réponse au Révérend Père.
— Le Grec, langue primitive de Rome —
Denis d'Halicarnasse—Plutarque—Cicéron
— Polybe—Valère Maxime — Aulu-Gelle.
— Etat du Latin au vie siècle de Rome —
Senatus Consultes prohibitifs de l'Enseignement— Toléré au temps de Cicéron—Vespasien le rend Officiel—Son fils le supprime
dans toute l'Italie — Le Latin créé par l'Aristocratie Romaine disparaît avec elle
comme langue parlée. — Il ne fut jamais
employéparaucunpeuple, mêmedu Latium
— Nos Dialectes, toujours en usage, bien
CHAPITRE
�Pages.,
qu'antérieurs de plus de 600 ans au moins
à lalangue Latine
197
XII. —Le bassin de l'Océan colonisé
par les Grecs—Am. Marcellin après Timagène — II. Ribadieu — A. Thierry — Tableau des noms d'origine Grecque de quelques anciens Peuples de la Gaule — Idem
de quelques Villes — Idem des Fleuves, Rivières, Montagnes— Idem de quelques-uns
des Noms Grecs conservés dans la langue
usuelle — Méthode Grecque pour la composition des noms
215
CHAPITRE
ANNEXE
au Chapitre XII
259
XIII.—D'où vient le nom des Gascons..,
265
XIV. — Quelques vieux mots Gascons d'origine Celto-Grecque en regard de
leurs synonymes d'origine Latine tous également en usage — Deux tableaux comparatifs de chacun 100 mots : 1* Grec, Gascon,
Latin, Français; 20 Grec, Gascon, Français, Latin, Gascon
273
CHAPITRE
CHAPITRE
�Pages.
XV. — Signification certaine de
quelques mots Celto-Grecs —Drôleries Etymologiques— Tableau comparatif en 5 langues : Sanscrit, Grec, Gascon, Latin, Français — Conséquences de la comparaison..
307
XVI. — Résumé de la partie Philologique
331
ANNEXE. — Loi des 12 Tables sur i° l'Esclavage; 2" le Prêt à intérêt; 30 la Puissance
paternelle
337
CHAPITRE
CHAPITRE
Ire
IIe
ANNEXE.
Les vraies sources du Droit
Romain. — La Loi des XII Tables, et le
Droit prétorien d'or igine également Grecque
355
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TYPOGRAPHIE
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Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Patrimoine écrit occitan:imprimés
Description
An account of the resource
Ce set contient les imprimés numérisés par le CIRDÒC issus des collections des partenaires d'Occitanica
Libre
Item type spécifique au CIRDÒC : à privilégier
Région Administrative
Languedoc-Roussillon
Variante Idiomatique
Gascon
Aire Culturelle
Gascogne
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
Dictionnaire étymologique de la langue gasconne avec la racine celte ou grecque de chaque mot gascon suivi du mot latin et français : Premier volume / par Alcée Durrieux, avocat à la Cour d'appel de Paris
Subject
The topic of the resource
Occitan (langue) -- Dictionnaires
Gascon (dialecte) -- Étymologie -- Dictionnaires
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Durrieux, Alcée (1819-1901)
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie et lithograhie Gaston Foix (Auch)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1899
Date Created
Date of creation of the resource.
2015-10-23
Date Issued
Date of formal issuance (e.g., publication) of the resource.
2015-10-23 Joanna Cassoudesalle
Rights
Information about rights held in and over the resource
domaine public
License
A legal document giving official permission to do something with the resource.
Licence ouverte
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
1 vol. (371 p.)
Language
A language of the resource
fre
oci
lat
Type
The nature or genre of the resource
Text
monographie imprimée
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
http://purl.org/occitanica/12391
FRB340325101_CR-XIX-0209-1
Temporal Coverage
Temporal characteristics of the resource.
18..
Relation
A related resource
Vignette : http://www.occitanica.eu/omeka/files/square_thumbnails/b81cad4645dea3bed11b7e8ae8e04078.jpg
http://www.sudoc.fr/008949425
Description
An account of the resource
C'est en 1899 qu'Alcée Durrieux (1819-1901), avocat à la Cour d'appel de Paris, originaire de Lectoure (Gers), érudit et philologue, traducteur des <em>Poésies gasconnes</em> de Pey de Garros, publie son <em>Dictionnaire étymologique de la langue gasconne avec la racine celte ou grecque de chaque mot gascon suivi du mot latin et français</em>, en deux volumes.
C'est en 1899 qu'Alcée Durrieux (1819-1901), avocat à la Cour d'appel de Paris, originaire de Lectoure (Gers), érudit et philologue, traducteur des <em>Poésies gasconnes</em> de Pey de Garros, publie son <em>Dictionnaire étymologique de la langue gasconne avec la racine celte ou grecque de chaque mot gascon suivi du mot latin et français</em>, en deux volumes.
C'est en 1899 qu'Alcée Durrieux (1819-1901), avocat à la Cour d'appel de Paris, originaire de Lectoure (Gers), érudit et philologue, traducteur des <em>Poésies gasconnes</em> de Pey de Garros, publie son <em>Dictionnaire étymologique de la langue gasconne avec la racine celte ou grecque de chaque mot gascon suivi du mot latin et français</em>, en deux volumes.
Alternative Title
An alternative name for the resource. The distinction between titles and alternative titles is application-specific.
Dictionnaire étymologique de la langue gasconne : Premier volume / par Alcée Durrieux
Source
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Mediatèca occitana, CIRDOC-Béziers, CR-XIX-0209-1
Occitanica
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