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PDF Text
Text
�Une grande famille féodale dans le Languedoc du XII ème
siècle, les Guilhem de Montpellier
L’importante famille féodale des Guilhem, seigneurs de Montpellier, est un cas particulier sous
bien des égards dans le Languedoc du XIIème siècle. Apparaissant pour la première fois dans les
sources à la fin du Xème siècle, les Guilhem de Montpellier n'étaient alors qu'une famille
seigneuriale relativement modeste du comté de Melgueil1. Ils opérèrent une rapide ascension au
cours du XIème siècle, de pair avec le développement exponentiel de leur ville de Montpellier, et
s'imposèrent au XIIème siècle comme une des familles seigneuriales les plus puissantes du
Languedoc. Comme la quasi-totalité des seigneurs languedociens, ils furent à leur tour entraînés
dans le conflit entre les comtes de Toulouse et de Barcelone qui secoua la région durant tout le
XIIème siècle : la grande guerre méridionale. Contrairement à d’autres acteurs de cette guerre qui
alternèrent leur fidélité d’un camp à l’autre au cours du siècle, comme la famille Trencavel, les
Guilhem de Montpellier restèrent des soutiens inébranlables des comtes de Barcelone jusqu’à la
fin du conflit. Au-delà de leur importance régionale, les Guilhem sont un cas intéressant de part
les stratégies originales qu’ils mirent en œuvre pour renforcer leur pouvoir et assurer la pérennité
de leur seigneurie. Appuyés sur une ville marchande florissante qu’ils s’employèrent à développer,
ils formèrent dans la deuxième moitié du XII ème siècle une alliance forte avec la haute bourgeoisie,
qui posait tant de problèmes aux Raimondins et aux Trencavel 2.
Nous verrons d’abord l’histoire des Guilhem de Montpellier au cours des XI ème et XIIème siècles et
les étapes de leur ascension en Languedoc, puis les stratégies qu’ils mirent en œuvre pour assurer
la pérennité de leur seigneurie, avec notamment le réseau d’alliance et de parentés qu’ils
développèrent, leur alliance avec la bourgeoisie montpelliéraine et leur amitié avec les papes.
I. Les Guilhem de Montpellier
La première mention de Montpellier qui nous soit parvenue est la donation, le 26 novembre 985
par le comte de Melgueil d’un manse nommé Monte Pestelario à un dénommé Guilhem, en
échange de son dévouement3. La ville de Montpellier n’existe alors pas et Guilhem ne reçut que
des champs et des garrigues, avec probablement quelques habitations éparses. De cette modeste
donation résultera à la fin du XIIème siècle une des plus grandes villes du sud de la France,
1Le comté de Melgueil (aujourd’hui Mauguio) était situé dans l’actuel département de l’Hérault.
2On peut citer l’exemple extrême de Raimond Trencavel, vicomte de Béziers, Carcassonne et Albi, qui fut assassiné en
1167 par les bourgeois de Béziers.
3Pour plus de détails sur cette donation de 985, voir H. Vidal, Montpellier et les Guilhem, Université Montpellier 1,
2012, chapitre "Aux origines de Montpellier : la donation de 985".
1
�rivalisant avec les anciennes cités romaines de Narbonne ou Béziers.
L’une des raisons d’un tel développement se trouve dans la situation originale du comté de
Melgueil lui-même. En effet, les autres comtés et vicomtés du Languedoc sont normalement
centralisés autour d’une cité importante, en général une ancienne cité romaine, dans laquelle
réside à la fois le comte et l’évêque. C’est le cas de Nîmes, Béziers, Agde ou Lodève par exemple.
Le comté de Melgueil en revanche ne vit pas ce type de développement : au haut Moyen Âge les
anciennes villes latines, comme Maguelone ou Substantion, déclinèrent progressivement. L’évêque
et le comte résidaient au début du Moyen Âge à Maguelone mais se déplacèrent ensuite à
Substantion quand la cité fut pillée par Charles Martel. Ils se séparèrent ensuite quand cette ville
périclita à son tour : les comtes s’installèrent dans le château de Mauguio alors que les évêques
retournèrent à Maguelone dont ils relevèrent l’ancienne cathédrale. Le comté de Melgueil n’avait
donc aucun centre urbain d’importance et était partagé entre deux pôles de pouvoirs
géographiquement séparés.
C’est dans ce contexte que Guilhem reçut le manse de Montpellier. Bien que son ascendance soit
obscure et plus modeste que les grandes familles féodales du Languedoc 4, il n’est lui-même pas
ressource. Guilhem et sa famille avaient des possessions dans la viguerie de Popian, dont
notamment le château d’Aumelas, dont la construction serait l’œuvre d’un Gui, père putatif de
Guilhem I5. Montpellier ne serait ainsi, à la fin du Xème siècle du moins, qu’une possession plutôt
périphérique des Guilhem. Après ce premier acte fondateur de 985, l’obscurité recouvre les
actions des premiers des seigneurs de Montpellier. L’historiographie en dénombre quatre, de
Guilhem I à Guilhem IV, ce dernier mourant en 1076 laissant un fils en bas âge, Guilhem V. Les
étapes des premiers développements de la ville de Montpellier nous sont inconnues, mais celui-ci
semble très rapide. En effet en 1076, Montpellier est déjà une ville digne de ce nom, avec son
enceinte et son château seigneurial, le château Saint-Nicolas, alors qu’il n’y avait rien moins d’un
siècle plus tôt.
Les comtes de Melgueil étaient à cette époque entièrement indépendants du comte de Toulouse,
et dans les faits les raimondins n’avaient aucune prétention sur le comté. Ils n’en étaient pas
absents pour autant. A la mort de Guilhem IV en 1076, Raimond de Saint-Gilles prit le jeune
Guilhem V et sa seigneurie sous sa protection. Cette implication de celui qui allait devenir comte
de Toulouse dans le comté de Melgueil n’était pas anodine. Guilhem IV de Montpellier devait
déjà avoir eu des différends avec le comte de Melgueil et Raimond de Saint-Gilles par cette
manœuvre devait vouloir s'appuyer sur le seigneur de Montpellier contre le comte. Pierre de
Melgueil avait en effet épousé Almodis de Toulouse, sœur de Raimond de Saint-Gilles, et ce
dernier avait probablement des vues sur le comté.
C’est ainsi peut-être pour se protéger de son ambitieux beau-frère que Pierre de Melgueil fit la
donation de son comté à la papauté en 1085, faisant du pape son suzerain supérieur. Si c’était la
raison de cette manœuvre, cela fonctionna : nous n’avons plus de trace d’intervention raimondine
dans le comté de Melgueil pour un demi-siècle.
4Voir C. Duhamel-Amado
5C. Duhamel-Amado, Genèse des lignages méridionaux, t. 2, Portraits de familles, Toulouse, 2001, p. 397-403.
2
�La puissance du seigneur de Montpellier s’accroissait alors de plus en plus rapidement ce qui
entraîna des conflits avec ses deux suzerains, le comte de Melgueil et l’évêque de Maguelone.
Guilhem V contestait les droits que ses suzerains possédaient encore sur Montpellier afin d’en
devenir le seul seigneur. Un accord est signé avec le comte en 1080 dans lequel celui-ci cède les
droits qu’il conservait encore sur la ville contre une forte somme d’argent 6. Restait la question de
l’évêque : à cette époque, Montpellier était séparée en deux bourgs voisins : Montpellier et
Montpellieret. Les Guilhems possédaient Montpellier en plein droit, mais l’évêque était le
suzerain de Montpellieret et des conflits éclataient régulièrement entre les deux. Un compromis
fut finalement trouvé en 1090 : Montpellieret fut séparé entre le seigneur et l’évêque et Guilhem
V lui prêta serment de fidélité7.
Ces conflits avec ses deux suzerains n’allaient pas s’arranger et étaient symptomatique de la rapide
montée en puissance du seigneur de Montpellier au sein du comté.
En cette fin du XIème siècle, les possessions des Guilhem étaient déjà respectables, centrés autour
de deux pôles principaux. Autour de Montpellier, ils étaient probablement les suzerains de
Montferrier, Castelnau et Villeneuve, châteaux situés le long du Lez, ainsi que de l’étang de
Lattes8. A l’ouest, autour du château familial d’Aumelas, ils étaient également suzerains des
châteaux du Pouget et de Saint-Pons de Mauchiens9.
Guilhem V était désormais majeur et en pleine possession de sa seigneurie, mais un évènement
important allait lui faire quitter ses terres : en 1095 retentissait dans toute la chrétienté l’appel à la
croisade du pape Urbain lors du concile de Clermont, et Guilhem V de Montpellier prit la croix
aux côtés du comte de Toulouse Raimond de Saint-Gilles. Une telle entreprise nécessitant
beaucoup d’argent, il s’endetta auprès des Aimoin, qui étaient une importante famille noble
montpelliéraine, et leur confia la viguerie ainsi que la gestion de la ville durant son séjour en Terre
sainte. Il s’illustra à plusieurs reprises au cours de la croisade et était considéré comme un homme
de confiance et un chevalier vaillant de Raimond de Saint-Gilles. Quand, après la prise de
Jérusalem en 1099, certains seigneurs quittaient la Terre Sainte pour rentrer dans leurs terres,
Guilhem resta encore plusieurs années à combattre pour le comte de Toulouse et ne fut de retour
à Montpellier qu’en 1103. A son arrivée, il réalisa que les Aimoin avaient profité de son absence
pour renforcer leurs pouvoirs dans la ville à ses dépens. Guilhem V revenait de la croisade pas plus
riche qu’il n’en était parti et ne pouvait leur rembourser sa dette. Ceux-ci refusèrent de lui rendre
le château de Saint-Nicolas où ils s’étaient installés, et le forcèrent à signer un accord dans lequel il
leur cédait la viguerie en tant que fief héréditaire, ainsi que le château de Saint-Nicolas et toute
6LIM p. 99.
7LIM p. 69, 90, 91.
8Aucune donation ni serment concernant les Guilhem ne nous est parvenu jusqu’en 1111, et ils étaient déjà à cette
époque suzerains de ces différentes possessions. Au vu de leur proximité avec Montpellier, il est probable qu’elles
étaient déjà en leur possessions dès 1076, mais nous n’avons aucune source pour le confirmer.
9Pour les liens entre les Guilhem et les seigneurs du Pouget et de Saint-Pons de Mauchiens, voir C. DuhamelAmado, Genèse des lignages méridionaux, t. 2, Portraits de familles, Toulouse, 2001, p. 274-275.
3
�une série de droits sur la ville10. L’autorité seigneuriale était ainsi amputée au sein même de
Montpellier au profit d’une famille rivale puissante et hostile, qui allait rester une épine dans le
pied des Guilhem pendant au moins un demi-siècle.
Détail intéressant, il s’avère que plusieurs des soutiens des Aimoin dans l’acte qu’ils signèrent avec
le seigneur de Montpellier étaient des proches du comte de Melgueil. Il paraît ainsi très possible
que le comte ait soutenu les revendications des Aimoin face à Guilhem V afin de limiter
l’ascension de ce turbulent vassal.
Cela ne fut néanmoins pas suffisant car le seigneur de Montpellier accéléra le développement de
sa seigneurie au cours des années qui suivirent. Il semblait avoir pour objectif de réunir ses
possessions occidentales d’Aumelas et orientales de Montpellier. En 1111 il reçut les serments de
fidélité des châtelains de Montarnaud et de Cournonsec, en 1112 de Popian et Frontignan, en
1113 Montbazin, en 1114 Pignan et acquit le castrum de Mazers 11 en biterrois à une date
inconnue. Guilhem V de Montpellier était ainsi devenu la force dominante dans une région allant
du Lez à L’Hérault.
Cette rapide montée en puissance entraîna des tensions de plus en plus importantes avec son
suzerain le comte de Melgueil, qui voyait une partie de ses vassaux jurer fidélité au seigneur de
Montpellier et son influence coupée de la partie occidentale de son comté. Afin de désamorcer ces
tensions grandissantes, le seigneur de Montpellier donna en 1120 sa fille Guillemette en mariage
au comte de Melgueil Bernard IV, afin de resserrer les liens entre les deux dynasties, sans grand
succès comme nous allons le voir.
A sa mort en 1121, Guilhem V sépara sa seigneurie entre ses fils, conformément aux usages du
temps. L’aîné, Guilhem VI, reçut Montpellier et ses dépendances, l’étang de Lattes ainsi que les
fiefs à l’est de la Mosson. Le puîné, nommé lui aussi Guilhem, reçut entre autres les châteaux
d’Aumelas, Popian, Montarnaud, Villeneuve, Frontignan, Montbazin et Cournonsec, et il prit le
nom de Guilhem d’Aumelas pour se distinguer de son frère. La suzeraineté des châteaux du
Pouget et de Pignan fut quant à elle partagée entre les deux frères. Ce morcellement de la
seigneurie de Montpellier affaiblissait quelque peu Guilhem VI, mais celui-ci bénéficiait toujours
du soutien de son frère avec lequel il restait proche, et conservait une forte influence sur les
vassaux de celui-ci.
Les tensions reprirent de plus belle entre le nouveau seigneur de Montpellier et le comte de
Melgueil, et elles se cristallisèrent en 1124 sur une affaire de moulin 12. Guilhem VI avait en effet
détourné un bras secondaire du Lez sur le cours principal afin de l’élargir et faciliter la navigation
vers son port de Lattes, privant d’eau un moulin appartenant à un vassal du comte Bernard IV. Le
vassal s’en plaignit au comte, qui prit sa défense et exhorta Guilhem à rétablir le cours d’eau
originel. Guilhem VI se rendit à Melgueil accompagné de plusieurs seigneurs amis et tenta de
10LIM p. 207.
11Aucun acte de donation, inféodation ou serment concernant Mazers n’est contenu dans le cartulaire des Guilhem,
aucun individu nommé "de Mazers" n’apparaît dans leurs actes, mais il est régulièrement mentionné dans leurs
testaments.
12LIM p. 101.
4
�régler la situation pacifiquement avec le comte, sans succès. Après l’échec des négociations, le
vassal lésé pilla les alentours du Montpellier à la tête des chevaliers du comte. La situation
dégénéra alors en guerre totale entre le seigneur de Montpellier et le comte de Melgueil, et chacun
saccagea les domaines de l’autre de manière répétée. L’évêque de Maguelone tenta sans succès de
mettre fin au conflit et la situation était telle qu’il en vint à faire appel au pape Calixte II pour
faire cesser les hostilités. Le pape nomma des arbitres ecclésiastiques pour résoudre le conflit,
auxquels les deux belligérants acceptèrent de se soumettre : les archevêques de Vienne et
Tarragone, ainsi que les évêques de Grenoble et Carpentras, avec l’évêque de Maguelone luimême. La sentence arbitrale fut rendue le 9 mai 1125. Guilhem dut rétablir le cours de la rivière
et chacun dut réparer les dommages causés à l’autre. Les arbitres réglèrent d’autres différends entre
le seigneur de Montpellier et le comte de Melgueil, notamment sur des questions de justice, de
péages, sur le poids et l’aloi de la monnaie de Melgueil ainsi que sur des serments dus par
Guilhem au comte. Ces arbitrages supplémentaires montrent que cette guerre violente est bien le
résultat de l’accumulation des querelles entre les Guilhem et leur suzerain et que l’affaire du
moulin n’a été que l’étincelle. L’ascension du seigneur de Montpellier était telle qu’il menaçait
désormais l’autorité même du comte, entamant un véritable bras de fer pour prendre l’ascendant
sur lui dans le comté.
En 1128, Guilhem VI fit un prêt de 13 000 sous au comte, qui avait visiblement des problèmes
financiers, et se rembourserait cet emprunt en prenant trois deniers par livres sur la frappe de la
monnaie de Melgueil. Le seigneur de Montpellier acquit du même coup un contrôle sur cette
fructueuse monnaie qui circulait dans tout le Languedoc, le comte ne pouvant désormais plus
l’affaiblir sans son consentement13. Un nouvel accord suivit deux ans plus tard en 1130 : toujours
en difficultés financières, le comte avait emprunté 5 000 sous supplémentaires à Guilhem VI et
souhaitait en plus affaiblir la monnaie melgorienne. Les deux hommes s’accordèrent sur la
question mais le comte dut faire de lourdes concessions : il donna définitivement en fief les trois
deniers par livre sur la monnaie de Melgueil au seigneur de Montpellier. De plus, s’il devait
mourir alors que ses enfants étaient encore mineurs (et il n’avait alors qu’une fille en bas âge),
Guilhem VI serait chargé de la régence du comte et de la tutelle de ses enfants14.
Ce dernier accord marque l’ascendant net pris par le seigneur de Montpellier sur son suzerain et
est l’étape finale des reculs successifs du comte depuis plusieurs décennies face à son vassal.
Bernard IV de Melgueil y sacrifiait un des derniers instruments de la puissance de sa famille en
cédant une partie des revenus qu’il tirait de la production de la monnaie de Melgueil au seigneur
de Montpellier. Cette inféodation fut un important gain financier pour les Guilhem, qui
s’attacheront par la suite à conserver cette manne financière dans leur patrimoine. La deuxième
partie de l’accord est tout aussi importante : le fait de donner la régence et la tutelle de ses enfants
est un acte de confiance, et il est évident que la confiance ne devait pas régner entre les deux
hommes. Que le comte ait accepté ces termes est un signe éloquent de son état de faiblesse.
On peut noter que jusque-là, les Guilhem se sont concentrés sur le contexte local du comté de
Melgueil. La grande guerre méridionale avait alors commencé en 1120 entre les comtes de
13LIM p. 113.
14LIM p. 116, 119, 122, 123.
5
�Toulouse et de Barcelone, chacun revendiquant le comté de Provence, jusqu’à ce que la paix soit
signée en 1125. Le seigneur de Montpellier resta scrupuleusement à l’écart de cette guerre, occupé
qu’il était par ses querelles avec son suzerain. D’un côté, il semblait se rapprocher du comte de
Barcelone, qu’il aida à prendre Majorque en 1114-1115 aux musulmans 15. De l’autre, il était
également très lié au seigneur Décan de Posquières, aujourd’hui Vauvert, qui était un des plus
proches fidèles du comte de Toulouse Alphonse Jourdain.
Mais cette situation de neutralité allait changer. En effet, en 1132, le comte Bernard IV de
Melgueil mourut et laissa une fille unique, Béatrice, âgée de 7 ou 8 ans, sous la tutelle de son
oncle Guilhem VI de Montpellier, conformément à l’accord de 1130. Celui-ci était ainsi devenu
de facto l’homme le plus puissant du comté, consacrant sa victoire face à au comte de Melgueil.
Cette situation attira l’attention du comte de Toulouse Alphonse Jourdain, qui contesta la régence
de Guilhem VI et se revendiqua régent légitime au nom d’Almodis, qui était sa tante et la grandmère du défunt comte de Melgueil, et était toujours vivante.
Devant le refus de Guilhem VI de lui céder la régence du comté, le comte de Toulouse rassembla
son ost et lui déclara la guerre. Cette déclaration était surtout un moyen de pression sur le
seigneur de Montpellier, et les deux hommes s’accordèrent sans effusion de sang sur un
compromis. Ils se partagèrent la régence : le comte de Toulouse administrerait pour 6 ans le
château de Melgueil et la partie orientale du comté, Guilhem obtenant quant à lui pour la même
période le château de Montferrand et la partie occidentale du comté. Après ces six années, ils
s’accorderaient pour marier la jeune comtesse Béatrice16.
Guilhem VI n’avait pas apprécié outre mesure de s’être fait ainsi forcer la main, et voyait d’un
mauvais œil l’ingérence de l’entreprenant comte de Toulouse dans le comté de Melgueil. Il
chercha en secret à marier Béatrice afin de court-circuiter cet accord, de préférence à quelqu'un
capable de tenir tête à la colère prévisible du comte de Toulouse. Le rapprochement croissant de sa
famille avec Barcelone le fit naturellement se tourner vers le comte de Provence, Bérenger
Raimond, frère du comte de Barcelone Raimond Bérenger IV. Au mépris de l’accord qu’il venait
de signer avec le comte de Toulouse il y a quelques mois à peine, Guilhem VI fiança la jeune
Béatrice au comte de Provence et signa un autre accord avec celui-ci afin de garantir sa position
dans le comté, faisant de Bérenger Raimond de Provence le nouveau comte de Melgueil17.
En s'opposant directement au comte de Toulouse et en prenant le parti de son rival de Barcelone,
les Guilhem de Montpellier se retrouvaient à leur tour plongés dans la grande guerre méridionale.
La réaction d'Alphonse Jourdain à ces fiançailles ne se fit pas attendre et, furieux, il s'avança en
Provence à la tête d'une armée, menaçant de reprendre le conflit qui s'était arrêté depuis 1125.
Mais une autre affaire attira alors son attention : le 17 juillet 1134, le vicomte Aymeri de
Narbonne mourut à la bataille de Fraga, laissant une jeune fille mineure, Ermengarde, comme
unique héritière de la vicomté. Voyant une occasion de s’emparer de la riche vicomté de
15HGL t. 4, p. 38.
16LIM p. 149.
17LIM p. 132.
6
�Narbonne18, il fit la paix avec Bérenger Raimond à l'automne 1134 et reconnut son mariage avec
Béatrice l'année suivante.
Ce développement consacra l'ascension du seigneur de Montpellier au sein du comté de Melgueil,
qui n'était désormais plus gêné par son suzerain. Durant cette période, il acquit notamment les
châteaux de Balaruc en 1129 et Paulhan en 1140. Le comte de Barcelone, pour renforcer la
fidélité de Guilhem VI, lui donna en fief la ville et le diocèse de Tortose, qui restait à conquérir
sur les musulmans, à condition qu’il le serve dans toutes ses guerres.
Toutefois, en s’opposant ainsi au comte de Toulouse et en s’impliquant dans la grande guerre
méridionale, le seigneur de Montpellier se faisait un ennemi puissant et entreprenant. Les
conséquences ne tardèrent pas à se faire sentir.
En août 1141, Montpellier se révolta contre Guilhem VI, l’obligeant à fuir honteusement la ville
et à se réfugier dans son château de Lattes 19. Nous ne sommes pas sûrs de l'identité exacte des
responsables de la révolte. Pour les auteurs de l'Histoire Générale du Languedoc ce serait les
Aimoin, qui possédaient toujours la viguerie de Montpellier en fief et restaient les rivaux de la
famille seigneuriale au sein de la ville, parce que Guilhem VI aurait nommé un membre d'une
autre maison en tant que viguier 20. Jean Baumel réfute cette hypothèse et penche plutôt pour une
révolte bourgeoise liée à des revendications de droits communaux, s'appuyant notamment sur le
fait que les rebelles ont institué un consulat durant ces deux années de révolte, affirmant que les
Aimoin n'auraient commencé à soutenir les rebelles qu’en 1142 21. Il est probable que la vérité soit
entre les deux, et que la révolte ait été lancée par les Aimoin en ligue avec une partie de la
bourgeoisie montpelliéraine. En tout état de cause, une chose est sûre : cette révolte contre le
seigneur fut largement soutenue - et probablement partiellement provoquée - par le comte de
Toulouse Alphonse Jourdain, qui déstabilisait ainsi un des alliés du comte de Barcelone en
Languedoc.
Guilhem appela d'abord l'aide du Pape, Innocent II, avec lequel il avait de très bons rapports 22.
Celui-ci s'employa activement à le soutenir : il excommunia les rebelles et mit la ville en interdit 23.
18L. Macé, Les Comtes de Toulouse et leur entourage, Privat, 2003, p. 25-26.
19HGL t. 4, p. 110.
20Ibid.
21J. BAUMEL, Histoire d'une seigneurie du Midi de la France. Tome 1 : naissance de Montpellier (985-1213),
Montpellier, 1969, p. 132-133.
22L’élection d’Innocent II en 1130 était contestée et un autre pape, Anaclet II, avait été élu en même temps.
Innocent II, obligé de quitter Rome, débarqua en Languedoc et le seigneur de Montpellier Guilhem VI se mit
immédiatement à son service, s’employant avec zèle à le faire reconnaître dans la province. En remerciement,
Innocent II prit tous les domaines de Guilhem VI sous sa protection et le qualifia de chevalier spécial de saint-Pierre
dans un bref du 24 mars 1132. Dix ans plus tard, Innocent II n’avait pas oublié ce soutien du seigneur de
Montpellier.
23LIM p. 38.
7
�En 1142, il exhorta le comte de Toulouse Alphonse Jourdain de cesser de soutenir les rebelles sous
peine d'être excommunié à son tour. Le comte de Toulouse, qui était alors sous la pression d'une
coalition de seigneurs du Languedoc et du comte de Barcelone, continua de soutenir les rebelles
malgré ces injonctions et fut donc excommunié.
Guilhem VI était grandement affaibli par la perte de sa ville et était dans l’incapacité de la
reprendre, surtout quand les rebelles bénéficiaient du soutien d’Alphonse Jourdain. En 1142
toujours, Guilhem engagea son château de Paulhan à Aimeric de Clermont contre 8500 sous et
300 marcs d’argent fin, marquant les difficultés financières dans lequel il était plongé. Toutefois la
guerre tourna à la catastrophe pour le comte de Toulouse qui fut vaincu et capturé par Roger
Trencavel24. Il fut forcé de signer un traité de paix et cessa de soutenir les rebelles montpelliérains
afin de se réconcilier avec le pape et lever l’interdit sur ses états. Guilhem VI de son côté appela à
l'aide le comte de Barcelone, et les seigneurs amis de la province afin de prendre la ville par la
force. Le comte de Barcelone Raimond Bérenger IV ordonna à des troupes qu'il envoyait aider
son frère en Provence de d'abord venir en aide au seigneur de Montpellier, et de nombreux
seigneurs des alentours vinrent prêter main forte à Guilhem VI. Fort de l'union de toutes ces
troupes, il assiégea Montpellier, qui refusa pourtant de se rendre et se défendit vigoureusement.
Néanmoins, vers septembre 1143, les habitants souffrant de famine furent obligés de se rendre.
Guilhem VI reprit ainsi la ville dont il avait été chassé deux ans plus tôt.
Après la reprise de la ville, il se vengea des Aimoin en leur retirant une partie de leurs droits de
viguiers et en faisant raser le château de Saint-Nicolas qu’ils occupaient depuis le retour de
croisade de son père, affaiblissant significativement le pouvoir de nuisance de cette famille rivale
au sein de Montpellier. Il chassa également le chapitre de la ville, ce qui implique que l’évêque de
Maguelone avait dû soutenir les assiégés. Après ces événements, les Guilhem étaient très
reconnaissants de l'aide salutaire que leur avait fournie le comte de Barcelone et ils demeurèrent
par la suite ses fidèles indéfectibles.
Cette révolte fut un épisode traumatisant pour le seigneur de Montpellier, mais sa résolution
n’avait pas que des désavantages. Les Aimoin n’étaient désormais plus en position de contester
sérieusement son autorité, de nombreux seigneurs locaux, comme les Trencavel, et les seigneurs
d’Anduze, de Servian, de Lunel et de Clermont lui étaient venus en aide et l’ennemi toulousain
sortait grandement affaibli de sa défaite.
Un autre évènement important suivit de près : un an plus tard, en 1144, le comte de Melgueil et
de Provence Raimond Bérenger trouva la mort dans le port de Mauguio, et ne laissait qu’un fils en
bas âge que son oncle le comte de Barcelone pris sous son aile. Sa veuve, la comtesse de Melgueil
Béatrice, se remaria rapidement avec Bernard Pelet, seigneur d’Alès, qui devint le nouveau comte
de Melgueil25. Mais Béatrice était encore jeune, elle n’avait pas plus de vingt ans, et le nouveau
comte était très loin d’avoir la puissance et l’influence de son prédécesseur. Cela créa un certain
vide dans le comté de Melgueil, dont le seigneur de Montpellier profita pour étendre son
24HGL t. 4, p. 438-439.
25Bernard Pelet était issu d’une des branches de la puissante maison d’Anduze, tout comme les seigneurs d’Anduze et
ceux de Sauve, mais était, comme les Sauve, plutôt pro-toulousain.
8
�influence. Il semblait ainsi tout puissant face à un comte de Melgueil affaibli. Au vu des positions
très pro-barcelonaises du seigneur de Montpellier, Bernard Pelet entra logiquement dans le camp
toulousain mais n'était pour l'instant pas en position de contester l'ascendant qu'avait pris son
vassal.
Guilhem VI, plus proche que jamais de Raimond Bérenger de Barcelone depuis que celui-ci
l'avait aidé à recouvrer sa ville, s'impliquait désormais activement dans les guerres contre les
musulmans en Espagne et participa à ses côtés au siège et à la prise d'Almeria en 1147, puis de
Tortose l’année suivante26. Cette cité fut alors séparée en trois par le comte de Barcelone : un tiers
revint à Gènes pour l'aide qu'elle avait fournie dans le siège, un tiers au sénéchal de Barcelone
Guillaume de Moncade, et le dernier tiers fut donné en fief à Guilhem et ses descendants, comme
promis en 1136.
Après ces événements, Guilhem VI se retira du monde et se fit moine à Grandselve, séparant sa
seigneurie entre trois de ses cinq fils 27 : l'aîné Guilhem VII reçut Montpellier et ses dépendances et
la majorité de la seigneurie, le puîné Guilhem reçut Castelnau et le fief de Tortose, entre autres, et
prit le nom de Guilhem de Tortose. Le cinquième, Gui, reçut Paulhan et le Pouget et prendra plus
tard le surnom de Guerregiat, le guerrier, pour un exploit qui nous est malheureusement inconnu.
Guilhem VII et ses frères poursuivirent la ligne très pro-barcelonaise de leur père, et participèrent
à toutes les coalitions de seigneurs méridionaux contre le comte de Toulouse. Cela résultera
d’ailleurs dans la capture en 1153 de Guilhem VII et de son frère Guilhem de Tortose aux côtés
de Raimond Trencavel dans une bataille perdue face à Raimond V de Toulouse 28. Il fut libéré un
an plus tard dans des conditions inconnues. Guilhem VII poursuivit l’agrandissement de ses
domaines et acquit en 1157 l’importante seigneurie de Castries par l’héritage de son frère
Guilhem de Tortose, qui en avait épousé l’héritière et s’était fait templier 29. Il reçut également en
1160 les donations de plusieurs parties des châteaux de Clermont-l’Hérault et Nébian, qu’il
réinféoda à leurs propriétaires respectifs30. Le comte de Melgueil Bernard Pelet se faisait quant à
lui toujours discret et ne s’impliquait pas dans la guerre en cours. Cela allait changer.
La situation en Languedoc était toujours fortement instable et la guerre reprit en 1158. Une
nouvelle ligue se forma contre Raimond V de Toulouse, unissant Raimond Bérenger IV de
Barcelone, Raimond Trencavel, Ermengarde de Narbonne et Guilhem VII de Montpellier, rejoints
par le roi Henri II d'Angleterre qui revendiquait le comté de Toulouse au nom d'anciennes
26HGL t. 4, p. 121-123.
27Il fit rédiger son testament en 1146 avant de partir pour le siège d’Almeria, et était toujours seigneur juin 1147
(LIM p. 285).
28HGL t. 4, p. 474-475.
29LIM p. 573.
30Une partie du castrum de Clermont était en possession de Bérenger de Vailhauquès et une autre de Pierre Raimond
de Montpeyroux (LIM p. 713, 717). Ces deux hommes étant des proches de Guilhem VII, ils ne furent sans doute
pas très difficiles à convaincre. Bel exemple des Guilhem agrandissant leur seigneurie par le biais de leur réseau
d’alliances.
9
�prétentions de sa femme Aliénor d'Aquitaine. Voyant bien le danger mortel qu'une telle alliance
impliquait, Raimond V mobilisa tous les seigneurs languedociens qui lui étaient favorables et
s'allia entre autres au comte de Melgueil Bernard Pelet ainsi qu'à d'autres seigneurs de ce comté
afin qu'ils attaquent le seigneur de Montpellier et le tiennent occupé en bas Languedoc. Guilhem
VII dut faire face à une coalition de seigneurs locaux contre lui, menés par le comte de Melgueil
et les seigneurs de Pignan, qui étaient pourtant ses propres vassaux.
Nous ne connaissons pas les détails de cette guerre mais il semblerait qu’elle ait été violente et
difficile, et que Guilhem VII ait fini par prendre l'avantage sur ses adversaires, grâce entre autres à
l'aide de son ami Raimond Trencavel : le seigneur de Montpellier signa une trêve avec Bernard
Pelet en octobre 116131, puis fit la paix avec les seigneurs de Pignan l’année suivante 32, où il leur
donna 2000 sous en compensation d’avoir détruit leur château de Pignan.
Même si Guilhem VII avait finalement remporté cette guerre, le rapport de force avec le comte de
Melgueil n’était plus le même. Bernard Pelet avait pu rétablir son influence dans le comté, en
s’appuyant notamment sur son alliance avec le puissant Raimond V de Toulouse. L’influence
toulousaine se faisait ainsi de plus en plus pesante dans le comté, et la situation allait devenir
encore plus compliquée pour le seigneur de Montpellier.
Bernard Pelet mourut en 1171. Sa veuve Béatrice, qui possédait de son père Bernard IV de
Melgueil tous les droits sur le comté, commença des tractations avec Raimond V de Toulouse afin
de le lui donner au détriment de son fils Bertrand Pelet. Le fils aîné du comte de Toulouse, le
futur Raimond VI, fut fiancé à Douce, petite fille de Béatrice. Le conflit entre la mère et le fils
atteignit alors un point de non-retour : Béatrice déshérita Bertrand Pelet le 1er avril 1171 et
déclara sa fille Ermessende et sa petite fille Douce héritières de tous ses droits 33. Bertrand Pelet se
titra alors comte de Melgueil alors que sa mère était toujours vivante et s'allia à Guilhem VII afin
qu'il l'aide à conserver son comté. Raimond V de Toulouse revendiqua le comté au nom de son
fils et commença une campagne militaire pour en expulser Bertrand Pelet par les armes.
Il semble qu’il fallut un an et demi de guerre au comte de Toulouse pour finalement déloger
Bertrand Pelet du comté de Melgueil. Les détails n’en sont pas connus et on ne sait pas si
Guilhem VII soutint Bertrand par les armes, mais il abandonna sa cause quand il vit qu'elle était
perdue et reconnut Raimond V comte de Melgueil dans un acte de juin 117234.
Le seigneur de Montpellier mourut quelques mois plus tard, laissant quatre fils et cinq filles. Il
mit fin à la pratique délétère de ses prédécesseurs de fractionner la seigneurie entre plusieurs de ses
fils : l'aîné, Guilhem VIII, hérita de la totalité de la seigneurie, et devait entretenir ses frères et
sœurs jusqu'à leur majorité. Guilhem VII nomma son frère cadet Gui Guerregiat régent de la
seigneurie jusqu'à la majorité de son fils aîné, marque de la proximité entre les deux frères.
31Cart. de Mag. p. 215.
32LIM p. 594.
33Cart. de Mag.. p. 282.
34Cart. de Mag.. p. 287.
10
�Béatrice confirma la donation du comté de Melgueil au comte de Toulouse le 12 décembre
117235, acte auquel assista Gui Guerregiat. Le seigneur de Montpellier se retrouvait ainsi dans une
situation inédite de vassalité directe au comte de Toulouse, contre lequel il s'était opposé de
manière répétée depuis des décennies. Dans les faits, l'emprise nouvelle du comte de Toulouse sur
le comté de Melgueil n’est pas un changement dramatique pour le seigneur de Montpellier : celuici est toujours fermement pro-aragonais, il n'a perdu aucune possession et son réseau d’alliance n’a
pas été grandement affecté.
Il continuera dans les deux décennies qui suivirent à prendre part aux coalitions contre Raimond
V de Toulouse menées par le roi d’Aragon, et le comte de Toulouse ne chercha semble-t-il pas à
lui enlever des châteaux pour le punir malgré sa situation de vassal théorique.
La fin du siècle vit toutefois l’apaisement des tensions, peut-être par lassitude des belligérants. Le
comte de Toulouse et le roi d’Aragon firent la paix le 26 janvier 1190 dans l’île de Jarnègues 36. La
même année, Guilhem VIII de Montpellier reconnut Raimond, fils aîné de Raimond V, comte de
Melgueil et lui fit hommage, reconnaissant tenir tous ses domaines de lui en fief franc 37.
C’est également à cette période que Guilhem VIII, à force d’efforts, finit par obtenir le retour de
la seigneurie d’Aumelas dans le giron de Montpellier, qui en avait été séparé depuis 1121. Celle-ci
était en effet en possession de la famille de Murviel(-lès-Béziers), qui en avait hérité par le mariage
d’Adhémar de Murviel avec Tiburgette, fille de Guilhem d’Aumelas. En 1187, Raimond Aton de
Murviel, leur fils et détenteur de cette seigneurie, en fit la donation à Guilhem VIII qui la lui
rendit en fief38. Il la rachètera finalement en 1199 entièrement pour la somme importante de
77 400 sous melgoriens.
La grande guerre méridionale désormais terminée, et Guilhem VIII, tout en restant proche du roi
d'Aragon, commença à se rapprocher de son suzerain le comte de Toulouse. Le 29 mai 1194,
Raimond VI fit la donation à Guilhem VIII de la seigneurie d’Aumelas et lui inféoda Frontignan,
les deux hommes se jurant mutuellement protection, avec promesse de Guilhem qu'il serve le
comte du Rhône jusqu'à l'Hérault. Ces actes étaient surtout la confirmation d’un état de fait,
Guilhem VIII étant déjà en possession de toutes ces châtellenies, mais il reconnaissait désormais
officiellement les tenir du comte.
De fait, Guilhem VIII accrut nettement sa seigneurie dans ces dernières années. En 1189, le
vicomte d’Agde Bernard Aton lui engagea le château de Loupian pour 10 000 sous melgoriens
puis lui en fit la donation en 1191 39. En 1202, Raimond de Castries lui fit la donation du château
de Tressan ainsi que du quart de celui du Pouget, que Guilhem VIII lui rendit en fief 40. Au sein de
35Cart. de Mag.. p. 288.
36L. Macé, Les Comtes de Toulouse et leur entourage, Privat, 2003, p. 32.
37LIM p. 160.
38LIM p. 741, 745.
39LIM p. 657, 659.
40LIM p. 767.
11
�Montpellier, la concurrence des Aimoin avait pris un sérieux coup après l'échec de la révolte de
1141 et la famille avec décliné au cours du siècle. Raimond Aimoin mourut dans les années 1180
en ne laissant que trois filles, qui amenèrent leurs droits à la viguerie à leurs maris respectifs. En
1197 puis 1200 Guilhem VIII racheta la viguerie au derniers ayants droits, mettant
définitivement fin au pouvoir des viguiers dans la cité 41.
En novembre 1202, Guilhem VIII fut frappé par la maladie et entreprit de rédiger son testament.
Il légua à son fils aîné Guilhem IX la quasi-totalité de la seigneurie, à Thomas, son fils puîné, le
château de Paulhan et les droits sur Tortose, et destina ses trois autres fils à l'Église. Il était alors à
la tête d'une seigneurie puissante à laquelle il avait réuni les portions perdues par ses ancêtres,
comme la seigneurie d'Aumelas. La concurrence des viguiers avait disparue, il était ami du roi
d'Aragon, réconcilié avec le comte de Toulouse et entouré de puissants amis, que ce soit le
vicomte Trencavel, les seigneurs d’Anduze, de Lunel, de Clermont ou de Servian. Son réseau
d'alliance se développait sans contrainte au sein du comté de Melgueil et Montpellier était une des
plus grandes villes du sud de la France. La position des Guilhem semblait plus solide que jamais.
Pourtant, un an et demi plus tard, en 1204, son fils Guilhem IX serait chassé de la ville,
entraînant la fin de la dynastie des Guilhem. Les raisons de cette fin brutale se trouvent dans les
mariages de Guilhem VIII.
En 1174 débarqua à Montpellier Eudoxie, princesse byzantine promise au roi Alphonse II
d'Aragon, accompagnée de dignitaires byzantins. Mais leur voyage avait apparemment pris trop
de temps, et on leur annonça que le roi d'Aragon s'était entre temps marié avec la fille du roi de
Castille. Les byzantins furent désemparés par cette nouvelle, et le jeune Guilhem VIII sauta sur
l'occasion et se proposa d'épouser Eudoxie à la place. Les dignitaires byzantins refusèrent d'abord,
la condition de Guilhem VIII, simple seigneur, étant bien inférieur à celle d'une princesse. Mais
Guilhem insista tant et si bien qu'il finit par les convaincre d'accepter sa demande, et il épousa
Eudoxie Comnène le 18 janvier. De ce mariage naquit une fille unique, Marie. Ce mariage fut de
loin plus prestigieux que celui de n'importe lequel de ses ancêtres, pourtant au bout de quelques
années Guilhem VIII n'en était plus satisfait. En 1187, à la cour du roi d'Aragon, il rencontra
Agnès de Castille, parente du roi, et en tomba apparemment amoureux. Il répudia alors Eudoxie,
et épousa Agnès la même année. La raison la plus probable de cet acte devait être le souci du
seigneur de Montpellier d'avoir des fils qui pourraient perpétuer sa lignée (Eudoxie ne lui avait
donné qu'une fille). En ce sens, Agnès remplit admirablement bien son rôle puisqu'elle lui donna
huit enfants dont cinq fils. La princesse, bafouée, se retira dans l'abbaye d'Aniane où elle meurt
quelques années plus tard. Malheureusement, ce second mariage était illégitime, tout comme les
enfants qui en ont résulté, ce qui rendait les prétentions de ses fils illégitimes instables face à celles
de sa fille légitime, Marie. Guilhem décida de résoudre ce problème en la mariant dès qu'elle fut
nubile à Barral, vicomte de Marseille, en statuant bien dans le contrat de mariage qu'elle
renonçait à tous ses droits de succession sur Montpellier. Mais Barral mourut peu après, en 1192,
et la jeune veuve fut de retour à Montpellier. Guilhem la maria alors en 1197 à Bernard, comte de
Comminges en la faisant de nouveau renoncer à ses droits. Comptant sur les bonnes relations
traditionnelles de sa famille avec la papauté et sentant sa santé se détériorer, il tenta en 1201 et
41LIM p. 253, 246.
12
�1202 de faire légitimer ses enfants par le pape Innocent III, sans succès. Les liens forts de
Guilhem VIII avec la papauté ne suffirent pas, et la réponse papale fut un refus certes aimable,
mais ferme. Sa mort imminente, Guilhem VIII décida de passer outre et fit son testament 42 en
léguant sa seigneurie à son fils aîné, Guilhem IX, comme s'il était légitime. Marie ne serait appelée
à la succession qu'en cas de décès de tous les héritiers mâles. Ses fils encore mineurs, il chargea un
conseil de 15 bourgeois de la régence, sous la surveillance des évêques de Maguelone et d'Agde et
du prévôt de Maguelone, mit ses enfants sous la protection conjuguée du roi d'Aragon et du
comte de Barcelone et chargea ses amis Bernard d'Anduze et Etienne de Servian de défendre ses
enfants s'ils venaient à être attaqués.
Guilhem VIII mourut le 9 novembre 1202 et la succession de son fils Guilhem IX se passa sans
encombre. Le 1er aout 1203, le jeune seigneur prêta serment de fidélité à l'évêque de Maguelone 43
et en septembre il fit un accord avec le comte Raimond VI de Toulouse où ils se garantirent
mutuellement leurs personnes et leurs biens 44. Malgré sa naissance illégitime, la situation de
Guilhem IX semblait stable et ses deux suzerains l’avaient reconnu seigneur de Montpellier.
Pourtant le mécanisme qui allait provoquer la chute de sa famille était déjà en marche. Le roi
Pierre II d'Aragon en effet convoitait la puissante seigneurie de Montpellier afin de l'ajouter à ses
domaines et renforcer sa présence en Languedoc, et il vit dans la naissance illégitime de Guilhem
IX une occasion idéale.
Depuis la fin de la guerre, il entretenait de bonnes relations avec Raimond VI de Toulouse et ils
firent un accord pour que celui-ci l'aide dans son entreprise. En 1203, Raimond VI convainquit le
comte Bernard de Comminges, qui était son cousin et dont il était proche, de répudier Marie 45.
En avril 1204, Raimond VI et Pierre II se rencontrèrent à Millau et le roi d'Aragon engagea les
vicomtés de Millau et de Gévaudan au comte de Toulouse pour la somme colossale de 150 000
sous. Assuré du soutien de Raimond VI, Pierre II provoqua ensuite une révolte des
montpelliérains contre Guilhem IX et entra dans la ville. Entre le 25 avril et le 15 juin, en
présence du roi d'Aragon, Guilhem IX délia ses vassaux de leur serment, correspondant à une
abdication en bonne et due forme, et quitta la seigneurie avec sa mère et ses frères et sœurs. Le 15
juin 1204, Pierre II d'Aragon épousa Marie de Montpellier, et s'empara en son nom de la totalité
de la seigneurie de Montpellier. Quelques habitants, parmi les plus fidèles aux Guilhem, furent
exilés et leurs biens confisqués. Le 17 juin, Pierre II prêta serment de fidélité à l'évêque de
Maguelone pour Montpellier et Lattes, avec entre autres pour témoins le comte de Toulouse et
Bernard d'Anduze. C'est paradoxalement la fin de la grande guerre méridionale et la nouvelle
amitié entre le comte de Toulouse et le roi d'Aragon qui permit cette situation. Toutes les
personnes que Guilhem VIII avait nommées pour protéger ses enfants, que ce soit le roi d'Aragon,
le comte de Toulouse, l'évêque de Maguelone ou Bernard d'Anduze, furent des acteurs de cette
42LIM p. 195.
43Cart. de Mag. p. 487.
44Cart. de Mag. p. 489.
45L. Macé, Les Comtes de Toulouse et leur entourage, Privat, 2003, p. 93-94.
13
�manœuvre ou laissèrent faire sans protester46.
Les Guilhem avaient été des soutiens fidèles de la maison de Barcelone durant toute la grande
guerre méridionale, et c'est par une ironie de l'histoire cette maison qui provoqua leur chute.
II. Le Développement de Montpellier
La principale source de puissance des Guilhem de Montpellier fut leur ville, dont ils mirent les
richesses et le développement exponentiel au service de leurs ambitions. Comme nous l’avons dit,
les détails du développement de la ville à ses débuts sont inconnus, mais elle était déjà la plus
grande ville du comté à la fin du XIème siècle : elle était entourée d'une enceinte, avait un marché,
plusieurs églises et commerçait régulièrement avec Narbonne comme nous le montre un acte de
1085 entre les représentants des deux villes. On a trace de marchands montpelliérains aussi loin
qu'Ascalon en terre-sainte dès 109947.
Les Guilhem tiraient d’importants revenus du commerce florissant de leur cité. On peut le voir,
sur plus d'un siècle, de Guilhem V à Guilhem VIII, les seigneurs de Montpellier furent presque
toujours les prêteurs, rachetant par ce biais des droits à la dynastie comtale déclinante, des
châtellenies comme celle de Paulhan en 1140 ou Mireval en 1171, voire une seigneurie entière
avec le rachat de la seigneurie d'Aumelas en 1199. A seulement deux reprises les Guilhems
semblèrent être à cours de fonds, et chacune correspondait à une circonstance exceptionnelle :
l'endettement de Guilhem V lors de la première croisade, et les difficultés financières de Guilhem
VI lors de la révolte de Montpellier entre 1141 et 1143.
Conscient de l'importance du commerce maritime, et sachant que Montpellier n’était pas un port
mais était voisine du Lez, les Guilhem développèrent un port fluvial à Lattes, situé au bord de la
rivière et non loin de la mer, avec comme objectif d'en faire le port principal de Montpellier et du
comté. Les bateaux déchargeaient ainsi leurs marchandises à Lattes, qui étaient ensuite acheminées
par des embarcations à plus faible tirant d’eau par le Lez jusqu’à Montpellier.
On ne connaît pas ici non plus les dates précises de ce développement, mais le château de Lattes
fut probablement terminé peu avant 1140. Nous avons en effet un acte de cette année, dans
lequel l'évêque de Maguelone se plaignait que le seigneur de Montpellier méconnaissait ses droits
sur le château, le port et le moulin de Lattes 48. Le contenu de l'accord entre Guilhem VI et
l'évêque, qui s’accordaient notamment sur le cens que chaque bateau accostant au port devait lui
verser est la preuve que le port était actif. Dans ce même acte, l’évêque se plaignait également du
fait que des hommes quittaient les terres qui lui appartenaient et dont ils avaient la charge pour
46Pour plus de précisions sur ces événements, voir « L’Aragon et la révolution montpelliéraine de 1204 » dans H.
Vidal, Montpellier et les Guilhem, Université Montpellier 1, 2012.
47J. BAUMEL, Histoire d’une seigneurie du Midi de la France. Tome 1 : naissance de Montpellier (985-1213),
Montpellier, 1969, P. 99.
48LIM p. 95.
14
�aller s'installer à Montpellier. C’est un bon témoignage de l’attractivité de la ville pour les
populations des environs.
Les Guilhem s’appliquèrent également à s’approprier et aménager toute la longueur du Lez afin de
faciliter la circulation entre Montpellier et la mer. Ils se sont très tôt imposés comme suzerains des
châteaux situés au bord de la rivière, comme Montferrier et Castelnau, et rachetèrent les portions
de la rivière qu’ils ne contrôlaient pas encore à leurs propriétaires respectifs. L’affaire du
détournement d’un bras du Lez, qui provoqua la violente guerre entre Guilhem VI et le comte de
Melgueil en 1125 est ainsi directement liée à ces efforts.
III. Les réseaux d’alliances et de parenté
LES CADETS LAÏCS
Les seigneurs de Montpellier, à partir de Guilhem V, eurent tous une descendance assez
prolifique. Guilhem V eut ainsi 6 enfants, Guilhem VI 8 enfants, Guilhem VII 9 enfants et enfin
Guilhem VIII une fille d’Eudoxie, et 8 enfants d’Agnès. Le frère cadet le plus connu des seigneurs
de Montpellier est celui qui obtint de loin l’héritage le plus important : le fils puîné de Guilhem
V, Guilhem d’Aumelas.
Après la mort de son père, Guilhem d’Aumelas se retrouvait à la tête d’une puissante seigneurie
rassemblant onze château, voisine des possessions de son frère Guilhem VI avec lequel il partageait
la suzeraineté sur deux d’entre eux : Pignan et le Pouget. Guilhem d'Aumelas épousa Tiburge
d'Orange dans la deuxième moitié des années 1120. Celle-ci était la fille unique et héritière du
comte d'Orange, ce qui en faisait un mariage particulièrement juteux pour le puîné de Guilhem
V.
Bien que les relations entre les deux frères aient été plutôt bonnes, et qu’il n’y ait jamais eu de
conflits entre eux, leur proximité n’était pas idéale. En effet, Guilhem d’Aumelas n’est pas vu aux
côtés du seigneur de Montpellier lors de sa guerre contre le comte de Melgueil en 1125 et, plus
étonnant encore, nous n’avons aucune trace de ses actions durant la révolte de Montpellier en
1141, alors même que d’autres familles traditionnellement alliées des Guilhem, comme les
seigneurs d’Anduze, sont bien présentes. Il ne sembla pas non plus concerné par la grande guerre
méridionale et demeura rigoureusement absent des conflits avec le comte de Toulouse 49. Il est fort
possible que cela soit lié à sa possession par mariage de la seigneurie d’Orange, qui était située
dans la partie de la Provence possédée par le comte de Toulouse, rendant périlleux une guerre
ouverte avec celui-ci. De manière générale, Guilhem d’Aumelas resta strictement neutre dans les
évènements de la grande guerre méridionale. Il semble qu’il se soit attaché à conserver son
indépendance vis à vis du seigneur de Montpellier et ait voulu fonder une lignée parallèle,
expliquant ainsi sa politique plutôt distante de son frère. Après sa mort en 1156 50, le seigneur de
49Il ne fut pas capturé en 1153 contrairement à ses neveux Guilhem VII et Guilhem de Tortose.
50LIM p. 734.
15
�Montpellier s’efforcera durant plusieurs décennies de ramener la seigneurie d’Aumelas dans le
giron montpelliérain, jusqu’à finalement y parvenir dans les années 1190, comme nous l’avons vu.
Les autres frères cadets laïcs des seigneurs de Montpellier, bien que moins emblématiques que
Guilhem d’Aumelas, furent des membres importants de l’entourage seigneurial. Citons l’exemple
de trois d’entre eux, qui eurent chacun des parcours assez similaires : Guilhem de Tortose et Gui
Guerregiat, frères de Guilhem VII, et Gui Burgondion, frère de Guilhem VIII.
Contrairement à Guilhem d’Aumelas, ils furent tous trois très proches du seigneur de Montpellier,
le soutinrent dans tous les épisodes de guerre qu’il eut à soutenir dans la grande guerre
méridionale, et furent des hommes de confiance sur lesquels le seigneur pût s’appuyer. Ainsi
Guilhem de Tortose fut capturé en même temps que son frère en 1153 par le comte de Toulouse,
et Gui Guerregiat l’aida lors de la guerre dans le comté de Melgueil entre 1158 et 1162. Lorsque
Guilhem VII mourut en 1172, il fit de son frère Gui Guerregiat le régent de sa seigneurie et le
tuteur de ses enfants encore mineurs, marque de l'entière confiance qu'il avait en son frère cadet 51.
Celui-ci s'acquitta fidèlement de sa tâche, et participa notamment à la coalition de 1177 contre le
comte de Toulouse avec ses neveux Guilhem VIII et Gui Burgondion.
Chacun d’entre eux fut doté de deux ou trois châteaux et d’autres terres, donc nettement moins
que Guilhem d’Aumelas. Ils moururent tous sans descendance et leurs possessions revinrent dans
la seigneurie de Montpellier à leur mort. Les hasards de la vie jouèrent un rôle important dans
cette absence d'héritiers des autres cadets montpelliérains, mais contrairement à Guilhem
d'Aumelas, aucun de ceux-ci ne semblait particulièrement concerné par la perpétuation de leur
lignée. Un réflexe lignager visant à la conservation du patrimoine au sein de la seigneurie
montpelliéraine a ainsi très bien pu jouer dans cette pauvreté de descendance des cadets.
LES CADETS ECCLÉSIASTIQUES
Les Guilhem, comme la plupart des familles seigneuriales à l'époque, donnèrent certains de leurs
cadets à l'Église et plusieurs d'entre eux accédèrent à des positions prestigieuses. Cette présence
des Guilhem parmi le haut clergé local fut cependant assez tardive. En effet, aucun fils de la
génération de Guilhem V (il était fils unique) ni de celle de Guilhem VI (les deux fils se
partagèrent l'héritage paternel) ne fut destiné à l'Église. Cela changea à partir de la génération de
Guilhem VII, dont deux des frères furent donnés à l’Église par leur père : Bernard Guilhem, qui
fut archidiacre de Béziers de 1167 à 1172 puis décéda, et surtout Raimond Guilhem, qui devint
abbé d'Aniane en 1162 puis évêque de Lodève en 1187 jusqu'en 1201. Guilhem VII donna son
fils Raimond comme moine à Grandselve, et celui-ci devint par la suite évêque d'Agde de 1192 à
1213.
C’est donc surtout dans la dernière décennie du XII ème siècle que le seigneur de Montpellier
bénéficia de la position de ses parents dans les rangs de l'Église. En effet, Guilhem VIII avait alors
son oncle Raimond Guilhem comme évêque de Lodève et son frère Raimond comme évêque
d'Agde. Ceux-ci restèrent proches de leur parent et sont vus régulièrement à ses côtés, notamment
51H. Vidal, Montpellier et les Guilhem, Université Montpellier 1, 2012, voir le chapitre "Un cadet de la famille des
seigneurs de Montpellier : Gui Guerregiat".
16
�lors de la signature d’actes important. Cette proximité est d'autant plus importante que ces deux
évêques étaient également les seuls dirigeants de leur vicomté : en 1188, Hugues comte de Rodez
et vicomte de Lodève céda tous ses droits sur la vicomté à Raimond Guilhem pour 60 000 sous
melgoriens et Bernard Aton VI, vicomte d'Agde, avait cédé en 1187 tous ses droits sur la vicomté
au prédécesseur de Raimond.
LES MARIAGES
Un des gages de stabilité du règne des Guilhem fut le réseau d’alliances qu’ils mirent en place. Ils
furent en particulier très attentifs à développer et entretenir des amitiés solides avec les grandes
familles féodales voisines du comté de Melgueil, afin que celle-ci leur viennent en aide en cas de
besoin dans leurs conflits au sein du comté. Ce système d’alliance fit ses preuves et fut même
salutaire dans leurs moments de difficultés. Ainsi lorsque Guilhem V puis son fils Guilhem VI
entrèrent violemment en conflit avec le comte de Melgueil, ils furent fermement soutenus par
Bernard d’Anduze et Décan de Posquières. Lorsque Guilhem VI fut forcé de fuir Montpellier
révoltée en 1141, et se retrouvait dans une situation extrêmement précaire, il put compter sur un
soutien important de ses alliés : les Trencavel, les seigneurs d’Anduze, de Servian, de Lunel et de
Clermont notamment lui vinrent en aide pour reprendre sa cité. En 1158, quand Guilhem VII
fut attaqué par le comte de Melgueil Bernard Pelet et divers seigneurs du comté, dont certains de
ses propres vassaux, le vicomte de Béziers, Carcassonne et Albi Raimond Trencavel vint l’aider à la
tête de ses vassaux et lui permis de sortir vainqueur du conflit.
La politique matrimoniale des Guilhem visait ainsi principalement à resserrer plus encore les liens
avec ces familles, auxquelles ils marièrent la majorité de leurs filles et de leurs sœurs. Ils se lièrent
ainsi à Bernard Aton V vicomte de Nîmes et d’Agde, de la famille Trencavel, et Raimond Étienne
de Servian dans les années 1140, à Raimond Gaucelm de Lunel et Raimond de Roquefeuil, de la
famille d’Anduze, dans les années 1170, et à Aimeric de Clermont en 1182, chacun issus de
familles venues en aide aux Guilhem lors de la révolte de Montpellier.
Ainsi, des grandes familles féodales voisines, seuls les seigneurs de Sauve, qui étaient proches des
comtes de Melgueil, leur demeuraient hostiles52.
IV. Une alliance avec la bourgeoisie
Montpellier se développa très rapidement comme nous l'avons vu, devenant une riche et
importante ville marchande. Là comme ailleurs, le XII ème siècle vit le développement de la
bourgeoisie et avec elle des revendications pour des droits communaux et consulaires. Mais là où
ils s'instituèrent relativement pacifiquement dans d'autres villes de la région, comme à Béziers et
Narbonne dans les années 1130 ou Nîmes et Saint-Gilles dans les années 1140, le consulat
apparut pour la première fois à Montpellier en 1141 dans un contexte très différent : celui de la
révolte de la cité contre Guilhem VI, les rebelles nommant leurs chefs consuls. On sait comment
52Pour plus de détails sur les mariages des Guilhem, voir "Les mariages dans la famille des Guilhem" dans H. Vidal,
Montpellier et les Guilhem, Université Montpellier 1, 2012
17
�se termina ce malheureux épisode. Avant cela, les bourgeois étaient rares dans l’entourage du
seigneur. Mis à part la famille des Lambert, qui était très proches des Guilhem depuis le début du
XIIème siècle53, la quasi-totalité de l’entourage du seigneur était des chevaliers montpelliérains et
des nobles du comté de Melgueil. De là vient peut-être une des origines de cette révolte. Après
celle-ci toutefois, les bourgeois commencèrent à être présents de plus en plus souvent aux côtés du
seigneur. Il est possible que les Guilhem, dans une volonté d’apaisement, aient écouté certaines
revendications des bourgeois après la révolte et leur ait laissé une place plus importante dans leur
entourage. Ce phénomène allait se poursuivre et s’accentuer dans les décennies suivantes. Dans les
années 1160 notamment, le seigneur de Montpellier vit un recul net de son réseau d’alliances face
au comte de Melgueil, qui bénéficiait du soutien du comte de Toulouse. Une partie des nobles du
comté quittèrent l’entourage de Guilhem VII, et celui-ci sembla alors se replier sur sa ville de
Montpellier, et la bourgeoisie montpelliéraine prit la place laissée vacante par les nobles du comté.
Ainsi, lorsque Guilhem VII de Montpellier chercha à racheter le château de Mireval à son cousin
Raimbaud d’Orange dans les années 1160, ce sont des bourgeois montpelliérains, Guilhem Pierre
et Guilhem Adalguier, qui jouèrent le rôle d’intermédiaires, en rachetant des parts du château
pour les revendre ensuite à Guilhem VII54.
La place des bourgeois dans l'entourage du seigneur s'accrut plus encore dans le dernier quart du
XIIème siècle où ils devinrent même, dans les années 1190, nettement majoritaires dans ses actes
par rapport aux nobles.
Lorsque Guilhem VIII fit son testament en 1202, et qu’il laissait ses enfants dans une position
précaire dû à leur illégitimité, il laissa la régence à un conseil de quinze prud'hommes choisis
parmi ses hommes de confiance dans la bourgeoisie montpelliéraine.
Il faut toutefois préciser que, même si le seigneur est très proche des bourgeois montpelliérains, il
ne l’est pas de tous les bourgeois. Les bourgeois présents dans son entourage sont pour la plupart
issus de quelques familles de la haute bourgeoisie montpelliéraine, et leur rang social n’est pas bien
loin des nobles qu’ils côtoient. La moyenne bourgeoisie n’a pas beaucoup plus accès à l’entourage
seigneurial qu’avant, et ce sera sur cette moyenne bourgeoisie montpelliéraine que s’appuiera le roi
Pierre II d’Aragon pour faire renverser le jeune Guilhem IX. Les grandes familles montpelliéraines
présentes dans l’entourage de Guilhem VIII seront pour la plupart absentes lors des premières
années du consulat à Montpellier, qui fut créé en 1204, dû à leur proximité avec l’ancienne
famille seigneuriale.
Une telle alliance était un phénomène original parmi les grandes familles féodales
languedociennes. Les autres grands seigneurs avaient en général des relations difficiles et
régulièrement conflictuelles avec leurs bourgeois.
53Les Lambert furent ainsi présents à 16 reprises sur la période 1076-1121 et faisaient donc partie des familles les
plus proches du seigneur dès cette époque, ce qui est exceptionnellement tôt par rapport aux autres familles
bourgeoises montpelliéraines.
54LIM p. 523, 532, 530, 536, 537.
18
�V. L’amitié des papes
Un autre aspect original de la seigneurie des Guilhem de Montpellier est leurs relations
privilégiées avec les papes. Les fondations de cette relation remontent à 1085, lorsque le comte
Pierre de Melgueil fit la donation de son comté au pape, faisant de lui le suzerain supérieur du
comté de Melgueil.
Les rapports privilégiés entre les Guilhem et les papes commencèrent vraiment en 1130, à l'arrivée
du pape Innocent II en Languedoc. Alors que son élection était contestée et qu'un autre pape,
Anaclet, avait été élu en même temps, le seigneur de Montpellier se mit immédiatement à son
service et s'employa avec zèle à le faire reconnaître dans la province. En remerciement, Innocent II
prit tous les domaines de Guilhem sous sa protection et le qualifia de chevalier spécial de saint
Pierre dans un bref du 24 mars 1132. Guilhem VI conserva par la suite d'excellentes relations avec
lui et ses successeurs.
En 1162, son fils Guilhem VII accueillit triomphalement le pape Alexandre III à Montpellier
alors que celui-ci avait été forcé de quitter l'Italie par l'empereur germanique, qui soutenait « son »
pape, Victor II. Le pape et sa cour restèrent plusieurs mois à Montpellier et il parla en termes
élogieux de son séjour dans la ville. Lorsqu'il redescendit du nord de la France trois ans plus tard,
il s'arrêta de nouveau à Montpellier pendant plusieurs semaines, durant lesquelles Guilhem VII
rejeta avec indignation des propositions de l'empereur germanique de lui livrer le pape en
l'échange de cadeaux importants.
Grâce à ces excellents rapports avec les papes, les Guilhem bénéficièrent de leur aide en plusieurs
occasions. Lors de la révolte de 1141 on l'a vu, Innocent II, qui n'avait pas oublié le dévouement
du seigneur de Montpellier, ne ménagea pas son aide et soutint activement Guilhem VI contre les
rebelles. Il ordonna notamment à l'archevêque de Narbonne et à ses suffragants, majoritairement
pro-toulousains, d'interdire à leurs diocésains d'aider les rebelles. Il envoya plusieurs lettres pleines
de sollicitudes à Guilhem VI l'informant sur l'aide qu'il lui apportait. Son successeur Célestin II
continua dans la même voie, ordonnant à l'archevêque de Narbonne d'interdire à ses diocésains
d'aider les Aimoins qui s'étaient réfugiés en narbonnais et cherchaient des soutiens après la prise
de la ville55. Même si c'est par les armes que le seigneur de Montpellier reprit sa ville, un tel
soutien de la papauté nous montre bien ce statut spécial des Guilhem auprès des papes.
Alexandre III, particulièrement reconnaissant envers Guilhem VII pour son aide et son accueil, lui
donna le privilège de ne pouvoir être excommunié que par le pape, et ses chapelles de Montpellier
et Lattes ne pourraient être soumises à des interdits 56. Il prit en même temps les habitants et les
marchands de Montpellier sous sa protection. Plus tard, en 1169, il lui vint en aide contre les
génois qui saccageaient ses côtes et rançonnaient ses marchands57.
Lorsque l'hérésie se répandit en Languedoc à la fin du XII ème siècle, Guilhem VIII maintint
consciencieusement sa seigneurie dans la plus stricte orthodoxie, probablement encore plus après
55LIM p. 35.
56LIM p. 46.
57LIM p. 49.
19
�son mariage illégitime avec Agnès de Castille en 1187, dans l'espoir que son zèle soit un argument
supplémentaire dans la légitimation de ses enfants. Malgré ces excellentes relations et un
important échange épistolaire entre 1199 et 1202, le pape refusera toujours de légitimer ce
mariage, avec les conséquences que l'on connaît. Les Guilhems se sont toujours attachés à avoir
une image de seigneurs pieux, et on ne peut contester qu'ils l'étaient effectivement, malgré leurs
conflits réguliers avec l'évêque de Maguelone.
Les seigneurs de Montpellier quittèrent plus d'une fois leurs terres pour aller combattre les
infidèles. Guilhem V fut un fidèle de Raimond de Saint-Gilles et combattit bravement lors de la
première croisade, ne revenant qu'en 1103. Il prit part à l'expédition de 1114 pour prendre
Majorque aux musulmans, conjointement avec le comte de Barcelone, Pise et Gènes, où il
s'illustra encore une fois. Son fils Guilhem VI partit lui aussi pour la terre sainte en 1126-1127
d'où il rapporta des reliques, et combattit plusieurs fois en Espagne contre les musulmans,
participant aux prises d'Almeria et de Tortose. A Montpellier même, Guilhem V fonda l’hôpital
Saint-Guilhem, son fils Guilhem VI finança la construction d'une chapelle de l'ordre du Temple
en 1129 et sa mère et lui donnèrent vers 1143 des terres pour fonder la maladrerie de SaintLazare. Il fit également construire l'église Sainte-Croix à son retour de terre-sainte en 1127 pour y
installer les reliques qu'il en rapportait. Quand son fils Guilhem VII atteint sa majorité, il se retira
au monastère de Grandselve pour le reste de ses jours, participant notamment à la fondation de
l'abbaye de Caudeil en Albigeois et celle de Vallaure en Catalogne, et il mourut comme
bienheureux des cisterciens. Ce statut de seigneur pieux extrêmement dévoué envers le pape fut
très avantageux pour les seigneurs de Montpellier, comme on a pu le voir, et était un des éléments
de la force et de la stabilité de leur seigneurie. Le seul moment où le soutien du Pape fit défaut fut
lors de la chute des Guilhem en 1204 où Innocent III laissa agir le roi d'Aragon.
En conclusion, les Guilhem de Montpellier sont un cas original parmi les grandes familles
féodales du Languedoc du XIIème siècle sous bien des aspects.
Dans leur parcours d’abord, qui les mena de simples châtelains à la fin du X ème siècle à côtoyer
d’égal à égal les plus grandes et anciennes familles du Languedoc, cela en s’appuyant sur le
développement exceptionnel de leur cité de Montpellier. Leur ascension rapide les fit rapidement
entrer en conflit avec leur suzerain le comte de Melgueil qui ne parvenait plus à maitriser leur
ambitieux vassal. La famille comtale, qui échoua à développer une ville digne de ce nom qui
aurait dû prendre le rôle de pôle de pouvoir du comté, vit sa puissance péricliter au cours des XI ème
et XIIème siècles malgré ses origines anciennes et prestigieuses, au profit d’un vassal sans grand
passé. Les Guilhem, après avoir gagné leur bras-de-fer contre la famille comtale, furent à partir des
années 1130 plongés dans la grande guerre méridionale qui allait secouer le Languedoc jusqu’à la
fin du siècle. Parce que cela cadrait avec leurs intérêts, les Guilhem furent des fidèles indéfectibles
de la maison de Barcelone jusqu’à la fin de la guerre, et ils restèrent des adversaires résolus du
comte de Toulouse même après que celui-ci ait acquit le comté de Melgueil.
Les Guilhem sont également un cas original dans les stratégies qu’ils mirent en œuvre pour
pérenniser leur seigneurie. C’est grâce entre autres à leur intelligence et leur énergie que
20
�Montpellier put s’accroitre comme elle l’a fait, et ils s’appliquèrent à agrandir leur port de Lattes
et à sécuriser et aménager le cours du Lez. Ils développèrent un solide réseau d’alliances et de
parenté, dans le comté de Melgueil et ses environs, et bénéficièrent ensuite du soutien de ces alliés
lors des guerres qu’ils eurent à mener. Quand les Guilhem durent faire face aux pires difficultés, et
qu’ils furent chassés de leur propre cité révoltée, leurs réseaux tinrent bons et ils purent reprendre
leur ville grâce à l’aide de leurs alliés. Ils furent par la suite très attentifs à consolider ces alliances
avec les grands seigneurs voisins du comté, comme les Trencavel, les seigneurs d’Anduze, de
Servian, de Clermont ou de Lunel, et ce fut le but premier de leur politique matrimoniale.
A partir de la deuxième moitié du XIIème siècle, ils devinrent très proches de la bourgeoisie
montpelliéraine qu’ils intégrèrent de plus en plus dans leur entourage, quand les autres grandes
familles féodales avaient des relations souvent conflictuelles avec leurs bourgeois.
Enfin, leur relation privilégiée avec les papes et leur respect de la plus stricte orthodoxie catholique
détonnait dans un Languedoc de plus en plus gagné par le catharisme.
Pourtant, malgré toutes leurs précautions visant à stabiliser et défendre leur seigneurie, et alors
même que les Guilhem étaient plus puissants que jamais, leur lignée prit fin brutalement en 1204
sur une machination savamment orchestrée, mêlant un mariage illégitime et un roi entreprenant.
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Une grande famille féodale dans le Languedoc du XIIe siècle, les Guilhem de Montpellier / Alexandre Vergos
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Une grande famille féodale dans le Languedoc du XIIe siècle, les Guilhem de Montpellier / Alexandre Vergos
Une grande famille féodale dans le Languedoc du XIIe siècle, les Guilhem de Montpellier / Alexandre Vergos
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<div style="text-align: justify;">L’importante famille féodale des Guilhem, seigneurs de Montpellier, est un cas particulier sous bien des égards dans le Languedoc du XII<sup>e</sup> siècle. Apparaissant pour la première fois dans les sources à la fin du X<span style="font-size: 8.33333px;"><sup>e</sup> </span>siècle, les Guilhem de Montpellier n'étaient alors qu'une famille seigneuriale relativement modeste du comté de Melgueil. Ils opérèrent une rapide ascension au cours du XI<sup>e</sup> siècle, de pair avec le développement exponentiel de leur ville de Montpellier, et s'imposèrent au XII<sup>e</sup> siècle comme une des familles seigneuriales les plus puissantes du Languedoc. Comme la quasi-totalité des seigneurs languedociens, ils furent à leur tour entraînés dans le conflit entre les comtes de Toulouse et de Barcelone qui secoua la région durant tout le XII<sup>e</sup> siècle : la grande guerre méridionale. Contrairement à d’autres acteurs de cette guerre qui alternèrent leur fidélité d’un camp à l’autre au cours du siècle, comme la famille Trencavel, les Guilhem de Montpellier restèrent des soutiens inébranlables des comtes de Barcelone jusqu’à la fin du conflit. Au-delà de leur importance régionale, les Guilhem sont un cas intéressant de part les stratégies originales qu’ils mirent en œuvre pour renforcer leur pouvoir et assurer la pérennité de leur seigneurie. Appuyés sur une ville marchande florissante qu’ils s’employèrent à développer, ils formèrent dans la deuxième moitié du XII<sup>e</sup> siècle une alliance forte avec la haute bourgeoisie, qui posait tant de problèmes aux Raimondins et aux Trencavel.</div>
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