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Castan, « héritier » de Perbosc
Hervé Terral (Toulouse II)
Embarretz pas Occitania dins de gàbias : provincialisme, regionalisme, federalisme,
ancionalisme, partits, sectas e segregacions… An paur d’èsser !1
Le 2 décembre 2000 se tint à Comberouger (Tarn-et-Garonne) une journée « Antonin
Perbosc » à l’initiative de Georges Passerat et de Norbert Sabatié, fins connaisseurs de son
œuvre2. Cette journée dans le village où Perbosc enseigna pendant quinze ans (1893-1908),
se voulait une préparation au CAPES d’Occitan/langue d’oc (Perbosc, bénéficiaire d’une
sorte de revival éditorial, était alors au programme). Félix Castan, qui connut l’auteur en sa
jeunesse pendant la guerre, fut en quelque sorte le « grand témoin » de cette manifestation
intellectuelle : ce fut aussi sa dernière sortie publique avant son décès en janvier 2001. Ce
fut la seule fois où je le croisais.
Si étaient prévus « prepaus e testimoniatges sus Perbosc » (par exemple le fait que ce
dernier, à l’occasion des visites de Prosper Estieu, organisait une promenade digestive dans
les ruines de l’abbaye voisine de Grandselve… se clôturant par une séance où ils
compissaient la tombe de l’évêque Foulques, troubadour devenu exterminateur de
cathares), Castan offrit au journal de l’IEO Occitans3 cinq pages qui résument très bien son
intervention et sa référence à l’œuvre de Perbosc.
Une sorte de testament
Dans ce texte intitulé « Perbòsc a Comberouger », Castan cite d’entrée Max
Rouquette : « Après lui, rien ne fut comme avant ». « Le renouveau félibréen fit un saut dans
l’identité et la modernité » - rien de moins !
Néanmoins, selon lui, Perbosc participa peu à la vie active du Félibrige, ce fut même
« un Félibre par accident et peu enthousiaste »4 (il contribua cependant entre autres
initiatives à la défense des maintenances et à la chute, en 1909, de Pierre Devoluy de la
direction du mouvement, dans le cadre d’une alliance hostile de couleur politique très…
composite, allant de la droite monarchiste à l’extrême gauche).
Cela n’empêche nullement Castan de le qualifier de « socialiste libertaire » dans un
contexte tendu (affaire Dreyfus, vote de la loi de séparation des Eglises et de l’Etat en 1905),
lui qui fut un abonné des Cahiers de la Quinzaine de Charles Péguy et qui se dit disciple d’un
seul : Auguste Fourès (1848-1891), incarnation du « Félibrige rouge ». C’est sur sa tombe,
lors des obsèques maçonniques de ce dernier, qu’il rencontra celui qui sera près de
cinquante ans durant son ami et compagnon de lutte, Prosper Estieu (1860-1939).
Autres références majeures pour Perbosc : Castela, poète meunier du Bas-Quercy par
l’intermédiaire duquel il découvrit l’écrit occitan, les montalbanais Cladel et Bourdelle – ce
dernier représente pour Castan « l’intervention occitane au niveau de l’universel (en
1
In Jorn, Mòstra del Larzac, 1972, p. 3. Le recueil est dédié à deux figures majeures de l’occitanisme : JeanMarie Auzias et Bernard Manciet.
2
Cf. en particulier leur édition, avec S. Cézerac-Perbosc, des Récits et contes populaires de Gascogne 1.,
Gallimard, 1979.
3
Cf. bibliographie, Castan, 2001.
4
In « La pédagogie de Perbosc par Félix-Marcel Castan », Linha Imaginòt, 1er trimestre 2006, 12-13. Cité p. 12.
�sculpture), comme Cézanne en peinture. Perbosc apporta en outre dans les années 1920 à
Ismaël Girard, son cadet, ce qui devait être la devise du mouvement culturel occitan : « La Fe
sens òbra mòrta es » (reprise du Nouveau Testament, Epître de Jacques, 2, 17).
Ouvert sur les Lettres et les Arts, Perbosc le fut aussi sur le monde. Son premier
ouvrage, le Gòt occitan (la coupe occitane), est né de la crise du phylloxera et représente un
symbole : l’homme boit le vin qui féconde la pensée et la civilisation. Thème qui sera cher,
notons-le au passage, à l’abbé Joseph Salvat qui, de Saint-Nazaire de Béziers en SaintNazaire de Carcassonne, prêchera sur le thème du vin rédempteur dans les années 1920.
Autres ouvrages clés : Campèstre (Lo libre del Campèstre) – qui ne sera publié que… sept
décennies plus tard ; Castan, qui à son propos renvoie, sans grande explication, à la pensée
de Jaurès, évoque « le cycle des saisons ». Lo Libre dels Auzèls, œuvre de la maturité (1924),
est, quant à lui, tout à fait l’expression de l’idée de liberté : Perbosc est toujours prêt à s’en
aller voir du pays, dit Castan, qui voit en lui un « homme du futur ». Dans la suite de ce texte
de synthèse, publié sous le titre « Perbosc : un exemple » (Occitans !, n°101, 2001), Perbosc
entre, avec Jaurès et Bourdelle, dans une sorte de sainte trinité (si l’on ose dire !) porteuse
d’une seule identité occitane, précédée d’une trinité qui cherchait déjà son unité : Fourès,
Fauré, Cézanne, trio auquel il faudrait peut-être ajouter Lautréamont… Nous sommes assez
loin de Mistral « qui représentait avec hauteur l’identité collective », « enfermant la
Renaissance dans un esprit de secte, dont il était le gourou » (p. 5).
A contrario, la création d’une société traditionniste avec ses élèves, en charge de
collecter chants, devinettes, proverbes, etc., dans le petit village de Comberouger où il fut
instituteur, illustre une première mouture des « méthodes actives » elles-mêmes5.
Comberouger : capitale, conclut Castan, fondatrice de l’occitanisme.
Castan et l’édition de la poésie
En 1961, à un moment où la poésie de Perbosc demeure difficile d’accès, Castan fait
paraître sous le titre : Perbosc. Choix de poèmes occitans une anthologie de 99 pages dans la
collection « Maîtres de la poésie occitane » de l’IEO.
Trois parties structurent l’ensemble :
1. L’univers invisible ;
2. La nature infinie ;
3. L’Être et la mort.
Ce recueil emprunte à différents volumes, tout particulièrement L’Arada et le Gòt
occitan, mais aussi au poème pacifiste Los mòrts te parlaran, mais encore à quatre inédits (la
source n’est pas mentionnée ; la table des matières est en français). En fin de volume, on
trouve une bibliographie détaillée, très précise et référencée. Dans une « conférence »
inaugurale, intitulée « Antonin Perbosc et le sentiment cosmique », Castan donne quelques
éléments personnels concernant l’auteur : « caractère grave, ennemi du bavardage, qui
contrastait si fort avec l’esprit des milieux félibréens »… Héritière des « poètes populaires »,
5
Cf. « La pédagogie de Perbosc par Félix-Marcel Castan » in Linha Imaginòt, 1er trimestre 2006, 12-13. Repris
in Castan F.-M., Félix Castan ou l’équilibre parfait de l’identité, Larrazet (82), Maison de la culture, 2010, 387389. Sur ce sujet, je renvoie aussi à mon livre : Antonin Perbosc. Les langues de France à l’école, Canet-enRousillon, Trabucaire éd., 2006, 135-156. Le terme « méthode active » (au singulier) est déjà employé par le
philosophe de l’éducation Henri Marion vers 1880 ; Perbosc, pour sa part, était un lecteur de Tolstoï lui aussi
précurseur des méthodes actives dans son domaine de Iasnaïa Polonia.
�au premier rang desquels Jasmin et Gélu, la jeune garde des écrivains occitans devait
rapidement se trouver aussi orpheline d’Aubanel et de Fourès et dut se confronter à la figure
tutélaire de Mistral « dont la longue existence ne devait s’achever qu’en 1914 », précise non
sans arrière-pensées Castan… Perbosc connut dans sa jeunesse d’autres courants littéraires :
le Parnasse, l’École romane, les symbolistes, le groupe toulousain de L’Effort, etc., non sans
aborder dès ses premiers textes « le grand registre des travaux et des jours des existences
terriennes ». « Sentiment cosmique » donc, poésie philosophique aussi, dans le sillage des
penseurs présocratiques, d’un Lucrèce et, Castan va le répétant dans maints textes, de son
contemporain et ami le sculpteur Antoine Bourdelle – l’homme qui « sculpte en langue
d’oc » selon ses propres dires »6.
Mais Perbosc doit être également inclus dans
la lutte des érudits, linguistes et historiens, attachés aux méthodes du travail scientifique, […]
des républicains et anti-cléricaux, partisans du nouveau régime qui s’instaurait en France, enfin
par des éléments issus des provinces limousines, gasconnes, languedociennes, qui souffraient
mal une prédominance provençale, trop sensible à la tête de l’organisation (p. 6).
« Le Progrès chemine lentement, mais il ne s’arrête pas à mi-chemin » (p. 13), écrit
Perbosc en préface des oeuvres posthumes de son compatriote Auguste Quercy (1911).
Perbosc est un homme de son temps, engagé, y compris dans la Franc-Maçonnerie (ce que
ne signale pas Castan). Aussi écrit-il à Estieu en date du 19 novembre 1910 : « Je suis félibre
en sommeil pour quelque temps, mais F .˙. M . ˙. actif. Voilà. Ecrasons l’infâme ! » (souligné
par Perbosc). Au demeurant, Perbosc avait déjà indiqué au même (lettre du 15 mars 1895) :
« Tout ce qui est aristocrate et clérical, il faut qu’on sache bien […], que nous n’en voulons
pas. Ce sont ces gens-là qui ont fait le discrédit et la honte du Félibrige. »
Pour Castan : « La longue destinée de Perbosc a la noblesse d’un arbre vivant » (p.
21). Un arbre tourné vers le haut, vers l’avenir, plus que vers le sol néanmoins (Perbosc n’est
pas Barrès). Cette perception d’une grande force intérieure avait été relevée par Armand
Praviel et J. R. de Brousse dans leur Anthologie du Félibrige (1909 : p. 227), quand ils parlent
de ce « grand et vigoureux Quercynois, à la barbe blonde et à la voix paisible » - le portrait
d’Estieu faisant état d’un personnage plus exalté.
Castan et les « manifestes occitans »
En 1976, Castan fait paraître sous le titre Antonin Perbosc 1861-1944 / Manifestes
occitans ce qui est présenté comme le volume I des Òbras completas, et « l’intégrale de
l’œuvre en prose occitane et française »… et rien de moins… Dans une « note liminaire », il
précise quand même : « On ne connaît pour l’instant que le tiers de l’œuvre totale de
l’auteur et ce tiers est pratiquement épuisé depuis longtemps. » Ce qui justifie en soi la
publication de 26 textes en occitan et 22 en français – allant de 1892 à 1943. Textes
largement méconnus : des textes de circonstances (discours publics commémoratifs) à de
véritables manifestes programmatiques (tel Fòc nòu, 1904), des préfaces aux pamphlets
(ainsi de larges extraits des Langues de France à l’école). L’ensemble se clôt par trois pages,
6
Lettre de Bourdelle à Perbosc (été ou automne 1914), Fonds du Musée Ingres (Montauban), Bulletin du
Musée Ingres (n°12 décembre 1962).
�destinées à l’ethnologue André Varagnac7, intitulées « Fragments pour un mémoire » et
largement ignorées jusqu’alors.
Ceci étant, deux critiques peuvent être formulées à l’égard de ce livre :
- aucun des textes n’est situé dans son contexte, ni même présenté – ce qui en
amoindrit incontestablement la portée ;
- Pour autant que l’on puisse retrouver les versions d’origine, on comprend mal
certaines coupures. Pourquoi, par exemple, avoir supprimé la fin du discours
devant le monument de Fourès au Boulingrin de Toulouse (in Terra d’oc, 1898) :
« E aro, O Fores ! cridi del prigond de mon cor aisso que clameres totjorn dins le
mesclada : « Visque Lengadoc ! Visque Fransa ! » ?
Pourquoi avoir de même exclu de Fòc nòu le poème de Paul Rejin/Paul Rey « Lo
Ninarel de la suava Tolozana », qui conclut ce texte manifeste de 19048, modèle possible de
ce qu’il convient de faire paraître désormais selon Perbosc, ?
Dans son introduction, Castan n’a pas manqué de faire part de ses options politiques,
prenant ses distances avec les thèses de Robert Lafont (opposant nation primaire et nation
secondaire) : « L’idée d’Occitanie […] n’est pas séparable d’une certaine conception de la
nation française, vivante dans le peuple […]. La Nation est le lieu de l’unité, la patrie le lieu
de la diversité » (p. 15) – non sans renvoyer à un grand décentralisateur, son compatriote
quercynois Jean Izoulet (1858-1929), professeur de philosophie sociale au Collège de
France, que Perbosc n’a pas manqué de citer longuement en ouverture de son Anthologie
d’un Centenaire (1908).
Castan et ses propres manifestes
Dans sa longue vie, Castan a… manifesté de maintes manières. Il a eu, lui aussi, ses
manifestes personnels. Nous en retiendrons deux :
a- Décentralisation occitaniste, interventions théoriques de F. Castan 1961-1972, placée
sous les auspices de la Mòstra del Larzac (1973). Dédié à la bretonne Jeanne Laurent
(1902-1989) ; instigatrice de la décentralisation culturelle sous la IVe République (à la
fondation du festival d’Avignon, celle-ci crée également les premiers centres
dramatiques nationaux : Colmar, Saint-Etienne, Grenier de Toulouse, Comédie de
Provence, etc.). Cet ouvrage de Castan se donne à voir comme un florilège d’auteurs
(Camille Soula, Déodat de Séverac, les « Montévidéens » de Tarbes, à savoir Isidore
Ducasse et Jules Laforgues…) et d’expériences culturelles variées : théâtre, poésie,
arts plastiques… Il affirme avec résolution un point nodal de sa pensée : « La France
et ses capitales » (p. 92 et sq.), indiquant un futur possible :
7
André Varagnac (1894-1983), ethnologue venu des milieux socialistes, fut responsable du Bureau du
Régionalisme à Toulouse sous le régime de Vichy – ce qui ne compromit pas la suite de sa carrière. Défenseur
du patrimoine occitan, il semble avoir protégé alors les réserves cachées du musée du Louvre et toléra la
présence au sein du Bureau du professeur, révoqué, H. Lefebvre - lequel prépara alors sa thèse sur les
« communautés paysannes pyrénéennes » (éditée en… 2014).
8
On trouvera ces deux documents dans leur version intégrale dans mon livre précité, 2006, pp. 61 et 114.
�« Paris se maintiendra entouré d’une couronne satellite dans la zone immédiatement
liée à son destin et brûlée par la lentille de son intellect ; l’Occitanie acquerra un statut,
le rôle national de porte-parole et de tuteur d’une province qui reprend confiance en sa
chair entière, confiance surtout dans les siècles bâtisseurs où nous entrons. » (p. 107).
Optimisme ? Perbosc est plusieurs fois évoqué, voire cité par quelques vers dans un
« hommage à Vilar » (p.81) :
« Ailàs ! qu’es aquó sus la paura terra, s’i sem per morir de la môrt eterna ?
Canta ça que là, fontassa, fonteta,
Ta vielha cançon per iô qu’embelinan
Sus mos camps reirals sorgas e fatôrgas. »
Pour autant Castan célèbre « le Languedoc, seul pays au monde qui soit désigné par
son langage (et qui) possède deux langues (et) deux capitales, Toulouse et Montpellier » :
« Qu’est-ce que le Languedoc ? Les habitants plus qu’en aucune autre province de
France y ont oublié leur nom, nul ne se dit languedocien. On va en Provence, en Limousin ou
en Auvergne […] ; mais on ne va qu’en Haute-Garonne, dans le Tarn, l’Aude ou l’Ariège […].
Nous ne nous en plaindrons pas ! » (p. 39).
A contrario, Perbosc, quand il participe à la célébration du centenaire du Tarn-etGaronne (1908), ne manque pas d’écrire :
« Qui a jamais crié avec conviction Vive le Tarn-et-Garonne ! Ce que chacun pense,
consciemment ou non, c’est Vive le Quercy ! vive le Rouergue ! Vive l’agenais ! Vive la
Lomagne ! Vive la Gascogne ! Vive le Languedoc ! » (Anthologie d’un Centenaire, p. XIII).
b- Décentralisation. Manifeste multiculturel (et anti-régionaliste), 19849. Il s’agit d’un
pendant de l’ouvrage précédent, mais comprenant des textes dans l’ensemble plus récents.
Les références élogieuses y sont nombreuses. Relevons, dans un passage (daté du 30 juillet
1965) destiné à Charles Camproux, alors en charge des études romanes à la faculté des
Lettres de Montpellier), cette auto-présentation de sa jeunesse :
« Je ne connaissais guère que mes maîtres, mes seuls vrais maîtres ; ceux qu’on ne renie pas
une fois dans une vie, Jules Cubaynes10 et Antonin Perbosc, et des anthologies du Félibrige
provençal ou des Troubadours, longuement fréquentés, et le Pain du Péché 11» (p. 92).
Dès l’ouverture (et la dédicace à sa défunte épouse Marcelle – dont il accolera
désormais le prénom au sien propre, signant : Félix-Marcel Castan) sont convoqués les
scientifiques (Albert Jacquart, Jean Dausset, Jacques Ruffié), mais aussi les plasticiens et
philosophes (Charles-Pierre Bru), mais encore le toulousain psychologue Philippe Malrieu12.
À l’occasion d’un Discours de Beaubourg (12-5-1982), Castan énonce son point de vue
quelque peu iconoclaste :
« Je me sentirais plus à l’aise dans ce Carrefour des Régions s’il s’appelait Carrefour des
Identités culturelles. La région n’est pas un but. C’est tout au plus, dans la France
9
Collection Lucter [sic], Cocagne éditions, Montauban. 1984. Lucter/Lucterius fut le dernier chef gaulois
résistant à César à Uxellodunum (actuel Quercy).
10
Jules Cubaynes (1894-1975) fut très lié à Perbosc, quercynois comme lui et Castan.
11
Lou pan dóu pecat, drame en 5 actes, de Théodore Aubanel, publié en 1882.
12
Philippe Malrieu, philosophe et psychologue communiste, entretint une correspondance avec Castan dans
les années 1950. Il fut toujours un ami de la langue d’oc. La bibliothèque du département de psychologie de
l’université Jean-Jaurès porte aujourd’hui son nom.
�contemporaine, un cadre de gestion […]. La gestion engendre des normes et la culture les
défait. » (p. 11).
La suite offre une série de textes volontiers programmatiques : « Muret, victoire ou
défaite ? » (1963) ; Déclaration de Nérac (avec B. Manciet en (1956) ; Robespierre antiGrégoire (très anti-girondin) à l’occasion de la programmation des Drapiers jacobins dont le
Provençal Benedetto a emprunté la thématique « au magnifique roman de Félix Gras, Leis
Roges dau Miegjorn13 [sic] 1896).
Homme de pensée, mais aussi
homme d’action, comme eût pu dire en son
temps Emile Durkheim, Castan conclut son
ouvrage (p. 166) par une « table
d’orientation », qui illustre ses nombreuses
activités : au centre, le Carrefour d’Occitanie
(centre d’initiatives culturelles), d’où
rayonnent le Festival de Montauban – droit
à la ville14 (depuis 1957), la Mòstra del
Larzac / Centre d’art contemporain – droit à
la décentralisation (depuis 1969), Caméra
libératrice / audio-visuel (depuis 1973),
Forum des Identités / villages-villes-capitales
(depuis 1978), Mòstra, périodique théorique
anti-centraliste (depuis 1974), Cocagne
éditions (depuis 1973), Centre international
de synthèse du baroque – droit à la pluralité
(depuis 1963). Cette déclinaison des droits
divers s’affiche dans l’esprit de la
« Révolution de 1789 », célébrée avec force,
chacun s’en souvient, pour son bicentenaire.
Le combat occitaniste de Castan fut essentiellement culturel « l’engagement
politique – communiste – se situant pour lui essentiellement dans le cadre national
français ». C’est ce qu’indique à sa façon (i.e. a contrario) un autre communiste militant de la
cause occitane, René Merle (né en 1936) dans un entretien avec Laurent Revest (Jornalet,
quotidien électronique, 7-1- 2017) :
« Partejavi ges de perspectiva autonomista o nacionalista occitana, mai mi retrobavi dins lei
batalhas unissent la defensa de la lenga e de la cultura d’òc, e la protestacion còntra la
desindustrializacion dau país, la mesa a mòrt de l’agricultura tradicionala e la transformacion
dau “Sud” en bronzacuou d’Euròpa. Fuguèt rapidament la posicion de la federacion comunista
d’Erau. D’autrei seguèron.
Mas aquesta posicion rescontrèt la viva oposicion d’un autre corrent occitanista, animat per lo
militant comunista montaubanés Fèlix Castanh, per lo quau la defensa de la cultura d’òc
ganhava ren de se foraviar dins de revendicacions economicas, politicas e socialas: deviá èstre
unicament culturala, e essencialament literària, dins una entrepresa descentralizaira. »
13
Cette graphie est celle du manifeste. Graphie originale : Li rouge dóu miejour.
« Le droit à la ville » est aussi le titre d’un ouvrage de Henri Lefebvre (1968, Anthropos), surtout connu alors
comme sociologue de l’urbain.
14
�Dans la descendance de Castan, s’en revendiquant largement, on pourra trouver
aussi dans les décennies à venir le Carrefour culturel Arnaud-Bernard cher au chanteur
Claude Sicre (Toulouse), lui aussi rayonnant un temps à partir du journal Linha Imaginòt de
Bordeaux à Nice, via Marseille. De même, mezzo voce, la Convergencia occitana toulousaine,
regroupant à ce jour près de 80 associations très variées, mais unies dans la référence à la
culture d’oc : la salle de conférence de l’Ostal d’Occitania porte ainsi le nom de Perbosc et
ses principaux animateurs savent à l’occasion tenir des propos assez « castaniens » d’esprit.
Conclusion
Perbosc avait écrit en 1922 (lettre à l’écrivain Charles Derennes) : « J’ai toujours
souhaité n’être ni le chef, ni le soldat de personne », affirmant dans le choix des termes
mêmes une sensibilité libertaire d’esprit. Bien qu’avançant avec détermination son point de
vue – au point d’être l’un des rares Félibres ou Occitanistes sollicités par les initiateurs du
projet, notamment Ismaël Girard, à ne pas signer la lettre/pétition adressée au Maréchal
Pétain en septembre 1940 en faveur d’un enseignement de la langue d’oc et d’un
redécoupage des provinces. Il ne chercha pas à avoir un cénacle de disciples (encore moins
une cour), seulement des amis (on songe à la fresque de Marc Saint-Saëns qui le représente
avec quelques uns d’entre eux dans la salle de lecture de la bibliothèque du Patrimoine, rue
du Périgord à Toulouse). Pour autant, il eût pu souscrire à cette prime affirmation du jeune
Castan dans son premier livre :
« L’impératif est inscrit dans un cœur d’homme : mettre bon gré les sources de sa vie
en société en société avec toutes les vies qui naissent sur la terre, parmi les nations et les
continents.15 »
Bibliographie sélective
CASTAN Félix, De campestre, d’amor e de guerra, IEO, coll. « Messatges », 1951.
CASTAN Félix, Antonin Perbosc, choix de poèmes occitans, Toulouse, Institut d’Etudes
Occitanes, 1961.
CASTAN Félix, De Centralisation occitaniste (interventions théoriques 1961-1972), La Cavalerie,
Mòstra del Larzac, 1973.
CASTAN Félix-Marcel, Décentralisation. Manifeste multi-culturel (et anti-régionaliste) –
Interventions critiques, Montauban, Cocagne éd., 1984.
CASTAN Félix-Marcel, « Perbosc à Comberouger », Occitans !, 2001, n°100, 4-5.
CASTAN Félix-Marcel, « Perbòsc un exemple », Occitans !, 2001, n°101, 4-6.
CASTAN Félix-Marcel, Félix Castan ou l’équilibre parfait de l’identité, Larrazet (82), Maison de
la culture, 2010, 387-389.
PERBOSC Antonin, Obras completas 1, Manifestes occitans, Mostra/Cap e cap, la
Cavalerie/Montech, 1976.
TERRAL Hervé, Antonin Perbosc. Les langues de France à l’école, Canet-en-Rousillon,
Trabucaire éd., 2006.
15
Félix CASTAN, De campestre, d’amor e de guerra, IEO, coll. « Messatges », 1951, p. 6.
�
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<a href="http://occitanica.eu/omeka/items/show/19160">Autour de Félix Castan : Journée d’études du 5 mai 2017 </a><br /><a href="http://occitanica.eu/omeka/items/show/19160">RedOc / LLACS - CIRDOC</a>
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Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
Language
A language of the resource
fre
Type
The nature or genre of the resource
Text
texte électronique
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
http://www.occitanica.eu/omeka/items/show/19187
Temporal Coverage
Temporal characteristics of the resource.
19..
Description
An account of the resource
<!DOCTYPE html>
<html>
<head>
</head>
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<div style="text-align: justify;">
<p>Communication d'Hervé Terral dans le cadre de la Journée d'études « Autour de Félix Castan » organisée par l'équipe de recherches LLACS (EA 4582, Université Paul-Valéry, Montpellier) et le CIRDOC le 05 mai 2017.</p>
</div>
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</html>
<!DOCTYPE html>
<html>
<head>
</head>
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<div style="text-align: justify;">Comunicacion d'Hervé Terral dins l'encastre de la jornada d'estudis « Autour de Félix Castan » organizada per l'equipa de recèrcas LLACS (EA 4582, Universitat Paul-Valéry, Montpelhièr) e lo CIRDÒC lo 05 de mai de 2017.</div>
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Relation
A related resource
Vignette : http://occitanica.eu/omeka/files/original/0e762944f764faefe98a2dcfe7259483.jpg
Subject
The topic of the resource
Poésie occitane -- 20e siècle -- Histoire et critique
Castan, Félix-Marcel (1920-2001)
Perbosc, Antonin (1861-1944)
Source
A related resource from which the described resource is derived
X:\CAMPUS\Journee_Castan\04-Terral-Castan
Rights
Information about rights held in and over the resource
© Hervé Terral
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LLACS Univ MTP 3
Catégorie
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Ressources scientifiques
Poesia occitana = poésie occitane