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Occitan lenga olimpica
L’organisation des jeux olympiques d’hiver en 2006 dans la province de Turin, dont une partie du domaine skiable est situé dans les vallées occitanophones d’Italie, les « Valadas » représenta une opportunité historique pour les acteurs associatifs engagés pour la promotion de l’occitan, autour de la Chambra d’òc, et les pouvoirs publics régionaux (Province de Turin et Région Piemonte) qui construisaient au même moment une politique de valorisation des minorités linguistiques à la suite du vote de la loi italienne n° 482 du 15 décembre 1999 « sur la protection des minorités linguistiques historiques ».

Le modèle est celui des autorités catalanes qui avaient réussi, notamment grâce à l’engagement du maire de Barcelone Pasqual Maragall alors président du comité de candidature, à faire du catalan l’une des quatre langues officielles des JO de Barcelone en 1992. Les acteurs associatifs et institutions des Vallées occitanes d’Italie lancèrent une campagne de sensibilisation « Occitan lenga olimpica » dont le but affiché était d’affirmer l’identité occitane des montagnes turinoises où se déroule l’événement en profitant de la visibilité mondiale offerte par l’événement. Pour les acteurs de la promotion de l’occitan dans les « Valadas », majoritairement actifs dans la province voisine de Cuneo, c’était aussi une occasion d’étendre la prise de conscience populaire et un développement des actions en faveur de l’occitan dans la province de Turin.

Les Vallées occitanes d’Italie ont découvert leur « occitanité » assez récemment, suite à l’arrivée sur leur territoire au milieu des années 1960 de François Fontan (1929-1979), activiste important de la période quoique controversé, théoricien de l’ethnisme et fondateur du Parti nationaliste occitan. Inès Cavalcanti de la Chambra d’òc, cheville-ouvrière de la campagne Occitan lenga olimpica retrace cette prise de conscience dans un article qui lui est consacré dans la revue Ethnologie française : « Jusqu’en 1970, je ne savais pas que j’étais Occitane, je ne savais même pas le nom de la langue que je parlais. Pour désigner notre langue, on disait parler a nosto modo. On voyait les vallées comme un lieu isolé, sans identité et, dans un certain sens, sans futur. François Fontan, Occitan venu de l’autre côté des Alpes, s’est installé un jour à Frassino dans la Vallée Varaita et avec sa « prédication » sur l’Occitanie, il m’a ouvert une fenêtre, j’ai regardé dehors et j’ai découvert un autre monde. »  Cette prise de conscience récente d’une appartenance à une communauté linguistique - et de « destin » pour les militants dans la lignée du projet nationaliste de Fontan - peut apparaître pour certains comme artificielle, concevant la langue locale dans son environnement et ses spécificités locales, refusant en particulier la normalisation graphique venue du Languedoc. Une organisation, la Consulta Provenzale, se mobilisa contre la campagne « Occitan lenga olimpica ». Leur argumentation fut relayée en France par les adversaires provençalistes à l’idée d’une langue occitane commune et donna lieu à une question écrite au gouvernement du sénateur des Bouches-du-Rhônes André Vallet en avril 2004. Ils défendent l’idée que la campagne de sensibilisation serait une tentative « occitaniste » d’imposer sur les territoires des Valadas une langue artificielle qui ne serait pas celle du territoire. L’appartenance des parlers « a nosto modo » à l’ensemble occitan est cependant assez comprise par les pouvoirs publics et les habitants des Valadas pour mettre en œuvre durant toute la durée des JO de Turin la campagne de sensibilisation « Occitan lenga olimpica » : guichets d’information des journalistes et du publics, actes officiels en langue occitane, rencontres linguistiques et culturelles, etc.

Menée officiellement par les institutions publiques, la campagne marque indéniablement un jalon dans l’histoire de la reconnaissance officielle et internationale de l’occitan comme langue contemporaine parlée des Alpes italiennes jusqu’à l’Atlantique. Paradoxalement, c’est dans cette région récemment « occitanisée » que l’action et l’affirmation collective d’une occitanité peut paraître parfois la plus forte, en particulier parce qu’elles sont portées - comme du côté Espagnol (Aran en Catalogne) - par des politiques nationales et territoriales en soutien à la reconnaissance officielle et la promotion de l’usage des langues territoriales. Fort du succès et de l’impact de la campagne Occitan lenga olimpica, la Chambra d’òc lancera deux ans plus tard une des initiatives parmi les plus marquantes de la décennie 2000 pour l’affirmation occitane : une mobilisation de tous les territoires de l’Occitanie autour de leur langue et culture commune autour d’une grande marche de 1’300 km, « Occitània a pè », depuis les Valadas jusqu’à la Catalogne occitanophone (Aran) en traversant une partie de l’Occitanie française.
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Lo parlar occitan d'Arbouno (Arbona), comuna de Chastelmanh, Val Grana, dins las valadas occitanas d'Itàlia
Centre interrégional de développement de l'occitan (Béziers, Hérault)
Votre question : Que sait-on sur le parler occitan du hameau d'Arbouno ([N]Arbona) en Val Grana ?

Vignette d'illustration : Arbouno encore habité, source : http://www.saperepopolare.com

Notre réponse :
Arbouno (Arbona en occitan graphie normalisée, parfois Narbona) est un hameau de montagne inoccupé depuis les années 1960, situé dans la commune de Castelmagno (Chastelmanh en occitan), en Val Grana, au centre des « Vallées occitanes d’Italie ». Castelmagno est emblématique de l’évolution de la civilisation montagnarde alpine, marquée par un important mouvement de dépeuplement au cours de la seconde moitié du XXe siècle au profit des régions industrielles de Turin et de Rhône-Alpes en France.
Arbouno fait d’ailleurs l’objet d’un travail de recherche et de valorisation patrimoniale autour du projet éco-muséal « Una casa per Narbona » (voir liens ci-dessous). Sur la même commune de Castelmagno, à Valliera, un autre village abandonné par ses habitants au cours du XXe siècle, fait aujourd'hui l’objet d’un projet de développement économique, culturel et écologique dont l’étude est consultable en ligne (consulter l'étude sur le projet de Valliera).

L’occitan parlé à Arbouno : que sait-on ?

Sur le plan linguistique, le village d’Arbouno est connu des linguistes pour le parler de ses habitants, qui aurait eu des spécificités locales, et dont la forme se rapprocherait de l’ancien occitan (occitan du Moyen Âge). Sans que l'on en connaisse les raisons, il semblerait qu'Arbouno ait pu être peuplé par des immigrants au Moyen Âge, et que les formes de leur parler occitan d'origine se soit maintenu du fait de l'isolement et de la relative autonomie de la communauté. 
Les particularités linguistiques et phonétiques de l'occitan parlé à Arbouno et ses similitudes avec le parler de deux vallées des Pyrénées ariégeoises (La vallée de Bethmale et la vallée de Bellongue) ont été étudiées et ont fait l'objet de deux publications, toutes deux accessibles en consultation sur place au CIRDOC ou disponibles via nos services de documentation à distance (plus d’infos et contacts sur www.locirdoc.fr) :
- LOMBARDO, Renato, « Appunti sulle peculiarità del dialetto occitano di l'Arboùna », Novel temp, n° 18, 1982, p. 26-34.
- BRONZAT, Franco, « Un fenomene de conservacion fonetica en qualque endreit de las Alpas e dals Pireneus e son enterpretacion grafica », Actes du IV Congrès International de l'AIEO, 1993, pp. 685-700.

En savoir plus sur Arbouno et sa région : Quelques ressources et documents :

Projets et actualités culturelles :

- Le projet « Una Casa per Narbona » (actualité du projet de recherche et valorisation, nombreuses photos du site) : http://unacasapernarbona.tumblr.com 
- Projet agrotouristique « Des Martin » (revivification d’un bourg de montagne sur la commune de Castelmagno) : http://www.desmartin.it
- Association de promotion de la culture occitane de Castelmagno : Centro Occitano di Cultura « Detto Dalmastro » : http://www.lavousdechastelmanh.it/centrocc/centroc.htm
- Castelmagno occitan : site d’information et de promotion « Castelmagno / Chastelmanh, país occitan » : http://www.castelmagno-oc.com
- Site officiel de la commune de Castelmagno : http://www.comune.castelmagno.cn.it 
- Une vidéo pour découvrir « Castelmagno / Chastelmanh, terre d’oc » : voir la vidéo sur youtube 

Histoire de Castelmagno et de sa région :

L’historien de Castelmagno est un certain Bernardino Galaverna, prêtre qui officiait dans la commune dans les années 1890-1900. Ses publications sont particulièrement riches sur les rites et traditions festives de Castelmagno.
- GALAVERNA Bernardino, Cenni storico-tradizionali intorno a S. Magno Martire Tebeo ed al Paese e Santuario di Castelmagno, Cuneo, Fratelli Isoardi, 1894.
- GALAVERNA Bernardino, Le Quarantore nella parrocchia di S. Ambrogio in Castelmagno ..., Cuneo, Tip. F.lli Isoardi, 1907
Revue d'histoire et de culture locales :
La Vous de Chastelmanh, revue d’histoire et de culture locales de Castelmagno : Fondée par Gianni De Matteis, ce bulletin est publié régulièrement depuis 1970 par le Centro Occitano di cultura « Detto Dalmastro ». Gratuit et tiré à 1200 exemplaires, il est le lien et le porte-parole de la petite communauté de Chastelmanh, il contient des articles sur l’histoire et sur la culture occitanes.
Le CIRDOC conserve une collection de ce bulletin (de 1979 à 2009), disponible en consultation sur place.
Les numéros publiés depuis 2002 sont disponibles en ligne sur le site du Centro Occitano di cultura « Detto Dalmastro » : consulter la revue en ligne.  

Patrimoine culturel immatériel : La Baìo di Castelmagno

La Baìo est le rite festif le plus emblématique et important des vallées occitanes d'Italie. La commune de Castelmagno a également sa Baìo. De nombreuses informations sur le site castelmagno-oc.com : http://www.castelmagno-oc.com/eventi/baia_storia.htm