Depuis 2008, l'association "Histoire et cultures en Languedoc" organise chaque année les Rencontres Internationales du Patrimoine Historique.
Avec le soutien de la Région Occitanie Pyrénées Méditerranée, du CIRDOC - Institut occitan de cultura, de la ville de Leucate, de la Société Archéologique de Montpellier et de la Confrérie des Consuls de la Seigneurie de LEUCATE.
Découvrir l'association Histoire et cultures en Languedoc.
La frontière définie au Traité de Corbeil (1258) entre Louis IX, roi de France et Jacques 1er, roi d’Aragon n’est pas un linéaire continu, mais un no man’s land aux marges contestées. On peut dire que la limite entre les deux royaumes reste floue et peu lisible, conséquence de nombreux conflits. Saint Louis organisera sa frontière en forteresses de dissuasion autour de Carcassonne, ce seront : Aguilar, Peyrepertuse, Puylaurens, Quéribus, Termes. La géographie tourmentée des Corbières appuie leur rôle dissuasif. Ces forteresses du vertige, selon Michel Roquebert sont pour la plupart d’anciens châteaux refuges des cathares tombés lors de la croisade contre les Albigeois. Au traité de Corbeil, le Roussillon et la Cerdagne sont laissés à l’Aragon ; il faudra donc établir une forteresse pour protéger l’ouverture sur la Méditerranée, ce sera Leucate face à Salses l’aragonaise.
Leucate connaît un épisode majeur lors des guerres de religion dans le Languedoc. L’Édit de Nemours marque la cassure du Languedoc entre deux fractions irréductibles. L’une, fidèle à la Ligue, implantée dans la partie Ouest, ayant à sa tête le maréchal de Joyeuse, alliés aux Espagnols, qui rejette l’idée de reconnaître Henri de Navarre comme successeur d’Henri III. L’autre, à l’Est, sous le gouvernement du Duc de Montmorency, partisans du roi de Navarre. La limite des territoires est établie entre Béziers et Narbonne, mais dans les faits il n’en est rien. L’espace frontalier entre Narbonne et l’Espagne est trop stratégique. Montmorency ne va pas l’abandonner à la Ligue et Joyeuse a besoin des liaisons sûres avec le roi d’Espagne qui fournit troupes et subsides. La guerre permanente dans cet espace nous conduit aux deux sièges de Leucate.
En 1589, les Espagnols, alliés de la Ligue viennent assiéger Leucate. Il s’en suit l’exécution du gouverneur de la place, Jean du Barry. Françoise de Cezelli, son épouse prend la tête des défenseurs et résiste aux Espagnols. Reconnaissant son exploit, Henri IV la chargera de gouverner la place jusqu’à la majorité de son fils Hercule. En 1637, les Espagnols échouent pour la seconde fois à prendre Leucate. L'histoire est cruelle pour la brave citadelle.
Le traité des Pyrénées est signé le 7 novembre 1659 et met fin à la guerre de trente ans par le mariage de Louis XIV avec l’infante d’Espagne, Marie-Thérèse. En 1664, sur ordre du roi, le château est détruit, son inutilité décrété. De son histoire, que reste-t-il ? Quelques vestiges, témoins de son importance et de la présence de l’héroïne du lieu. Alors, qui est Françoise de Cezelli, passée sous silence par de nombreux historiens ?
Elle naît à Montpellier en 1558 et y meurt le 16 octobre 1615. Son père, Jean de Cezelli, comte de Mauguio et président de la chambre des comptes de Montpellier appartient à la lignée des marchands ayant fait fortune. Précisons que Montpellier est une cité en mouvement, où le moteur est la réussite dans les affaires. Rien de surprenant à ce que Jean de Cezelli marie sa fille Françoise, en seconde noce à Jean Antoine de Boursier, seigneur de Barri. Ainsi commença l’histoire de la « Dame de Leucate ».
Pour conclure, revenons au titre de l’exposé : En quoi « la frontière est une cicatrice de l’histoire » ? Depuis les limes romaines ou les marches franques, la frontière est un marqueur spatial d’une différence sémantique et d’une forme de construction territoriale. Cette démarcation a évolué. Au Moyen Âge, la territorialité est marquée par les lieux stratégiques de pouvoir, tels des noyaux polynucléaires, pour exemples : les forteresses de Saint-Louis. Au XVIIe siècle, Richelieu, puis Mazarin envisagent des frontières naturelles pour la France (Pyrénées, Rhin…) Le traité des Pyrénées légitime cette revendication : « Remettre la France où était la Gaule ». Le mythe est repris par la monarchie, par la Révolution et par la République. On parle d’Hexagone, figure géométrique par excellence pour traduire stabilité, perfection, harmonie. La création de l’Union européenne marque la suppression des frontières, c’est une nouvelle cicatrice. Nous ne pensons plus en terme de structure mais de flux.
Maguy Chapot-Blanquet
Docteur en Sciences Humaines
Philippe Martel revient sur la défaite française après l'offensive allemande et sur l'idéologie du Régime de Vichy, notamment face aux langues de France.
Lors de la défaite de 1940, la France est coupée en deux. La zone Sud, correspondant en partie à l'espace occitan, est entre les mains du Maréchal Pétain. Celui-ci va y déployer les thèmes réactionnaires de la Révolution Nationale, notamment le retour à la terre et aux "petites patries". Pour cela, il va s'appuyer sur la figure de Frédéric Mistral, l'écrivain tutélaire de la langue d'oc, et soulever de nouvelles espérances parmi les défenseurs des langues de France. A l'instar des autres français, les écrivains d'oc et les occitanistes se joignent à l'unité nationale, mais reviennent très vite de leurs illusions.
Philippe Martel, Historien, Professeur émérite, est l'un des principaux spécialistes de l'espace occitan
Le CIRDOC - Institut occitan de cultura a reçu quatre conférenciers pour évoquer l'histoire méconnue de la langue occitane dans la Seconde Guerre mondiale.
Langue de maquis, de connivence avec les autochtones, de création littéraire dans les camps de prisonniers allemands, des «vieilles patries» exploitées par la Révolution Nationale, du testament d'un prisonnier politique à Carcassonne à la veille de son exécution...
Au moment de la Seconde Guerre mondiale, l'occitan est encore la langue vernaculaire de son espace traditionnel, dans une France où échouent des langues du monde entier que le conflit déplace de drames en drames.
Pour évoquer tous ces aspects linguistiques minorés mais capitaux de la Seconde Guerre Mondiale, le CIRDOC - Institut occitan de cultura a réuni Philippe Martel, Cécile Noilhan, Jean-Michel Lahieyte et Yan Lespoux pour revenir sur les douleurs de la Guerre et de l'Occupation, à travers les portraits de figures de l'occitanisme ou d'occitans ordinaires.
Ces conférences ont été organisées dans le cadre de l'Année Jean Moulin en 2023, lancée par la Commune de Béziers pour commémorer le 80e anniversaire de l'arrestation de Jean Moulin, originaire de cette ville.