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Livre de prières à l'usage des Augustins de Brignoles

Contenu

Recueil de prières manuscrit à l'usage de la communauté des Grands Augustins de Brignoles de la main du frère Augustinus Perrone (signé f. 83). Il contient un calendrier et des prières en latin, en occitan provençal, en italien ainsi qu'un court texte – sans doute postérieur – en français. La dédicace en provençal au roi de France et aux citoyens de la ville de Brignoles (f. 25v) pourrait être un élément de datation (postérieur à 1480, mort du dernier comte de Provence).

Description physique

Reliure moderne, pleine basane, dos à trois nerfs fermeture à lacets, triple filets et petits fers à froid sur les plats, imitation des reliures estampées du XVe siècle.. 86 feuillets reliés. 150 x 205 mm.

Provenance 

Vignette ex-libris (fin du XIXe siècle) : « Maison curiale de Brignoles ».

Collection de Charles Perrat (1899-1976), archiviste paléographe, membre de l’École française de Rome, professeur à l’École des chartes (chaire de paléographie). Il a été archiviste aux Archives nationales, secrétaire de l’École des chartes, chargé de cours à la faculté des Lettres de Paris, professeur à l’École des chartes (chaire d'histoire des institutions politiques, administratives et judiciaires de la France), secrétaire de rédaction de la Revue historique de droit français et étranger.

Modalités d'entrée dans la collection : Achat, Galerie les Enluminures, décembre 2011

Bibliographie

- Brunel, C. Bibliographie des manuscrits littéraires en ancien provençal, Geneva [Slatkine reprints], 1973, n° 250 : “Livre d'oraisons en latin, provençal, italien et français” (Brunel, 1973, p. 72)

- Davies, Peter V. Glanures occitanes recueillies dans trois livres d’heures (fin XIVe s.-XVe s.), Glasgow, University of Glasgow French and German Publications, 1993

- Audisio, G. “Deux réseaux, quatre circuits. Le livre religieux en Provence au XVIe siècle,” dans Le livre religieux et ses pratiques : études sur l'histoire du livre religieux en Allemagne et en France à l'époque moderne, Göttingen, 1991, pp. 95-109

- Reboul Gabriel, Essai historique sur la ville de Brignoles : d'après les notes de M. Émilien Lebrun, Marseille, Impr. Marseillaise, 1897

- Archives départementales du Var, inventaire dactylographié, sous-série 5H : Clergé avant 1789, « Augustins de Brignoles ».


- Martignoni, Alice. "Un cas de plurilinguisme in Provence au début de l'époque moderne. Étude, analyse linguistique et édition critique du 'Laudario de Brignoles' et d'autres textes dévotionnels en occitan dans le ms. 913 du CIRdOC (Béziers)". Thèses en préparation à l'Université Paris sciences et lettres en cotutelle avec École Pratique des Hautes Études , dans le cadre de École doctorale de l'École pratique des hautes études (Paris), en partenariat avec Savoirs et pratiques du moyen-âge au XIXème siècle (laboratoire) et de École pratique des hautes études (Paris) (établissement opérateur d'inscription) depuis le 01-09-2017

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Auger Gaillard, poète occitan de la Renaissance
S’appuyant sur l’édition d’Ernest Nègre (Auger Gaillard : Œuvres complètes. Paris : PUF, 1970), ce site personnel, réalisé par Jean-Marc Razimbaud, permet de découvrir la vie et l’œuvre d’un poète occitan singulier, Auger Gaillard (v. 1530-1595), charron de Rabastens (Tarn), ayant participé aux guerres de Religion comme soldat.

Le site contient également un choix de textes occitans d’Auger Gaillard avec la traduction française.

Aller sur le site : http://auger-gaillard.com

Auger Gaillard, site internet sur le poète occitan de la Renaissance


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Chabaud, Silvan
Louis Bellaud (1543 ?-1588), Bellaud de la Bellaudière de son nom littéraire, est un poète provençal du XVIe siècle. Il est l’auteur de trois ensembles poétiques en langue d’oc : les Òbras e Rimas (Sonnets et autres rimes de la prison), Lo Don-Don Infernal et Los Passatemps. Bellaud est considéré comme le maître du sonnet en occitan : la forme et le rythme particuliers de ces petits poèmes hérités de la Renaissance italienne et, plus loin, des troubadours, firent des merveilles sous sa plume.

Des ombres de la prison à la douceur de l'instant


Né à Grasse (06), le poète a surtout vécu entre Avignon et Aix-en-Provence (Arles, Carpentras également) où il a côtoyé la bonne société provençale (noblesse, bourgeoisie, avocats) ; mais les troubles de son siècle l’ont conduit à s’engager dans l’armée et ses mésaventures de soldat en errance l’ont mené en prison, à Moulins (dans l’actuel Allier).

Ses textes sont marqués et blessés par l’expérience carcérale qui répand ses ombres derrière ses poèmes. Bellaud a cependant su chanter la douceur de l’instant, les plaisirs d’être en bonne compagnie et nous livrer un témoignage vivant de la Provence barroque.

Poète de la modernité


Nourri de littérature à la mode de son époque (Ronsard, Du Bellay, Magny etc.), Bellaud fit de la langue d’oc une langue de création moderne. Il est le premier acteur d’une Renaissance occitane.

Il fut aussi poète en provençal à la cour du gouverneur de Provence, Henri d’Angoulême, où il croisa Malherbes ou encore Louis Galaup de Chasteuil. Il en vécut difficilement, mais il vécut de sa plume, et il ouvrit les portes pour toute une génération d’écrivains provençaux.

Aujourd’hui, il est encore une source d’inspiration et une référence majeure : la richesse et la beauté de sa langue, mise au service de la musique des sonnets, continuent de fasciner les chercheurs et les auteurs contemporains.


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Les Poésies gasconnes de Pey de Garros
CIRDOC - Institut occitan de cultura

Résumé

La poésie de Pey de Garros, est une poésie bucolique écrite dans une langue populaire riche, vigoureuse et naturelle. C’est une des premières œuvres occitanes du XVIe siècle qui revendique sa filiation avec les écrits des troubadours et « tente de poser l’existence d’une langue et d’une nation gasconne ».

Titre original complet

Poesias gasconas de Pey de Garros Laytorès dedicadas a magniphic e poderos princep le Princep de Navarra son seño

Exemplaires conservés

Albi BM - Rochegude 2436

Paris BnF - 16- YE- 1797

Paris BnF - RES- YE- 863

Paris B Mazarine - 4° 10917 O [Res]

Toulouse BU Arsenal - Resp 35293

Versailles BM - Goujet 23 4°

Londres BL -  241.l.14

Note de contenu

La poésie de revendication s’affiche aux premières pages de l’ouvrage dans l’avis au lecteur où l’auteur expose sa défense de la langue gasconne, seul passage en français de l’ouvrage.

Note d’étude

Pey de Garros, publie les Poesias gasconas en 1567, après ses Psaumes de David viratz en rhythme gascon publiés à Toulouse deux ans plus tôt. Bien que peu lue, l’œuvre de Garros renouvela profondément la littérature d'Oc au XVIe siècle. Garros est le premier auteur qui, de façon totalement novatrice, assume dans l'expression littéraire les particularités dialectales du gascon dans l'ensemble occitan. Il marque - comme le relève Robert Lafont - dans le devenir occitan, la naissance du gascon écrit. Utilisant dans son œuvre une graphie personnelle qui se situe en rupture avec les anciennes traditions d'écriture des archives, il veut ainsi faire entrer sa langue dans la modernité à l'instar des autres langues européennes. Le but de Garros est de rendre sa dignité à la langue gasconne, lien d'une nation encore à naître.

Non seulement il refuse d'écrire en français, « lengatge hardat » (langage fardé) pour adopter « la lenga de la noiritut » (langue de la nourrice), opposant ainsi le naturel à l'artifice, mais, par son choix des genres poétiques, il se distingue volontairement de la Pléiade française.

Éditions et traductions

Œuvres complètes de Pey de Garros ; [trad. du gascon en français par Alcée Durrieux]. Édition nouvelle. - Auch : G. Foix, 1895 (CAB 784)

Traductions partielles

Les églogues de Pey de Garros ; suivies du Chant nuptial : texte de 1567 avec une traduction, des notes et un glossaire par André Berry,.... Toulouse : É. Privat, 1953. (CAC 801)

Eglògas : poësias gasconas / Pey de Garros Éd. bilingue établie par Jean Penent. - [Toulouse] : Letras d'òc, 2012, Texte original accompagné d'une adaptation en orthographe moderne (gascon), d'une adaptation en occitan languedocien et d'une traduction française. - Bibliogr. p. 269-275 (CAC 9421)

Postérité de l’oeuvre

L’œuvre de Pey de Garros occupe une place éminente et fait de lui un des promoteurs de la renaissance provençale. Il est un des premiers promoteurs de la tradition d’écriture occitane qui s’inspire du modèle antique de Virgile et de sujets bucoliques. Après lui cette voie sera suivie par Larade et Goudelin au XVIIe siècle, l’abbé Favre et Claude Peyrot au XVIIIe siècle et se prolongera jusqu’aux Chansons pastorales de Despourin au XIXe siècle.

Bibliographie

Colloque sur Pey de Garros et la situation culturelle de l'Aquitaine méridionale au XVIème siècle : Auch Lectoure, 15, 16, 17 avril 1965 Institut d'Etudes Occitanes. [Toulouse] : Institut d'Etudes Occitanes, 1968

Pey de Garros : ca 1525-1583 : actes du Colloque de Lectoure, 28, 29 et 30 mai 1981 réunis par Jean Penent ; Centre d'étude de la littérature occitane. - Béziers : Centre International de Documentation Occitane, 1988.

François Pic, « Bibliographie de l’oeuvre imprimée de Pey de Garros » dans : Pey de Garros : ca 1525-1583, Béziers : Centre International de Documentation Occitane, 1988, p. 71-88.

Jean-Yves Casanova, « Entre Gascogne et France : l'idéologie de Pey de Garros dans les Poesias Gasconas de 1567 et l'ethnotypisme linguistique du Faeneste », Albineana, Cahiers d'Aubigné, 1995,  6, p. 289-306.

L'œuvre de Pey de Garros : poète gascon du XVIe siècle André Berry ; éd. établie par Philippe Gardy et Guy Latry. Talence : Presses universitaires de Bordeaux, 1998.

Ressources numériques

Exemplaire Bibliothèque de Toulouse (Arsenal) 1567

Exemplaire BnF Gallica (1567)

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Édition des œuvres poétiques de Robert Ruffi par Jean-Yves Casanova
Casanova, Joan-Ives (1957-....)

Avec cette nouvelle édition critique Jean-Yves Casanova a voulu rendre hommage à Robert Ruffi, homme de lettres marseillais de la fin du XVIe et du début du XVIIe siècle, dont les importants travaux historiques, presque ignorés, et les écrits poétiques n’ont pas reçu la reconnaissance qu’ils méritent. Ses œuvres littéraires ne firent pas l’objet d’une publication spécifique de son vivant, mais deux de ses sonnets apparaissent toutefois dans les pièces liminaires de l’édition des Obros e Rimos de Bellaud de la Bellaudière en 1595. Robert Ruffi ayant laissé deux manuscrits inédits, l’un poétique, l’autre historique1, Jean-Yves Casanova a choisi d’éditer ici les œuvres poétiques. Celles-ci avaient déjà fait l’objet d’une édition en 1894, mais qui n’était que partielle et appelait donc un travail d'édition critique.

Une version abrégée de cette édition est parue sous le titre Contradiccions d’Amor en 2000 aux éditions Atlantica à Biarritz.

À propos de l'éditeur

Jean-Yves Casanova est Professeur à l’Université de Pau et des pays de l’Adour depuis 1996 et spécialiste de la poésie baroque occitane. Il est l’auteur d’études de référence sur des auteurs comme Jean de Nostredame (1507?-1577), Bellaud de la Bellaudière (1533?-1588) ou encore Robert Ruffi (1542-1634).
Il est également l’un des plus grands spécialistes contemporains de l’œuvre d’auteurs comme Victor Gélu et Frédéric Mistral2.
Jean-Yves Casanova a également été président du Pen-Club de Langue d’Oc.

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1. Conservés au Musée Paul Arbaud, les deux manuscrits sont respectivement côtés MQ111 et MQ112.

2. Voir son ouvrage L’Enfant, la mort et les rêves. Trabucaire, Perpignan, 2004, 418 pp

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CIRDÒC-Mediatèca occitana
Olivier Lamarque
Le Ramelet moundi, « Le Bouquet toulousain », est l’œuvre de Pèire Godolin (Pierre Goudelin en français), poète occitan qui connut un extraordinaire succès populaire aux XVIIe et XVIIIe siècles.

Les débuts d'un poète populaire


C’est à Toulouse, en 1580, que naît Pèire Godolin (prononcé « Pèyré Goudouli ») d’un père chirurgien. Il fait des études de droit et devient avocat, un métier qu’il n’exercera jamais. On découvre pour la première fois le poète en 1609 lorsqu'il gagne un prix pour une de ses poésies en français au concours de poésie des Jeux floraux. Mais dès 1610, Godolin choisit d’écrire en occitan et publie A l’hurouso memorio d’Henric le Gran, à l’occasio de l’assassinat d’Henri IV par Ravaillac. C’est en 1617 que paraît le Ramelet moundi* (Ramelet mondin : Bouquet toulousain), un livre qui connaît un grand succès : en 1647, il est édité pour la troisième fois ! On publie même un dictionnaire occitan-français pour que les gens qui ne connaissent pas bien l’occitan puisse comprendre les œuvres du poète.

* « Mondin » ou « ramondin » veut dire « toulousain » en occitan. Toulouse est en effet la ville des comtes Raymond.

La langue noble de la rue

Comme l’indique son titre, le Ramelet moundi se veut un bouquet de fleurs (poétiques) toulousaines, c'est-à-dire en langue toulousaine, ainsi magnifiée en « langue des comtes Raimond », les comtes de Toulouse au Moyen Âge, d'où l'invention du terme « moundi », que l'on pourrait traduire par « raimondin ». En déclin depuis le XVIe siècle, la langue occitane vit alors la rude concurrence de la langue française, langue du roi. Entreprenant une véritable renaissance des lettres occitanes, Godolin anoblit ainsi la langue des rues de Toulouse sans craindre l'effet burlesque que l'on retrouve par ailleurs dans ses sujets d'inspiration, du répertoire carnavalesque aux chansons à boire, et qui contribuèrent à l'extraordinaire succès populaire de son œuvre.

Après sa mort, son œuvre continuera d’être publiée tout au long du XVIIe et du XVIIIe siècle, laissant une abondante production imprimée qui participa à la renaissance toulousaine des lettres occitanes.
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CIRDÒC-Mediatèca occitana


Henri IV de France et de Navarre est entré dans l'histoire comme « le Bon roi Henri » ou « le Béarnais» , deux surnoms qui témoignent de la légende qui s'est emparée très tôt de la figure d’un roi au destin peu commun. D’abord roi de Navarre et chef du parti protestant contre la dynastie des Valois, il devient roi de France catholique en 1589.

Naissance d'un symbole

Henri de Navarre est l’héritier d’un royaume qui mène une importante politique d’indépendance vis-à-vis de l’Espagne et la France. Sa naissance en 1553 est mise en scène par son grand-père, le roi Henri II d'Albret, comme un acte d'affirmation de la souveraineté et des spécificités de son royaume vis-à-vis de ses encombrants voisins. Dans un château de Pau paré pour l'occasion des plus riches tentures aux couleurs des Béarn-Navarre, Jeanne d'Albret met au monde le jeune prince sur l'air de Nouste dame deu cap deu poun (vieille chanson béarnaise).

Henri, devenu roi de Navarre et chef du parti protestant, comprend lui aussi très tôt le sens des symboles. Pour construire sa légende, il reçoit la contribution des écrivains de la renaissance littéraire gasconne initiée par sa mère Jeanne d'Albret, dont le plus important, le très « patriotique » Pey de Garros, compose ainsi des Poesias gasconas où il contribue à la création du mythe du « bon roi Henri »... de Navarre.

Un Gascon à la Cour de France

Mais alors que catholiques et protestants se déchirent au cours des Guerres de Religion, son accent et ses manières d'homme élevé « à la béarnaise » vont être tournés en ridicule par le Parti catholique et royal. C’est la naissance du personnage du « Gascon » et du genre de la « gasconnade », qui perdureront dans le comique français jusque tard au XVIIe siècle. Ce personnage du Gascon fanfaron et beau-parleur va même renaître à la fin du XIXe siècle avec Cyrano de Bergerac d’Edmond Rostand.

L'héritage béarnais d'Henri IV aura ainsi deux facettes du vivant du roi. Mais sa mort soudaine et violente en 1610 va faire des sujets de moquerie d'hier les symboles d'un roi simple et proche de son peuple. Le motif du Gascon s'inverse lorsque, en 1611, l’écrivain Guillaume Ader crée l’idéal Gascon avec un chef-d’oeuvre de la littérature occitane, Lo Gentilome Gascon. Son héros, Henric Gascoun, se confond avec Henri IV ainsi décrit en conquérant flamboyant, glorieux chef de guerre.

« Notre Bon roi Henri »

Dès lors, Henri IV sera le « Bon roi Henri », le Béarnais, une figure positive tour à tour utilisée par les différents camps, tant royalistes que révolutionnaires, encyclopédistes...

Pourtant, si Henri maintient de son vivant la souveraineté politique (les États de Béarn), juridique (Fors et coutumes) et même linguistique (Henri IV ne s'adresse à ses sujets béarnais qu’en occitan) de ses États,  le roi de France n’en sera pas moins le grand continuateur de la marche vers l’absolutisme et le centralisme, dont la langue unique ne peut être que la langue historique des rois de France et de leur domaine, le français.
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Los psalmes de David metuts en rima bearnesa d'Arnaud de Salette (1583)
Salette, Arnaud de (15..-15..)
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Les joyeuses recherches de la langue tolosaine (1578)
Odde de Triors, Claude

Claude Odde de Triors n’est pas toulousain mais originaire du Dauphiné, ce qui explique sans doute sa curiosité « joyeuse » et presque anthropologique avant la lettre pour le parler des Toulousaines et des Toulousains auquel il est immanquablement confronté comme étudiant dans la capitale du Languedoc.  

Le contenu

Le petit ouvrage que publie Odde de Triors est un livre intéressant à plus d’un titre. Sur le plan linguistique, il fournit une compilation de mots et expressions, de scènes de vie qui nous laisse entrevoir la vie populaire toulousaine au XVIe siècle. Il offre également un inventaire très complet de la production littéraire toulousaine de son époque. 

Les Joyeuses recherches de la langue toulousaine apparaît comme un projet encyclopédique sur la langue populaire, emporté dans un style joyeux qui révèle un lecteur attentif de Rabelais. Odde de Triors recueille des mots, des dictons, des sobriquets dans le parler vivant du peuple, il les définit et les commente, en les surchargeant des gloses fantaisistes à la manière d’un traité faussement docte. Il mêle l’occitan, le français et le latin pour provoquer un jeu de registres destiné à faire rire. 

L’édition

On ne trouve ni nom d’auteur ni d’imprimeur sur ce recueil qui ressemble à une édition clandestine. C’est la longue Epître liminaire placée en tête du livret qui nous donne la date de publication. Le nom de l’auteur nous est révélé par ses amis qui lui adressent des vers à la louange de son œuvre.  Le fleuron de la page de titre permet d’attribuer l’impression à l’imprimeur toulousain Jacques Colomiez. Les relieurs Chambolle-Duru de la 2e moitié du XIXe siècle reprennent ce fleuron sur la reliure de cet exemplaire issu des collections du CIRDOC-Mediatèca occitana (CR-A-8137).

 

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La requeste faicte et baillée par les dames de la Ville de Tolose (1555)
CIRDOC - Institut occitan de cultura

Résumé

La Requeste faicte et baillée par les dames de Toulouse est une des œuvres les plus curieuses de l’imprimé occitan du XVIe siècle, connue par un seul exemplaire conservé. L’ouvrage contient vingt-et-une courtes pièces poétiques en occitan et en français, qui s’inscrivent dans la longue « querelle des femmes » qui anima la première moitié du XVIe siècle en France

Titre original complet

La Requeste faicte & baillée par les Dames de la Ville de Tolose. Aux messieurs maistres & mainteneurs de la gaye scie[n]ce de Rhethorique, au moys de May,...

La Requeste faicte et baillée par les Dames de la Ville de Tolose. Aux messieurs maistres et mainteneurs de la gaye science de Rhethorique, au moys de May, Auquel moys par lesdits seigneurs se adjugent les Fleurs D’or et d’Argent, aux mieux disans, tendent affin qu’elles feussent receues a gaigner ledit Pris. Avec plusieurs sortes de Rithmes en divers lengaiges et sur divers propos, par lesdites Dames de Tolose composées. Ensemble une Epistre en Rithme aussi par icelles faicte et envoyée aux Dames de Paris. Le premier jour de May.

Exemplaires conservés

Le seul exemplaire connu est conservé par la Bibliothèque municipale de Toulouse et provient d’une collection privée (Jean Faure, Toulouse). Il y aurait eu 2 éditions antérieures de l’ouvrage dont celle de 1555 est la seul rescapée (François Pic).

Manuscrit

« La requeste faicte et baillée par les dames de la ville de Tolose aux messieurs maistres et mainteneurs de la gaye science de rhethorique... Imprimé à Tolose, par J. Colomies, 1555 »
Copie manuscrite du XIXe siècle des trois premières pages du recueil  [fol. 166 (17) au fol. 168 (21)]
BU Arsenal Droit lettres Toulouse, Ms 216, fol. 166 (SICD)
 
Ressource numérique
http://www.purl.org/occitanica/4305
images 303-305

Possesseurs

1828 - Payne (vente Londres)
1850 - Potier (libraire)
1850 - Tibulle Desbarreaux-Bernard (Toulouse) [ex libris n°2743]
1945 - B. Galanti (bibliophile)
1997 - Patrick Sourget (libraire Chartres)
2002 - Jean Faure (Toulouse)
2004 - Bibliothèque municipale de Toulouse [Res. D XVI 1205 (3)]

Note de contenu

Le texte de La Requeste met en scène la demande de participation des dames de Toulouse au concours annuel de poésie organisé par le Collège de Rhétorique de la ville (la requête est donnée en première position), en même temps qu’un florilège de pièces censées témoigner de leurs talents.
Au delà du ton « féministe » de quelques textes, les autres relèvent de la satire comique dans lesquels les « dames » signent portraits et contre-portraits des défauts et vices féminins, devenus clichés dans une abondante littérature misogyne de la première moitié du XVIe siècle (controverse connue sus le nom de « Querelle des femmes »).
Le recueil compte 9 pièces en français et 12 en occitan (10 en « lengaige Tolosain », une en « gavatch » et une en « gascon ») : orchestrent l’« effet de polyphonie d’une école poétique en deux idiomes » (Courouau, Gardy).
 
L’ouvrage s’inscrit dans un corpus occitan toulousain dans lequel on relève Las Nomparelhas receptas… et Las Ordonansas et Coustumas del Libre Blanc, œuvres « d’une écriture tout à la fois conforme à l’efflorescence littéraire renaissante française et qui s’en différencie cependant. Les voix féminines, le contrepoint linguistique, sont pour les auteurs autant d’effets de miroir inversé, d’éléments de carnavalisation » (Escudé).

La question des auteur(e)s

La Requeste est une œuvre collective réunissant les pièces  signées de 16 noms féminins (Gabrielle Brunete, Marguerite de bon vouloir, Catherine Fontaine, Françoise Marrie, Glaude Ligoune, Esclarmonde Espinette, Magdaleine princesse, Marie de hault pris, Mondina de Lenvege, Johana Perla, Dona Prouzina Belvengua, Anthonia I., Guillaume Finoy, Andieta Pechayre, Bernarde deu Pin) ou de l’ensemble de leur groupe (les dames de Toulouse) et d’un seul auteur masculin Pierre Trassebot. La Requeste alimentera l’idée mythique d’une « Pléiade toulousaine féminine » construite par Alexandre Du Mège, qui sera réfutée en 1853 par Jean-Baptiste Noulet.

De la controverse des sexes à la controverse des langues

Les objectifs ludiques et polémiques de la guerre des sexes sont doublées par la question linguistique de ce recueil plurilingue : l’occitan domine numériquement, tout en démontrant sa variété face au monolithisme du français. Le dernier poème, le plus long du recueil, prend des accents de manifeste linguistique. Il met en scène les dames toulousaines prenant la parole collectivement pour rédiger une « Epistre en lengaige Tolosain, faicte et composée par les Dames de Tolose, responcive à celle que les Dames de Paris leur avoyent envoyée » dans laquelle elles affirment leur droit à s’exprimer « en nostre bel lengatge » tandis qu’elles moquent l’accent des Parisiennes « car en parlan, semble que machetz Fresas » (car en parlant, il semble que vous mâchiez des fèves) = à l’heure où l’occitan se perd dans les élites, la fiction de l’écriture féminine leur permet d’exprimer sous forme de canular leur nostalgie pour une langue qui n’était pas moins capable que le français d’exprimer les beautés de la poésie.

Édition originale

La Requeste faicte & baillée par les Dames de la Ville de Tolose. Aux messieurs maistres & mainteneurs de la gaye science de Rhethorique, au moys de May,...
Tolosa : Jac. Colomies, 1555, 16 f. (sig. A1-B8) ; 8
[Res. D XVI 1205 (3)]

Le seul exemplaire connu est relié avec :

Las Ordenansas & Coustumas del Libre Blanc, observadas de tota ancianetat, compausadas per las sabias femnas de Tolosa. Et registradas en forma deguda per lor secretary.
Tolosa : Jac. Colomies, 1555, 16 f. (sig. A1-B8) ; 8
[Res. D XVI 1205 (1)]
 
Las nompareilhas Receptas, per fa las Femnas tindentas, rizentas, plasentas, polidas, & bellas. Et aussi per las fa pla cantar, & caminar honestament, & per compas,... Ensemble une Requesta de l'Actor a lencontra de lasditas Femnas.
Tolose : Guyon Boudeville, 1555, 8 f. (sig. A1-B4) ; 4
[Res. D XVI 1205 (2)].

Publication d’extraits commentés

Jean-Baptiste Noulet, De la Prétendue pléiade toulousaine, ou Réfutation de ce qui a été récemment imaginé dans le but d'établir l'existence d'une société littéraire de dames, à Toulouse, au XVIe siècle, Toulouse : impr. de J.-M. Douladoure, 1853.

Édition critique moderne avec traduction et bibliographie

La requeste faicte et baillée par les dames de la ville de Tolose (1555) : textes français et occitans / éd. critique établie par Jean-François Courouau et Philippe Gardy. Toulouse : Presses universitaires du Mirail, 2003.

Postérité

La Requeste et ses œuvres-sœurs constituent les seules oeuvres de création littéraire en occitan de la première moitié du XVIe siècle. Á la fois œuvre en miroir, et œuvre carnavalesque, La Requeste ouvre toutefois le possible d’une renaissance occitane en démontrant que la langue des Toulousains, que les élites abandonnent au même moment, est autant capable d’expression poétique que le français. Toulouse sera un des principaux foyer de cette renaissance avec Pey de Garros puis avec Godolin, stoppée pour un temps par la parenthèse ligueuse.  
La Requeste est « une pierre d’importance dans la compréhension du monde humaniste à Toulouse.
Longtemps introuvable, la Requeste pourra sans nul doute reprendre une place majeure dans l’architecture des tensions de langue, de comportement, d’idées, qui ont fait de Toulouse au milieu du XVIe siècle un lieu capital de l’Europe moderne ». (Pierre Escudé).

Bibliographie

Alexandre Du Mège, « Le Palais de Bernuy ou le Collège Royal de Toulouse », Mémoires de la Société archéologique du Midi de la France, III, 1836-1837, p. 10-15.
 
Jean-Baptiste Noulet, De la Prétendue pléiade toulousaine, ou Réfutation de ce qui a été récemment imaginé dans le but d'établir l'existence d'une société littéraire de dames, à Toulouse, au XVIe siècle, Toulouse : impr. de J.-M. Douladoure, 1853. (Extrait des Mémoires de l'Académie impériale des sciences, inscriptions et belles-lettres de Toulouse).

François Pic, « Ourdenansas et coustumas del Libre Blanc, Nompareilhas receptas..., Requeste faicte et baillée par les Dames de la Ville de Tolose : les tribulations de trois textes toulousains du XVIe siècle ou un cas notoire d'inaccessibilité de la littérature occitane moderne » dans : Études romanes dédiées à la mémoire de Jacques Boisgontier, Montpellier, extrait de la Revue des Langues Romanes, 2000 p. 117-145.

Pierre Escudé, « Redécouverte d’un texte majeur de la Renaissance toulousaine », Annales du Midi, 2004, 116, p. 4000-402,
En ligne
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/anami_0003-4398_2004_num_116_247_2865_t1_0400_0000_2


Ressource numérique
http://numerique.bibliotheque.toulouse.fr/ark:/74899/B315556101_RD16_001205_003

 


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