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CIRDOC_CBC-0767_p61-70.pdf
Rapport de recherche : Minorités nationales, culture et décentralisation : le cas occitan (1983)
Coulon, Christian
Morin, Françoise
Bien connue aujourd'hui, la crise dans laquelle entre le mouvement occitan et plus largement la dynamique de revendication régionaliste au début des années 1980 est observée dès 1983 par deux chercheurs en sciences sociales : Françoise Morin (Université de Toulouse-Le Mirail) et Christian Coulon (CNRS, Bordeaux). 

Ce rapport est la relation d'une communication faite au colloque qui s'est tenu les 4 et 5 décembre 1983 au Centre Thomas-More à Lyon sur la problématique des « minorités nationales » dans le nouveau contexte politique de la gauche au pouvoir : 
« Jusqu'en mai 1981, l'État français est resté sourd à ces revendications. En se présentant aux élections avec, dans ses bagages, la reconnaissance des « peuples minoritaires » de France et de leur « droit à la différence », le Parti Socialiste transgressait en quelque sorte toute une série de règles et de principes qui ont modelé l'État-Nation à la française. Après deux ans de gouvernement, si le programme socialiste de « la France au Pluriel » est loin d'être appliqué dans sa globalité, des ouvertures ont néanmoins eu lieu (...) Or, paradoxalement, au moment où les acteurs de ces cultures minoritaires devraient s'emparer de ces ouvertures pour développer une dynamique de conscientisation, on constate un certain immobilisme de ces mouvements (excepté en Corse). »

Il a été publié dans Recherches et documents du Centre Thomas More, n° 48, décembre 1985.
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Esòp
Dalharí, Jan. Trad.
De nombreuses fables d’Ésope, le fondateur mythique du genre littéraire, sont parvenues jusqu’à nous. Les enseignements du fabuliste grec de l’Antiquité ont gardé toute leur vivacité et leur mordant grâce à leur écriture dense et piquante. C’est un choix de 70 fables qui est ici présenté : s’y croisent lion amoureux, agneaux craintifs, singe rêvant d’être roi, grenouilles envieuses, héron ou fourmis, devins, bergers, et dieux…
Adaptation gasconne de Jan Dalharí, accompagnée d’un lexique occitan-français.
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La latinité du XXIe siècle (article de Robert Lafont)
Lafont, Robert (1923-2009)
Dans cet article, contribution à l’ouvrage Calandreta, 30 ans de creacions pedagogicas, Robert Lafont interroge le concept de latinité. Si cette notion a pu être utilisée à des fins nationalistes, Robert Lafont rappelle à quel point il est artificiel de dualiser le monde culturel germanique du monde culturel latin. Pour lui, c’est vers une nouvelle Europe, ouverte à la latinité sous toutes ses formes, que s’achemine la nouvelle génération sortie des écoles Calandreta.
Occitania Libertaria
Peiregòrd es pas a vendre : la contestation face aux promoteurs immobiliers
Escarpit, David
Bertrand, Aurélien

Les années 1970 sont marquées par la contestation sociale et économique d’un certain modèle de l’état. De 1968 et la contestation de la France gaulliste aux chocs pétroliers et ses conséquences économiques et sociales, la période est un foisonnement de mouvements contestataires, alternatifs, à travers toute l’Europe, parfois favorables à l’usage de la violence.
Dans les pays d’Oc, cette période correspond au fameux borbolh créatif et idéologique qui voit la naissance de la Nouvelle chanson occitane, mais aussi la théorisation de certains concepts comme le Colonialisme intérieur, un des thèmes développés par Robert Lafont et largement repris par de nombreux théoriciens de la pensée occitane.

L’idée que dans le contexte étatique français, les pays d’Oc soient traités comme des pays colonisés - en plus de ce que l’on peut considérer comme une colonisation culturelle - sur le plan du développement économique, se répand. La stratégie économique des pays du Midi serait limitée à en faire des nids à touristes, envahis par l’industrie hôtelière et les promoteurs immobiliers, servant de jardin à Paris et sa banlieue. Des pays sans économie propre - détruite par les politiques agricoles françaises - tout juste bons à être placés sous tutelle.

Cette idée, associée à un contexte d’intense militantisme occitan, donne naissance à des comités d’action, des groupes de petite taille décidés à passer à la vitesse supérieure dans leur quête de reconnaissance de l’identité occitane, quitte à envisager l’action directe et le recours à la force.

Deux régions sont particulièrement touchées par ce phénomène. Le Languedoc, en proie à la crise viticole et possédant une tradition « rouge » de contestation sociale et le Périgord, pays hautement touristique. Tous deux se sentent dépossédés de leur patrimoine. Dans une moindre mesure Bordeaux, base arrière des groupes occitanistes, recrute beaucoup dans les milieux associatifs occitans et universitaires. Le Périgord notamment fait partie des régions occitanes où la langue et la culture sont demeurées vivantes, avec un Félibrige actif sans être politisé et une vie musicale et poétique occitane intense.

C’est dans ce contexte qu’apparaît le Comité d’Action Sarladais (CAS), autour de slogans comme « Le capital croque le Périgord » ou « Lo Perigòrd es pas a vendre » (le Périgord n’est pas à vendre). Ce dernier fait référence au rachat de fermes abandonnées et de terres par de riches « colons » empêchant l’installation de jeunes agriculteurs. On recense aussi l’utilisation plus marginale du slogan « Lo vent a bufat, l’Estat a pas paiat » (le vent a soufflé, l’État n’a pas payé) qui fait référence à une tempête ayant saccagé des noyers et aux promesses d’indemnisations des agriculteurs non tenues. De petits groupuscules fleurissent : outre le CAS apparaît également le « Front de Liberacion de la Val de Dròpt », tous deux tentés par l’action directe et les opérations coup de poing. Au sein de ces groupes, chaque membre ne connaît qu’une partie des autres membres, la clandestinité est de règle. Ils seront bientôt réunis dans la mouvance de « Volèm Viure Al País », qui prône alors l’action directe et une certaine forme de violence, en particulier dans le Sarladais et du côté de Sainte-Foy-la-Grande, avec des ramifications à Bordeaux, en Lot-et-Garonne et en Sud-Gironde. Il existe aussi un « Moviment Anarquista Occitan » (mouvement anarchiste occitan) en particulier en Périgord. Quelques petits journaux satiriques occitans sont également imprimés, comme Lo Pelharòt à Bergerac.

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1962 : les écrivains occitans s'engagent contre le « colonialisme intérieur »
Manifeste publié dans Los carbonièrs de La Sala, Vent terral, 1975, pp. 155-156 . La version présentée est la version manuscrite d’Yves Rouquette.
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De la RCP 323 en Pays de Sault au GARAE : pour une anthropologie autochtone en pays d’Oc
Dans le domaine des sciences sociales, les années 1960-1970 sont marquées par les « Recherches coopératives sur programme » (RCP), vastes enquêtes pluridisciplinaires qui se sont souvent avérées comme de véritables aventures collectives aux répercussions importantes sur les terrains étudiés.
De 1973 à 1978, sous la direction de l'archéologue Jean Guilaine, alors enseignant-chercheur à l’Université Paul-Sabatier de Toulouse, une RCP est menée dans le Pays de Sault (Pyrénées audoises). Par son importance pour la connaissance et la valorisation de la langue et des cultures de tradition orale, la RCP 323 apparaît comme le versant scientifique du grand mouvement de renouveau revendicatif et culturel qui emporte alors l’espace occitan autour de la dénonciation du « colonialisme intérieur » et la revendication au « Volèm viure al país ». Elle sera à l’origine de la création d’une institution, le GARAE, à Carcassonne.
Image : Daniel Fabre enregistre le conteur Pierre Pous, Bessède-de-Sault (Aude), 1973. Photo Jean-Pierre Piniès.

Les RCP et une nouvelle approche des sociétés locales dans les années 1960-1970

Ces programmes de recherche fondés sur le décloisonnement des disciplines et des approches, permettent d’embrasser une société comme un tout, quel que soit l’échelle du terrain étudié. La RCP consacré à Plozévet, petite commune de Bretagne entre 1961 et 1965, choisi pour sa situation d’isolat de « culture rurale intacte » fut déterminante pour l’évolution des sciences sociales en France et demeure une référence.
Côté occitan, c’est le pays de Sault qui devient le terrain d’une vaste enquête pluridisciplinaire conduite par Daniel Fabre dans le contexte du renouveau culturel occitan et du développement des revendications régionalistes. Daniel Fabre est d’ailleurs proche du mouvement occitan, en participant aux Universités occitanes d’été de Robert Lafont, penseur du concept de colonialisme intérieur et leader d’organisations militantes (IEO, COEA), et en publiant quelques textes articulant évolution des sciences sociales et problématiques occitanes.
La RCP 323, loin de constituer une seule affaire scientifique, est menée comme un des versants du mouvement qui marque l’action et la pensée occitane des années 1960 à l’orée des années 1980 autour d’un concept-phare : la lutte contre le colonialisme intérieur.

Une enquête anthropologique dans un contexte de “décolonisation” de l'Occitanie

La RCP 323 porte sur « l’Anthropologie et l’écologie pyrénéennes ». Daniel Fabre dirige l’équipe en pays de Sault, déterminé comme zone-pilote, de 1973 à 1978. Cette recherche collective et pluridisciplinaire engagea plusieurs jeunes ethnologues du Centre d’anthropologie des sociétés rurales de Toulouse dirigé par Daniel Fabre et Jean Guilaine et formera les bases de ce que certains appelleront l’école toulousaine. L’enquête en pays de Sault mobilisa jusqu’à 25 membres sur un total de 60 qui s’attachèrent à la RCP 323 sur les Pyrénées.

Dans les années 1970 l’anthropologie culturelle et sociale ne constituait par à l’université de Toulouse un cursus autonome. Elle était au carrefour de l’anthropologie biologique, de la dialectologie et des études occitanes. Aux côtés de l’Institut pyrénéen d’études anthropologiques, c’est via le vénérable Institut d’études méridionales que le lien de la nouvelle génération d’ethnologues et anthropologues avec la question linguistique et culturelle portée par l’occitanisme va se produire. Au sein de l’Institut d’études méridionales, Jean Séguy assure les cours de langue et l’écrivain René Nelli assure des cours réputés « inclassables » d’ethnologie méridionale.
Plus globalement, « le mouvement occitan de revendication identitaire, de défense de la langue et de la culture occitanes, qui se cristallise dans les années 1960 et gagne en puissance après Mai 68, imprègne les prises de position de Daniel Fabre et d’autres collègues ethnologues contre le colonialisme de l’intérieur, contre cet ethnocide (la référence à Jaulin est assumée) dont se serait rendu coupable un État français centralisateur, destructeur des particularismes locaux et des minorités nationales. » (Christine Laurière, La RCP 323 : une aventure collective en pays de Sault. ethnographiques.org, 32 - septembre 2016)

La RCP 323 est donc conduite par des personnalités engagées dans le mouvement occitaniste de façon conscientes et assumées. Dans un article paru en 1972 (Annales de l’Institut d’estudis occitans) Daniel Fabre et Jacques Lacroix appelaient déjà à un programme de « décolonisation de l’anthropologie ». Non seulement ces anthropologues carcassonnais revendiquent leur qualité « d'indigènes », plaident pour une « anthropologie autochtone », corollaire régional pour une décolonisation de l'anthropologie, mais ils ne dédaignent pas mettre en cause eux aussi le colonialisme intérieur, l’aliénation linguistique, l’ethnocide culturel. Au cours de la décennie 1970, marquée en Occitanie par un grand mouvement de renouveau créatif et revendicatif et par le succès des revendications et d’organisations prenant de plus en plus part à la vie politique régionale et nationale, des ethnologues autour de Daniel Fabre et Jacques Lacroix vont articuler les grandes thématiques de l’époque (colonialisme intérieur, révolution régionaliste, décentralisation, etc.) à leur discipline :
- 1972, « Pour une anthropologie occitane. Propositions pour la décolonisation de l’anthropologie », Annales de l’Institut d’études occitanes, II (6), p. 71-85 ;
- 1975, « Pour une anthropologie des collectivités rurales occitanes », Communautés du Sud, vol I, Paris, U.G.E. 10/18 ;
- Bidart Pierre, Blanc Dominique, Drulhe Marcel, Fabre Daniel, Holohan Wanda, Lacroix Jacques, Morin Françoise, Rivals Claude, 1977, « L'anthropologie des minorités nationales dans les pays industrialisés », Bulletin du Musée Basque, n° 78, p. 177-190.
- Fabre Daniel, (président et rapporteur), 1978, « Les minorités nationales en pays industrialisés », L'Anthropologie en France. Situation actuelle et avenir, Colloques internationaux du Centre national de la recherche scientifique, n° 573, Paris, CNRS, p. 293-314.
 
Ces ethnologues occupent le terrain de la recherche et produisent des oeuvres dont certaines feront date :
- 1972 Aspects des collectivités rurales en domaine occitan. Etude anthropologique en pays de Sault, Toulouse, Université Paul Sabatier.
- 1973, La Vie quotidienne des paysans du Languedoc au XIXe siècle, Paris, Hachette-Littérature.
- 1974, La tradition orale du conte occitan. Les Pyrénées audoises, T I, Paris, Presses Universitaires de France.
 

Postérité : la naissance du GARAE à Carcassonne

Suite à la RCP 323 qui s’inscrit dans un moment d’engagement pour les ethnologues carcassonnais, dans le nouveau contexte politique et institutionnel de 1981, ils créent le Groupe audois de recherche et d’animation ethnographique (GARAE).
La création du GARAE advient alors même que s'éteignent les échos de cette revendication d'une anthropologie occitane, au même titre que les revendications régionalistes dans le mouvement intellectuel et social.
Jean-Pierre Cavaillé, chercheur toulousain spécialiste de la question occitane contemporaine, impute ce désengagement à l'impossibilité pour l'ethnologie indigène de s'implanter en tant que telle dans les institutions de recherche et plus largement à la stigmatisation encourue par ce type de démarche (et plus encore quand elle est conduite par des amateurs), parce que soupçonnée de servir une conception fermée de l'identité et de prêter le flan à la politisation. Il envisage d'ailleurs la Mission du patrimoine ethnologique, créée à la fin du mandat giscardien en 1980, comme le moyen de tenir le phénomène en respect.
Christiane Amiel, ethnologue et chercheuse au GARAE, met l'abandon de la posture militante des anthropologues carcassonnais sur le compte de l'échec du dialogue avec les occitanistes d'alors, et le présente comme le résultat d'une incompréhension qui a amené les uns à se détourner des autres et réciproquement.

Si le GARAE naît d’un désamarrage de l’ethnologie occitane de l’occitanisme, il se raccroche en revanche à l’héritage carcassonnais en matière d’ethnographie (Groupe d’études régionalistes et de folklore audois créé en 1937 et sa revue, Folklore, active depuis 1938, travaux et enseignement de René Nelli, etc.)
Dans la foulée de création du GARAE est mise sur pied une exposition et  son catalogue paru en 1982, Un demi-siècle d’ethnologie occitane : autour de la revue Folklore, aux éditions du Garae : y sont mis en valeur les travaux que mènent alors les Carcassonnais et en scène leur parenté avec les centres d'intérêt des ethnographes de la génération 1930 (le GAEF, la revue Folklore, etc.).
Quelque chose d'une autre militance, légitimée par les grands ancêtres, est alors en train de s'inventer, de s'expérimenter, qui loin de rompre avec les lieux (qui sont tout à la fois leurs terrains d'enquêtes et le lieu où ils ont choisi de vivre), permet de s'y inscrire et d'y agir autrement.

S’il y a une rupture entre les environnements idéologies et militants de la RCP 323 dans les années 1970 et ceux du GARAE dans les années 1980, la continuité est assurée, autour de Daniel Fabre et d’une nouvelle génération d’ethnologues et d'anthropologues qui continuent à faire évoluer le regard porté, par l'ethnologie du proche, sur les cultures occitanes et autres.

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L'intervention d'Yves Rouquette au Musée Fenaille dans le cadre du festival l'Estivada de Rodez en 2012

Invité en juillet 2012 dans le cadre du festival L'Estivada de Rodez, l'écrivain Yves Rouquette déclame ici plusieurs de ses poèmes et y raconte des anecdotes liées à des rencontres faites tout au long de sa vie, depuis la cours intérieur du Musée Fenaille à Rodez.

Dans une grande solennité, conférent à cet instant une aura toute particulière, l'écrivain y déclame des extraits du Cant dels millenaris et de la suite poétique Diusses primièrs.
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Entretien avec Frank Tenaille, spécialiste des musiques occitanes
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Revolum : à la fois label et revue
En 1974, avec son compagnon Michel Berthoumieux, la chanteuse ariégeoise Rosina de Pèira monte un label afin d'éditer des artistes du renouveau musical populaire et traditionnel occitan. Ce sera Revolum, pour « Renouveau ». Depuis Toulouse, la maison de disque éditera alors
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« L'Immortèla », une chanson devenue hymne

L'Immortèla, une chanson devenue hymne

La chanson De cap tà l'immortèla est l'œuvre la plus connue du groupe béarnais Los de Nadau, devenu Nadau en 1986. Elle fait partie du troisième album du groupe, L'Immortèla, gravé en 1978 chez Ventadorn, le grand label occitan de l'époque. Bien que chanson de création, De cap tà l'immortèla est devenue en seulement une quarantaine d'années, une chanson véritablement populaire dans les pays d'oc, souvent considérée comme traditionnelle.

L'immortèla aborde la question de la démarche de recherche pour retrouver la langue perdue. Elle constitue donc une sorte de contrechant de la chanson contestataire qui s'attaque au système accusé d'avoir détruit cette langue. La langue et ce qui s'y rattache (le pays, la culture perdue) y sont représentés par la métaphore d'une fleur, l'Immortèla, nom occitan de l'edelweiss dans les Pyrénées, plante supposée ne jamais mourir et ne pas craindre le gel et les intempéries, qualités transposées sur la langue qui, bien que maltraitée, ne meurt pas. Le narrateur est représenté comme un chercheur, quelqu'un qui escalade la montagne à la recherche de la langue-fleur. L'accent est davantage mis sur la démarche de quête et les difficultés de cette démarche, que sur la fleur elle-même (la libertat, qu'ei lo camin, la liberté, c'est le chemin) et sur les espoirs toujours renouvelés qui invitent à aller plus loin malgré le découragement (après lo malh un aute malh, après la lutz ua auta lutz, après la montagne, une autre montagne, après la lumière, une autre lumière).

La chanson prend place dans un album globalement bâti sur un ton revendicatif et militant, dans l'esprit général de la Nouvelle chanson occitane des années 1970, dont Los de Nadau fut l'un des groupes emblématiques. Dans ce mouvement artistique et musical, la chanson sert à dénoncer ce qui relève du « colonialisme intérieur », concept popularisé notamment par Robert Lafont et appliqué à l'Occitanie, sur les plans culturel, économique et politique. Le rôle joué par l'école de la République à partir de la fin du XIXe siècle dans la déconstruction à la fois de la compétence linguistique et du patrimoine culturel des populations des pays d'Oc est largement mis en avant, à l'instar de la chanson-titre Mossur lo regent, parue dans le premier album éponyme en 1975. Los de Nadau s'inscrivent pleinement dans ce mouvement jusqu'au début des années 1981, où l'amorce d'une décentralisation ainsi que les évolutions des goûts et des genres amorceront le déclin de ce premier âge de la Nouvelle chanson occitane. Los de Nadau, puis très vite Nadau, connaît de profondes mutations d'effectif, de style et de propos qui accoucheront d'un groupe différent tout en étant la suite du premier. De cap tà l'Immortèla cessera d'être enregistrée au disque, avant de faire son retour au début des années 1990 sur l'enregistrement vidéo Nadau en Companhia, qui capte la prestation du groupe au Zénith de Pau en 1993. La chanson réapparaît sous une forme légèrement différente. Le branle au débit rapide de 1978 s'est ralenti, en même temps qu'il gagnait en solennité. Le chant de marche est devenu un hymne.

L'Immortèla est immédiatement devenue une chanson emblématique du groupe, puis de la musique occitane tout entière, et enfin du mouvement occitaniste qui l'a rapidement assimilée à un « hymne » occitan officieux, aux côtés du Se canta et de la Copa santa, qui possèdent également cette dimension. Échappant à ses auteurs, elle devient une chanson populaire occitane comme si elle avait toujours existé. La chanson est reprise sur plusieurs disques de Nadau à partir des années 1990, et sur tous leurs DVDs. Le groupe l'interprète à chaque concert depuis les années 1990, parfois en fin de soirée, parfois en introduction. Elle constitue à chaque fois un point d'orgue indéniable de la prestation et est reprise en chœur par le public. Elle est également entonnée lors des manifestations occitanistes et autres évènements revendicatifs.

Paroles de la chanson

Sèi un païs e ua flor
(E ua flor, e ua flor)
Que l'aperam la de l'amor
(La de l'amor, la de l'amor)
Haut Peiròt, vam caminar, vam caminar
De cap tà l'immortèla
Haut Peiròt, vam caminar, vam caminar
La païs vam cercar
Au som deu malh, que ia ua lutz
(Que ia ua lutz, que ia ua lutz)
Qu'i cau gurardar los uelhs dessus
(Los uelhs dessus, los uelhs dessus)
Haut Peiròt, vam caminar, vam caminar
De cap tà l'immortèla
Haut Peiròt, vam caminar, vam caminar
La païs vam cercar
Que'ns cau traucar tot lo segàs
(Tot lo segàs, tot lo segàs)
Tà ns'arrapar, sonque las mans
(Sonque las mans, sonque las mans)
Haut Peiròt, vam caminar, vam caminar
De cap tà l'immortèla
Haut Peiròt, vam caminar, vam caminar
La païs vam cercar
Lhèu veiram pas jamei la fin
(Jamei la fin, jamei la fin)
La libertat qu'ei lo camin
(Qu'ei lo camin, qu'ei lo camin)
Après lo malh, un aute malh
(Un aute malh, un aute malh)
Après la lutz, ua auta lutz
(Ua auta lutz, ua auta lutz)
Haut Peiròt, vam caminar, vam caminar
De cap tà l'immortèla
Haut Peiròt, vam caminar, vam caminar
La païs vam cercar

Enregistrements

L'Immortèla, Ventadorn, 1978, sous le titre De cap tà l'Immortèla.

Nadau en companhia, VHS, 1993.

S'aví sabut, CD, 1995.

Nadau en companhia, CD en public au Zénith de Pau, avec chœurs et orchestre 1996.

Nadau a l'Olympia, VHS, 2000.

Nadau en companhia, Hèsta de las Calandretas, zénith de Pau, VHS, 2002.

Nadau a l'Olympia, DVD, 2005.

Nadau, Olympia 2010, DVD et CD, 2010.

Nadau, Zénith de Pau, 2017, DVD et CD, 2017.

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