"Saint Jean ! Saint Jean ! S'écriaient-ils. / San Jan ! Sant Jan Sant Jan ! Cridavon. »
« Toutes les collines étincelaient / Tòuti li colo esbrihaudavon. »
« Comme s'il avait plus des étoiles dans les ombres ! / Coume s'avié plóugu d'estello dins l'oumbrun !"
« Cependant la rafale folle / Enterin la Flamado folo »
« Emportait l'encens des collines / Empourtavo l'encèns di colo »
« Et la rouge lueur des feux / Emé di fiò la rougeirolo »
« Vers la Saint planant dans le bleu crépuscule." / Vers lou Sant, empla dins lou blu calabrun. » Frédéric Mistral, Mireille. Chant VII, 1859.
Dès 1963, cette tradition fut entretenue et vivifiée par le Cercle des Jeunes Gens, instaurant la veillée du feu puis son transport le lendemain jusqu'au Palais des Rois de Majorque, au cours du "Rey del foc" initié par Jean Iglesis.
Le renouveau catalan observé dès les années 1950-1960, se propage progressivement en terres occitanes et tous particulièrement en Provence, deux régions d'ailleurs historiquement liées. Dans les années 1980, les feux de la Saint-Jean connaissent ainsi un renouveau dans cet espace grâce à l'influence directe des Catalans de Salon-de-Provence, qui redonne vie au bûcher provençal en faisant appel pour cela à la flamme du Canigou.
À compter de 1981 est créée une Maintenance des feux de la Saint-Jean et dès 1985, une branche provençale voit le jour afin de maintenir les liens ainsi créés. Entre 1985 et 1986, des fagots de bois, "li balaus de Sant-Jan", rassemblés par de petits provençaux et enrubannés aux couleurs de leur région, participent d'ailleurs à l'ascension du Canigou à l'occasion de la Saint-Jean d'été, et viennent rejoindre le bûcher. L'opération prend l'appellation de "Li recampado di Prouvençau au Canigou". Les relations fondées dans les années 1980 se maintiendront jusqu'à nous. La Maintenance provençale reçoit ainsi chaque 23 juin à midi, les coureurs de Saint-Cannat. Au terme d'une course de relais de trois jours, ceux-ci rejoignent Arles au départ de la Casa Peiral de Perpignan. Ils y remettent alors la flamme du Canigou qui servira le soir même à embraser le bûcher.
FABRE, Pierre-Jean ; La Saint-Jean en Provence ; [S.l.] : Comité de Provence des mainteneurs des feux et traditions de la Saint-Jean, [1987?]
VAN GENNEP, Arnold ; Le folklore français, tome 2. Paris : R. Laffont, 1999.
TÈMA(S) realizat a l'escasença de la mòstra Flamenca, cap d'òbra occitan del sègle XIII, al Musèu Fenaille de Rodés, del 23 al 28 de julh de 2013, en partenariat amb lo CIRDÒC e la Bibliotèca d'aglomeracion de Carcassona.
Votre question : Existe-t-il un lien entre les fêtes de la Saint-Jean en Occitanie et les fêtes de la Saint-Jean au Brésil ?
En Occitanie comme au Brésil, ainsi que dans de nombreux pays dans le monde, la nuit du 23 au 24 juin est l'occasion de nombreuses festivités autour de la naissance du saint Jean-Baptiste. Ces différentes commémorations paraissent reposer sur un socle commun, aux origines semble-t-il très anciennes, aujourd'hui métissé selon les espaces, de coutumes locales spécifiques.
Fêtes de la Saint-Jean brésiliennes et occitanes
La fête de la Saint-Jean brésilienne fut instaurée dans le pays par les Portugais, qui colonisèrent le Brésil dès le début du XVIe siècle, important avec eux leurs coutumes et fêtes traditionnelles. A l'instar du Portugal, le Brésil instaure alors « las Festas juninas », du 12 au 29 juin, festivités durant lesquelles est tour à tour rendu hommage à saint Antoine, saint Jean (nuit du 23 au 24 juin) ainsi qu'aux saints Pierre et Paul. Pays dont plus de la moitié des habitants est de confession catholique, le Brésil perpétue aujourd'hui encore ces commémorations.
Ces fêtes, inscrites dans le calendrier cérémoniel chrétien, furent dans ce pays métissées de nombreuses coutumes locales, issues des rites et traditions anciennes et païennes. La Saint-Jean y est notamment l'occasion de feux et de danses, dont l'une, le « Quadrilha », tire son origine du quadrille français.
La France, et notamment le pan occitan de son territoire, compte aujourd'hui encore de nombreux espaces où se commémore toujours la Saint-Jean. Ces fêtes demeurent de fait principalement actives en Provence, en Roussillon ainsi qu'en Bretagne. Nous trouvons dans différents ouvrages des indications concernant la pratique de la Saint-Jean et tout particulièrement la coutume des feux qui accompagnent communément cette fête (cf. Van Gennep, Arnold ; Le folklore français, tome 2. Paris : R. Laffont, 1999 ; Fabre, Pierre-Jean ; La Saint-Jean en Provence ; [S.l.] : Comité de Provence des mainteneurs des feux et traditions de la Saint-Jean, [1987?]).
Pierre-Jean Fabre nous renseigne ainsi sur les modalités de la Saint-Jean en Provence dans le courant des années 1980. La Saint-Jean d'été, commémorant la naissance de saint Jean-Baptiste, dans la nuit du 23 au 24 juin, s'accompagne selon lui d'un certain nombre de pratiques à vertus purificatrices, associant trois éléments : l'eau, les plantes (pour bon nombre d'entre elles médicinales), et le plus important d'entre eux, le feu.
Origines de la Saint-Jean
La présence d'une importante communauté occitane au Brésil pourrait-elle être à l'origine de coutumes et pratiques communes aux festivités de la Saint-Jean dans ce pays et dans la zone occitane ? De nombreux Occitans, notamment aveyronnais et béarnais, immigrèrent bien au cours des XVIIIe et XIXe siècles en Amérique du Sud, apportant avec eux langue et coutumes. La ville de Piguë constitua ainsi durant longtemps une enclave occitane en Argentine. Toutefois, le Brésil représenta moins que l'Uruguay, l'Argentine ou le Chili une terre d'accueil pour ces immigrants, en dépit de politiques parfois volontaristes de la part de l'État brésilien en ce sens (à ce sujet, consulter l'ouvrage d'Henry de Charnisay, L'émigration basco-béarnaise en Amérique , Biarritz, JetD éditions, 1996; pp,213-215).
Il semble donc falloir chercher dans les origines de la fête elle-même pour comprendre les similarités, mais également les disparités existantes entre Saint-Jean brésilienne et Saint-Jean occitane. A l'instar du Brésil ou de la France, de nombreux pays dans le monde célèbrent la Saint-Jean. Outre le Portugal, l'Italie mais également les pays baltes (Estonie, Lettonie, Lituanie) et scandinaves (Suède notamment, mais aussi Finlande et Norvège) célèbrent ainsi la nuit du 23 au 24 juin. Cette pratique touche donc des zones culturelles très variées, mais dans lesquelles le christianisme est implanté de longue date.
La Saint-Jean s'inscrit effectivement dans le calendrier cérémoniel du christianisme. Dès 506 après J.-C., le Concile d'Agde comptait la Saint-Jean comme l'une des principales fêtes chrétiennes aux côtés de Noël, la Pâque, l'Ascension et Pentecôte. Elle donnait d'ailleurs lieu à la célébration de trois messes comme pour Noël. Tout comme le 25 décembre, la Saint-Jean commémore d'ailleurs, non pas un décès (comme c'est le cas de la majorité des fêtes dans le calendrier chrétien), mais une naissance, celle de saint Jean-Baptiste. Les similarités entre ces deux fêtes tiennent également à leur proximité avec le calendrier solaire et les solstices, d'hiver pour Noël et d’été pour la Saint-Jean.
À ce sujet, les avis des ethnologues et anthropologues s'étant penchés sur les traditions et coutumes de la Saint-Jean différent. Le folkloriste Van Gennep réfute ainsi la thèse d'une proximité entre ces deux fêtes et la nature solaire et solsticiale de la Saint-Jean, à l'inverse de nombreux autres auteurs, dont le Provençal Pierre-Jean Fabre, prenant pour appui le calendrier julien (calendrier initié sous Jules César), afin de souligner que tant la Saint-Jean d'été que Noël tombaient exactement huit jours avant le premier du mois suivant « le 24 juin est le VIII des calendes de Juillet, le 25 décembre est le VIII des calendes de Janvier » (P.-J. Fabre, La Saint-Jean en Provence, op.cit, p.42), dates qui sont également celles des deux solstices dans le calendrier julien. Notons à ce sujet que le Brésil, situé dans l'hémisphère sud, célèbre la fête alors que s'annonce la saison non pas estivale mais hivernale.
Les origines de la Saint-Jean, aujourd'hui fête chrétienne, semblent donc à rechercher, tout du moins dans le cas des pratiques qui l'accompagnent tels les feux rituels, dans des coutumes plus anciennes et païennes, pratiques pour la plupart transmises oralement et remontant à des temps très reculés : les traces écrites les plus anciennes les concernant remonteraient à 1181 en Allemagne selon Van Gennep (Folklore de France, tome 2. op.cit.), et 1165 selon Fabre (La Saint-Jean en Provence, op.cit, p.42). Il est de fait difficile de définir clairement les origines de la Saint-Jean qui présente selon les endroits de nombreux points communs, mais également des disparités.
Notons toutefois que ces festivités s'inscrivent majoritairement dans une démarche de ritualisation et de socialisation. Tel est notamment le cas des feux, réunissant autour d'eux une grande part de la communauté (par exemple en Catalogne, avec le grand feu sur le Canigou). [Au sujet des feux rituels dans le cadre de Noël et du solstice d'hiver, consulter également : http://occitanica.eu/omeka/items/show/1818)]. La présence récurrente de traditions, telles la cueillette de plantes médicinales et thérapeutiques, l'aspersion d'eau sur les autres, les feux et braises, renvoient pour leur part à la dimension dite purificatrice de cette fête, elle aussi présente dans les différents espaces qui commémorent la Saint-Jean.
Pour en savoir plus :
CHARNISAY, Henry de, L'émigration basco-béarnaise en Amérique , Biarritz, JetD éditions, 1996
FABRE, Pierre-Jean ; La Saint-Jean en Provence ; [S.l.] : Comité de Provence des mainteneurs des feux et traditions de la Saint-Jean, [1987?]
VAN GENNEP, Arnold ; Le folklore français, tome 2. Paris : R. Laffont, 1999.
Lo Viatge, parfois appelé Sant Josèp amb Maria (incipit de la chanson) ou La fugida en Egipta, est un chant de noël occitan, (en savoir plus sur la tradition des Nadals occitans) sur l'épisode de la fuite en Egypte.
La chanson est centrée sur un épisode miraculeux très populaire depuis le Moyen Âge, le « miracle de la moisson », souvent représenté en peinture et en sculpture, mais absent des textes sacrés : Joseph, Marie et de l'enfant Jésus poursuivis par les soldats d'Hérode passent au bord d'un champ de blé en train d'être semé. Le blé grandit miraculeusement et les paysans se mettent à le moissonner. Lorsque les soldats arrivent, ils demandent aux paysans à quel moment ils ont vu passer la famille. Ceux-ci leur répondent : quand nous étions en train de semer ce blé. Les soldats crurent ainsi que la famille était passée des mois plus tôt et abandonnèrent la poursuite.
Il est connu et chanté dans tout le territoire occitan et connaît plusieurs versions. Il a notamment été collecté par Damase Arbaud en Provence sous le titre La fugida en Egipta et a été publié dans le premier tome son ouvrage Chants Populaires de la Provence en 1864.
(Cliquer sur l'image pour afficher la partition complète)
À propos de ce Noël, Damase Arbaud donne quelques explications : « Ce joli noël dont il existe une version française, a été fort répandu en Provence, et on le chante parfois encore devant les crèches des églises de village. Il s'est évidemment inspiré de ces recueils de prodiges que le Moyen Âge aimait tant. »
On en trouve une autre version dans un recueil de chants de noëls anonyme en occitan de la première moitié du XXe siècle (consulter la ressource)
(Cliquer sur l'image pour l'afficher en taille réelle)
Lo Viatge a été publié et enregistré par le CORDAE-La Talvera dans son ouvrage Nadals d'occitània : Chants de Noël d'Occitanie (Cordes : CORDAE-La Talvera, 2008)
Sant Josèp ambe Maria | Saint Joseph avec Marie |
Totis dos van viatjar. | Tous les deux vont voyager |
Demandan la retirada, | Ils demandent un refuge |
Degun los vòls pas lotjar. (bis) | Personne ne veut les loger. |
« Ont anatz tant bèla Dama ? | « Où allez-vous belle Dame |
E l'enfant que vos portatz ? | Avec l'enfant que vous portez ? |
- Vòli l'amagar, brave òme, | - Je veux le cacher brave homme |
Digatz s'aquò se pòt far ? (bis) | Dites moi si cela est possible |
- Aquí dejòs ma capòta, | - Là sous mon manteau |
Degun li vendrà cercar ! | Personne ne viendra le chercher ! |
- Pren-te lo faucil, brave òme, | - Prends ta faux brave homme |
Ton blat prèssa de copar ! (bis) | Ton blé est prêt à moissonner ! |
Coma se farià, Madama ? | - Comment serait-ce possible Madame |
Totara l'ai semenat ! | Je viens juste de le semer ! |
- Vai t'en véser sus l'arada | - Regarde les labours |
Anem ! Vai segar ton blat ! » (bis) | Et va moissonner ton blé. » |
La palha dins un quart d'ora | La paille dans un quart d'heure |
Avià grandit, espigat, | Avait grandi et fait l'épi |
E dins un autre quart d'ora, | Et dans un autre quart d'heure |
L'espic s'èra amadurat. (bis) | L'épi avait mûri. |
La primièra gabelada | La première gerbe |
Ne fasià un plen braçat, | Faisant une bonne brassée, |
Mas aquí la bona armada | Quand voilà la grande armée |
Dels Josieus emmalierats. (bis) | Des Juifs courroucés. |
« Vèni viste, vièlh segaire, | « Viens vite vieux moissonneur |
Quita de segar lo blat ! | Arrête de moissonner le blé ! |
Ont es passada la maire | Où est passée la mère |
Que portava un nòvel nat ? (bis) | Qui portait son nouveau-né ? |
- Passèt pel temps de cobrida | - Elle est passée au moment des semailles |
Quand semenavi mon blat | Quand je semais mon blé |
- Anem partiguem brigada, | - Allez partons brigade |
Aquò'z èra l'an passat ! » (bis) | C'était l'année dernière ! » |
Jogaire –bateire- e afogat de tambornet participa a sa renaissença per la creacion d’una federacion en 1939 e la refonda de sas règlas en 1954, a partir del tamburello italian.
Biografìa detalhada :
S'inscrivant dans le cycle des festivités hivernales, les halhas et socas de Nadau constituent deux pratiques traditionnelles de feux rituels. Autrefois particulièrement répandues en Gascogne, il en demeure aujourd'hui encore traces et pratiques.
Halhas de Nadau
Du latin facula,halha en dialecte gascon, haille en français, est un rituel de protection des récoltes. Bien que la tradition soit moins répandue aujourd'hui, ce rite agraire était autrefois particulièrement respecté, alliant bûchers ou brandons (ensembles de petites branches sèches surmontées d'un bouchon de paille ou d'enveloppes de maïs imbibés de résine), échanges intergénérationnels et chants à vertu incantatoire.
Ces feux de Noëls, feux fixes ou feux mobiles, parfois combinaison de ces deux formes selon les régions concernées, sont attestés dans différents espaces d'Aquitaine. Au cours des époques, différents auteurs et chercheurs se sont penchés sur la question des halhas, proposant définitions et témoignages de la pratique.
L'abbé Césaire Daugé dans Le mariage et la famille en Gascogne d'après les proverbes et les chansons (trois volumes, 1916-1930), l'ethnologue Arnold van Gennep (Le folklore français. 3, Cycle des douze jours, de Noël aux Rois ), puis René Cuzacq (Noël, Premier de l'An et carnaval au pays landais, Mont-de-Marsan, [s.d] ) entre autres auteurs, apportèrent tour à tour dans leurs ouvrages des clés de compréhension de cette pratique dans l'espace gascon. Ces écrits furent plus récemment complétés par les travaux menés par Patrick Lavaud dans les années 1980 (1), particulièrement sur la pratique des halhas en Bazadais. L'ensemble de ces ouvrages ainsi que les diverses enquêtes ont permis de discerner peu à peu les contours de l'espace concerné par cette pratique et le réseau de signification l'entourant.
On distingue généralement deux types de feux de noël en Gascogne, les feux mobiles d'une part, souvent pratique à caractère familial ; les feux fixes d'autre part, regroupant généralement la communauté autour d'un rituel collectif (2). Ce dernier type fut identifié pour la zone de la Chalosse. Nous trouvons trace de ces feux également en Béarn, dans les environs de la ville d'Orthez, ainsi que dans certaines zones du proche Pays Basque. Des halhas sont également attestées dans la Grande Lande, grâce aux témoignages apportés à ce sujet par Félix Arnaudin - malheureusement non édités - tout comme dans le Bordelais, selon les Macariennes de l'Abbé Girardeau (XVIIIe siècle)(3).
Allumées lors de la veillée de Noël, à l'occasion de la Saint-Jean d'hiver, les halhas constituent un rituel agraire dont la signification et les origines ont fait l'objet de débats entre ethnologues et chercheurs, soutenant ou rejetant la dimension solsticiale de cette pratique. Traditionnellement faites de ronces et de branchages dans leur version fixe, les halhas s'accompagnent parfois de brandons, qui entrent dans la pratique des feux mobiles. Dans le cas de ces derniers, une personne, le plus souvent le patriarche du foyer, est en charge de la cérémonie. Muni de brandons, celui-ci fait le tour de la propriété, assurant par ce biais sa protection et le succès des récoltes à venir.
Rituel agraire, le feu lui-même s'accompagne le plus souvent de chants à vertu incantatoire, entrant dans le processus de protection des récoltes. Sur une base commune, ces chansons présentent des variations d'une région à l'autre.
En voici un exemple recueilli par l'abbé Césaire Daugé (4):
"Halhe Nadau,/ Halha Nadau / Haille de Noël
Lou trip au pau/ Lo trip au pau/ La saucisse sur le pieu
Lou gat ou hum/ Lo gat au hum/ Le chat dans la fumée
Pum !/ Pum !/ Pum !
(version originale et version présentée dans une graphie normalisée, ainsi que traduction française).
D'autres versions proposent pour leur part : "La poule au toupin/ Couradje vesin (la poule au pot/ Courage voisin)" ou selon la version elle aussi rapportée par l'abbé Césaire : "Lous escuts a la paret/Bé t'ous couelhe".
La première version ici présentée, faisant évocation du chat là où d'autres se concentrent sur la question des champs, fait apparaître un autre pan des rites et des légendes alors en cours en Gascogne. Rite agraire, il est également possible que les feux de Noël aient été considérés comme des sorts visant la protection des foyers et de la communauté contre les sorcières et loups-garous. Ceux-ci étaient en effet réputés particulièrement actifs durant la nuit du 24 au 25 décembre selon les croyances populaires (5). Symboliquement, le chat se rattache à ces croyances et de nombreux textes et récits rapportent, en Gascogne comme ailleurs, des scènes de chats envoyés dans les flammes. Le cri de Pum parfois ahum voire hoü figure d'ailleurs comme un contre-sort, identifié d'ailleurs comme tel par Simin Palay dans son Dictionnaire du Béarnais et du Gascon modernes (6), qui y voit le cheminement du terme hum (fumée en gascon) à hum : courir comme le vent. Un cri, Hum, également poussé du côté du Gave d'oloron pour faire peur et chasser les sorcières, précisément la veille de Noël.
Les feux de Noëls, dont la pratique était en recul jusque dans ces dernières années, perdurent malgré tout dans cette région. Certains foyers, comme du côté de Bazas, retrouvant d'ailleurs une nouvelle vigueur suite aux travails menés à la fin du XXe siècle sur ces questions, et se réinventant sans cesse.
La soca de Nadau
A la pratique des halhas en extérieur, fait pendant celle de la bûche de Noël, portant en gascon des noms différents : soca,catsau,capdau,lo soc... selon le lieu où cette coutume était pratiquée.
Une enquête menée au XIXe siècle par Dieudonné Dergny (7), donne quelques informations sur les zones gasconnes concernées par cette pratique : Pays de Born, Marensin, Chalosse, Bigorre, Astarac, Comminges, Nébouzan et Lomagne, ainsi que quelques localisations dans le Gers et les Hautes-Pyrénées.
Les informations fournies sur le sujet par les auteurs et chercheurs successifs, Dieudonné Dergny, l'abbé Laborde en Béarn, le landais René Cuzacq ou l'ethnologue français Arnold van Gennep, témoignent d'une certaine diversité de pratique, tant sur la nature du bois utilisé (chêne, pin, mais également bois d'arbres fruitiers à lente combustion) et la durée de combustion espérée. Celle-ci peut ainsi varier d'une nuit en Béarn selon l'abbé Laborde, à neuf journées consécutives dans les Landes aux dires de René Cuzacq (8). La coutume de la bûche de Noël, mise dans l'âtre la veille de Noël, a cependant partout en commun la volonté d'assurer la protection du foyer, le respect du délai de combustion faisant office de bon augure pour l'année à venir.
Cette coutume de la bûche de Noël que l'on retrouve également dans d'autres espaces occitans, ne semble pas s'être accompagnée en Gascogne d'un chant ou d'une incantation particuliers. Ce rite inscrit dans le Cycle des douze jours séparant Noël du jour des Rois, s'entoure toutefois d'un certain nombre de proverbes et supersititions, lié à ses vertus propitiatoires.
Lavaud,Patrick,"La halha de Nadau dans le Bazadais" in Les Cahiers du Bazadais, n° 81, 2ème trimestre 1988, pp. 45-52.
Lavaud,Patrick, "Halhas de Nadau en Vasadés" in Son d'Aquí, site du patrimoine oral et festif en Aquitaine (www.sondaqui.com).
A ce sujet consulter VAN GENNEP, Arnold, Le folklore : croyances et coutumes populaires en France, Paris, Stock, 1924, Tome I, volume 8.
DAUGÉ, Césaire, Le mariage et la famille en Gascogne d'après les proverbes et les chansons, Paris : A. Picard ; Bordeaux : Féret et fils ; Duhort-Bachen : C. Daugé, 1916-1930. p.286.
TRAIMOND, Bernard, Sur des rituels de protection en Gascogne, communication faite dans le cadre du Groupement de Recherches en Ethnologie Landaise (G.R.E.L.), article non publié. Cité dans Halhas de Nadau en Vasadés, Son d'Aquí.
PALAY, Simin, Dictionnaire du béarnais et du gascon modernes (Bassin Aquitain), Paris : Centre National de la Recherche Scientifique, édition de 1961. Article Ahumes.
DERGNY, Dieudonné, Usages, coutumes et croyances, 2 vol., Abbeville, 1885 et 1888.
CUZACQ, René, Noël, Premier de l'An et carnaval au pays landais; Mont-de-Marsan, Jean-Lacoste, [s.d].
CUZACQ, René, Noël, Premier de l'An et carnaval au pays landais; Mont-de-Marsan, Jean-Lacoste, [s.d].
DAUGÉ, Césaire, Le mariage et la famille en Gascogne d'après les proverbes et les chansons, Paris : A. Picard ; Bordeaux : Féret et fils ; Duhort-Bachen : C. Daugé, 1916-1930.
FOIX, Vincent, Dictionnaire gascon-français (Landes), PESSAC,Presses universitaires de Bordeaux, édition de 2003.
Lavaud,Patrick,"La halha de Nadau dans le Bazadais" in Les Cahiers du Bazadais, n° 81, 2ème trimestre 1988, pp. 45-52
PALAY, Simin, Dictionnaire du béarnais et du gascon modernes (Bassin Aquitain), Paris : Centre National de la Recherche Scientifique, édition de 1961.
VAN GENNEP, Arnold, Le folklore : croyances et coutumes populaires en France, Paris, Stock, 1924, Tome I, volume 8.
Composé au moment de la croisade en Languedoc ou croisade contre les hérétiques albigeois (1208-1229), le poème de la Canso représente le seul récit des événements relatés du point de vue languedocien et dans la langue vernaculaire.
Redécouvert au XVIIIe siècle puis par les premiers romanistes du début du XIXe siècle, ce texte joua un rôle important dans l'avènement de la renaissance d'oc ou l'éveil d'une conscience "occitane", à l'instar de Frédéric Mistral qui le considérait comme "la Bible de notre nationalité".
L'oeuvre telle que nous la connaissons par le manuscrit fr. 25425 de la BNF, les deux fragments et la version en prose, ne comporte aucun élément de titre, en raison sans doute de l'absence de véritable incipit (L'incipit "Aiso es la cansos de la crozada contr els ereges d'Albeges" est une invention de l'édition Fauriel de 1837) ni d'explicit.
Sa dénomination a connu de nombreuses variations :
- La guerre des albigeois, en vers provençaux (1783, Guillaume de Bure)
- Histoire de la croisade contre les hérétiques albigeois (1837, Claude Fauriel)
- Chronique des albigeois (1838, François-Just-Marie Raynouard)
- Aiso es la cansos de la crozada contr els Eretges d'Albeges (1841, Du Mège, Histoire générale de Languedoc, Tome IV, d'après l'incipit inventé de l'édition Fauriel)
- Poème de la croisade contre les Albigeois (1861, G. Guibal)
- Chanson de la croisade albigeoise (1931, Eugène Martin-Chabot)
- Cançon de la crosada (Titre en occitan moderne normalisé : 1963, Robert Lafont ; 1972, Charles Camproux)
- Canso de la Crozada (Titre en ancien occitan, forme internationale retenue par l'IFLA pour l'indexation bibliographique, 2004).
Le manuscrit fr. 25425 de la Bibliothèque nationale de France est le seul témoin intégral conservé du poème, ou chanson, de la Croisade. On connait également deux fragments dont l'un est aujourd'hui perdu et trois copies d'une version en prose réalisée au XVe siècle sur un manuscrit différent du fr 25425.
Description : manuscrit sur parchemin de 169 feuillets reliés.
Dimensions : 245 x 180 mm
Reliure : reliure maroquin bleu, tranches peintes. Il contient 13 dessins à la plume, considérés comme des esquisses à des enluminures inachevées. Ces dessins ont très souvent été reproduits car ils représentent une des rares représentations iconographiques à peu près contemporaines de la croisade.
À la page 70, le manuscrit contient une signature d'atelier ou de copiste : "Pons escriba""- vers 1336, "Jorda Capella" (prêtre ou chapelain du nom de Jordan ?), d'après une note manuscrite à la fin du manuscrit : "Jorda Capella deu sus aquest romans XV. tornes d'argentz bos quel prestem a VI. de fevrier M.CCC.XXXVI."
La manuscrit avait donc été engagé par un certain Jordan pour la somme de XV gros tournois.
Cette somme était "relativement élevée" selon Paul Meyer, bien qu'il ait traduit "tornes d'argentz" par "livres tournois", ce qui représenterait une valeur considérable ; en 1931, Eugène Martin-Chabot a rectifié la traduction par "quinze gros tournois", somme déjà significative.
- XVIIe siècle : Collection du cardinal Mazarin [donnée incertaine : référence manquante]
- Début du XVIIIe siècle : Collection de Pierre-Paul Bombarde de Beaulieu (1698-1783), conseiller au Grand Conseil de Louis XV, d'après Jean-Baptiste de La Curne de Sainte-Palaye qui cite plusieurs passages du manuscrit de la Canso ("Manuscrit de M. de Bombarde") dans ses Mémoires sur l'ancienne chevalerie (1759).
La copie que La Curne de Sainte-Palaye avait fait réaliser du manuscrit de la Canso, annotée et corrigée de sa main, est aujourd'hui conservée à la Bibliothèque de l'Arsenal (Ms. 3321) et suivi d'une "Table générale des noms de lieux de ce même manuscrit" et d'une "Table générale des noms propres du même manuscrit".
- Deuxième moitié du XVIIIe siècle : Collection du duc de la Vallière, d'après le catalogue dressé par Guillaume de Bure en 1783.
Guillaume de Bure, Catalogue des livres de la Bibliothèque de feu M. le duc de La Vallière, Première partie..., tome second, 1783 ; n° 2708 (p. 168-170) : « Manuscrit infiniment précieux, rare et curieux. Il est du XIVe siècle, écrit en lettres de forme, à longues lignes, et il contient 120 feuillets, dont 13 sont ornés de figures dessinées au simple trait. » (p. 168)
- Après 1783 : Bibliothèque du roi puis nationale (N° 190 du fonds La Vallière, puis Ms. français 25425, cote actuelle)
Le philologue romaniste F.-J.-M. Raynouard possédait un fragment d'une autre copie de La Canso "d'une écriture assez moderne" [Lexique roman, t. I, p. 226], perdu depuis son décès.
Ce fragment, publié par Raynouard, contenait d'importantes variantes, notamment des indications biographiques sur Guillaume de Tudèle, auteur de la première partie du poème, et ses liens avec le comte Baudoin, frère du comte de Toulouse Raimon VI.
Ce fragment a également été présenté et utilisé par Raynouard dans son Lexique roman. Il est tiré d'une histoire manuscrite du Quercy, Les Esbats sur le pays de Quercy de Guyon de Maleville, sieur de Casals (ou Cazals), qui écrivait vers 1600.
Il s'agit de 38 vers rapportés par Guyon de Maleville ayant essentiellement trait à la condamnation prononcée au concile d'Arles. Ces vers présentent des variantes par rapport au manuscrit fr. 25425 de la BNF.
Document original : "Seconde partie des esbats de Maleville sur le pays de Quercy audit pays", 321 f.. BM de Grenoble, ms. n° 1158.
Copie : La Bibliothèque municipale de Cahors possède une copie des Esbats sur le pays de Quercy de Guyon de Maleville, réalisée en 1806 (BM Cahors, Ms n° 1)
Edition : Esbats de Guyon de Maleville sur le pays de Quercy..., Publication de la Société des études littéraires, scientifiques et artistiques du Lot, Cahors, F. Delpérier, 1900 (588 p.)
Le poème a été mis en prose au XVe siècle à partir d'un manuscrit différent du fr 25425.
Cette version en prose est connue par trois copies du XVIe siècle : BNF, français 4975 / Bibliothèque de Carpentras, Collection Peiresc / Bibliothèque municipale de Toulouse, ms 608.
"Cette sorte de traduction, écrite d'un style lourd et pédantesque, et qu'on a pu, non sans vraisemblance, regarder comme l'oeuvre de quelque jurisconsulte inconnu, est loin d'être la représentation fidèle de l'original.
L'auteur ne visait évidemment en aucune manière à faire oeuvre de traducteur exact et consciencieux : son but n'était autre, selon toute vraisemblance, que de rédiger à peu de frais un livre d'histoire pour ses contemporains. (...)
Cette version en prose paraît avoir joui d'un certain succès. Elle est devenue, en l'absence du poème qui n'était guère connu avant la publication de Fauriel, l'une des principales sources de l'histoire de la croisade albigeoise.
Chassanion, Mar-Antoine Dominici, le président Catel, Pierre de Marca, Vaissète, pour ne parler que des anciens, en ont fait usage." (Paul Meyer, La chanson de la croisade..., t. I, Introduction).
La Canso de la Crozada est un poème épique qui relate la croisade contre « les Albigeois » ou « hérétiques cathares » qui a eu pour conséquence le rattachement du comté de Toulouse au domaine du roi de France.
La Canso commence sur l'appel du pape Innocent III (1208). Le récit se termine, onze ans plus tard, par le siège raté de Toulouse par le fils du roi de France Philippe-Auguste, futur roi Louis VIII, « victoire toulousaine que le poète ne savait pas éphémère » (Henri Gougaud, 1984).
La croisade se termine en réalité le jeudi saint 12 avril 1229 à Paris, où le comte de Toulouse Raimon VII se soumet à l'Église et consent à terme au rattachement du Languedoc à la France.
Cette longue chanson épique, contemporaine des événements, a été composée en occitan et en vers alexandrins, par deux auteurs successifs.
Le premier, Guilhem de Tudèle, clerc navarrais établi à Montauban puis à Bruniquel, est partisan du camp des croisés. Son récit en 131 laisses (2772 vers) s'arrête à la veille de la bataille de Muret (1213), événement décisif.
Un continuateur anonyme, au style et aux intentions très différents reprend le récit où Tudèle l'avait laissé. En 83 laisses (6810 vers suivants), il relate la suite des événements jusqu'au siège de Toulouse, éphémère victoire du camp toulousain.
Le nombre de vers attribué à chacun des auteurs a donné lieu à débat. Jusqu'à Fauriel, les observateurs du manuscrits n'ont pas distingué les deux parties de l'oeuvre et l'attribuent à un seul auteur. Il faut attendre la thèse de Georges Guibal et l'étude de Paul Meyer pour dinstinguer clairement deux parties à la langue, au style et aux partis pris très différents. Enfin, en 1931, Eugène Martin-Chabot établit une version de référence du texte occitan et rectifie les parties attribuées à chaque auteur. Il regroupe les laisses en chapitres et forge des titres pour chacun d'eux, facilitant le repérage dans l'oeuvre.
Le texte du continuateur anonyme est souvent considéré de meilleure qualité linguistique et littéraire. Surtout, le texte de l'Anonyme est la seule source contemporaine de la croisade partisane du camp toulousain au point d'être reçu à l'époque contemporaine comme un texte de "résistance", ou "patriotique" avant l'heure.
- Claude FAURIEL, Histoire de la Croisade contre les hérétiques albigeois, écrite en vers provençaux par un poète contemporain, traduite et publiée par M. C. Fauriel, Paris, Imprimerie royale, 1837. Consulter en ligne [1].
- Paul MEYER, La chanson de la Croisade contre les albigeois, commencée par Guillaume de Tudèle et continuée par un poète anonyme, éditée et traduite pour la Société de l'Histoire de France, par Paul Meyer, Paris, Renouard, Henri Loones, 1875-1879, 2 tomes. Consulter en ligne [2]
- Eugène Martin-Chabot, La chanson de la croisade albigeoise, éditée et traduite du provençal, par Eugène Martin-Chabot, Paris, Champion, 1931.
- GOUGAUD, Henri, La Chanson de la Croisade albigeoise, traduction nouvelle par Henri Gougaud, BERG International, 1984
- Grandes pages de "La Canso" : 1208-1219 / Guilhem de Tudèle et l'Anonyme ; texte original occitan établi par Eugène Martin-Chabot ; trad. française, annotation et prés. Anne Brenon ; trad. anglaise Janet Shirley ; trad. musicale Christian Salès, Paratge suite symphonique ; photos Jean-Louis Gasc, Argeliers : éditions Christian Salès, 2012.
C'est la seconde partie de l'oeuvre, celle composée par le continuateur anonyme, qui fait depuis le XIXe siècle le succès de la Canso. Véritable "partisan" du camp toulousain, il introduit dans son texte des valeurs morales qui donnent à l'affrontement entre les croisés et le camp toulousains (partisans du comte de Toulouse) l'image très littéraire d'un combat de résistance du Bien contre le Mal :
"D'un côté se trouvent Paratge, la noblesse d'âme, le sentiment de l'honneur, les vertus d'un cœur généreux, inséparable de Pretz, le mérite personnel, qu'accompagnent le bon droit, Dreitz, la justice de la cause, Dreitura, la loyauté, Lialtatz. De l'autre, l'orgueil, Orgolhs, l'esprit de démesure, Desmesura, la fourberie, Engans, la mauvaise foi, Falhimens. Les premiers symboles s'appliquent naturellement à Raimond VI et à son fils, le jeune comte, les autres à Simon de Montfort et à ses partisans. C'est aussi le combat de la Croix et du Lion. Le poème est écrit à la gloire de Toulouse et de la maison comtale. Son héros est le futur Raimond VII, « le vaillant jeune comte dirige les combats », en lui « réside toute valeur », il « relève Paratge et abat les orgueilleux », il « redonne éclat et splendeur à ceux qui ont été ou sont spoliés. » (Dossat, Cahiers de Fanjeaux, 1969) Redécouvert au XIXe siècle dans un contexte d'éveil.
"Si nous étions réduits, pour étudier la croisade, aux sources latines, actes et chroniques, nous serions bien mal informés. Beaucoup de faits, principalement de ceux qui se produisirent du côté des méridionaux, nous resteraient cachés. Des nombreux alliés du comte de Toulouse, nous connaîtrions à peine quelques-uns, et par-dessus tout nous ne saurions rien du sentiment avec lequel les populations méridionales, Toulouse notamment, se mirent à la résistance, lorsqu'il devint clair que la croisade ne tenait à rien de moins qu'à remplacer les familles seigneuriales du Midi par quelques ambitieux venus de France. Sur tout cela Pierre de Vaux-Cernai ne sait à peu près rien et Guillaume de Puylaurens n'offre que quelques notions accidentelles et fragmentaires. La principale source d'information est le poème de la croisade." Paul Meyer, Introduction
Voir Guibal 1861
« La Chanson de la croisade est pour nous, gens d'Occitanie, l'histoire de nos malheurs ; elle est notre épopée ; chaque ligne de ce poème semble écrite avec le sang de nos aïeux. » Joseph Salvat, recension de "Eugène Martin-Chabot. - La Chanson de la croisade albigeoise, éditée et traduite du porvençal. Tome I : la Chanson de Guillaume de Tudèle..." dans "Bulletin critique", Revue d'histoire de l'Eglise de France, vol. 19, n° 83, 1933
A la différences des Chroniques de la croisade, projet historiographique, la Canso est une oeuvre de littérature, surtout pour sa deuxième partie composée par l'Anonyme, comme le souligne Paul Meyer qui n'en défend pas moins son intérêt historique, à propos de la relation que fait l'auteur du concile de Latran, très différente des Actes officiels du concile :
"Fauriel a eu tort de comparer les actes du concile avec le récit toulousain. Les actes du concile sont des décisions, non pas un procès-verbal des séances. (...) Il n'est pas possible de souhaiter une confirmation plus décisive du rôle que le poète assigne au pape, rôle où, je le répète, tout est un peu grossi et mis en accord avec la conception générale de l'œuvre, qui appartient à l'histoire populaire et ne peut tenir compte des nuances délicates. En somme, tout ce que nous pouvons contrôler, dans le récit du poème, paraît avoir toute l'exactitude qu'on peut attendre d'un écrit composé à une époque où ne régnaient pas les habitudes scientifiques de notre temps. Quand on a fait la part de la forme poétique employée par l'auteur, étant bien assuré que le comte de Foix ni surtout le pape n'ont parlé en vers provençaux, on se trouve en présence d'un document historique aussi valable que n'importe quelle chronique d'événements contemporains."
Plus récemment, l'écrivain et conteur Henri Gougaud réalisait une nouvelle traduction française du texte afin d'en rendre la qualité littéraire : « La Canso est un grand reportage chanté, une sorte de journal parlé feuilletonesque et passionné qu'il faut imaginer proféré par quelque bougre accoutumé des estrades, attentif à informer, bien sûr, l'assemblée devant lui bouche bée, mais aussi à l'émouvoir, à la tenir en haleine, à l'attendrir et à l'effrayer, à lui faire, si j'ose dire, l'amour en mots et l'amener à jouissance sous peine de se voir abandonné au prochain détour de couplet. La Canso, au fond, ne diffère que par sa dimension des « complaintes à faits divers » que l'on goualait, au siècle dernier, sur le pavé des cours. » (Gougaud, 1984)
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Consultez le manuscrit fr. 25425 de la Bibliothèque nationale de France de La Canso de la Crozada
Consultez la réédition électronique du texte d'introduction de Paul Meyer à la Canso de la Crozada
Hercule Birat, né en 1796 dans la ville de Narbonne, fut une figure locale notable des débuts du XIXe siècle. Chansonnier satirique, poète français comme occitan, considéré par certains comme un précurseur des Félibres, il revendique de son vivant son style populaire et provincial (dans le sens de local), pour une oeuvre plurielle, reflétant près d'un demi-siècle de vie narbonnaise.
Les premières années
Hercule Birat naît à Narbonne le 30 juillet 1796, dans une famille de juristes toulousains, installés dans la région depuis la deuxième moitié du XVIIIe siècle. Sa mère, Hostalot de son nom de jeune fille, est pour sa part une Narbonnaise de souche.
Hercule Birat poursuit tout d'abord des études de droit, dans la tradition familiale, à Toulouse et Paris, avant de devenir géomètre puis matelot sur un navire faisant cap vers la Martinique. A la mort de son père en 1820, il rentre en France, se marie l'année suivante et s'installe alors sur un domaine agricole dans la proximité de Homps.
Le poète
Ce n'est donc qu'à l'âge mûr que le Narbonnais entreprend de coucher sur le papier et par la voie des vers ses impressions sur la vie de ses concitoyens. En 1837 paraît sa première publication, La Fête de Notre-Dame-du-Cros.Il a alors passé la quarantaine. Son second ouvrage paraît neuf ans plus tard, en 1846. Intitulé Voeux à Notre-Dame-des-Auzils, il est, par sa thématique, proche du précédent texte de l’auteur.
L’installation de celui-ci à Narbonne deux ans plus tard, dans le contexte particulierdes débuts de la IIe République, influencera nettement sa production, qui adopte alors une tonalité plus satirique.
Le satiriste
Hercule Birat, qui loue à l'un des clubs républicains de la ville un local dans sa demeure, est en contact direct avec leurs idées, chaudement exprimées, souvent au détriment de son sommeil.
L'auteur puise dans cette situation la veine d'une production satirique visant ses hôtes républicains, mise en musique sur des airs populaires de l'époque. De cette période, nous gardons principalement l'écho de Birat lui-même, qui aurait déclaré avoir été "menacé d'avoir à porter sur ses épaules, à travers la ville, le buste de Marianne" (cf. MECLE, André, Hercule Birat, le Poète de Narbonne. In La Voix Domitienne, n°26-27 de 1997). Cet épisode aurait inspiré La Passion dal paure cansouniè narbounès.
Le rapport à la langue d'oc
Birat propose lui-même une poésie provinciale, locale. Il en vient progressivement à écrire autant en occitan qu’en français ;La Passion dal paure cansouniè narbounès est ainsi composée, comme plus tard d'autres de ses pièces, en dialecte narbonnais. Penché sur la prose de ses contemporains des Pays d'oc, il trouve en Jasmin, qu'il découvre à l'occasion d'une lecture de l'auteur à Narbonne, un modèle (cf. à ce sujet la préface de La Passiou dal pauré cansouniè narbounés).
La République installée, ses remuants hôtes l’ayant quitté, Birat explore de nouvelles voies d'expression. Il aborde alors le genre de l'épopée burlesque à travers deux textes en occitan :Dialogos entre la mountagno de Minerbo é lou Pic de Noro etLa Naissenço de Jacquès Premie. Birat voit en ces textes le sésame de son entrée à la Commission archéologique et littéraire de Narbonne. Par deux foix éconduit, Birat reprend les couleurs de la satire pour composer en janvier 1857 Les Lamentations du poète narbonnais, bientôt suivies d'une Supplique à Messieurs les membres de la Société archéologique. Effet direct de ses écrits ou heureux hasard, il intègre deux mois après la parution de ce second texte la Commission tant désirée, pour une courte durée toutefois.
Poésies narbonnaises
En 1861, les différents textes poétiques d'Hercule Birat sont réunis dans un même ouvrage, augmentés d'entretiens en prose entre l'auteur et un "artistarque", proposant un dialogue sur la qualité de son oeuvre. Les piques plus ou moins dissimulées en direction de ses confrères de la Commision font scandale et le conduisent à la démission.
Nonobstant son aspect polémique, cet ouvrage témoigne de la qualité de la plume de Birat, peintre de son époque, de sa région et son histoire. Le poète, féru d'histoire régionale, consulte par ailleurs les principaux écrits historiques réunis à son époque.
Ses textes nous renseignent sur la grande comme sur la petite Histoire, nous livrant de nombreux portraits croustillants de ses contemporains, ainsi qu'une perspective différente sur les événements marquant de la vie narbonnaise de l’époque.
Attaché à l'histoire et au patrimoine de sa région, Birat se distingue également par ses talents de conteur et de passeur de mémoire. Outre les nombreuses transcriptions de textes et légendes du cru, parfois agrémentéesde sa touche personnelle, il propose de nombreuses créations originales basées sur des textes primitifs, notamment dans le cycle de Saint-Paul dont fait partie le fameux La Gragnotto dé Sant-Paul daté de 1856, repris plus tard par Mistral dans son Mémoires et récits.
Bien que moins connu, son Sermon du père Bourras (tiré des Poésies narbonnaises, 5e et 6e entretien, second volume, certainement rédigé aux alentours de 1855) s'inscrit dans la longue lignée de textes reposant sur la tradition populaire qui donnèrent naissance au Curé de Cucugnan. Birat se serait appuyé sur ce bref dialogue: "Pam, pam, pam ! - Que tusto dé bas ? - Lou Pero Bourras – Cal demandats ? - Dé gens de Ginestas – Aïci y gna pas, anats pu bas – Dintrats, dintrats y'n manco pas !" Il semble que l'abbé Bourras, curé de Ginestas, acteur principal du sermon, ait effectivement existé. Originaire d'Espagne, il aurait en fait exercé son ministère non à Ginestas, mais du côté de Luc-sur-Orbieu ou de Marcorignan (À ce sujet, voir L'Inventeur du sermon du Curé de Cucugnan, conférence du Dr P. Albarel, Narbonne, 1927 et les écrits de Gaston Jourdanne).
Tristesse du curé face à l'indifférence des fidèles de sa paroisse, différentes étapes menant du Paradis à l'Enfer, et conclusion finale sont similaires dansLe Sermon du père Bourras et les versions successives du Curé de Cucugnan, faisant du texte de Birat le précurseur (il paraît en 1861 dans les Poésies narbonnaises) d'une pièce incontournable du patrimoine littéraire.
En dépit de ses apports à la littérature populaire et occitane, Henri Birat ne connut de son vivant qu'une aura principalement locale, recevant toutefois une certaine reconnaissance de ses pairs en 1866. Cette année-là, l'Académie des Jeux floraux remet au poète narbonnais un Jeton d'argent. En 1924, il était également honoré lors de la Sainte-Estelle. (cf. L'Inventeur du sermon du Curé de Cucugnan).
Henri Birat décède le 14 mai 1872 à Narbonne.
Pour en savoir plus:
Dr. P. ALBAREL, L'Inventeur du sermon du Curé de Cucugnan, conférence, Narbonne, 1927. (Cote CIRDOC : CBB 16)
BIRAT, Hercule, La Passiou dal paouré cansouniè narbounés : pot-pouirit démagogico-soucialisto, Narbonne, impr.de Caillard, 1850. (Cote CIRDOC: CBB 420-19).
BIRAT, Hercule, Poésies narbonnaises en français et en patois, suivies d'entretiens sur l'histoire, les traditions, les légendes, les moeurs, etc., du pays narbonnais, Narbonne : E. Caillard, 1860 (Cote CIRDOC: CAC 452-1).
BIRAT, Hercule, Une nouvelle étoile télescopique : satire dialoguée contre l'auteur des poésies narbonnaises, Narbonne : Caillard, 1867 (Cote: CBB 371-22).
MECLE, André, Hercule Birat, le poète de Narbonne, In La Voix Domitienne n°26-27 de 1997, p. 138-142 (Cote CIRDOC: O2).
PELISSIER DE LA PALME, . "La Vérité sur le Curé de Cucugnan" in La Cigalo Narbouneso, n°3, Mars-Avril 1914, p29-46. (Cote CIRDOC: KI3).
Margarita PRIOLÒ-GALHÒT / Marguerite PRIOLO-GAILLOT (1890-1955)
Marguerite Priolo (épouse Gaillot) devient Reine du Félibrige en 1913, après avoir été reine du Félibrige Limousin (1909-1912). Auteur de deux ouvrages de contes traditionnels (Legendas Lemouzinas, 1915 et Countes del Meirilher, 1916), elle fut l'une des disciples de Joseph Roux et l'élève d'une autre reine du Félibrige, la marseillaise Marguerite Genès (1868-1955), professeur de français à Brive, personnalité importante des débuts du félibrige en Limousin.
Reine du Félibrige
Native de Brive, c'est dans sa région natale que son nom apparaît pour la première fois dans les journaux de l'époque. Elle devient en 1909, à dix-neuf ans, reine du Félibrige limousin et le restera jusqu'en 1913. Elle est par ses parents, étroitement liée dès son enfance au mouvement, son père, le docteur Priolo étant un important mécène des auteurs d'oc. Sa mère, fut par ailleurs elle aussi reine du félibrige limousin durant une quinzaine d'années.
C'est à l'occasion de la Sainte-Estelle de 1913 à Aix-en-Provence qu'elle est désignée reine du Félibrige par Bruno Durand, lauréat des Jeux Floraux. René Jouveau rapporte cependant dans son Histoire du Félibrige (Nîmes, Bene, 1971, p.448), que le choix final revint à Mistral, au détriment de Mlle Magali Joannon, soeur de Marcel Provence, ayant eu les préférences de Bruno Durand.
Marguerite Priolo devient à cette date et pour sept années, le visage du Félibrige, et reçoit pour insigne un rameau d'olivier en argent. Elle participe à ce titre aux divers fêtes et commémorations du mouvement, fréquemment aux côtés du capoulié, et préside également la cour d'amour "spectacle hérité des troubadours, où se mêlent danses, chants et poésies." (cf.site internet du Félibrige).
Ces événements sont abondamment relayés dans la presse régionale et occitane de l'époque. La jeune reine y figure fréquemment coiffée du barbichet, coiffe traditionnelle limousine, qu'elle quitte toutefois durant le conflit armé de 14-18, pour une tenue d'infirmière, lorsqu'elle s'engage aux côtés de la Croix Rouge de Brive.
Conteuse limousine
Parmi les différentes commémorations auxquelles la reine du Félibrige est alors conviée, notons sa présente à Avignon, à l'occasion de la Sainte-Estelle de 1914. Elle dévoile alors ses qualités d'oratrice lors d'un échange avec le maire de la ville, M. Valayer, qui fut relaté dans la presse de l'époque (cf. La Farandole du 3 juin 1914, n°85 p.1-5).
Qualité qui lui valurent d'ailleurs d'être enregistrée dès 1913 au cours d'une collecte menée par le linguiste Ferdinand Brunot (1860-1938) de l'Université de la Sorbonne. Deux enregistrements de cette période sont actuellement en ligne sur Gallica. (premier enregistrement, cliquer ICI second enregistrement, cliquer ICI).
Ses ouvrages de contes, rédigés dans la langue du bas-Limousin et s'inpirant du patrimoine oral de sa région, Legendas Lemonzinas, sorti en 1915, et Countes del Meirilher (1916) lui vaudront les critiques positives de l'Almanach occitan de 1927 "deux volumes de prose, brillant résultat d'un fécond labeur intellectuel, comme parfait miroir d'un rare tempérament féminin" [...] dont les trop rares écrits continuent à souhait les pures traditions romanes" et sera salué en 1965 par le journal le Lemozi à l'occasion d'un article sur Marguerite Genès, dont elle fut l'élève "En effet dès sa parution, le livre Legendas Lemouzinas fut une révélation et opéra presque une révolution. Un style alerte, dru, flexible, épousant toutes les nuances de la pensée ou de la fantaisie venait de naître."(Lemouzi, numéro 15, 1965, p.281-282, Robert Joudoux).
En dépit de leur qualité reconnue, ces deux ouvrages ne furent pas par la suite ré-édité, mais leur auteur, décédée le 13 mars 1955 à Manzac-sur-Vern en Dordogne, membre du Félibrige limousin, participa localement à la diffusion et à la création en langue d'oc.
En savoir plus:
Ouvrages de Marguerite Priolo:
PRIOLO, Marguerite, Legendas Lemouzinas/ Légendes limousines, Brive, Impr. Roche, 1915.
PRIOLO, Marguerite, Countes del Meirilher/ Contes du Marguillier, Brive, Impr. Bessot et Guionie, 1916.
Quelques articles parus sur Marguerite Priolo
"La Santo Estello. Arrivée de la reine en Avignon." La Farandole, 3 juin 1914, n°85, p. 1-5. (COTE CIRDOC: M6).
"Echos: Countes del Meirilher." Le Mémorial d'Aix, 20 août 1916, n° 78.
"Marguerite Priolo-Gaillot (1890-1955)." Lemouzi, numéro 15, 1965, p281-282, Robert Joudoux. (COTE CIRDOC: AC-3-5)
"Marguerite Priolo-Gaillot, limousine". Almanach occitan de 1927.
Archives sonores disponibles sur Gallica.
Archives sonores, 26 août 1913, collecteur Ferdinand Brunot pour l'Université de la Sorbonne, informatrice, Marguerite Priolo. Lieu: Brive.
Premier enregistrement: cliquer ICI.
Second enregistrement: cliquer ICI.
Oeuvres publiées conservées aux CIRDOC
Manuscrits de Jules Seuzaret conservés au CIRDOC
- le ms. 173 contenant :- le ms. 634(2) contenant
Manuscrits inédits
Ref. biographiques