La date de publication du premier Armanac de Louzero pose problème. Cette publication annuelle en langue d'oc (dialecte du Gévaudan) est régulière depuis 1903. Cependant, un premier Armanac de Louzero avait été publié en format réduit en 1899.
La publication de cet almanach se poursuit jusqu'à nos jours avec toutefois une interruption entre 1958 et 1969. Depuis 1970, il constitue un supplément annuel à la revue Lou Païs : revue régionaliste du Gévaudan et des Cévennes. Jusque dans les années 1950 il était entièrement en langue d'oc, il est aujourd'hui bilingue.
Le n° 1 de l'Armanac de Louzero (1903) met en scène, sous forme de dialogue, l'ambition de ce nouvel almanach : « L'almanach patois. (...) Il faut que je te dise, Jacou, que ma fille était à Mende, hier, pour y vendre quelques fromages. Elle en a ramené une nouvelle : il paraît que l'on va faire un livre en patois. Tu ne l'as pas entendu dire ?
— Jacou : Un livre en patois ? Non... Tu veux peut-être dire un almanach ?
— Touèno : C'est ça : un almanach en patois.
— Jacou : J'y suis maintenant, et comme disait l'autre : il suffit d'expliquer. Mais il te faut savoir, Touèno, qu'un almanach ce n'est pas un livre : un almanach, c'est un almanach... Il y a les fêtes, la pluie et le beau temps, les foires, les lunes, de petites choses pour amuser le monde, des proverbes, des contes, des chansons, des remarques... Souviens-toi, Touèno, qu'un livre il y en a beaucoup qui ne se baisseraient pas pour le ramasser, alors qu'un almanach en patois, tu verras qu'on s'y jettera dessus comme les brebis sur le sel... » (cité et traduit dans Dominique Blanc, « Lecture, écriture et identité locale : Les almanachs patois en pays d'oc (1870-1940) », voir bibliographie ci-dessous)
Comme la couverture des premiers numéros l'annonce, cet almanach « Marco las fièiros, las festos, las lunos, las sesous, i o de contes, de prouberbis, de chansous, de farços, per fa passa lou tems al brabe mounde de nostre païs. »
Selon le témoignage de Félix Buffière (1966, voir bibliographie ci-dessous), « lou Grelhet »/Félix Remize assurait l'essentiel de la rédaction de l'armamac : « Sous sa couverture de couleur, l'Armanac avait invariablement ses 64 pages. Il s'ouvrait par un calendrier détaillé et s'achevait par la liste des foires de la Lozère. Un « Catecisme de la Meirino » ou « del Peyri », un récit évangélique, un conte du pays, du diable, du renard et du loup, parfois un conte « biropassat » (traduit) de Grimm ou de Perrault : le tout entremêlé de savoureuses farces, de bons mots, de proverbes, de devinettes, de chansons, et clôturé par « l'ensenhadou » ou table des matières. »
Parmi les collaborateurs réguliers du chanoine Remize, Félix Buffière cite Ange Peytavin, curé de Mialanes (qui signait Estieine). « Chontoclar » (Albert Brunel) fournissait régulièrement des chansons et illustrait l'Armanac.
Origine de l'Armanac de Louzero :À la fin du XIXe siècle et pendant la première moitié du XXe siècle, il y a une grande vogue des almanachs en langue d'oc, liée au développement du Félibrige qui avait créé dès 1855 l'Armana prouvençau à Avignon. Celui de la Lozère a été réalisé en 1899, puis de façon régulière à partir de 1903 par Félix Remize (« Lou Grelhet ») (1865-1941). Ces almanachs eurent un très grand succès populaire, certains tirant à plusieurs dizaines de milliers d'exemplaires.
En savoir + sur Félix Remize :Félix Buffière, « Le chanoine Félix Remize », introduction à Félix Remize, Contes du Gévaudan, vol. 1, s.l., s. n., 1966 (CIRDOC CAB 353-1)
Sur le mouvement des almanachs en langue d'oc :Dominique Blanc, « Lecture, écriture et identité locale : Les almanachs patois en pays d'oc (1870-1940) », dans Terrain, n° 5, octobre 1985 (pp. 16-28) [disponible en ligne sur le site de Dominique Blanc, anthropologue, Ingénieur d'études à l'Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales]
Revue littéraire occitane : n°7 d'octobre 1901 (6e année)
L'Opéra de Frontignan est une oeuvre anonyme, attribuée à Nicolas Fizes (1648-1718), éditée pour la première fois en 1679 par Etienne et Paul Marret.
Cette pièce est considérée comme le premier opéra rédigé en occitan. Il aurait en effet été composé en 1678, juste après les célébrations de la paix de Nimègue et la représentation du premier opéra joué à Montpellier.
L'Opéra de Frontignan est ainsi une comédie lyrique à grand spectacle dont la musique est un arrangement des airs populaires d'alors. L'intrigue est quant à elle assez simple et classique, elle met en scène les amours de Nicolas et Françon contrariées par les désirs d'un veuf, encouragé par la mère de la jeune fille.
Nicolas Fizes a délibérément rédigé son opéra dans le parler de Frontignan et a joint à son oeuvre un petit lexique faisant la correspondance entre quelques termes issus du parler frontignanais et montpelliérain.
On ne connaît aujourd'hui cet opéra que grâce à quelques manuscrits. Aucun ouvrage de l'édition originale de 1679 n'a pu être conservé. Léon Gaudin fait part dans son ouvrage sur cet opéra de l'existence d'un imprimé, un in 8° de 64 pages composé en italiques et sorti des imprimeries de Daniel Pech. Toujours d'après Léon Gaudin, la bibliothèque de Montpellier aurait conservé une copie informe de cet imprimé, disparue aujourd'hui. A la bibliothèque de Toulouse est également conservé un manuscrit transcrit pour Jacques de Bardy, conseiller au Parlement de Toulouse et proche de Nicolas Fizes. Plus tardif, un manuscrit du XIX° siècle, de la main de Léon Gaudin est également conservé à la Bibliothèque de Montpellier.
Le manuscrit présenté ici a été acquis par le CIRDOC en 2005, provenant d'une bibliothèque montpellieraine. La mention manuscrite Tandon au dos de la page de garde pourrait laisser penser qu'il s'agit de la bibliothèque d'André Auguste Tandon (1759-1824), grand-père du botaniste Moquin-Tandon et auteur de fables en vers patois.
Il est question de La Cansoun dis Àvi dans une lettre de Pierre Devoluy adressée à Frédéric Mistral datant du 29 mars 1906. L'expéditeur y fait part de ses impressions enthousiastes sur la chanson que Mistral vient de lui envoyer. Devoluy demande à Mistral s'il possède un air pour la chanter et pour qu'il la publie dès le prochain numéro du journal Prouvènço ! (Cf. Correspondance Frédéric Mistral - Pierre Devoluy : 1895-1913 / publ. et annotée par Charles Rostaing, 1984, p.687-688).
Pierre Devoluy est à l'époque rédacteur en chef du mensuel Prouvènço ! Auriflour de la causo felibrenco. La Cansoun dis Àvi sera effectivement publiée dans le n°16 du 7 avril 1906, signée par Frédéric Mistral, à Maillane le 27 mars 1906. La chanson y est précédée d'une petite introduction indiquant : « Èr : mescladis de E ièu quand la veirai
Ié dirai...
e de Eisabèu
Ti boutèu
Soun plen de sarriho... »
Ce numéro de Prouvènço ! est conservé à la médiathèque du CIRDÒC (cote magasin AF).
Aux lendemains de Mai 1968, Claude Alranq et le Teatre de la Carrièra (le « Théâtre de la Rue » en occitan) font irruption sur les places des villages et villes d’Occitanie avec un théâtre d’un nouveau genre, populaire, social et occitan, et une pièce emblématique, Mort et Résurrection de M. Occitania, farce tragique qui révèle à la société occitane les causes du « mal méridional » dans un contexte de crise de la viticulture languedocienne et des débuts d’un mouvement massif qui convergera sous le mot d’ordre « Volèm viure al país ».
Cette photographie, issue des archives du Teatre de la Carrièra conservées au CIRDOC, nous montre l’esprit de cette compagnie qui représenta pour des milliers de spectateurs une véritable révélation théâtrale et de prise de conscience culturelle.
Le chanteur Claude Marti évoque cette expérience dans son livre Homme d’Oc (Paris : ed. Stock, 1975) : « Et tout le monde est saisi, époustouflé, on n’avait jamais vu ça… Il y a là, sur la place, un camion asthmatique, beaucoup de décors en carton, beaucoup de pancartes, et des gens qui s’agitent, se préparent au milieu de ce matériel pour le moins sommaire. Il fait beau, tout le village est là, les enfants, les femmes, les hommes, dans une atmosphère de petite fête. Et la pièce commence. Incantatoire. Sous un linceul rouge marqué du drapeau occitan, il y a un mort. C’est M. Occitania, un petit viticulteur. Un tribunal est là qui disserte sur les causes de sa mort. (...) On était devant un théâtre réellement populaire, qui touchait profondément les gens tout en étant très pédagogique. (...) Les gens se reconnaissent dans M. Occitania, ils rient, ils applaudissent, ils prennent parti ; un passage est en occitan, un autre est en français, comme dans la réalité vécue… »