Présentation des coulisses et répétitions de la pièce Sèm Fòrça créée le 16 mars 2012 au Théâtre des Franciscains de Béziers par la compagnie La Rampe – Tio. Écrite par le dramaturge languedocien Claude Alranq, cette “odyssée pataphyique", en revisitant les rituels populaires mettant notamment en scène les animaux totémiques comme le Camel de Béziers, se veut une réflexion sur la transmission et la transformation d’un patrimoine intangible et menacé. Le titre reprend la devise inscrite sur le Camel : “Sen fosso” [sic], “Nous sommes nombreux”.
« Paparine est la nouvelle et malicieuse domestique de Pépézuc, un des derniers fleurons d’une grande dynastie vigneronne. Lors de la Feria des vendanges, elle découvre que son maître a 2 visages : à jeun, il manifeste le réalisme patronal le plus redoutable ; ivre, il caresse les plus folles utopies. Mais voilà que les divinités de l’Olympe jettent leur dévolu sur le patrimoine pépézuquien pour y créer un village-vacances ! »
Auteur, metteur en scène, comédien, ancien directeur du département des Arts de l'Université de Nice, Claude Alranq intervint en 2009 dans le cadre du colloque international Latinité, Méditerranée et mondialisation culturelle, sur la thématique du PCI (Patrimoine Culturel Immatériel) et des arts du spectacle vivant en terre d'Oc.
Soulignant l'évolution d'une notion aujourd'hui reconnue et clairement définie par l'UNESCO, Claude Alranq s'interroge sur le devenir des arts du spectacles vivants en langue minoritaire, dans une société contemporaine confrontée à la mondialisation et à l'homogénéisation culturelle.
Une fois l'état des lieux et les spécificités des arts du spectacles vivants en pays d'Oc établis, Claude Alranq s'interroge sur les défis posés dans le contexte actuel à ce type de patrimoine culturel immatériel, et énonce une série de propositions susceptibles de contribuer au soutien de l'action des porteurs de projets dans ce domaine.
Chant gascon
Paroles et traduction de la chanson (transcription fidèle du texte de la pochette du disque édité ; peut contenir des erreurs) :
Quan Gargantua | Quand Gargantua |
Tornè de l'armada | Revint de l'armée |
Dithò en entrant | Il dit en entrant |
Qu'éra mort de hami | Qu'il était mort de faim |
Refrain | Repic |
Ah! b'éri jo malauda | Ah! Que j'étais malade |
Oc, mlauda éri jo ! | Oui, malade j'étais ! |
S'a minjat un pòrc | Il a mangé un porc |
En ua gresilhada | Le temps d'une averse de grésil |
S'a minjat un buòu | Il a mangé un boeuf |
En ua poderada | Le temps de le tailler |
S'a minjat lo pan | Il a mangé le pain |
De dotze hornadas | De douze fournées |
Que s'a but lo vin | Il a bu le vin |
De quatorze annadas | De quatorze années |
Quan esto sadoth | Quand il fut repus |
Demanda ajada | Il demande à s'étendre |
Que l'an hèit un lheit | On lui fit un lit |
De sèt cars de palha | De sept chars de paille |
Quan esto cothat | Quand il fut couché |
Demmandè sa hemna | Il demanda à sa femme |
L'a volò tocar | Il a voulu la toucher |
S'es esbitcherrada | Elle s'est mise à bêler |
Chanson recueillie dans la région de Nice en dialecte Nissart.
Paroles de la chanson (transcription fidèle du texte de la pochette ; peut contenir des erreurs) :
Calant de Vilafranca | Descendant de Villefranche |
Per me crompar un capeu | Pour m'acheter un chapeau |
Me sìeu trompat de pòrta | Je me suis trompé de porte |
Dintreri au bordeu | Je suis rentré au bordel |
Repic | Refrain |
Tralala tralala | Tralala tralala |
Li gandaulas que se marìdon | Les putes qui se marient |
Tralala tralala | Tralala tralala |
Li gandaulas son marìdas | Les putes sont mariées |
Vai que l'amor ti passarà | L'amour te passera bien |
Fai larireta, fai larireta | Chante, chante |
Vai que l'amor ti passarà | Fai larireta, fai larira |
La femna dau bordeu | La mère maquerelle |
Diguèt "a que sies beu !" | dit "Ah que tu es beau !" |
M'a fach calar li bralhas | Elle m'a fait descendre les pantalons |
Per me chucar l'auceu | Pour me sucer l'oiseau |
I avia una gandaula | Il y avait une pute |
Amb de gros botelhs | Avec de gros mollets |
Lo cuiou coma una tìna | Le cul comme une tine |
L'i ai fotut lo pinseu | J'y ai mis le pinceau |
N'i aviá una pichina | Il y avait une petite |
Amb de belas tetinas | Avec de gros seins |
L'i ai pesugat li possas | Je lui ai pincé les tétons |
M'a pesugat l'auceu | Elle m'a pincé l'oiseau |
Le carnaval est un ensemble festif de pratiques et de rites populaires célébrant le passage d’une saison à une autre et le renouveau de la nature. C’est aussi, et surtout, une période de contestations et de remise en question de l’ordre établi dans la société qui le pratique. Elle ouvre une parenthèse dans laquelle débordements, défoulements et transgressions sont tolérés par les autorités.
Derrière le terme « carnaval » on trouve tout un ensemble de pratiques vivantes de par le monde. Ses formes évoluent d'une région à l'autre, mais également d'une époque à l'autre, en fonction des tensions internes et politiques qui en constituent le contexte. Si les traits généraux sont conservés, les principes de la fête sont souvent repris et adaptés aux réalités locales, passant alors au travers du prisme d'une culture et d'une langue.
Les carnavals occitans, présentent de nombreux traits communs aux carnavals du Nord de la France et du reste de l'Europe. Ils s’inscrivent dans le cycle des festivités populaires entre Noël et Carême en marquant symboliquement la fin de l’hiver. Leur date et leur durée fluctuent selon les époques et les régions (épiphanie, 2 février, 3 février, etc.). Elles précèdent généralement la période de Carême, dans un jeu d’opposition entre débordements et pénitences, gras et maigre, etc. Pendant carnaval, les inversions de toutes sortes (de sexes, de classes, voire même d’espèce), le port de masques et autres travestissements envahissent l’espace public. Cette pratique communautaire possède néanmoins des règles, des commémorations et des rites qui lui sont propres. Au sein du cortège on retrouve un grand nombre de personnages autour de la figure-clé de Carnaval, tels que les hommes sauvages et les jugements de cocus (assoadas, ou asinadas). Ils portent principalement et traditionnellement des noms occitans renvoyant fréquemment à leur fonction au sein du cortège. Carnaval lui-même est affublé de différents noms en fonction des lieux comme par exemple « Bourrache Ier roi des buveurs » (à Canet-d'Aude en 1955), « Sent Pançard » dans le sud de la Gascogne, ou encore « Caramentrant » en Provence.
Le temps de la fête se finit invariablement par le jugement du Roi Carnaval, tenu collectivement et encore souvent écrit et interprété en occitan, et son immolation. Ces jugements constituent un moment-clé des fêtes, et l'une des principales sources d'inquiétudes des autorités en place. En effet, ils servent de tribune pour la population, pouvant ainsi exprimer son mécontentement. Carnaval est accusé de tous les maux soufferts, de tous les malheurs traversés au cours de l'année écoulée. Fêté, adoré jusque-là par les participants, Carnaval devient dès lors le bouc-émissaire sur qui se déversent toutes les frustrations.
Le temps du carnaval, la fête, la licence, le défoulement dans l'espace public sont tolérés, y compris les masques et autres travestissements. Par ces attributs les Hommes explorent leur part animale. Hommes sauvages, paillasses, « pétassons », ours, sont autant de costumes fréquents dans les cortèges occitans. Les masques de carnaval y ajoutent l'anonymat et accentuent l'aspect grotesque. Temps de remise en cause et d'inversion, carnaval conserve encore ses origines païennes et sa fonction sociale au travers de ces diverses pratiques, celles-ci ayant toutefois quelque peu perdu leur dimension symbolique.
Chansons et danses en occitan viennent rythmer les festivités du carnaval : « Dimars gras qu'a nau porcàs », « Adieu paure carnaval », « Carnaval es arribat », « Joan petit », ou la danse des soufflets. Celles-ci présentent une certaine récurrence sur tout le territoire occitan au cours de la période de carnaval. Par exemple la chanson « Adieu paure Carnaval » accompagne le roi des festivités lors de son dernier voyage.
Les danses proposées sont fréquemment satiriques, parfois licencieuses, mettant fréquemment en scène des couples, et principalement des jeunes gens. Un grand nombre de danses se sont ainsi développées autour des festivités de carnaval, parfois spécifiques à une région, et s'appuyant sur des formes pré-existantes ou en créant de nouvelles.
Les jugements, fictifs, adaptés de fêtes en fêtes, rédigés traditionnellement en occitan en amont de leur interprétation, constituent une tribune pour la population, pouvant ainsi exprimer son mécontentement.
Pastorales, jugements, et cortèges sont intéressants d'un point de vue culturel et patrimonial pour différents aspects (évolution de la langue à diverses époques, mise en scène de personnages issus du folklore et de mythes locaux...) qui sont autant de témoignages des spécificités du carnaval en Occitanie.
Répétés d'année en année, les textes, tout particulièrement dans le cas des jugements, sont adaptés au contexte particulier, politique et économique, de l'année de leur rédaction.
Les textes de carnaval, notamment ceux des jugements, sont conservés, repris et adaptés d’une année sur l’autre selon le contexte politique et économique de l'année. Ils constituent donc de véritables sources de connaissance.
Peu de certitudes existent quant aux origines réelles de carnaval. De par ses caractéristiques (célébration du passage d'une saison à l'autre, les inversions, les débordements tolérés par les autorités etc.) certains auteurs le comparent aux Saturnales romaines, fêtes se déroulant en décembre au cours desquelles les esclaves prenaient la place de leurs maîtres.
D'un autre côté, l'historienne Anne Lombard-Jourdan explore la piste gauloise du dieu Kernunnos, relevant notamment l'existence d'un mythe ancien mettant à l'honneur la figure symbolique du cerf, perdant ses bois au mois de février pour mieux les renouveler en un plus beau ramage.
Même l'étymologie du terme « carnaval » reste aujourd'hui encore source de questionnement.
On peut en trouver trace en France dès 1268, sous la forme de quarnivalle. Ce n'est qu'aux alentours du XVIe siècle, que cette expression, fruit de la tradition orale, prend la forme que nous lui connaissons actuellement.
Souvent citée, il semble que la piste latine faisant de carnaval le dérivé de carnelevare (mot latin formé de carne, « chair » et levare, « ôter », qui signifie littéralement entrer en carême) soit le fruit d'une construction postérieure au Xe siècle, date communément admise pour son apparition. En forgeant une étymologie en rapport avec le Carême, l'Église entérinait ainsi son intention de récupérer une cérémonie païenne, en la plaçant sous la dépendance du Carême.
Les débordements accompagnant les festivités de carnaval furent très tôt une source d'inquiétude pour les autorités, religieuses comme civiles, qui voyaient en celles-ci des risques potentiels pour leur autorité. Elles tentèrent d'y mettre un frein à défaut de pouvoir supprimer une fête si populaire, et furent progressivement rejointes par l'État qui vit dans les cortèges et jugements de Carnaval, un danger réel.
Au tournant de la Renaissance, ces derniers prennent effectivement un tour plus politique et les incidents se multiplient (Sarlat, 1574, Romans, 1580), entraînant la réaction des autorités. Ainsi au XVIe siècle de nombreux décrets sont édictés limitant les libertés autrefois accordées au cours de cette période.
Les XVIIe et XVIIIe siècles accentuent la part de révolte contenue dans le langage carnavalesque nourrissant en retour une méfiance toujours accrue des pouvoirs politiques. Il en sera ainsi au cours des siècles suivants, sans toutefois jamais mettre à bas complètement les festivités de carnaval.
Ainsi, en dépit des atteintes politiques, et malgré la parenthèse des conflits armés de 1914-1918 et de 1939-1945, carnaval retrouve au lendemain de la Seconde Guerre mondiale un second souffle, et constitue aujourd'hui encore un temps fort à la veille du printemps.
Les années 60-70 réconcilient la fête et la politique et aujourd'hui encore, le théâtre occitan contemporain puise une part de son inspiration dans les formes traditionnelles du carnaval.
Le carnaval est une pratique bien vivante, en Occitanie comme dans le reste du monde, qui évolue selon les époques et les lieux de sa pratique. Réinventant constamment ses formes en s'appuyant sur un héritage qui lui est propre, et s'adaptant à la société dans laquelle il se développe, il est tel un miroir déformant de la société. Il demeure un temps à part, une parenthèse de défoulement et de fête à la sortie de l'hiver.
Aujourd’hui certains carnavals, notamment occitans, sont inscrits à l’Inventaire du Patrimoine culturel immatériel en France.
Si carnaval reste une fête populaire il est aujourd’hui souvent organisé et encadré par des associations locales comme les comités des fêtes par exemple ou encore les écoles.
En domaine occitan le mouvement des écoles Calandretas est aussi un acteur majeur des nouveaux carnavals occitans.
Enfin dans certaines villes, comme à Limoux, il existe une entité spécifique en charge de l’organisation du carnaval.
Paroles de la chanson (transcription fidèle du texte de la pochette ; peut contenir des erreurs) :
C'était en Janvier la noce à Aimée
Avec Désiré son jeun' fiancé
Au son du violon et de l'accordéon
Aimée Désiré se sont mariés
Mais la pauvre Aimée, la bouche de côté
Ne pouvait parler qu'en parlant du nez
Quant à Désiré le pauvre garçon
Il avait l'menton comme un potiron
La tata Emma avait mal au bras
Tonton Marius était pleinde puces
La demoiselle d'honneur avait mal au coeur
Et son cavalier avait mal aux pieds
Les petit' cousines en rob' de mousseline
Et les ptits cousins s'tenaient par la main
Et les vieux parents suivaient en boîtant
Et versaient des pleurs qui faisaient mal au coeur.
Chanson traditionnelle Provençale
Paroles (transcription fidèle du texte de la pochette ; peut contenir des erreurs) et traduction :
E ieu tanben vòli me maridar amb la Marion qu'es tan polida. Mai as pas de lotjament, ai pas de cantaire, ai pas d'argent.
Alara, monsurs, dams, consi me cal faire ?
Et moi aussi je veux me marier avec Marion qui est si jolie. Mais je n'ai pas de logement, je n'ai pas de chanteur, je n'ai pas d'argent.
Alors messieurs-dames, comment dois-je faire ?
Parpalhon mon bon amic | Papillon mon bon ami |
Parpalhon marida ti ! | Papillon marie-toi donc ! |
Dels ancians seguent l'usatge | Des anciens suivant l'usage |
Pens'a te metr'en menatge | Pense à te mettre en ménage |
Parpalhon mon bon amic | Papillon mon bon ami |
Parpalhon marida ti ! | Papillon marie-toi donc ! |
Coma me maridarai | Et comment me marier |
Que ges de lotjament n'ai | Je ne sais où me loger |
Li responde la limaça | Moi, lui répond la limace |
Leu te cedarai ma plaça ! | Je te céderai ma place papillon ! |
Coma me maridarai | Et comment me marier |
Que ges de lençòl ieu n'ai | Puisque je n'ai pas de draps ? |
Va, lui répond l'araignée, | |
Ieu te filarai l'escanha ! | Je te filerai la toile ! |
Coma me maridarai | Et comment me marier |
Que de pan per aquò n'ai | Puisque je n'ai pas de pain ? |
En serva garde l'espiga | La fourmi répond - je garde |
Li responde la formiga | Plus d'un épi en réserve ! |
Coma me maridarai | Et comment me marier |
Que de cantaire non ai | Puisque je n'ai pas de chanteur |
Li responde la cigala | La cigale lui répond |
De mon cuou farai timbala | Mon cul fera timbale |
Coma me maridarai | Et comment me marier |
Que d'argent per aquò n'ai | Puisque je n'ai pas d'argent |
Oui, lui répondit la vieille | |
J'te don'erai de l'oseille | |
Parpalhon, mon bon amic | Papillon mon bon ami |
Parpalhon marida ti ! | Papillon marie-toi donc ! |
Dels ancians seguent l'usatge | Des anciens suivant l'usage |
Pens'a te metr'en menatge | Pense à te mettre en ménage |
Parpalhon, mon bon amic | Papillon mon bon ami |
Parpalhon marida ti ! | Papillon marie-toi donc ! |
Tous les ans, pour l'organisation du carnaval de Nice, un grand concours était lancé pour la création d'une chanson appelée à devenir la chanson officielle du carnaval et chantée tout au long du défilé. Les partitions et les chansons sélectionnées étaient ainsi éditées puis vendues les semaines précédant et suivant le carnaval.
De toutes les propositions ce fut celle présentée ici, en dialecte Nissard, qui remporta le concours en 1911.
Premier extrait musical de la pièce, L'Air du Guet fait partie de la tradition carnavalesque d'Aix-en-Provence.
L'Antoni, est, elle, une chanson présente en Languedoc et Provence.
Paroles de l'Antoni : (transcription fidèle du texte de la pochette ; peut contenir des erreurs)
Ma filha te vòls maridar |
Ma fille, tu veux te marier |
Avem ges d'argent per te donar | Nous n'avons pas d'argent à te donner |
Qu'es aquò d'argent ? | Qu'est-ce que c'est l'argent ? |
Qu'apelatz d'argent ? | Qu'appelez-vous l'argent ? |
Empruntaren nòstres parents | Nous emprunterons à nos parents |
REPIC | REFRAIN |
L'Antoni, lo vòli | L'Antoine je le veux |
Maridatz-me per aquest'an | Mariez-moi cette année |
Ièu podi plus esperar tan ! | Je ne peux attendre plus ! |
Ma filha te vòls maridar | Ma fille tu veux te marier |
Avem ges de pan per te donar | Nous n'avons pas de pain à te donner |
Qu'es aquò de pan ? | Qu'est-ce que le pain ? |
Qu'apelatz de pan ? | Qu'appelez-vous du pain ? |
Los bolangièrs coion tot l'an | Les boulangers cuisent toute l'année |
Ma filha te vòls maridar | Ma fille tu veux te marier |
Avem ges d'abit per te donar | Nous n'avons pas d'habits à te donner |
Qu'es aquò d'abit ? | Qu'est-ce que c'est des habits ? |
Qu'apelatz d'abit ? | Qu'appelez-vous des habits ? |
Empruntarem nòstres amics | Nous en emprunterons à nos amis |
Ma filha te vòls maridar | Ma fille tu veux te marier |
Avem ges de crotz per te donar | Nous n'avons pas de croix à te donner |
Qu'es aquò de crotz ? | Qu'est ce que c'est une croix ? |
Qu'apelatz de crotz ? | Qu'appelez-vous une croix ? |
S'embrassarem ben totes dos | On s'embrassera bien tous les deux |
Ma filha te vòls maridar | Ma fille tu veux te marier |
Avem ges de lièch per te donar | Nous n'avons pas de lit à te donner |
Qu'es aquò de lièch? | Qu'est ce qu'un lit ? |
Qu'apelatz de lièch ? | Qu'appelez-vous un lit ? |
Cocharem long dels escaliers | Nous coucherons le long des escaliers |
Créée et interprétée par le Teatre de la Carrièra, la pièce Bogre de Carnaval raconte une histoire de vie et de mort, une histoire de la vie quotidienne, celle d'Antoni Testanboi et de Marion, l'histoire de leurs amours, de leur mariage, la naissance et l'éducation de leur enfant, leur mal-mariage, la maladie de l'Antoni et la mort finale de leur couple...
Pour réaliser cette pièce, les membres du Teatre de la Carrièra se sont interrogés sur la tradition carnavalesque comme contribution à la lutte menée par le mouvement occitan dans les années 1970 pour monter un spectacle s'inspirant des forces libératrices et subversives qui traversent Carnaval.
Pour cela, des enquêtes ont été réalisées en Languedoc et en Provence ont permis de recueillir les chants présentés lors du spectacle. Ces chants ont été réinterprétés afin de restituer avec les moyens d'un spectacle l'esprit carnavalesque et de le livrer au spectateur avec toute sa saveur, ses potentialités de contestation et de liberté. Un disque vinyle, édité par le label Ventadorn, est sorti en 1978 : les titres qui y figurent sont reportés ci-dessous, en bas de page. [imatge id=174]
Les membres du Teatre de la Carrièra :
Alranq, Claude
Clément, Anne
Coulomb, Christian
Pelletier, Manuel
Roquefeuil, Jean-Louis
Tuech, Maurice
Verdié, Patrick
Bonafé, Marie-Hélène
« Dans le début des années 70, j'avais découvert Les travaux et les jours de Dario Fo et c'était une révélation d'entendre ces chants populaires chantés par des grandes chanteuses comme Giovana Marini (avec qui nous avons travaillé plus tard sur Yerma) et Catarina Bueno. Puis quand je suis venue jouer au Teatre de la Carrièra, mon premier rôle était celui d'un homme, le Cinglou le nervi du patron des mines dans Tabò. Et après cette expérience j'ai joué beaucoup de rôles d'hommes avec beaucoup de plaisir : c'était déjà le carnaval. Avec Marie Hélène Bonafé nous avions réalisé toutes les deux une soirée « d'animation » cévenole avec La disputa au liech de Jean Castanha où je jouais le vieux mari et des chants. Cette soirée autour des chansons a créé une envie d'aller plus loin dans cette voie.Par ailleurs nous découvrions les carnavals : Limoux, Pézenas surtout et cette cérémonie inconnue pour moi protestante des Cévennes. Avec Claude nous avons fait des stages de formation sur le jeu carnavalesque, nous avons aussi suivi un stage « commedia dell'arte » avec Jacques Lecoq à Paris.Toute ces découvertes nous ont donné envie de faire un spectacle sur le carnaval. Dans mon enfance à Saint Hippolyte on chantait et jouait la chanson La noce à Aimée, nous sommes donc partis d'une noce avec improvisations, le monde à l'envers hommes en femmes, femmes en hommes. Pour le travail du chant Catarina Bueno est venue nous aider et Claude Alranq soutenait le travail. Mais c'était avant tout une création collective : 4 comédiens et 3 musiciens.Le travail sur les personnages carnavalesques qu'ils soient comédiens ou musiciens était très riche : tout en étant comiques ils devaient aussi par moment inspirer la pitié – le pauvre cocu par exemple. La participation avec le public était très importante : au milieu du spectacle nous allions inviter les gens à danser dans la salle. Le spectacle s'est beaucoup joué dans des salles communales.La mise en scène était très simple comme dans le théâtre de tréteaux, l'acteur était le roi mais sans jamais prendre le devant de la scène: c'était une équipe énergique et qui allait de l'avant. Toute cette énergie c'était tout le travail théâtral que fait l'équipe du Teatre de la Carrièra depuis des années et les pistes de jeu proposé par Claude Alranq avec le corps et la voix habités par les personnages populaires de l'Occitanie.Un des plus grands souvenirs est la tournée en Bretagne, jouer dehors en plein hiver...En 2001 j'ai fait une tournée de contes en Bretagne et il y avait des anciens de 1978 qui m'ont dit : pour nous Bogre de Carnaval a été très important: après on a commencé à ajouter des couplets à nos chansons, une chanson c'est une histoire. J'ai pensé aux cantastorie italiens. »
Anne Clément