Auteur | Clément, Anne. Auteur, interprète Benichou, Julien. Compositeur Huang, Edda. Interprète Benichou, Daphné. Interprète Zinner, Lucas. Interprète Alranq, Perrine. Interprète Hébrard, Jean. Interprète Duplan, Josette. Interprète | |
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Editeur | Compagnie Gargamèla-Théâtre CIRDÒC-Mediatèca occitana | |
Date d'édition | 2016 | |
Sujet | Feuilletons radiophoniques | |
Type de document | Sound document sonore | |
Langue | oci | |
Format | audio/mpeg son dématérialisé | |
Extent | 00:12:04 | |
Droits | © CIRDOC © Compagnie Gargamèla-Théâtre | |
Réutilisation | Creative commons = BY - NC - ND | |
Permalien | http://www.occitanica.eu/omeka/items/show/16685 | |
Création de la notice | 2017-08-03 Marion Ficat | |
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Encore une fois tout semblait aller pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles comme disait le grand Voltaire que peuchère je n’ai jamais lu son oeuvre.
Peut-être un jour quand je serai retraitée, c’est ce qu’ils disent tous : le jour où...
Quelqu’un frappe à la porte, Maître Bardot :
- Bonjour Jeanne. René n’avait pas de famille et comme vous êtes l’héritière de son bien tout le monde pense que c’est à vous de prendre en charge l’enterrement. Je sais que ce n’est pas simple : il était catholique et cette religion n’aime pas trop les suicidés !
- Je ne pense pas que René était tellement religieux! Je vais aller voir le curé de la paroisse. Il y a certainement dans la tombe de sa femme Rosette une place pour lui.
- Et non ! C’est à la mairie que vous devez aller.
- Je ferai tout ce qu’il faut pour qu’il ait un bon voyage de l’autre côté. Nous n’irons pas au funérarium comme pour l’Oncle Vincent. Et le verre de l’amitié se fera dans son jardin.
- Votre jardin maintenant !
- Par pour longtemps vous pouvez me croire !
- À bientôt Jeanne !
Je n’ai qu’une envie : aller au lit et me réveiller après l’enterrement ! Sûr que je n’ai pas pu le faire pour moi mais je vais le faire pour vous ! Et maintenant que tout est fini comme dans la chanson je peux vous l’assurer : tout s’est bien passé et René et sa femme « requiescant in pace » dans le cimetière communal.
Aujourd’hui c’est samedi et Mathilde arrive lundi 24 Juin à Fréjorgues. Pour le moment elle restera avec moi à la maison jusqu’à l’accouchement. Je n’ai rien dit à personne dans le village. Ce sera la surprise pour tout le monde, surtout le ventre. Heureusement que son homme n’est pas venu avec elle. Mais un jour il faudra bien et alors ce sera le scandale au village.
Bon et demain comment allons-nous nous retrouver ? Pour moi la rancune s’il y en a eu n’existe plus. Tant de choses ont changé dans ma vie depuis le mois d’octobre ! Peut-être que je suis une autre femme : plus jeune ou peut-être plus vieille...
Ce matin je suis allée à Béziers et j’ai acheté des rideaux pour la chambre de Mathilde : avec des fleurs jaunes et rouges et des oiseaux verts et bleus, le printemps et l’été sont entrés ensembles plein de joie dans la maison pour la Saint Jean ! Avec la machine ça a été vite fait : Hôtel 4 étoiles ! Et maintenant j’essaie de me souvenir ce qu'elle aimait le plus manger : la friture de poissons à la catalane, les côtelettes d’agneau, les haricots, la salade verte, le fromage de chèvre... Ça suffit pour commencer : il y aura tout dans le frigo. Cuire sera vite fait.
Maintenant c’est dimanche. Angèle la voisine amoureuse de René est venue me voir pour s’excuser de ce qu’elle m’avait dit.
- Ô Madame Jeanne je sais bien que vous ne l’avez pas tué et de toutes façons je me souviens de ce qu’il vous a fait dans votre jeunesse quand il a fait un enfant à la Rosette. C’est de sa faute si vous êtes restée vieille fille ! Mais vous comprenez maintenant qu’il n’est plus là je suis toute seule ! Ça me fait pleurer. Je lui ai apporté son dîner tous les jours depuis la mort de Rosette. Chaque fois je lui demandais ce qui lui plairait. Je connais les hommes, je suis restée quarante ans avec mon Edmond. Évidemment vous ne pouvez pas savoir parce que vous avez été seule toute votre vie. Ce n’est pas simple pour un homme d’être veuf et c’est pour ça que les femmes vivent plus longtemps que les hommes. Maintenant ma vie est une friche : plus de René pour discuter du village et des gens !
Je l’ai prise dans mes bras cette petite femme bravette avec son chignon cendré et je l’ai embrassée.
- Vous pouvez venir me voir quand vous voulez, ça me fera plaisir Angèle !
- Eh bé vous êtes bien brave ! Je n’aurais jamais cru qu’un jour ce serait possible de discuter avec vous comme avec une amie ! Je n’oublierai pas de venir Jeanne, avec plaisir !
Demain je dois être à dix heures du matin à Fréjorgues. Le bonheur s’infiltre partout dans mes veines. L’histoire recommence au début : demain nous serons toutes les deux sur la terrasse comme l’année dernière à la même date. Le retour de l’enfant prodigue !
Au lit Madame que demain tout va changer !
Maintenant je suis assise devant la sortie « arrivée » de l’aéroport. Évidemment comme tous ceux qui vivent à la campagne, les paysans, je suis arrivée une heure avant l’heure. Il faut bouger un peu Jeanne, aller boire un café et lire un journal.
Ça me plaît de regarder les voyageurs qui s’en vont on ne sait pas où, peut-être de l’autre côté de la terre. J’ai commencé à lire un article sur les vignes du Languedoc et ils disent que le vin est de mieux en mieux et qu’il y a beaucoup d’américains qui achètent des vignobles dans le pays.
- Jeanne ! Je suis là ! Viens m’aider, les valises sont lourdes !
- Mathilde ! Ma fille ! Si jolie !
Je la prends dans mes bras mais avec le ventre c’est pas simple. Nous nous embrassons sans arrêt tout en criant comme deux enfants :
- Est-ce que je peux t’appeler « maman » ?
- Pourquoi pas ? Ça me ferait plus tôt plaisir à mon âge ! Oh ! Tu as changé la couleur de tes cheveux et tu n’as pas grossi. Sans le ventre tu dois être maigre !
- Et tu as changé de look aussi : tu es plus comme une dame de la ville. Plus de cheveux gris, des jeans de jeune fille, une chemise pleine de couleurs. Mais je t’ai reconnue Madame Jeanne !
- Et moi aussi Mademoiselle Mathilde ! Tu es toujours belle ! Rentrons à la maison !
Nous sommes dans la voiture. Mathilde est tellement heureuse de voir le paysage. Ça a été la même chose pour moi quand je suis revenue il y a deux semaines. Tout semble petit ici mais avec un grand choix de couleurs et on peut voir la campagne et surtout les vignes de chaque côté de la route. Dans l’autre pays il n’y a que des autoroutes avec des arbres gigantesques et gris de chaque côté qui cachent le paysage. Mathilde est heureuse des couleurs de sa chambre et elle n’arrête pas de dire : cool ! so cool !
J’ai préparé le dîner sur la terrasse : la friture de poissons avec l’aïoli. Quand Mathilde revient elle s’est changée : une chemise longue, légère et claire que je n’avais jamais vue.
- Où as-tu trouvé cette robe ?
- C’est Fred qui me l’a achetée quand il est allé voir sa mère pour Noël à Montego Bay.
- C’est où ?
- Une ville de son pays la Jamaïque.
- Tu as une photo de Fred ?
- Non. Mais je pense que je ne veux plus le voir. À chacun sa route !
- Je croyais que c’était le père de ton enfant ?
- L’un n’empêche pas l’autre ! Mais si je suis revenue ici c’est que l’histoire était finie ! Cette vie ne me plaisait plus. Sûr que c’est un bel homme, intelligent et tout et tout. Mais le monde de la musique quand on n’est pas musicien ce n’est pas pour moi. Dans la vie je ne veux pas être derrière et je veux décider quel chemin suivre.
- Et ton enfant n’aura pas de père !
- Il aura la couleur de sa peau et quand il sera grand s’il veut il pourra aller rendre visite à son père à New York ou à Montego Bay. Et peut-être que je trouverai un autre père pour lui, qui sait ? Et Rémy ?
- Il sera ici la semaine prochaine. Il est retraité et si tout se passe bien nous allons vivre ensemble ici et ailleurs...
- Est-ce que j’aurais la chance de rester ici quand vous serez ailleurs ?
- Pour le moment c’est la fête de la Saint Jean et une fête que je n’ai jamais vue : le Total Festum. Tu vas aller te reposer et on ira danser.