Entretien avec Alberte Forestier [Son documentaire]
Alberte Forestier, née Labrunhie, à Metge (petit hameau de la commune de Figeac surplombant le domaine du Surgié) où elle a toujours vécu, est décédée le 23 janvier 2015.
Elle conservait depuis l’enfance un sentiment de différence. Déjà à l’époque où elle fréquentait l’école primaire, les filles qui venaient, comme elle, d’un milieu paysan n’avaient pas le même statut que celles qui étaient issues d’un milieu ouvrier ou commerçant qui se considéraient comme « de la ville ». La pratique quotidienne de la langue d’Oc accentuait cette différence avec les filles qui utilisaient exclusivement le français.
« Je suis d'un pays où l'on parlait couramment occitan, en famille, avec les voisins, sur les foires, dans les petits magasins… ».
Baignée dans la culture occitane, elle se souvenait avec délectation des contes, des légendes populaires et des chants traditionnels qui avaient rythmés son enfance. Toujours prête à raconter les vicissitudes de son Quercy natal, elle aimait faire partager son univers quotidien au plus grand nombre. Dans sa ferme de Metge, elle avait organisé à plusieurs reprises des repas « à l’ancienne » qu’elle préparait elle même, des veillées, des feux de la Saint Jean etc. Lors de ces occasions, le conte, le récit et la musique prenaient toujours une place importante. Alberte Forestier avait intégré, en tant que présentatrice, conteuse et chanteuse, le groupe folklorique cardaillacois L’Auglaneto. Sur les ondes de Radio Présence, qu'elle avait rejoint en 2002, elle animait une émission hebdomadaire « Occitania ». Son authenticité et sa présence vocale faisait d'elle une des figures de proue de la programmation de cette radio locale. Elle maniait à merveille la truculence, l'autodérision et un certain sens de l'absurde. Elle essayait d’être éclectique en mêlant des lectures d’auteurs, tels Jean Boudou ou Frédéric Mistral, avec des contes et récits locaux. Véritable puits de science, les médias s'entichaient de cette personnalité cultivée et attachante.
Amoureuse de la chanson, Alberte ne cessait de transmettre sa passion pour sa langue singulière. Avec sa posture vocale particulière, elle cultivait un registre chanté assez grave, proche de la voix parlée. Son timbre de voix était de suite repérable. Avec ce particularisme vocal elle n’avait pas pu pleinement intégrer une chorale académique et avait préféré l’esthétique et le répertoire du groupe de chants traditionnels de l’école de musique de Figeac. Elle s'adonnait au chant dans divers festivals où elle se produisait. Avec ses deux fidèles acolytes, Xavier Vidal, qui l'accompagnait au violon ou à l'accordéon, et Jean-François Prigent à la guitare électronisée, elle assurait le show. Lors de ces évènements, elle avait rencontré des « pointures musicales ». Parmi eux, André Minvielle, Lionel Suarez ou encore Bernard Lubat.
Pour ce qui est du répertoire des contes, le chanteur limousin Jan de Melhau avait réalisé un film dans lequel une large place avait été donnée à Alberte Forestier.
L’association La Granja avait également consacré à Alberte Forestier un recueil accompagné d’un cd de chants et contes.
Bien qu’issue d’une pratique traditionnelle du quotidien et du familial, Alberte Forestier baignait aussi dans un milieu occitaniste et dans le milieu de la scène et du spectacle. Bien que reconnue sur le plan artistique, elle conservait une certaine modestie en se référant toujours à son fort ancrage dans son milieu paysan d’origine.
Entretien avec Alberte Forestier [Son documentari]