Les Ballets occitans de Toulouse sont une compagnie de spectacle vivant créée en 1962 par Françoise Dague. La compagnie a joué un rôle majeur pour le renouveau culturel occitan, en particulier en matière de musiques et danses dites traditionnelles ou populaires et fut à l’origine de la création du Conservatoire occitan de Toulouse. [imatge id=21632]
[imatge id=21633] Originaire du Limousin, Françoise Dague est immergée dans la culture populaire et la langue occitane par l’action de sa mère, Cécile Leygue-Marie (1905-1988), ingénieure-agronome, folkloriste réputée, passionnée de costume traditionnel qui, au contact du monde rural par son métier, va constituer une collection de premier plan aujourd’hui exposée au Musée des Jacobins à Auch. [imatge id=21635]
La création des Ballets occitans dès le début des années 1960 participe d'une volonté de mettre en valeur la culture occitane au travers d'une troupe de musiciens-danseurs-chanteurs professionnels. Diplômée des Beaux-Arts, connaisseuse experte du costume traditionnel des pays occitans, chanteuse, danseuse, elle est aussi une grande costumière.
La troupe fait figure d'ambassadrice et de vitrine d'une culture occitane décomplexée, fière de ses héritages et spécificités culturelles - musique, danse, costume, langue, etc. - qu’elle rend ainsi « digne » du spectacle professionnel. Les ballets jouent en Occitanie et dans le monde entier : tournées en Grèce (1963), Allemagne (1964), Turquie (1965), Suisse (1966), Israël (1967), Hollande (1968), etc. La compagnie enregistre plusieurs disques, dont les deux premiers, en 1967 et 1969, sortent chez Philips. [imatge id=21634]
Le modèle de référence est celui des Ballets russes d'Igor Moïsseïev, c'est-à-dire une compagnie artistique de spectacle contemporain dont l’esthétique est enrichie de la culture folklorique authentique dépouillée de tous oripeaux susceptibles de la caricaturer.
Cette création s’inscrit dans un premier moment du revivalisme culturel avec la création de compagnies qui proposent des prestations scéniques mettant en valeur les danses et les costumes traditionnels : le Ballet national de danses françaises créé en 1961 par Jacques Douai et Thérèse Palau ou encore les Ballets populaires poitevins.
Véritablement pionnière, créée une décennie avant le grand mouvement de renouveau folk, le projet évolue au fil du temps : aux musiciens de type académique, interprétant les œuvres sur des instruments d'orchestre symphonique, se substitue une recherche organologique afin de retrouver et de réutiliser des instruments traditionnels occitans tels que le graile (hautbois du bas-Languedoc), la bodega (cornemuse de la Montagne noire), la boha (cornemuse gasconne), etc. Le chant, la diction sont travaillés, ainsi que les pas de danse afin de se rapprocher d'un rendu aussi proche que possible de la réalité traditionnelle.
En recherche permanente d’authenticité et d’originalité esthétique, la compagnie des Ballets occitans et Françoise Dague sont à l’origine d’importants fonds de collectes ethnographiques et ethnomusicologiques. Elle est à l’origine de la création à Toulouse, en 1971, du Conservatoire occitan chargé dès son origine de conserver et valoriser les fonds d’enquêtes orales, de transmettre les pratiques musicales et dansées mais aussi des cours de langue occitane par des ateliers publics et très vite de conserver les savoir-faire instrumentaux et de fournir aux musiciens de plus en plus nombreux des instruments avec des ateliers de facture instrumentale.
Les ballets occitans accueillent toute une nouvelle jeune génération qui sera ainsi sensibilisée et formée, parmi laquelle débute de nombreuses personnalités du renouveau culturel occitan contemporain : Jean-Pierre Lafitte, Claude Sicre, Rosina de Pèira, Pierre Corbefin, Xavier Vidal, etc.
Les Ballets occitans ont disparu à la fin des années 1980. Les archives de la compagnie (enregistrements et captations de spectacle, photographies, dossiers documentaires, etc.) sont conservés an Conservatoire occitan des musiques et danses traditionnelles (COMDT).
Né à Marseille, André Benedetto (1934-2009) est un auteur de théâtre, metteur en scène et comédien.
Il crée en 1961 la Nouvelle Compagnie d’Avignon avec le comédien et metteur en scène avignonnais Bertrand Hurault. En 1963, la compagnie s’installe dans une salle jouxtant le cloître des Carmes, qui devient le Théâtre des Carmes, devenue un lieu-référence du théâtre contemporain. C’est ici qu’André Benedetto « invente » le Festival Off en 1966-1967.
L’année 1973 marque l’arrivée d’André Benedetto et de la Nouvelle Compagnie/Théâtre des Carmes d’Avignon dans le mouvement culturel occitan. Depuis le début des années 1960, André Benedetto aborde dans ses pièces les grands thèmes d’actualité et de la société (Le Pilote d’Hiroshima, 1963, Les voyous, 1965, et surtout Napalm en 1967, première pièce française sur le Vietnam). Benedetto et sa compagnie mènent une critique féroce de la politique de décentralisation théâtrale, dont le festival d’Avignon est le symbole. Ils initient le festival Off et publient un manifeste contre la politique culturelle institutionnelle.
Toujours à la recherche de nouveaux thèmes et formes de création, il se tourne en 1973 vers l’Occitanie. Il initie une réflexion sur le théâtre populaire comme théâtre enraciné dans un territoire, un environnement social et culturel.
Du 10 au 24 juillet 1973, en plein XXVIIe Festival d’Avignon, il met à disposition le théâtre des Carmes pour des « Rescontres occitans ». Cette année-là deux pièces de la Nouvelle Compagnie sont programmées officiellement au Festival d’Avignon, La Madone des ordures et Pourquoi et comment on a fait un assassin de Gaston D. qui revient sur l’affaire Dominici.
André Benedetto met le théâtre des Carmes à la disposition du Teatre de la Carrièra qui joue La Guerre du vin, monte une librairie éphémère spécialisée dans la littérature et les problèmes occitans, distribue dans la rue un journal militant, Esclarmonda et organise le soir du 14 juillet un « bal des ethnies » en opposition au bal « national » de la ville.
Écrivains, acteurs, artistes, metteurs en scène, intellectuels et militants occitans se rassemblent autour de ces Rescontres occitans d’Avignon, qui marquent un moment de convergence des acteurs culturels occitans qui se structureront en 1977 autour de deux collectifs, l’Action Jeune Théâtre (AJT) et l’Accion Culturala Occitana (ACO).
[imatge id=166]André Benedetto entame dès 1974 une collaboration avec Félix Castan, figure idéologique du mouvement occitan de l’Après-Guerre, penseur de la régionalisation de la culture. La collaboration Castan-Benedetto produit notamment Le Siège de Montauban en 1974 dans le cadre du festival d’Occitanie, pièce historique montée avec les habitants de la ville.
Il est membre de la Linha Imaginòt, le collectif occitan et littéraire créé autour de Félix-Marcel Castan, dont il est proche, ainsi que de Bernard Lubat et de l’écrivain Bernard Manciet. Réfléchissant sur la décentralisation culturelle, André Benedetto travaille avec Serge Pey, avec qui il organise à Toulouse les premières Nuits de la Poésie. Il compose et jour en 1999 la pièce occitane San Jorgi Roc.
Bernard Manciet est un écrivain originaire des Landes, né à Sabres en 1923 et mort à Mont-de-Marsan en 2005.
Il débute sa scolarité à Sabres avant de partir à Talence et Bordeaux pour passer son baccalauréat. Il fait des études de lettres et de sciences politiques à Paris. Bernard Manciet est mobilisé quelques temps comme sous-officier dans la zone d'occupation française en Allemagne. Il revient à Paris et reprend ses études en sciences politiques. Il sert ensuite dans les services diplomatiques, d’abord en Allemagne puis, en 1953 en Amérique du Sud. Il revient dans les Landes en 1955, il se fixe à Trensacq où il fonde une famille et gère l'entreprise de sa belle-famille (les établissements Dayon et Manciet) dans le secteur de la scierie. En 1965, il quitte son travail à la scierie familiale pour se consacrer pleinement à l'écriture.
Il avait commencé à publier dès l’Après-Guerre, notamment dans Reclams, la revue littéraire de Béarn et Gascogne dirigée par Miquèu de Camelat. Son premier poème, « A le nèu », paraît à l’été 1945 (Reclams de Biarn e Gascougne, Annada 49, n° 07-09 - Garba-Seteme 1945) À partir des années 1960 il se réalise dans la poésie, le roman, l'essai ou encore les pièces de théâtre. Le fil conducteur de cette œuvre est l'occitan gascon « negue » (parler noir) des Landes, dont il se disait le « renard ».
En 1964 paraît le roman Lo gojat de noveme (Toulouse : Institut d'Estudis Occitans), considéré comme l’une des œuvres majeures de la littérature occitane du XXe siècle. Lo gojat de noveme est le nom que donne Bernard, le narrateur, à cet étranger qui vient chaque année au Barrail pour quelques jours puis reprend son chemin vers on ne sait quel destin. Une année, il ne réapparaît pas. Commence alors une longue attente d'une famille écrasée par la misère et l'isolement.
Il devient dans ces années-là une figure importante du mouvement intellectuel et littéraire occitan. Il participe pour un temps aux débats occitanistes au sein de l’Institut d’estudis occitans aux côtés d’autres grandes personnalités de sa génération. Membre puis secrétaire de l'Institut d'Estudis Occitans, il s’oppose au cours des années 1950, aux côtés de Félix Castan, à la voie nouvelle lancée autour de Robert Lafont qui souhaite un élargissement de la pensée et de l’action de l’IEO aux champs économiques, sociaux et politiques. Il cosigne avec Félix Castan « La Déclaration de Nérac » en 1956, véritable manifeste contre la nouvelle doctrine économiste et politique initiée par Lafont et qui tente de définir le cadre d'une nouvelle approche stratégique et esthétique culturelle. Il rompt avec l’IEO en 1964 : à l’Assemblée générale de Decazeville (6 septembre 1964) les opposants à la pensée et la stratégie économiste et politique (Ismaël Girard, Félix Castan et Bernard Manciet) sont exclus.
Bernard Manciet est actif pour la création et la diffusion de la création littéraire occitane. Il prend la direction de la grande revue de la modernité littéraire occitane OC (fondée en 1923).
Bernard Manciet n’a cessé de répéter que son modèle était la parole populaire et l’éloquence sacrée, et que le poème écrit n’était qu’une étape vers sa profération. À partir des années 1980 il devient lecteur public de ses propres poèmes. Il prend part à de nombreux évènements, comme le Festival occitan d'Eysines en 1987, où il rencontre le jazzman Bernard Lubat avec lequel il se produit à plusieurs reprises notamment dans le cadre du festival d’Uzeste.
Il est reconnu dès les années 1960 par le monde de la littérature occitane comme l'un des auteurs majeurs de la modernité. En 1972 René Nelli écrit qu'il est certainement l'un des grands poètes méconnus de l'Europe moderne (René Nelli, La poésie occitane des origines à nos jours, Paris : Seghers, 1972). La publication, en 1989 de son long poème en 16 chants L'Enterrament à Sabres (Garein : Ultrei͏̈a, 1989 ; 2e ed. : Paris : Gallimard, 2010) lui permet d'accéder à une reconnaissance nationale et internationale. Son dernier livre Casaus perduts (Pau : Reclams, 2005) est un recueil de contes où se mêlent douceur et ironie face au temps qui passe.
Si les appellations diffèrent selon les régions, les balètis, bals gascons, bals auvergnats, bals trads, elles recouvrent un même phénomène social et culturel, le renouveau du bal dit « traditionnel ». Ce phénomène, observable dans l’Europe entière et objet d’une reconnaissance institutionnelle (Inscription du fest-noz breton sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité en 2012), est le signe d’une évolution générale de la société vis-à-vis de formes musicales et dansées qui ont pâti au cours du XXe siècle de la fin de la société rurale traditionnelle et de ses sociabilités locales mais également d’une image dévalorisée qui a rompu les transmissions, traditionnellement orales et de génération en génération (perte des savoir-faire en matière de facture instrumentale, perte des répertoires musicaux, perte des formes dansées, etc.)
Au contraire aujourd’hui, les bals traditionnels sont particulièrement populaires chez les jeunes générations et investissent autant l’espace rural que l’espace urbain.
Leur revitalisation à compter des années 1970 s’appuie sur les grandes vagues d’enquêtes ethnographiques, ethnomusicologiques qui ont permis de collecter répertoires, formes chantées et dansées, savoir-faire auprès des dernières générations de transmission par tradition orale.
Un bal traditionnel n’est pas exactement la reproduction d’un bal de tradition local tel qu’il pouvait se dérouler dans la société rurale traditionnelle. Patrimoine vivant, il recouvre des formes, des calendriers, des modes d’organisation et des fonctions sociales et culturelles à la croisée des héritages et des usages et représentations de la société actuelle.
On y danse sur des musiques arrangées et revitalisées selon des influences diverses. Les musiques peuvent être issues de répertoires traditionnels ou créées par des musiciens pour la danse. Les instruments eux aussi peuvent être traditionnels des pays d’Oc, comme le violon, l'accordéon diatonique, les cornemuses (boha en gascogne, bodega ou craba de la Montagne noire, cabrette ou chabrette en Auvergne et Limousin, etc.), la vielle à roue ou les flûtes ou bien se mêler aux instruments contemporains (guitare électrique, basse, batterie, etc.)
Danser en pays d’Oc
La danse est l'une des activités ludiques les mieux partagées de l’ancienne société traditionnelle. La redécouverte des danses traditionnelles dans les années 1970, la collecte des anciens danseurs, ont abouti à un fort mouvement de pratique à travers de nombreux ateliers et plus encore de fêtes et de bals qui jalonnent le calendrier annuel.
Les différents pays d’Oc ont tous une danse emblématique même si la société actuelle a tendance à les compiler pour diversifier la pratique des bals. La bourrée est la danse emblématique de l’Auvergne et du Limousin, tandis que Congò et rondeau recouvrent Gascogne centrale et Haut-Agenais, branle et sauts dans les Pyrénées.
Au-delà des pratiques dansées spécifiques à un territoire, on retrouve bien sûr les pratiques dansées communes (valses, polkas, scottishes ou mazurkas), issues des danses de salon qui se sont développées en Europe au XIXe siècle, se sont diffusées dans les pratiques dansées populaires non sans adaptations stylistiques locales.
Le Centre international de recherche et documentation occitanes (CIRDOC) - Institut Occitan de Cultura est un établissement public de coopération culturelle, créé en 2019 à partir de la fusion de deux organismes, le Centre interrégional de développement de l’occitan (Béziers) et de l’Institut Occitan d’Aquitaine (Billère).
Le nouvel établissement, implanté sur ses deux sites - la Mediatèca à Béziers et l’Etnopòle Billères a pour mission la sauvegarde, la connaissance et la promotion de la culture occitane.
Établissement public de coopération culturelle, à vocation nationale et internationale, fondé et administré par neuf collectivités publiques - État (Ministère de la Culture), régions Occitanie et Nouvelle-Aquitaine, Ville de Béziers, départements de l’Hérault, des Pyrénées-Atlantiques et de l’Aude, communautés d’agglomération de Pau-Béarn-Pyrénées et Béziers-Méditerranée - la création du CIRDOC - Institut occitan de cultura marque une nouvelle étape dans la mise en œuvre des politiques publiques en France en faveur des langues et cultures dites régionales.
En 1975, un an après le succès de l’exposition Mille ans de littérature occitane (Béziers, Musée des Beaux-Arts), l’écrivain et activiste occitan Yves Rouquette, alors professeur au lycée de Béziers, convainc la Ville de soutenir son projet de « bibliothèque nationale occitane ». Aux côtés de nombreux écrivains, artistes, chercheurs et militants, il crée une première association, le Centre international de documentation occitane (CIDO). Le CIDO voit affluer dons d’archives et bibliothèques privées et mène une active politique d’acquisition afin de constituer une collection encyclopédique et représentative de la richesse et de la diversité des expressions culturelles, scientifiques, intellectuelles et sociales occitanes des origines à nos jours.
Le CIDO se professionnalise et acquiert rapidement une reconnaissance des institutions (collectivités locales, universités, Bibliothèque nationale, ministère de la Culture, etc.) Au tournant des années 1970 et 1980 il est l’organisme intégralement dédié à la culture occitane le mieux doté en matière d’emploi et de métiers. Il mène de nombreuses actions de promotion et diffusion des savoirs et de la création occitane : exposition, rencontres, publications.
L’association entre en crise dans les années 1990, due aux crises internes de l’occitanisme de la période (courant universitaire et courant populaire) mais également à l’émergence des politiques publiques régionales en matière de valorisation de la langue et de la culture occitanes. La crise aboutit à la fin de l’activité de l’association en 1995, reprise en 1998 par un nouvel établissement, public, coadministré par la Ville de Béziers et la Région Languedoc-Roussillon.
Dans les mêmes années, les acteurs du mouvement occitan en Béarn posaient avec le Département des Pyrénées-Atlantiques les jalons d’une politique publique en faveur du développement de l’occitan qui suscite notamment la création de l’Institut occitan.
Celui-ci devient rapidement l’opérateur de la région Aquitaine et de l’État pour l’accompagnement de projet et la structuration de l’action en faveur de l’occitan. Au cours des années 2000, suite à la convention Unesco pour le patrimoine culturel immatériel, l’Institut occitan d’Aquitaine va développer une expertise scientifique et professionnelle, en lien avec l’Université de Pau, pour l’accompagnement des projets d’inventaire, sauvegarde et valorisation du patrimoine culturel immatériel occitan.