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Lou Tresor dóu Felibrige : le dictionnaire de référence de la création littéraire occitane
CIRDOC - Institut occitan de cultura

Résumé

Lou Tresor dóu Felibrige est un dictionnaire provençal-français, au caractère presque encyclopédique. Il aura fallu une trentaine d’années à Frédéric Mistral (1830-1914) pour rassembler toute la matière de ce dictionnaire monumental, recueillie auprès d’écrivains et locuteurs de tous dialectes occitans ou bien puisée directement dans les sources écrites. C’est un ouvrage qui s’est imposé comme référence dès sa parution et jusque aujourd’hui.
Frédéric Mistral est l’un des fondateurs du Félibrige, association investie dans la défense de la langue occitane. Il souhaite par là encourager la création poétique comme élément moteur de la renaissance d’oc (il est l'auteur de Mirèio notamment, paru en 1859, et lauréat du prix Nobel de littérature en 1904), c’est pourquoi il destine son dictionnaire d’abord aux félibres (membres du Félibrige), d’où le titre de l’ouvrage. Pour autant, tous ceux qui s’intéressent à la langue et à la culture occitanes, félibres ou non, reconnaissent dès sa parution la qualité et l’utilité du Tresor.


Autres version du titre :

Le trésor du félibrige (traduction française du titre)

Présentation du contenu

Frédéric Mistral rédige à la suite de son titre une liste des points précis qui constituent le contenu de son ouvrage. Le lecteur est ainsi averti de ce qu’il pourra trouver lors de ses recherches :
« 1° Tous les mots usités dans le Midi de la France, avec leur signification française, les acceptions au propre et au figuré, les augmentatifs et diminutifs, et un grand nombre d’exemples et de citations d’auteurs ;
2° Les variétés dialectables [sic] et archaiques [sic] à côté de chaque mot, avec les similaires des diverses langues romanes ;
3° Les radicaux, les formes bas-latines et les étymologies ;
4° La synonymie de tous les mots dans leurs divers sens ;
5° Le tableau comparatif des verbes auxiliaires dans les principaux dialectes ;
6° Les paradigmes de beaucoup de verbes réguliers, la conjugaison des verbes irréguliers et les emplois grammaticaux de chaque vocable ;
7° Les expressions techniques de l’agriculture, de la marine et de tous les arts et métiers ;
8° Les termes populaires de l’histoire naturelle, avec leur traduction scientifique ;
9° La nomenclature géographique des villes, villages, quartiers, rivières et montagnes du Midi, avec les diverses formes anciennes et modernes ;
10° Les dénominations et sobriquets particuliers aux habitants de chaque localité ;
11° Les noms propres historiques et les noms de famille méridionaux ;
12° La collection complète des proverbes, dictons, énigmes, idiotismes, locutions et formules populaires ;
13° Des explications sur les coutumes, usages, mœurs, institutions, traditions et croyances des provinces méridionales ;
14° Des notions biographiques, bibliographiques et historiques sur la plupart des célébrités, des livres ou des faits appartenant au Midi.»

Note d’étude

Cet ouvrage s’inscrit parfaitement dans le vaste projet de renaissance linguistique occitane initiée au cours du XIXème siècle, notamment par Frédéric Mistral lui-même.

Ce dernier développe très jeune un sentiment d’attachement à la langue et à la culture d’oc, qui se mue rapidement en passion et le mène à la tête du mouvement de renaissance occitane. Mistral aurait eu d’abord l’intention de faire un supplément au dictionnaire d’Honnorat pour son propre usage sur un cahier qu’il fait ajouter sur son exemplaire acquis en 1853. Ce projet remonterait probablement à 1848, ou guère plus tard, et le résultat aura finalement constitué une sorte d’ébauche du Tresor dóu Felibrige. Mais c’est la création du Félibrige en 1854 qui donnera tout son sens à cette entreprise, menée avec une détermination inébranlable. Le Félibrige étant une association de poètes occitans dont l’objectif est de redonner à la langue occitane ses lettres de noblesse, il convient de fournir aux félibres un instrument pour appuyer une création littéraire riche et de qualité, capable de motiver et de pérenniser l’usage de la langue. C’est pourquoi Mistral se lance dans un travail extrêmement ambitieux d’inventaire des termes occitans, accompagnés le plus souvent possible de citations d’auteurs occitans de tous dialectes depuis les troubadours en passant par les poètes baroques et jusqu’aux poètes contemporains. Mistral entend par là mettre en relief à la fois l’unité de la langue et sa grande diversité mais aussi faire de son Tresor le témoin et le révélateur de sa vitalité à travers les âges.

Pour alimenter son dictionnaire, Mistral s’appuie à la fois sur des témoignages de personnes et sur des documents écrits. Il sollicite d’une part ses nombreux correspondants, pour la plupart écrivains, éditeurs, linguistes romanistes, mais aussi plus simplement des amis, connaissances ou personnes rencontrées à l’occasion, et qui ont pour la plupart une pratique de la langue naturelle et quotidienne. Il a par ailleurs à sa disposition une infinité d’œuvres littéraires et de dictionnaires, lexiques, glossaires dans lesquels il a largement puisé. D’ailleurs, la trentaine d’années passée entre l’apparition des félibres et la parution des deux tomes du Tresor a fait de ces poètes à la fois la source et la finalité de l’ouvrage. Parmi les ouvrages de lexicologie utilisés par Mistral, le dictionnaire d’Honnorat1 peut être considéré comme la source principale, traitée cependant avec une certaine liberté par Mistral : on constate quelques variations entre les deux, des différences de citations, des variations de sens, quelques omissions ou enrichissements. Pour le reste il n’a pas hésité à exploiter quantités d’autres travaux lexicographiques, anciens ou contemporains, publiés ou à l’état de manuscrits, parfois en cours d’élaboration, ceci afin d’assurer la fiabilité de son inventaire, particulièrement pour les parlers qui n’étaient pas le sien. À l’article « diciounari », on trouve une trentaine de titres dont on se doute qu’il les a utilisés, mais d’autres sources nous sont peut-être encore inconnues.

L’étude des manuscrits de travail de Mistral serait intéressante pour comprendre la progression des travaux jusqu’à la forme définitive du dictionnaire. Il existe trois manuscrits, qui seraient en quelque sorte trois étapes de l’élaboration du dictionnaire : le premier est très sommaire, il ne comporte que les termes et leur traduction, puis s’étoffe au fur et à mesure de l’avancée des travaux de Mistral ; le second fait apparaître toute la matière du Tresor mais à l’état de brouillon, avec des annotations marginales ; le troisième est une version au propre du deuxième, peut-être à l’attention de l’imprimeur, avec encore quelques annotations. Mais ces trois manuscrits sont déjà des compilations de notes probablement éparses, sur feuilles volantes dont on n’a apparemment plus de traces.2

La première édition du dictionnaire paraît chez Remondet-Aubin, à Aix-en-Provence, en plusieurs temps et de nombreuses années après l’initiation du projet d’élaboration. Le premier des 60 fascicules est publié en 1879 et le dernier en 1886. Entre temps, le premier tome (A-F) paraît en 1882 et le second en 1886. Mistral a suivi de très près toutes les étapes de la fabrication (mise en page, impression) puis la diffusion (prospectus de présentation, réception des souscriptions et expédition des fascicules, entente avec les libraires-diffuseurs).3 Elle contient un sonnet de Mistral en guise de préface : « Au Miejour », ainsi qu’un supplément et quelques additions.

S’il est possible que Mistral ait lui-même envisagé une réédition de son ouvrage, elle n’a pas vu le jour, du moins de son vivant. La première réédition est l’édition « du Centenaire », sous-entendu de la naissance de Mistral, parue chez Delagrave, en 1932 à Paris. La réimpression de l’ouvrage est accompagnée d’une documentation iconographique et d’une préface de Mme Marie Frédéric Mistral. On trouve à la suite des additions de Mistral une strophe de F. Vidal, « Sus lou Tresor dóu Felibrige », daté de 1886 ainsi qu’un extrait du « discours du Président de la République R. Poincaré, venu, le 14 octobre 1913, saluer à Maillane l’”Homère” de Provence ».
Une réimpression du dictionnaire paraît en Allemagne, chez Biblio-Verlag, à Osnabrück en 1966.
En 1968, une troisième édition paraît chez Ramoun Berenguié à Aix-en-Provence. Pierre Rollet y fait figurer un avant-propos et deux articles placés à la fin du second volume, l’un sur le Tresor dóu Felibrige et l’autre sur le mot « Oucitan ». Il ajoute aussi des « notes manuscrites de Mistral relevées sur son exemplaire du Tresor dóu Felibrige conservé au Museon Mistral » ainsi qu’un « supplément établi d’après les notes de Jules Ronjat ».
À l’occasion du centenaire de la publication du Tresor, une exposition a lieu, suivie d’une nouvelle édition parue chez Édisud, à Aix-en-Provence en 1979, préfacée par Jean-Claude Bouvier (linguiste). Cette préface, ou introduction, contient plusieurs chapitres très documentés autour de l’élaboration du Tresor du Felibrige, ainsi qu’une bibliographie et des photos et reproductions.
La même année, une réimpression de l’édition de 1968 paraît chez C.P.M. Marcel Petit à Raphèle-lès-Arles.
Enfin, Prince Negue (Pau) propose en 2003 une réimpression en 4 tomes, sur laquelle ne figure pas la liste des éléments contenus dans le dictionnaire, insérée par Mistral à la suite de son titre.


Postérité de l’oeuvre

Le Tresor dóu Felibrige a été très positivement accueilli lors de sa parution, il a rencontré beaucoup de succès et reste encore à l’heure actuelle un ouvrage de référence dans le milieu occitan. Cela n’empêche pas quelques reproches : notamment le privilège que Mistral semble accorder à son propre parler, le provençal rhodanien, (probablement beaucoup pour des raisons pratiques d’accès à la langue mais peut-être aussi pour des raisons affectives) en plus du choix de la graphie félibréenne qui n’était pas unanimement acceptée, y compris dans le Félibrige, pour des raisons d’adaptation aux autres dialectes. D’un point de vue lexicographique, si la rencontre (et l’amitié) avec le chartiste Paul Meyer est sans doute pour quelque chose dans l’amélioration de son projet à partir des années 60 et si les talents de linguiste de Mistral ne sont déjà plus à prouver, cela ne fait pas pour autant de lui un expert : la visée de Mistral était d’ordre plutôt littéraire que véritablement scientifique et cela se ressent. Ainsi, le mérite de Mistral pour le travail qu’il a accompli n’est pas remis en cause mais sa rigueur est tout de même critiquée : les formes les plus fiables qu’il propose seraient celles concernant la langue rhodanienne, et les autres dialectes seraient parfois trop manipulés ou mal interprétés. Toutes les formes lexicales proposées ne seraient pas absolument authentiques. Autrement dit le Tresor ne devrait peut-être pas être utilisé comme référence unique par les linguistes : Mistral a été quelques fois soupçonné de se laisser aller à une forme de normalisation et d’esthétisation de la langue pour son utilisation poétique. Enfin la matière ethnographique conséquente contenue dans le Tresor n’est ni exhaustive ni spécialisée mais cela n’est pas vu comme un défaut : c’est une vision globale de la culture occitane car « l’étude d’une langue ne peut être séparée du contexte culturel dans lequel elle s’inscrit »4.

Ressources bibliographiques

Éditions :

Remondet-Aubin, Aix-en-Provence ; Roumanille, Avignon ; Champion, Paris : 1878-1886.

Delagrave, Paris : 1932, sous la direction de Victor Tuby.

Biblio-Verlag, Osnabrück : 1966.

Ramoun Berenguié, Aix-en-Provence : 1968. Préface de Pierre Rollet

Edisud, Aix-en-Provence : 1979. Préface de Jean-Claude Bouvier.

C.P.M. Marcel Petit, Raphèle-lès-Arles : 1979

Prince Negue, Pau : 2003, 4 tomes.

Études :

Jean Boutière. “De la genèse du Trésor de F. Mistral” in Actes et Mémoires du 1er Congrès International de Langue et Littérature du Midi de la France, 1957, p. 319

Jean-Claude Bouvier, Suzanne Estève et Jean-Maurice Rouquette. Mistral et la langue d’oc, Centenaire du Tresor dóu Felibrige. Catalogue de l’exposition organisée en 1979 par la Bibliothèque de Méjanes, l’Université de Provence et le Museon Arlaten

Marcelle d’Herde-Heiliger. Frédéric Mistral et les écrivains occitans dans le Tresor dóu felibrige. S.F.A.I.E.O., Pau, 1998, préface de G. Kremnitz

Hans-Erich Keller. “La valeur du Tresor dóu Felibrige pour les études lexicologiques occitanes” in Revue de linguistique romane, Nos 89-90, 1959, pp. 131-143

Charles Rostaing. “Le dictionnaire d’Honnorat source du Tresor dóu Felibrige” in Revue de Linguistique Romane, 1974, 38, p. 459

Ressources numériques

Le Tresor dóu Felibrige numérisé sur le site de Lo congrès : http://tdf.locongres.org/

Le Tresor dóu Felibrige numérisé par la Bnf : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k74854

Le Tresor dóu Felibrige numérisé par archive.org : https://archive.org/details/loutrsordufelibr01mist

 

1. S.-J. Honnorat. Dictionnaire provençal-français : ou dictionnaire de la langue d'oc ancienne et moderne. Suivi d'un Vocabulaire français-provençal (...). Repos, Digne, 1846-48

2. Jean Boutière. “De la genèse du Trésor de F. Mistral” in Actes et Mémoires du 1er Congrès International de Langue et Littérature du Midi de la France, 1957, p. 319

3. Pour ces précisions, voir Jean-Claude Bouvier, Suzanne Estève et Jean-Maurice Rouquette. Mistral et la langue d’oc. Centenaire du Tresor dóu Felibrige, catalogue de l’exposition organisée en 1979 par la Bibliothèque de Méjanes, l’Université de Provence et le Museon Arlaten

4. Citation de Jean-Claude Bouvier, tirée de Mistral et la langue d’oc. Centenaire du Tresor dóu Felibrige.

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Dossier documentaire autour de l'opéra Mireille

Le 19 mai 1864 est créé sur la scène du Théâtre Lyrique à Paris l'opéra Mireille de Charles Gounod. Quelques mois après sa grande création lyrique Faust, le compositeur voit dès la sortie du poème épique Mirèio de Frédéric Mistral une nouvelle occasion de s'éloigner des conventions de l'opéra-comique alors en vogue pour proposer une véritable œuvre lyrique, portant une réelle dimension poétique.

Contexte de production de l'oeuvre

Charles Gounod contacte alors Frédéric Mistral qui l'invite à venir passer quelques temps chez lui, en Provence afin de pouvoir s'imprégner du climat de Mirèio et comprendre pleinement sa dimension tragique en lien avec les paysages et traditions provençales. Le compositeur écrira son opéra en quelques semaines, en contact direct avec les lieux, la culture et l'atmosphère qui imprègnent l'ouvrage de Frédéric Mistral. Son œuvre porte ainsi des personnages et paysages simples et modestes en apparence, loin de la féerie qui imprègne les opéras de l'époque, mais portant en eux des sentiments intenses et une forte dimension tragique. Le compositeur cherche à restituer dans sa partition toute l'émotion que lui avait suscité la lecture de l'ouvrage original.

Ce voyage de Gounod en Provence représente un tournant dans l'histoire lyrique française car c'est peut-être la première fois qu'un compositeur lyrique part travailler sur les lieux mêmes où évolueront les personnages de son œuvre.

 

Michel Carré à qui était confié la rédaction du livret élabore également Mireille en contact permanent avec Frédéric Mistral. Il obtient de ce dernier l'autorisation de revenir sur la chronologie de l'intrigue et souhaite amener quelques petits changements au dénouement de l'histoire. L'auteur reste inflexible sur ce point et lors de sa création, l'opéra Mireille sera composé de cinq tableaux avec un dénouement calqué sur celui du poème épique.

Pourtant, dès les premières répétitions des changements doivent être apportés à la partition. Mme Carvalho, l'interprète du rôle-titre demande de nombreux aménagements et même l'insertion d'une valse-ariette, morceau plus léger, dénotant quelque peu avec la dimension tragique de Gounod avait voulu donner à l'ensemble de son œuvre. Dès la première représentation, face à la critique et réactions du public qui ne comprennent pas la mort de Mireille et le dénouement funeste, Charles Gounod et Michel Carré décident de modifier en profondeur l'opéra. Après des aménagements incessants, ce dernier est réduit à trois actes et se termine sur une fin heureuse, il sera joué dans l'état, vidant toute l'intrigue de sa puissance et dimension poétique. Il faudra attendre 1901 pour que Mireille soit joué dans sa forme première, et 1939 pour que Henri Busser rédige la partition critique de Mireille, qui fait encore référence aujourd'hui et est considérée comme seule conforme aux volontés originelles de Charles Gounod. C'est cette version qui avait notamment été utilisée lors de l'entrée de l'opéra au répertoire de l'Opéra de Paris en 2009.

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Mireille : partitions
La partition de Mireille fut composée durant les quelques mois que Charles Gounod passa en Provence en 1863. La partition originale évolua beaucoup lors des répétitions, notamment à la demande de l'interprète principale, Mme Miolan-Carvalho. 

Créé le 19 mars 1864 sur la scène du Théâtre Lyrique à Paris, cet opéra ne remporta pas dès le départ un franc succès ce qui précipita encore les remaniements amenés à la partition. La fin jugée trop tragique fut supprimmée et l'opéra initialement prévu en 5 actes n'en comporta plus que deux. 

Par la suite les différentes créations amenèrent leurs lots de modifications si bien, qu'en 1939 lorsqu'on voulut rejouer la version originale de l'opéra, on ne retrouva pas certaines des partitions originales.

Les différentes éditions de partitions peuvent ainsi nous donner une idée de l'évolution de la pièce et de sa composition musicale.
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Le Boeci : la plus ancienne œuvre littéraire en occitan
CIRDOC - Institut occitan de cultura
Le Boeci est un poème allégorique, paraphrase en langue occitane du traité stoïcien et néoplatonicien Consolatio philosophiae du philosophe et homme politique latin Anicius Manlius Severinus Boethius dit Boèce (480?-524). Il a vraisemblablement été composé en Limousin aux alentours de l’An Mil. Ce poème sur la vie de Boèce est connu par un manuscrit fragmentaire de 258 vers décasyllabes conservé au sein d’un recueil de manuscrits du fonds ancien de la Bibliothèque d’Orléans.
Le fragment du Boeci est considéré, avec la Canso de sancta Fides de Agen (Chanson de Sainte Foi d’Agen), comme une des plus anciennes œuvres littéraires composées en langue occitane.

Autres versions du titre :

Le manuscrit ne comportant aucun élément de titre, les différents éditeurs et critiques ont forgé différents titres depuis le début du XIXe siècle. Le titre Boeci est aujourd’hui adopté comme titre conventionnel (titre uniforme) [1].

Formes rejetées :

< Poème en vers romans sur Boèce (F. Raynouard, 1817)
< Boèce (P. Meyer, 1872)
< Boecis (V. Crescini, 1926)
< Fragments de la Vie de Boèce en langue romane

Exemplaires conservés :

Le Boeci est connu par une seule copie fragmentaire copiée à la fin d’un recueil de textes religieux conservé à la Bibliothèque d'Orléans : « Jérémie et Ézéchiel, suivis de sermons, du Cantique des cantiques et d'un fragment de la Vie de Boèce en langue romane ».

Le Poème commence au milieu de la page 269 et s’arrête à la page 275 par un mot coupé. Les 21 premiers vers (page 269) sont d’une écriture plus archaïque que le reste du fragment.

Provenance :

Le manuscrit provient de l’abbaye de Saint-Benoît-sur-Loire (abbaye de Fleury), dont la bibliothèque compose une importante partie du fonds ancien de la Bibliothèque d’Orléans, transféré lors de la Révolution française.

Mentionné au XVIIIe siècle par l’abbé Lebeuf dans l’une de ses Dissertations sur l’histoire civile et ecclésiastique de Paris, il est découvert par François Raynouard en 1813 dans les collections de la Bibliothèque d’Orléans.

Description du manuscrit :

Au sein d’un recueil, parchemin, 275 p. (XIe s.). Le Boeci a été copié à la fin du manuscrit (p. 269-275) sur des feuillets laissés blancs.

Identifiant (cote) :

Bibliothèque municipale d'Orléans, ms. 444 (ancienne cote : n° 374).

Description détaillée :

Voir la description complète du manuscrit dans le Catalogue général des manuscrits des bibliothèques publiques de France (sur le site du Catalogue collectif de France : ccfr.bnf.fr) :

http://ccfr.bnf.fr/portailccfr/jsp/index_view_direct_anonymous.jsp?record=eadcgm:EADC:D18013076

Étude :

1. Contenu du Boeci :

Le Boeci est un poème inspiré du traité De Consolatione Philosophae, rédigé par Boèce dans sa prison de Pavie, après qu'il ait été emprisonné en 520 par Théodoric le Grand, roi ostrogoth d'Italie et héritier de fait des empereurs romains d'Occident. Le fragment conservé, qui n’évoque que le début de la Consolatio Philosophae, constitue sans doute le commencement d’une œuvre beaucoup plus volumineuse. Initialement traité de morale stoïcienne influencée par le néoplatonisme, dépeignant de façon allégorique la consolation apportée au phisolophe incarcéré par la Philosophie, qui dialogue avec lui en abordant des concepts tels que la souffrance, la consolation, le déterminisme, la liberté, la providence, la justice ou la vertu. Boèce sera exécuté en 524 au terme de quatre années de détention. 

Si ce texte occitan est l’imitation d’une œuvre morale très célèbre au Moyen Âge, Robert Lafont et Christian Anatole ont fait remarquer que son auteur fait preuve d'un projet poétique : « L’auteur occitan a mêlé à ce texte de tradition cléricale des notations plus populaires qui appartiennent à la légende du saint. Il a surtout laissé aller son imagination à décrire l’échelle symbolique qui apparaît à Boèce peinte sur le vêtement de Dame Philosophie. Ce n’est pas un clerc seulement, mais un poète de métier. » De fait, en paraphrasant un texte allégorique mais aussi partiellement autobiographique, l'auteur se place à mi-chemin entre un traité de philosophie morale reformulé et une hagiographie de Boèce, considéré selon la tradition chrétienne comme un saint de l'Église catholique, bien qu'il n'ait jamais été canonisé. 

Le poème commence par un appel aux jeunes hommes dissipés (v. 1-19), puis évoque l’emprisonnement de Boèce (v. 20-157) et se termine avec l’apparition de la Dame (v.158-258). Le vers 258 est tronqué au début du second mot : « De pec… »

2. Le Boeci ou l'acte de naissance de la littérature occitane :

La plupart des historiens de la littérature occitane ont fait du Boeci une des plus anciennes œuvres d’expression occitane aux côtés de la Canso de sancta Fides de Agen.

L’émergence de l’occitan comme langue d’écriture se déroule dans un processus long, peu perceptible dans la documentation, qui s'opère entre le VIIIe et le XIe siècle. Le Boeci comme la Chanson de Sainte Foi marquent un tournant dans la mesure où la langue occitane y est autonome, contrairement aux documents antérieurs, où le conflit avec le latin est évident. Le cas de l’émergence de la scripta occitane est original : « Paradoxalement, la première des écritures ainsi mise en point ne fut pas administrative, mais poétique. En effet, la première charte dont la rédaction soit fondée sur l’emploi exclusif et autonome de la langue d’oc est datée d’avril 1102. D’autres chartes présentent à des dates plus anciennes des fragments qui, noyés dans le latin, se laissent identifier comme romans, mais dans un phrasé général qui ne s’est pas démarqué de l’usage du latin. (...) Ainsi, ce sont selon toute vraisemblance le poème sur Boèce et la Chanson de sainte Foi qui constituent aux alentours de l’an Mil la première affirmation nette de la romanité d’oc face à la tradition écrite latine. »

À partir de cette époque, la langue occitane comme langue d'écriture, de pensée et de création va se développer au point que moins d'un siècle plus tard, avec Guilhem IX et les premiers troubadours, le rapport de force entre le latin et l'occitan aura basculé en faveur de la seconde pour l'innovation poétique. À propos du fragment du Boeci, Robert Lafont écrit : « nous sommes aux sources d'une littérature nouvelle, déjà maîtresse de sa forme. »

Notons cependant que le Boeci ouvre davantage la voie à une prose religieuse d’expression occitane qu’à la lyrique des troubadours « qui s’opposeront tant à l’ancienne culture latine qu’à la nouvelle création poétique cléricale. » En effet, les topos de la Fin'Amor n'apparaissent encore nullement dans cette oeuvre nourrie des dialogues de Platon et de la pensée de saint Augustin, qui se rattache clairement à la culture de l'Antiquité chrétienne.

3. La datation de l’œuvre :

La datation du Boeci a donné lieu à beaucoup de spéculations depuis le XVIIIe siècle où Court de Gébelin (Discours préliminaire du Dictionnaire étymologique de la langue française, 1773-1782), le faisait remonter au IXe siècle.

La plupart des spécialistes s’accordent cependant sur la datation proposée dès le XIXe siècle par François Raynouard puis Paul Meyer, c’est-à-dire entre la fin du Xe siècle et plus probablement le premier tiers du XIe siècle selon l’étude linguistique très poussée de Vladimir Rabotine, dont les conclusions sont confirmées par les critiques postérieurs (René Lavaud et Georges Machicot, 1950 ; Christian Anatole et Robert Lafont, 1970). L’étude de Vladimir Rabotine, qui conclut à l’antériorité du Boeci sur la Chanson de Sainte Foi d’une vingtaine d’années, confirme que le fragment en occitan sur Boèce est bien « le plus ancien monument littéraire de la langue d’oc ».

L’étude de la langue du poème permet de l’attribuer à un auteur de la région limousine, sans doute un clerc de l’abbaye Saint-Martial de Limoges, grand foyer d’écrit religieux d’expression occitane. La copie aujourd’hui conservée à la Bibliothèque d’Orléans a sans doute été réalisée dans la même abbaye avant de rejoindre la librairie de l’abbaye de Saint-Benoit-sur-Loire.

Éditions et traductions :

1/ RAYNOUARD , François. Choix des poésies originales des troubadours, t. II, Paris, 1817. 
Aussi : RAYNOUARD (François), Fragment d’un poème en vers romans sur Boece…, Paris, 1817.

Première édition complète du texte et traduction française.

En ligne sur Occitanica : consulter le document.

2/DIEZ, Friedrich. Altromanische Sprachdenkmäler, Bonn, 1846, p. 39-72.

3/ BARTSCH, Karl, Chrestomathie provençale, Elberfeld, 1868.

4/ MEYER, Paul, Recueil d’anciens textes bas-latins, provençaux et français, Paris, 1877, 23-32

En ligne sur Gallica : consulter le document. 

5/ HÜNDGEN, Franz, Kritische Ausgabe des altprovenzalischen Boëthiusliedes unter Beifügung eines Commentars, Oppeln 1883.

Édition jugée « peu satisfaisante » par Vladimir Rabotine.

6/ CRESCINI, Vincenzo. Manualetto provenzale per uso degli alunni delle Facoltà di Lettere, Verona ; Padova, 1892, p. 1-5.

7/ APPEL, Carl. Provenzalische Chrestomathie, Leipzig, 1895, p. 147-151.

8/ BARTSCH, Karl. Chrestomathie provençale, 6e éd. entièrement refondue par Eduard Koschwitz, Marburg, 1904.    

9/ BOSELLI, Antonio. Il Boecis in antico provenzale secondo la lezione dell'apografo orleanse, Roma, 1903.

10/ LAVAUD, René, MACHICOT, Georges. Boecis : poème sur Boèce (fragment), Toulouse, Institut d’Études Occitanes, 1950.

Nouvelle édition et traduction française littérale.

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Les Fors de Béarn
CIRDÒC - Mediatèca occitana

La loi occitane des rois de Navarre

   L’occitan fut dans les différents « pays » qui ont la langue en partage largement utilisé pour les actes politiques et administratifs en concurrence avec le latin. Si la fameuse Ordonnance de Villers-Cotterêts édictée par François Ier en 1539 scelle le monopole du français administratif dans une grande partie de l'espace occitan – à l'exception des actes notariés, actes privés, qui demeurent longtemps rédigés dans la langue des contractants – le cas du Béarn et de la Basse-Navarre, territoires indépendants au début du XVIe siècle, va permettre le rayonnement d'un occitan langue d'État jusqu'à la Révolution française. Parmi le corpus de textes occitans produits pour les souverains du Béarn qui portent le titre de 'Roi de Navarre', la traduction des Psaumes de David viratz en rythme gascon réalisée par le poète Pey de Garros, et dédiée à la reine Jeanne d'Albret, représente un acte de grande portée politique dans le contexte des Guerres de religion. Mais les souverains de Béarn-Navarre vont également produire une loi fondamentale de leur royaume, en occitan gascon, le « For general ».

   Depuis le Moyen Âge, les Pyrénées sont des pays de « fors » - du latin 'forum', la place publique où l'on rend la justice et par extension la coutume selon laquelle les jugements étaient rendus – recueils de droits et libertés spécifiques accordés aux communautés. Le plus ancien for semble être celui d'Oloron, accordé vers 1080 en vue d'attirer des habitants dans une place stratégique pour la reconquête de l'Espagne par les seigneurs chrétiens. Les Fors de Béarn représentent jusqu'au XVIe siècle un ensemble législatif complexe, sans cesse repris et remanié, différent d'une juridiction à l'autre. Morlàas, Aspe, Ossau, Barétous, Oloron, etc. ont leurs propres fors.

   C'est le roi Henri II d'Albret (1503-1555), réussissant à extraire la Basse-Navarre des prétentions espagnoles et gagnant une véritable indépendance pour son royaume, qui lance une politique de modernisation de l'administration de son État. Il fait compiler et réviser les différents « fors et coutumes » du Béarn pour la rédaction d'un « For général », loi fondamentale qui régit la vie politique mais aussi économique et sociale des Béarnais.

Le For général, rédigé en gascon, langue de l’État pyrénéen, est promulgué le 27 novembre 1552. Immédiatement imprimé – c'est d'ailleurs le premier livre imprimé à Pau – et largement diffusé, le For est confirmé en 1620 lors de l'annexion définitive du Béarn à la couronne de France, et maintiendra la personnalité historique et linguistique de la province jusqu'à la Révolution française.




Editions du CIRDOC - Institut occitan de cultura

Los Fors et Costumas de Bearn, A Pau, Per Isaac Desbaratz, Imprimeur & Marchand Liberaire deús Estatz de la Prouvince de Bearn. M. DCC. XV., [2 bl.]-144 p. ; in-4, exemplaire sur parchemin. Relié avec Stil de la justicy deu pais de Bearn (1716) et Ordonnances feites per Henric II (1716)., CR-A 8099

Ressources numériques

Des fors disponibles en ligne
Les fors et costumes de 1602
Les fors et costumes de 1682
Les fors et coutumes de 1715

Un témoignage de l'évolution du droit en Béarn en 1633
Compilation d'auguns priuiledgis...,

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Daphnis et Alcimadure : un opéra occitan à la Cour du Roi
CIRDOC - Institut occitan de cultura

Résumé

En 1754, Jean-Joseph Cassanéa de Mondonville, compositeur réputé pour ses grands motets présente à Fontainebleau, devant la cour du roi Louis XV, Dafnís e Alcimadura, pastorale languedocienne entièrement rédigée en occitan. Dans le cadre de ce que l'on a appelé la Querelle des Bouffons, qui oppose tenants de l’opéra italien et défenseurs du lyrique français, Dafnís e Alcimadura, que l’on considère comme le premier opéra occitan séduit le public notamment par l’utilisation de la langue occitane. L'oeuvre connaît un grand succès, elle est représentée en province jusqu’en 1789. La traduction du texte en français, faute d’interprètes lyriques maîtrisant l’occitan, la ravalant au rang de pastorale "ordinaire", hâta son oubli.



Autres versions du titre :

Titre conventionnel : [Daphnis e Alcimadure. Op. 9]

Autres appellations :

< Dafnís e Alcimadura

< Daphnis e Alcimadure

< Daphnis e Alcimaduro

Histoire de l'œuvre

Jean-Joseph Cassanéa de Mondonville est né en 1711 à Narbonne. Issu d'une famille de musiciens, - son père était organiste de la cathédrale de Narbonne -, Mondonville suit des études musicales et devient en 1738 violoniste et directeur au Concert Spirituel. En 1740, il accède à la charge de maître de musique à la Chapelle, une des trois composantes de la musique du roi, avec la Chambre et l'Écurie, spécialisée dans la musique religieuse, avec ses chantres.

Inventif et doté d'une parfaite technique, Mondonville marque la musique baroque d'un grand nombre d’œuvres remarquables. De même que ses  contemporains, comme Rameau, Mondonville s'illustre dans le genre, alors, dominant en musique sacrée, du grand motet à choeurs et orchestre. Son De profundis lui confère une certaine notoriété. Dans le domaine de la tragédie lyrique, il convient de citer  Vénus et Adonis ou encore Titon et l'Aurore, qui recontreront quelque succès. Le Narbonnais figure d'ailleurs parmi les plus grands compositeurs du XVIIIe siècle.

Au sein de ce riche répertoire, se distingue donc  Dafnís e Alcimadura, représenté devant la cour à Fontainebleau les 29 octobre et 4 novembre 1754, puis à l'Opéra le 29 décembre suivant. Cette pastorale est non seulement représentative du talent du compositeur mais l'originalité de sa démarche est de proposer  à la cour du roi Louis XV, une œuvre entièrement composée en occitan.

Contenu

L'opéra raconte l'histoire du pâtre Daphnis, amoureux de la jeune Alcimadure, celle d’un amour déçu : la belle ne croyant pas à la sincérité des sentiments du berger. Mais le jeune homme peut compter sur le soutien de Janet, le frère d'Alcimadure. Celui-ci va alors déployer tout un stratagème pour prouver à sa sœur que l'amour que lui porte Daphnis est authentique.

En prologue, nous trouvons une oeuvre en français de l'abbé Claude  Henri Fusée de Voisenon (1708-1775), Les Jeux floraux. Originaire de Voisenon, dans l'actuelle Seine-et-Marne, cet abbé de cour, mondain et cultivé, ne parlait bien évidemment pas l'occitan. Il est toutefois intéressant de noter sa connaissance de l'univers de l'Académie des Jeux Floraux de Toulouse, du Consistòri del Gai Saber et de sa mythologie.  Y est ainsi évoquée Clémence Isaure, fondatrice mythique de la compagnie des Jeux Floraux, désormais académie royale, fondée en 1323, dans le but. de maintenir la poésie des troubadours.  Il est intéressant de noter le soin qui a été apporté au choix d'un prologue cohérent avec le propos et l'univers de la pièce. 

Note d'étude

Une pastorale languedocienne

Dafnís e Alcimadura est revendiqué par Mondonville comme pastorale languedocienne. Jusqu'ici rien de bien original puisque le genre pastoral est alors très en vogue à la cour. Mais, outre l'emploi de la langue d'oc, Jean-Joseph Cassanéa de Mondonville est allé puiser dans le répertoire musical populaire de sa région d'origine.

La présentation de la pastorale devant la cour ne se fait pas sans critiques. Le baron Grimm notamment accuse Mondonville de plagiat. Selon lui, le compositeur aurait seulement arrangé l'Opéra de Frontignan de Nicolas Fizes (1679), considéré aujourd’hui comme le premier opéra en occitan, accusation qui ne tient pas la route puisque l'ouvrage de Fizes n'est pas un opéra au sens où nous l'entendons (et où on l'entendait déjà au temps de Mondonville) mais une série de reprises de chansons populaires occitanes, mentionnées par des timbres et non pas notées sur des portées. Mondonville puise beaucoup moins dans le répertoire musical populaire et traditionnel du Languedoc que ne l'avait fait le Frontignanais.  Il reconnaît cependant dans l’avant-propos de son opéra qu’il y a intégré au moins un air languedocien : "J'ay crû nécessaire d'insérer dans mon Ouvrage un Air du Pays que j'ay ajusté".

On peut d'ailleurs reconnaître dans Daphnis e Alcimadura plusieurs airs appartenant aujourd'hui au répertoire traditionnel des régions occitanes tels que Polida Pastorela ou encore L'Aiga de Ròcha.

Une rencontre des parlers : un projet panoccitan malgré lui

Pour l'écriture de Daphnis et Alcimadura, Mondonville emploie un occitan languedocien que nous pourrions qualifier de "standardisé", sans marqueurs dialectaux particuliers. Un parler simple, compréhensible de la majorité des locuteurs de langue d'oc. Parmi les rares chanteurs à la cour de Louis XV originaires du Midi, se trouvent deux Gascons : la Bordelaise Marie Fel et le Béarnais Pierre Jéliote, ainsi qu'un chanteur provençal, Antoine Trial. Peut-être est-ce afin de faciliter la tâche de ces locuteurs occitans non languedocien que Mondonville proposa un texte relativement unifié et simple d'accès. Marie Fel, Jéliote et Trial ont-il pu modifier leurs accents, ont-ils seulement essayé de s'en tenir à la stricte prononciation d'origine, ou bien ont-ils laissé leurs parlers colorer le languedocien du texte ? Il n'est pas possible de le dire. L'on peut néanmoins voir dans cette production parisienne d'un texte narbonnais chanté par une Bordelaise, un Béarnais et un Provençal quelque-chose comme une oeuvre panoccitane par concours de circonstance. 

La langue à l'origine du succès de l'Opéra ?

La langue occitane n'était vraisemblablement pas comprise, et encore moins parlée à la cour. Pourtant, Dafnís e Alcimadura entièrement rédigé en occitan a rencontré un grand succès dès sa création. 

Reproduction du livret original de l'opéra avec en introduction une table pour aider à la compréhension de la langue occitane



À l'inverse, toutes les tentatives de traduction en français du livret se sont soldées par des échecs. La langue occitane semble donc bien être un facteur essentiel du succès de la pièce. Il faut dire que Mondonville avait pris toutes les précautions nécessaires pour que l'emploi de l'occitan ne heurte pas les mentalités parisiennes : l'opéra est précédé d'un prologue en français de la main de l'abbé Voisenon qui place l'œuvre dans la tradition des Jeux Floraux toulousains et fournit des clés pour comprendre la langue. Il propose par ailleurs dans le livret, tant le texte dans sa version originale qu'une traduction française des expressions les plus compliquées.
 

Postérité de l’oeuvre

Les différentes gazettes et écrits de l'époque nous ont permis de savoir que l'opéra fut représenté à de nombreuses reprises à Paris dans l'année qui suivit mais également en province où le livret, la partition mais également des adaptation dans les dialectes locaux sont publiées (c'est notamment le cas à Montpellier en 1755). La prolifération des parodies de l'opéra attestent également de son rayonnement et de sa popularité.

Pour répondre aux demandes du public et permettre à un plus grands nombre d'interprètes de chanter dans cet opéra, Mondonville sortira en 1768 une nouvelle version de Dafnís e Alcimadura  traduite en français. L'opéra se diffuse alors beaucoup plus largement.

 
La dernière représentation connue de Daphnis e Alcimadura est donnée en 1778. Avec la mort du compositeur, plusieurs de ses œuvres tombent dans l'oubli, dont Dafnís e Alcimadura  qui ne sera remontée qu'en 1981.

C'est en 1977 que l'œuvre est redécouverte avec la thèse de Roberte Marchard consacrée au compositeur. Suivra une exposition à Lille, ville où Mondonville exerça ses talents à ses débuts puis la publication du catalogue de l'exposition  en 1980 par le Centre International de Documentation Occitane (CIDO) et la Société de Musicologie du Languedoc.
C'est alors le début d'une grande phase de redécouverte de l'œuvre du compositeur en Occitanie.

Programme de la première édition du festival Montpellier Danse

En  juillet 1981, l'opéra est enfin recréé à Montpellier, à l'occasion de la première édition du festival Montpellier-Danse. L'orchestre de Montpellier est dirigé par Louis Bertholon et on confie à Dominique Bagouet, figure de la Nouvelle Danse Française, la chorégraphie. 
Le choix de cette pièce n'est pas anodin pour la première édition du festival Montpellier Danse comme l'expliquent les élus à l'époque :  « Il fallait une œuvre à créer ou recréer pour consacrer le renouveau culturel de la région. Monter une œuvre écrite en langue régionale, c'est ancrer ce renouveau dans la pérennité d'une culture occitane spécifique. Le choix de Mondonville s'imposait ».


C'est lors de ce spectacle qu'est réalisé un enregistrement qui sera édité sous forme de vinyle la même année par la maison de disques Ventadorn, seul enregistrement complet de l'opéra édité à ce jour.

Plus récemment, l'opéra a été recréé par les élèves du conservatoire de Toulouse sur la scène du théâtre du Capitole en 2002.

Critiques et réception de l’oeuvre

 Dès la première représentation de l'opéra, de nombreuses critiques sont publiées dans les gazettes de l'époque. Les avis sont partagés entre bouffonistes (italianisants) et partisans de l'opéra Français. Outre les accusations de plagiat proférées par Grimm, c'est la question de la langue employée dans l'opéra qui semble cristalliser tous les débats, comme nous l'indique l'abbé Xavier de La Porte dans le tome III de ses Anecdotes Dramatiques : « Le jargon languedocien qu'il avoit parlé dans son enfance, et qui est presque aussi favorable au chant et aux idées tendres et galantes, que la langue Italienne, fut une nouveauté piquante à l'Opéra... ».

Ainsi, le Mercure de France de décembre 1754 fait paraître une critique élogieuse (consulter l'article original sur Gallica) : « M. Mondonville poète tout à la fois et musicien, est l'auteur des paroles et de la musique : tels étoient autrefois nos fameux Troubadours. La pastorale est écrite en langage toulousain, le prologue l'est en notre langue. [...] Alcimadure [...] et [...] Daphnis ont été rendus par Mlle Fel et Mr Jeliote. Ils sont si supérieurs l'un et l'autre, lorsqu'ils chantent le François, qu'il est aisé de juger du charme de leur voix, de la finesse de leur expression, de la perfection de leurs traits, en rendant le langage du pays riant auquel nous devons leur naissance... ».

A contrario, l'auteur du Manuscrit de Munich, partisan des Italiens rédige une critique plus sévère : « Daphnis et Alcimadure opera dont les paroles sont de l'idiome languedocien n'a pas plu généralement et nous n'en sommes pas surpris ; il faut sçavoir ce jargon, et si l'on l'avoit sçu, peutetre l'auroit-on encore moins gouté. Le Sr Mondonville pretend que les paroles sont de luy ainsy que la musique ; on luy reproche d'avoir beaucoup pillé chez les italiens. En tout cas ce n'est pas voler dans le tronc des pauvres. »

Grimm lui, accuse clairement Mondonville de plagiat, il affirme dans un article paru dans la revue Correspondance Littéraire que le compositeur est allé puiser dans l'Opéra de Frontignan de Nicolas Fizes, mais aussi dans plusieurs intermèdes italiens et enfin que « le reste consiste dans des airs en Languedoc que tout le monde, en Languedoc, sait par cœur. » (Melchior Grimm IN Correspondance littéraire). Mais une fois de plus, c'est l'emploi de la langue occitane qui soulève ses interrogations : Grimm explique que le seul mérite de cet opéra serait l'emploi de l'occitan qui se rapprochant de l'italien « pour la simplicité, la naïeveté, l'expression et la gentillesse » vient amener une valeur ajoutée à la pièce de Mondonville.

Ressources numériques

 Voir toutes les ressources consultables en ligne sur Occitanica.

 
 
 
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Lo Compendion de l’Abaco
Bancarel, Gilles
Bertrand, Aurélien

Lo Compendion de l'Abaco (littéralement Le Compendium de l'Abaque, du nom donné aux instruments mécaniques plans qui facilitaient le calcul) est un traité d’arithmétique de Frances Pellos (14..-....) (Francés Pelós en graphie occitane classique), mathématicien niçois. L’ouvrage, imprimé à Turin en 1492 est, en l'état des connaissances actuelles, le premier livre imprimé en occitan.

Autres appellations connues

< Lo Compendion de lo Abaco, [variante du titre de l'œuvre sans élision présente au sein de recueil]

< Lo Compendion del Abaco, [variante moderne avec contraction du titre de l'œuvre]

Exemplaires connus ou conservés

Il existe plusieurs exemplaires connus de cet ouvrage conservés à :

Londres, British Library, IA. 32436
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Nice, Bibliothèque municipale Romain Gary, 3 exemplaires : Rés. 12389, Rés. 12390, XV 254
Voir les notices des documents sur le site de la bibliothèque ; accéder au document numérisé sur Occitanica

Nîmes, Bibliothèque Carré d’art, INC 64 
Voir la notice du document sur le site de la bibliothèque

New York, Columbia University, Rare Book and Manuscript Library, Incunabula Goff P-260 
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Paris, Bibliothèque nationale de France, Res. p. V. 351
Voir la notice du document sur le site de la bibliothèque

Séville, Biblioteca Colombina, V, p. 294 
Voir la notice du document sur le site de la bibliothèque

Tokyo Nihon University College of Commerce

Description physique

Incunable in 4° de 82 feuillets numérotés en chiffres romains en haut de page. Une numérotation, moins régulière, en bas de page donne en lettres d’alphabet l’ordre des cahiers et en chiffres romains celle des feuillets à l’intérieur de chaque cahier. « La page de titre est composée d’un encadrement en bois gravé... contient de multiples tableaux et opérations , 40 figures géométriques dans le texte et 2 bois gravés » 
Extrait de la description détaillée de F. Pic (ref. ci-dessous) Incunable in 4°, 80 f. ill. bois gravé. 

Exemplaire de Nîmes :
Incomplet des ff. 51-54. - Texte en dialecte niçois, 41 lignes ; car. goth. 2 grandeurs ; lettres d'attente ; figures géométriques et 2 gr.s.b. (f. 79). Notes ms sur 2 ff. bl. rajoutés avant le titre.

Note de contenu

Frances Pellos présente son œuvre de la façon suivante dans son premier chapitre : 

Dieus done a mi gratia et sia en son plaser che fassa principi he fin de aquest compendion de abaco de art de arithmeticha he semblantment dels exemples de jeumetria contenguts en los presents sequents capitols, (...) Non obstant ordeneray la presente opera per capitols, debitament entendabla a un cascun, per so que las dichas arts son necessari, nedum a merchans, mas ad ogni persona de che condition se vulha sia.

Dieu me donne grâce et que soit en son bon plaisir que je commence et achève cet opuscule d'abaque d'art d'arithmétique ainsi que des exemples de géométrie contenus dans le présent et les suivants chapitres, (...) J'ordonnerai la présente œuvre en chapitres, aisément compréhensibles par tout un chacun, parce que les dits arts sont nécessaires, non seulement aux marchands, mais également à toute personne de quelque condition qu'elle soit.

Il se présente par la suite ainsi dans la conclusion de l'ouvrage : 

Complida es la opera, ordenada he condida
Per noble Frances Pellos, citadin es de Nisa,
Laqual opera a fach, primo ad laudem del criator
Et ad laudour de la ciutat sobredicha,
Laqual es cap de Terra Nova de Provensa,
Contat es renomat per la terra universsa.

Achevée est l'œuvre, ordonné et apprêtée
Par noble François Pellos qui est citoyen de Nice
Cette œuvre qu'il a faite, d'abord à la louange du créateur
Et à l'honneur de la cité susdite,
Laquelle est première de Terre Neuve de Provence
Qui est renommé sur la terre entière.


Ce ne sont donc pas les universitaires mais les milieux marchands qui produisent à partir du XIIIe siècle ces nouveaux « algorismes » (méthodes de l'art du calcul) ou livres d’« abaco », dont le but est d'apporter les rudiments mathématiques nécessaires au bon exercice du négoce. C'est pourquoi ces traités sont rédigés dans les langues d'usage des marchands, en occitan, italien, français, etc. et non en latin.

Lo Compendion de lo Abaco, qui figure parmi les premiers livres de mathématiques imprimés en Europe, témoigne de la place qu'occupe la langue occitane dans les échanges commerciaux à l'aube de la Renaissance.

Premier ouvrage de mathématiques appliquées, rédigé dans un provençal médiéval soigné, comportant des traits spécifiquement nissarts qui le rendent particulièrement intéressant pour l'étude de ce dialecte à la fin du XVe siècle. D’après l’historien André Compan « C’est avant toutes choses un code marchand, un traité d’économie qui est le bienvenu dans cette fin du XVe siècle à Nice et dans son comté. En effet, un siècle après la dédition de notre région aux comtes de Savoie, en 1388, l’essor mercantile a mis en bonne place la renommée de Nice. C’est ainsi que l’on peut retrouver dans ce traité les unités de valeur et les changes monétaires qui resteront en vigueur jusqu’à la Révolution ». L'auteur, à la fin du texte, a soin de spécifier qu'il est niçois et qu'il a écrit cet ouvrage à la louange du créateur et de sa ville « renommée sur la terre entière ». 

Note d’étude

À part l'édition originale, il existe une réédition réalisée par Robert Lafont. Dans son édition, Lafont poursuit par une étude généalogique qui, en s'appuyant sur sa noblesse, le rapprocherait des diverses branches de la famille Pellosio aux armes d'« or à l'ours de sable passant ». Il rappelle également que Pellos signifie « poilu, velu » (on écrirait aujourd'hui pelós, en norme classique).

Critiques et réception de l’œuvre

Édition critique 
Compendion de l'Abaco / Francés Pellos ; texte établi d'après l'éd. de 1492 par Robert Lafont, avec un comment. philologique ; comment. mathématique de Guy Tournerie. Montpellier : Univ. de Montpellier Fac. des lettres et sciences humaines, 1967. 

Bibliographie 
Jacques-Charles Brunet, Manuel du libraire et de l’amateur de livres, 5e édition, Paris, Firmin Didot, 1860-1865, T. 4, colonne 475. 

Catalogue général des incunables des bibliothèques publiques de France, Nendeln, Kraus-Thomson, 1970, T. XVI, p. 8977. 

Études 
Baldassare Boncompagni, « Intorno ad un trattato d’aritmetica stampato nel 1478 », Atti dell’Accademia Pontifica de’ nuovi Lincei, T. XVI, 1862-1863, p.161, 332-335. 

J. Rance-Bourrey, « Incunables niçois », Nice Historique, vol. X, mars 1908, p. 89-91. 

Étude critique et méthodique d’un ouvrage en moyen provençal : Lo compendion de l’abaco de Frances Pellos 1492 par Adolphe Viani sous la direction de Jean Granarolo [S.l.] : [s.n.], 1981. Thèse de 3e cycle : Études régionales : Nice : 1981. 

Roger Casaglia, « Frances Pellos e lou 500ème aniversari dou Compendium de l’Abaco », Nice Historique, 1982, n. 2, p. 108-112. 

François Pic, « Itinéraire bibliographique en mathématiques occitanes de F. Pellos (1492) à J.-F. Fulconis (1562) » dans : Huit siècles de mathématiques en Occitanie : de Gerbert et des Arabes à Fermat, Monein : Ed. PyréMonde, impr. 2008, p. 138-158. 

Michel Guillemot, « Les méthodes de fausse position dans le Manuscrit de Pamiers (1430) et le Compendion de l’Abaco de F. Pellos (1492) » dans : Huit siècles de mathématiques en Occitanie : de Gerbert et des Arabes à Fermat, Monein : Ed. PyréMonde, impr. 2008, p. 138-158. 

Ressources numériques 
BM Carré d'art Nîmes
BMVR Nice

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L'occitan au cinéma : Histoire d'Adrien de Jean-Pierre Denis
CIRDOC - Institut occitan de cultura
Histoire d'Adrien est un film couleur français de 95 minutes réalisé par Jean-Pierre Denis, en langues occitane (majoritaire, sous-titrée en français) et française, sorti en salles en 1981 sur le circuit Gaumont, et récompensé par la Caméra d'or à Cannes en 1980. La musique du générique a été composée et interprétée par Joan Pau Verdier.
[consulter la fiche film du catalogue collectif des bibliothèques et archives de cinéma Ciné-Ressources]

Consécration

23 mai 1980,  gala de clôture du 33e festival de Cannes : saluant « un film remarquable et qui [le] touche beaucoup », René Clément remet à Jean-Pierre Denis la Caméra d'Or – récompensant le meilleur premier film – pour Histoire d'Adrien, un long-métrage « tourné en langue d'oc, en occitan ».
À l'issue de la cérémonie, la journaliste France Roche, visiblement perplexe, s'interroge : « C'est très difficile de savoir si le film de Denis aura beaucoup de public, parce que c'est le premier film français parlé en patois. »

"La langue comme évidence" (Michel Chadeuil)


« Sens la lenga, queu film seria pas la meitat de çò que es. E Denis zo sap ben que vòu pas auvir parlar d'una version francèsa. En francès, Histoire d'Adrien seria estat "regionalista" o "provinciau". En occitan, es universau. » Michel Chadeuil (1) 
[Sans la langue, ce film ne serait pas la moitié de ce qu'il est. Et Denis le sait bien : il ne veut pas entendre parler d'une version française. En français, Histoire d'Adrien aurait été "régionaliste" ou "provincial". En occitan, il est universel.]

Autofinancé, tourné en 8mm en Dordogne, sur une période de deux ans, par un autodidacte, Histoire d'Adrien met en scène des acteurs bénévoles et amateurs. Locuteurs natifs de cet occitan périgourdin qui constitue la langue principale du film, ils improvisent la plupart des dialogues et ont rouvert la garde-robe de leurs grands-parents pour les besoins du tournage.
Le long-métrage dépeint la vie d'un jeune paysan né sans père au début du XXe siècle. Le quotidien de la ferme, le départ des hommes au front, l'exode rural, la grève des cheminots de 1920 sont autant d'éléments contextuels qui ancrent la fiction dans une vraisemblance historique fondamentale pour Jean-Pierre Denis – sans constituer l'essence de l'œuvre. Le propos demeure l'histoire, individuelle, de son personnage. L'histoire d'Adrien. Il en va de même pour l'utilisation de la langue occitane : 

« Le choix de la langue d'oc a été dicté par un souci de cohérence et d'authenticité, simplement parce qu'il ne pouvait en être autrement ; il va de soi qu'en 1905, dans les champs, les villages, les paysans s'exprimaient dans leur langue. » J.-P. Denis (2)

La comparaison s'impose avec l'adaptation par Chabrol du roman breton Le Cheval d'orgueil, sortie la même année, mais intégralement tournée en français. 

Postérité

Grâce au soutien du cinéaste René Allio, Histoire d'Adrien pourra être distribué en salles sur le circuit national. Ce premier long-métrage en occitan à diffusion grand public restera une exception dans le paysage audiovisuel français : le seul projet comparable, L'Orsalhèr (J. Fléchet, 1982), ne bénéficiera pas de la même distribution. De La Palombière à Ici-Bas en passant par Champ d'honneur, l'occitan restera prégnant dans l'œuvre de Jean-Pierre Denis. Il ne subsiste toutefois d'Histoire d'Adrien, – création occitane contemporaine sacrée à Cannes, chef-d'œuvre rendu à l'état de mythe –, que de rares copies en circulation, en piteux état ; le film n'a connu qu'une édition VHS (3) depuis longtemps épuisée.

Notes

(1) « Un grand film occitan : ‘Histoire d’Adrien’ » publié dans le n°9 de la revue Oc.

(2) Propos recueillis par Bernard Tremege et publiés dans Tecimeoc n°9.

(3) Jean-Pierre DENIS (réal.), Histoire d’Adrien, 95 min., couleur,  VHS-SECAM, Gaillon : Film à film, collection “Caméra d’or” dirigée par Jean-François Davy, 1990

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Le Dictionnaire languedocien-français de Pierre-Augustin Boissier de Sauvages
CIRDOC - Institut occitan de cultura

Le Dictionnaire languedocien-français de Pierre-Augustin Boissier de Sauvages est l'une des plus importantes œuvres lexicographiques occitanes imprimées et diffusées à l'époque moderne. Il a été un instrument de travail important pour les écrivains de la renaissance d'oc qui y font souvent référence au XIXe siècle.

Son auteur, l'abbé Pierre-Augustin Boissier de Sauvages (1710-1795), né et mort à Alès (Gard), est le frère du médecin et naturaliste François Boissier de Sauvages (1706-1767). Professeur de philosophie au Collège d'Alès, Pierre-Augustin Boissier de Sauvages se consacra aux sciences naturelles et publia plusieurs études relatives à la sériciculture, socle de l'économie cévenole au XVIIIe siècle. Il fait partie des petits contributeurs provinciaux de l'Encyclopédie de Diderot et d'Alembert. Malgré des études de théologie dans sa jeunesse à Paris, Pierre-Augustin Boissier de Sauvages embrasse tardivement la prêtrise, en 1771, à l'âge de 61 ans.


1. Autres versions du titre 

Dictionnaire languedocien-français est le titre conventionnel de l'œuvre, qui s'applique à ses trois éditions différentes. Il est utilisé comme autorité titre dans les catalogues et inventaires [voir la notice d'autorité titre dans le catalogue de la BnF].  

Les deux éditions parues du vivant de l'auteur (1756, 1785, voir ci-dessous) sont anonymes. L'identification de l'auteur a beaucoup varié dans les inventaires et les études sur l’œuvre : Abbé de S *** ; Abbé de Sauvages ; Abbé Boissier de Sauvages ; Pierre-Augustin Boissier de la Croix de Sauvages ; Pierre-Augustin Boissier de Sauvages de la Croix (parfois Lacroix).

La forme Pierre-Augustin Boissier de Sauvages est la forme d'autorité internationale dans les catalogues et inventaires [voir la notice d'autorité de nom de personne dans le catalogue de la BnF]. 


2. Exemplaires connus ou conservés 

Le Catalogue collectif de France (ccfr.bnf.fr) signale une vingtaine d'exemplaires pour chacune des éditions anciennes (1756, 1785). L'édition moderne de 1820 paraît plus rare (environ 6 ex. référencés).


3. Éditions anciennes 

(A)

Dictionnaire languedocien-françois, ou choix des mots languedociens les plus difficiles à rendre en françois : contenant un recueil des principales fautes que commettent dans la diction et dans la prononciation françoise, les habitans des provinces méridionales du Royaume, connus à Paris sous le nom de Gascons. Avec un petit traité de prononciation et de prosodie languedocienne. / par M. l'abbé de S*** ; A Nimes : chez Michel Gaude, 1756 ; (A Avignon) : de l'imprimerie de Mérande, 1756 (XXXI-492 p.)

(B)

Dictionnaire languedocien-français : contenant un Recueil des principales fautes... Nouvelle édition, corrigée d'un grand nombre de fautes, augmentée d'environ dix mille articles, et en particulier d'une nombreuse collection de proverbes languedociens et provençaux. / par Mr. L.D.S. ; A Nismes : Gaude, Père, Fils & Compagnie, Libraires, 1785 .- 2 t. (XL - 388 p. ; 395 p.) [les deux tomes sont souvent réunis en un seul vol.]

[Le terme impropre de "Gascons" est abandonné et l'important recueil de proverbes et dictons apparaît pour la première fois dans la 2e édition.]

(C)

[Louis-Augustin d'Hombres-Firmas (éd. Scientifique)] Dictionnaire languedocien-français, : contenant un recueil des principales fautes... suivi d'une collection de proverbes languedociens et provençaux. Nouvelle édition, revue, corrigée, augmentée de beaucoup d'articles ; et précédée d'une notice biographique sur la vie de l'auteur, par son neveu L.A.D.F. / par M. l'abbé de Sauvages ; A Alais, chez J. Martin, imprimeur-libraire, 1820. - 2 t. (XXXVIII – 390 p. ; 399 p.) [reprint : Genève, Slatkine, 1971, 2t. en 1 vol.] 

4. Note d'étude 

Le Dictionnaire languedocien-français de Boissier de Sauvages fait partie des premiers dictionnaires et lexiques imprimés de la langue occitane, antérieurs aux deux grandes entreprises du XIXe siècle, le Dictionnaire provençal-français de Simon-Jude Honnorat (Digne, 1846-1848) puis Lou Tresor dóu Felibrige de Frédéric Mistral (1878-1886).

Les dictionnaires occitan-français qui se multiplient au XVIIIe siècle sont souvent conçus pour éduquer les élites méridionales à la langue française classique plutôt que pour constituer des instruments linguistiques pour l'usage ou l'étude de la langue occitane. Le modèle du genre est bien sûr le dictionnaire de Desgrouais (1706-1766), professeur au Collège de Toulouse, Les gasconismes corrigés : ouvrage utile à toutes les personnes qui veulent parler & écrire correctement...(Toulouse, 1766), véritable classique maintes fois réédité, où « L'auteur veut seulement rendre les Gascons attentifs à des gasconismes qui ne leur sont que trop familiers, et dont il est important qu'ils se corrigent, s'ils veulent éviter ces petites humiliations, auxquelles les personnes qui parlent mal sont exposées , surtout à Paris, où ces expressions impropres ne manquent pas de donner lieu à des railleries dont il est toujours désagréable d'être l'objet. » (1) ou, comme l'écrit Jean-Claude Bouvier à propos des dictionnaires provençaux antérieur au Tresor dóu Felibrige : « Beaucoup de dictionnaires ou de glossaires de volume et d'intérêt inégal sont réalisés par des érudits locaux qui obéissent à deux sortes de raisons. Très souvent [...] ces ouvrages ont un but pratique : permettre aux 'Français du Nord', de plus en plus nombreux en Provence, de comprendre la langue du pays, mais surtout apprendre le 'bon français' aux Provençaux." (2) 

Le Dictionnaire languedocien-français de Boissier de Sauvages occupe cependant une place singulière dans ce corpus. L'abbé Boissier de Sauvages, professeur au Collège d'Alès est avant tout un scientifique menant nombre d'expériences naturalistes et géologiques – on loua postérieurement les principes newtoniens audacieux de son enseignement (3). Boissier de Sauvages publia d'importantes études sur la culture du ver à soie, rassemblées dans son Mémoire sur l'éducation des vers à soie en 5 tomes, (Nîmes, Gaude, 1763). Arpentant les Cévennes pour ses recherches naturalistes, il côtoyait quotidiennement les habitants du territoire dont la langue principale - et souvent unique - fournit la matière de son dictionnaire. Selon un témoignage oral rapporté par François Raynouard dans Le Journal des sçavans en 1824, « il choisissait toujours ses servantes dans les villages des Cévennes, où la tradition du vieux langage s'était le mieux conservée ».

La première édition du Dictionnaire languedocien-français (1756) constitue déjà une véritable entreprise lexicographique même si elle reste conduite dans l'esprit d'un manuel de « gasconismes corrigés ». En revanche la seconde édition, corrigée et augmentée par Boissier de Sauvages et parue en 1785, représente désormais un véritable dictionnaire de langue occitane réalisé à partir d'un patient travail de collecte de la langue parlée par les occitanophones des Cévennes et appuyé sur un sérieux travail de compilation des ouvrages et matériaux disponibles (glossaire de Godolin, premières éditions des troubadours, etc.). Dans son article consacré aux différentes éditions du Dictionnaire languedocien-français (AIEO, 1987, voir bibliographie), Claire Torreilles a notamment remarqué les relations qui unissaient Boissier de Sauvages avec l'abbé René Séguier qui avait produit un important lexique manuscrit du languedocien parlé dans les Cévennes (4).   

5. Critiques et réception de l'œuvre : 

Le cas du Dictionnaire languedocien-français de Boissier de Sauvages fait débat, tantôt perçu dans la lignée des glossaires « patois », dévalorisant la langue occitane et destiné à corriger la prononciation et le vocabulaire français des « méridionaux », tantôt perçu comme une œuvre lexicographique pratique et non dépourvue de discours valorisant : 

« Ce livre était destiné à enseigner aux Méridionaux le français littéraire. Malgré cela et quoique l'ouvrage ne vise pas à être complet, il contient de précieux renseignements sur le dialecte languedocien au milieu du XVIIIe s." (Walther von Wartburg, à propos de l'édition (A), 1756 ; voir bibliographie). 

En réalité, il y a une évolution dans les buts poursuivis par Boissier de Sauvages entre son édition de 1756 et celle de 1785 au sujet desquels les interprétations divergent : « Il semble qu'il y ait une accélération de la dévalorisation [des langues dites régionales par rapport au Français] dans les années 1750-70. À titre d'exemple probant : le changement des finalités des dictionnaires occitans. Boissier de Sauvages qui, en 1756, avait encore attribué une importance pratique à son dictionnaire languedocien-français, modifie complètement la préface de la seconde édition de 1785 : la seule finalité qu'il admet à ce moment-là est celle d'utilité pour l'auto-correction linguistique des languedociens. » (Brigitte Schlieben-Lange, 1996, voir bibliographie). 

À l'opposé, d'autres auteurs remarquent dans la deuxième édition du Dictionnaire languedocien-français de Boissier de Sauvages la formation d'un discours de défense de la langue d'oc : à propos du terme « patois », « L'abbé de Sauvages, dans son Dictionnaire, y consacre un article remarquable où il fait preuve d'une extrême lucidité quant aux connotations de ce terme. Il en perçoit d'abord l'aspect global puis celui de sous-langue, il écrit "c'est un langage dégénéré d'une langue plus parfaite" et il prend soin en suivant de distinguer le patois de sa langue : "il n'en est pas de même du gascon ou languedocien", et de s'étendre sur les causes sociolinguistiques de la situation de la langue. En citant d'autres auteurs, en l’occurrence M. de Vaissette et M. de Gibelin, il renforce encore son argumentation : "Le nom de patois ne peut convenir à une langue subsistante depuis plus de quinze cents ans" » (Marie-Anne Châteaureynaud, voir bibliographie).

Claire Torreilles a montré les différences fondamentales entre le projet (A) paru en 1756 et le projet (B) de 1785. La deuxième édition profite de dix ans de travail de compilation d'écrits occitans du Moyen Âge et de l'époque moderne. L'édition (B) répond à un véritable travail scientifique qui participe à une meilleure connaissance, de la part de Boissier de Sauvages, de l'ensemble occitanophone "d'Antibes à Bordeaux" et de la parenté directe entre la langue maternelle des Cévenols et la langue littéraire des troubadours et des grands auteurs occitans de l'époque moderne. Parallèlement, dans la période des trente ans qui sépare les deux éditions, la francisation des élites cévenoles s'est accélérée. Boissier de Sauvages inscrit son deuxième dictionnaire dans une perspective « patrimoniale ». Cette dimension patrimoniale sera d'ailleurs critiquée par une des grandes figures de la renaissance occitane en Cévennes, Gustave de La Fare-Alais, auteur de Las Castagnados (Alais, 1844) : « Les définitions y sont, en général, bien déduites, les classifications lumineuses ; les racines des mots, les étymologies, la marche de leur formation, tout cela est ingénieux et clairement exposé. (…) Mais plus on découvre de mérite dans cet auteur, plus on regrette qu'il se soit renfermé dans le rôle de grammairien français, alors qu'en imprimant une autre direction à ce même travail, il pouvait se faire le législateur suprême d'une langue à part, et lui donner une portée bien autrement utile à l'avenir littéraire du pays. » 

6. Postérité 

À l'occasion des projets de monuments à Florian et à Louis Pasteur, Raphélis de Brovès lance une campagne locale pour l'érection à Alès d'un monument à Pierre-Augustin Boissier de Sauvages, quelque peu oublié par les Alésiens à la fin du XIXe siècle.

Le monument à « l'abbé Pierre-Augustin de Sauvages », qui comprenait un buste en bronze sur un socle en pierre, est inauguré le 27 septembre 1896. Le projet est modifié en 1898 (exhaussement afin de dégager le buste de la masse du chapiteau). Le monument à Boissier de Sauvages était situé square Sauvages, rue de la Meunière, puis déplacé au Bosquet. 

Le buste a été enlevé et fondu lors de la Seconde guerre mondiale lors de la réquisition des matériaux non ferreux.

Sur la face latérale gauche du socle, une inscription en occitan (graphie de l'époque) : « l'obro laouzo lou mestre » (en graphie classique : l'òbra lausa lo mèstre = le travail récompense l'ouvrier), expression occitane que Boissier de Sauvages avait collectée et signalée dans son dictionnaire. 

Notes

(1) Louis-Mayeul Chaudon, Bibliothèque d'un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature, Avec les jugements que les critiques les plus impartiaux ont porté sur les bons ouvrages qui ont paru depuis le renouvellement des lettres jusqu'en 1772 par L.M.D.V. bibliothécaire de Mgr le Duc de **. - A Avignon : chez Antoine Aubanel et se vend chez J.P. Costard, 1772.

(2) Jean-Claude Bouvier, "Dictionnaires ou glossaires antérieurs au Tresor dóu Felibrige" dans : Mistral et la langue d'Oc, Aix-en-Provence, 1979.

(3) René André, voir bibliographie.

(4) « Le Dictionnaire languedocien de l'abbé Séguier », dans : www.occitanica.eu : coll. Estudis ; ressource électronique, 2013 [en ligne

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Chanson de la croisade contre les Albigeois
Lo CIRDÒC - Mediatèca occitana
Le long poème épique en langue occitane désigné en français sous le titre de "Chanson de la croisade contre les Albigeois" (en occitan moderne "Cançon de la Crosada" ; en ancien occitan "Canso de la Crozada") est connu par une seule copie manuscrite complète, conservée à la Bibliothèque nationale de France (Ms. français 25425), deux fragments et une version postérieure en prose connue par trois copies.


Composé au moment de la croisade en Languedoc ou croisade contre les hérétiques albigeois (1208-1229), le poème de la Canso représente le seul récit des événements relatés du point de vue languedocien et dans la langue vernaculaire.

Redécouvert au XVIIIe siècle puis par les premiers romanistes du début du XIXe siècle, ce texte joua un rôle important dans l'avènement de la renaissance d'oc ou l'éveil d'une conscience "occitane", à l'instar de Frédéric Mistral qui le considérait comme "la Bible de notre nationalité".

Autres versions du titre

L'oeuvre telle que nous la connaissons par le manuscrit fr. 25425 de la BNF, les deux fragments et la version en prose, ne comporte aucun élément de titre, en raison sans doute de l'absence de véritable incipit (L'incipit "Aiso es la cansos de la crozada contr els ereges d'Albeges" est une invention de l'édition Fauriel de 1837) ni d'explicit.


Sa dénomination a connu de nombreuses variations :

- La guerre des albigeois, en vers provençaux (1783, Guillaume de Bure)

- Histoire de la croisade contre les hérétiques albigeois (1837, Claude Fauriel)

- Chronique des albigeois (1838, François-Just-Marie Raynouard)

- Aiso es la cansos de la crozada contr els Eretges d'Albeges (1841, Du Mège, Histoire générale de Languedoc, Tome IV, d'après l'incipit inventé de l'édition Fauriel)

- Poème de la croisade contre les Albigeois (1861, G. Guibal)

- Chanson de la croisade albigeoise (1931, Eugène Martin-Chabot)

- Cançon de la crosada (Titre en occitan moderne normalisé : 1963, Robert Lafont ; 1972, Charles Camproux)

- Canso de la Crozada (Titre en ancien occitan, forme internationale retenue par l'IFLA pour l'indexation bibliographique, 2004).

Exemplaires conservés ou connus

Le manuscrit fr. 25425 de la Bibliothèque nationale de France est le seul témoin intégral conservé du poème, ou chanson, de la Croisade. On connait également deux fragments dont l'un est aujourd'hui perdu et trois copies d'une version en prose réalisée au XVe siècle sur un manuscrit différent du fr 25425.

Description physique

Description : manuscrit sur parchemin de 169 feuillets reliés. 

Dimensions : 245 x 180 mm 

Reliure : reliure maroquin bleu, tranches peintes. Il contient 13 dessins à la plume, considérés comme des esquisses à des enluminures inachevées. Ces dessins ont très souvent été reproduits car ils représentent une des rares représentations iconographiques à peu près contemporaines de la croisade.

À la page 70, le manuscrit contient une signature d'atelier ou de copiste : "Pons escriba""

Possesseurs identifiés 

vers 1336, "Jorda Capella" (prêtre ou chapelain du nom de Jordan ?), d'après une note manuscrite à la fin du manuscrit : "Jorda Capella deu sus aquest romans XV. tornes d'argentz bos quel prestem a VI. de fevrier M.CCC.XXXVI."

La manuscrit avait donc été engagé par un certain Jordan pour la somme de XV gros tournois.

Cette somme était "relativement élevée" selon Paul Meyer, bien qu'il ait traduit "tornes d'argentz" par "livres tournois", ce qui représenterait une valeur considérable ; en 1931, Eugène Martin-Chabot a rectifié la traduction par "quinze gros tournois", somme déjà significative.


XVIIe siècle : Collection du cardinal Mazarin [donnée incertaine : référence manquante]


Début du XVIIIe siècle : Collection de Pierre-Paul Bombarde de Beaulieu (1698-1783), conseiller au Grand Conseil de Louis XV, d'après Jean-Baptiste de La Curne de Sainte-Palaye qui cite plusieurs passages du manuscrit de la Canso ("Manuscrit de M. de Bombarde") dans ses Mémoires sur l'ancienne chevalerie (1759).

La copie que La Curne de Sainte-Palaye avait fait réaliser du manuscrit de la Canso, annotée et corrigée de sa main, est aujourd'hui conservée à la Bibliothèque de l'Arsenal (Ms. 3321) et suivi d'une "Table générale des noms de lieux de ce même manuscrit" et d'une "Table générale des noms propres du même manuscrit".


Deuxième moitié du XVIIIe siècle : Collection du duc de la Vallière, d'après le catalogue dressé par Guillaume de Bure en 1783.

Guillaume de Bure, Catalogue des livres de la Bibliothèque de feu M. le duc de La Vallière, Première partie..., tome second, 1783 ; n° 2708 (p. 168-170) : « Manuscrit infiniment précieux, rare et curieux. Il est du XIVe siècle, écrit en lettres de forme, à longues lignes, et il contient 120 feuillets, dont 13 sont ornés de figures dessinées au simple trait. » (p. 168)


Après 1783 : Bibliothèque du roi puis nationale (N° 190 du fonds La Vallière, puis Ms. français 25425, cote actuelle)

Le fragment perdu de Raynouard [R]

Le philologue romaniste F.-J.-M. Raynouard possédait un fragment d'une autre copie de La Canso "d'une écriture assez moderne" [Lexique roman, t. I, p. 226], perdu depuis son décès.

Ce fragment, publié par Raynouard, contenait d'importantes variantes, notamment des indications biographiques sur Guillaume de Tudèle, auteur de la première partie du poème, et ses liens avec le comte Baudoin, frère du comte de Toulouse Raimon VI.

Le fragment de Grenoble (G)

Ce fragment a également été présenté et utilisé par Raynouard dans son Lexique roman. Il est tiré d'une histoire manuscrite du Quercy, Les Esbats sur le pays de Quercy de Guyon de Maleville, sieur de Casals (ou Cazals), qui écrivait vers 1600.

Il s'agit de 38 vers rapportés par Guyon de Maleville ayant essentiellement trait à la condamnation prononcée au concile d'Arles. Ces vers présentent des variantes par rapport au manuscrit fr. 25425 de la BNF.


Document original :
"Seconde partie des esbats de Maleville sur le pays de Quercy audit pays", 321 f.. BM de Grenoble, ms. n° 1158.

Copie : La Bibliothèque municipale de Cahors possède une copie des Esbats sur le pays de Quercy de Guyon de Maleville, réalisée en 1806 (BM Cahors, Ms n° 1)

Edition : Esbats de Guyon de Maleville sur le pays de Quercy..., Publication de la Société des études littéraires, scientifiques et artistiques du Lot, Cahors, F. Delpérier, 1900 (588 p.)

Note de contenu

Versions remaniées en prose

Le poème a été mis en prose au XVe siècle à partir d'un manuscrit différent du fr 25425.

Cette version en prose est connue par trois copies du XVIe siècle : BNF, français 4975 / Bibliothèque de Carpentras, Collection Peiresc / Bibliothèque municipale de Toulouse, ms 608.

"Cette sorte de traduction, écrite d'un style lourd et pédantesque, et qu'on a pu, non sans vraisemblance, regarder comme l'oeuvre de quelque jurisconsulte inconnu, est loin d'être la représentation fidèle de l'original.

L'auteur ne visait évidemment en aucune manière à faire oeuvre de traducteur exact et consciencieux : son but n'était autre, selon toute vraisemblance, que de rédiger à peu de frais un livre d'histoire pour ses contemporains. (...)

Cette version en prose paraît avoir joui d'un certain succès. Elle est devenue, en l'absence du poème qui n'était guère connu avant la publication de Fauriel, l'une des principales sources de l'histoire de la croisade albigeoise.

Chassanion, Mar-Antoine Dominici, le président Catel, Pierre de Marca, Vaissète, pour ne parler que des anciens, en ont fait usage." (Paul Meyer, La chanson de la croisade..., t. I, Introduction).

Illustrations

Ce manuscrit comprend 13 illustrations à l’encre noire : 
  • frontispice 
  • la prise de Béziers 
  • le siège de Carcassonne
  • le combat de Montgey
  • la bataille de Saint-Martin-la-Lande 
  • la reddition de Moissac 
  • l’arrivée du roi Aragon devant Muret 
  • le concile de Latran
  • l’attaque des croisés repoussés à Beaucaire 
  • la rentrée du comte Raymond VI de Toulouse 
  • une bataille sous les murs de Toulouse
  • le combat de Baziège 
  • le siège de Marmande par le prince Louis de France

Notes d'étude

La Canso de la Crozada est un poème épique qui relate la croisade contre « les Albigeois » ou « hérétiques cathares » qui a eu pour conséquence le rattachement du comté de Toulouse au domaine du roi de France.


La Canso commence sur l'appel du pape Innocent III (1208). Le récit se termine, onze ans plus tard, par le siège raté de Toulouse par le fils du roi de France Philippe-Auguste, futur roi Louis VIII, « victoire toulousaine que le poète ne savait pas éphémère » (Henri Gougaud, 1984).

La croisade se termine en réalité le jeudi saint 12 avril 1229 à Paris, où le comte de Toulouse Raimon VII se soumet à l'Église et consent à terme au rattachement du Languedoc à la France.

Cette longue chanson épique, contemporaine des événements, a été composée en occitan et en vers alexandrins, par deux auteurs successifs.

Le premier, Guilhem de Tudèle, clerc navarrais établi à Montauban puis à Bruniquel, est partisan du camp des croisés. Son récit en 131 laisses (2772 vers) s'arrête à la veille de la bataille de Muret (1213), événement décisif.

Un continuateur anonyme, au style et aux intentions très différents reprend le récit où Tudèle l'avait laissé. En 83 laisses (6810 vers suivants), il relate la suite des événements jusqu'au siège de Toulouse, éphémère victoire du camp toulousain.


Le nombre de vers attribué à chacun des auteurs a donné lieu à débat. Jusqu'à Fauriel, les observateurs du manuscrits n'ont pas distingué les deux parties de l'oeuvre et l'attribuent à un seul auteur. Il faut attendre la thèse de Georges Guibal et l'étude de Paul Meyer pour dinstinguer clairement deux parties à la langue, au style et aux partis pris très différents. Enfin, en 1931, Eugène Martin-Chabot établit une version de référence du texte occitan et rectifie les parties attribuées à chaque auteur. Il regroupe les laisses en chapitres et forge des titres pour chacun d'eux, facilitant le repérage dans l'oeuvre.

Le texte du continuateur anonyme est souvent considéré de meilleure qualité linguistique et littéraire. Surtout, le texte de l'Anonyme est la seule source contemporaine de la croisade partisane du camp toulousain au point d'être reçu à l'époque contemporaine comme un texte de "résistance", ou "patriotique" avant l'heure.

Editions et traductions

- Claude FAURIEL, Histoire de la Croisade contre les hérétiques albigeois, écrite en vers provençaux par un poète contemporain, traduite et publiée par M. C. Fauriel, Paris, Imprimerie royale, 1837. Consulter en ligne [1].

- Paul MEYER, La chanson de la Croisade contre les albigeois, commencée par Guillaume de Tudèle et continuée par un poète anonyme, éditée et traduite pour la Société de l'Histoire de France, par Paul Meyer, Paris, Renouard, Henri Loones, 1875-1879, 2 tomes. Consulter en ligne [2]

- Eugène Martin-Chabot, La chanson de la croisade albigeoise, éditée et traduite du provençal, par Eugène Martin-Chabot, Paris, Champion, 1931.

- GOUGAUD, Henri, La Chanson de la Croisade albigeoise, traduction nouvelle par Henri Gougaud, BERG International, 1984


- Grandes pages de "La Canso"  : 1208-1219 / Guilhem de Tudèle et l'Anonyme ; texte original occitan établi par Eugène Martin-Chabot ; trad. française, annotation et prés. Anne Brenon ; trad. anglaise Janet Shirley ; trad. musicale Christian Salès, Paratge suite symphonique ; photos Jean-Louis Gasc, Argeliers : éditions Christian Salès, 2012.
  

Postérité de l'oeuvre

C'est la seconde partie de l'oeuvre, celle composée par le continuateur anonyme, qui fait depuis le XIXe siècle le succès de la Canso. Véritable "partisan" du camp toulousain, il introduit dans son texte des valeurs morales qui donnent à l'affrontement entre les croisés et le camp toulousains (partisans du comte de Toulouse) l'image très littéraire d'un combat de résistance du Bien contre le Mal :


"D'un côté se trouvent Paratge, la noblesse d'âme, le sentiment de l'honneur, les vertus d'un cœur généreux, inséparable de Pretz, le mérite personnel, qu'accompagnent le bon droit, Dreitz, la justice de la cause, Dreitura, la loyauté, Lialtatz. De l'autre, l'orgueil, Orgolhs, l'esprit de démesure, Desmesura, la fourberie, Engans, la mauvaise foi, Falhimens. Les premiers symboles s'appliquent naturellement à Raimond VI et à son fils, le jeune comte, les autres à Simon de Montfort et à ses partisans. C'est aussi le combat de la Croix et du Lion. Le poème est écrit à la gloire de Toulouse et de la maison comtale. Son héros est le futur Raimond VII, « le vaillant jeune comte dirige les combats », en lui « réside toute valeur », il « relève Paratge et abat les orgueilleux », il « redonne éclat et splendeur à ceux qui ont été ou sont spoliés. » (Dossat, Cahiers de Fanjeaux, 1969) Redécouvert au XIXe siècle dans un contexte d'éveil.

Critiques et interprétations de l'oeuvre

Une source historique inestimable

"Si nous étions réduits, pour étudier la croisade, aux sources latines, actes et chroniques, nous serions bien mal informés. Beaucoup de faits, principalement de ceux qui se produisirent du côté des méridionaux, nous resteraient cachés. Des nombreux alliés du comte de Toulouse, nous connaîtrions à peine quelques-uns, et par-dessus tout nous ne saurions rien du sentiment avec lequel les populations méridionales, Toulouse notamment, se mirent à la résistance, lorsqu'il devint clair que la croisade ne tenait à rien de moins qu'à remplacer les familles seigneuriales du Midi par quelques ambitieux venus de France. Sur tout cela Pierre de Vaux-Cernai ne sait à peu près rien et Guillaume de Puylaurens n'offre que quelques notions accidentelles et fragmentaires. La principale source d'information est le poème de la croisade." Paul Meyer, Introduction

Une "épopée nationale" ou le rôle de la Canso dans l'éveil d'un mouvement "nationalitaire" occitan

Voir Guibal 1861

« La Chanson de la croisade est pour nous, gens d'Occitanie, l'histoire de nos malheurs ; elle est notre épopée ; chaque ligne de ce poème semble écrite avec le sang de nos aïeux. » Joseph Salvat, recension de "Eugène Martin-Chabot. - La Chanson de la croisade albigeoise, éditée et traduite du porvençal. Tome I : la Chanson de Guillaume de Tudèle..." dans "Bulletin critique", Revue d'histoire de l'Eglise de France, vol. 19, n° 83, 1933

Une oeuvre de littérature "populaire"

A la différences des Chroniques de la croisade, projet historiographique, la Canso est une oeuvre de littérature, surtout pour sa deuxième partie composée par l'Anonyme, comme le souligne Paul Meyer qui n'en défend pas moins son intérêt historique, à propos de la relation que fait l'auteur du concile de Latran, très différente des Actes officiels du concile :


"Fauriel a eu tort de comparer les actes du concile avec le récit toulousain. Les actes du concile sont des décisions, non pas un procès-verbal des séances. (...) Il n'est pas possible de souhaiter une confirmation plus décisive du rôle que le poète assigne au pape, rôle où, je le répète, tout est un peu grossi et mis en accord avec la conception générale de l'œuvre, qui appartient à l'histoire populaire et ne peut tenir compte des nuances délicates. En somme, tout ce que nous pouvons contrôler, dans le récit du poème, paraît avoir toute l'exactitude qu'on peut attendre d'un écrit composé à une époque où ne régnaient pas les habitudes scientifiques de notre temps. Quand on a fait la part de la forme poétique employée par l'auteur, étant bien assuré que le comte de Foix ni surtout le pape n'ont parlé en vers provençaux, on se trouve en présence d'un document historique aussi valable que n'importe quelle chronique d'événements contemporains."


Plus récemment, l'écrivain et conteur Henri Gougaud réalisait une nouvelle traduction française du texte afin d'en rendre la qualité littéraire : « La Canso est un grand reportage chanté, une sorte de journal parlé feuilletonesque et passionné qu'il faut imaginer proféré par quelque bougre accoutumé des estrades, attentif à informer, bien sûr, l'assemblée devant lui bouche bée, mais aussi à l'émouvoir, à la tenir en haleine, à l'attendrir et à l'effrayer, à lui faire, si j'ose dire, l'amour en mots et l'amener à jouissance sous peine de se voir abandonné au prochain détour de couplet. La Canso, au fond, ne diffère que par sa dimension des « complaintes à faits divers » que l'on goualait, au siècle dernier, sur le pavé des cours. » (Gougaud, 1984)

 

Bibliographie

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Pour en savoir plus :


Consultez le manuscrit fr. 25425 de la Bibliothèque nationale de France de La Canso de la Crozada


Consultez la réédition électronique du texte d'introduction de Paul Meyer à la Canso de la Crozada

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