Film noir et blanc muet réalisé par Michel Cans à Saint-Pons-de-Thomières dans les années 1950. Fait partie de la collection "Les villages de l'Hérault dans les années 1950".
Le CIRDÒC conserve à Béziers l'ensemble des films tournés par Michel Cans dans une soixantaine de villages de l'Hérault dans les années 1950. Les bobines 16 mm d'origine ont été transférées d'abord sur VHS et ont été ensuite numérisées entre 2010 et 2011.
L’ensemble du fonds et des droits qui y sont attachés ont été cédés par le réalisateur au CIDO entre 1989 et 1991. Le CIDO en a ensuite fait don au CIRDOC en 2000.
Occitanica va vous permettre progressivement d'accéder à l'ensemble de ce fonds audiovisuel en ligne. Ces documents illustrant la vie des villages de l'ouest héraultais ont acquis avec les années un intérêt patrimonial, mais aussi sentimental pour les habitants de l'Hérault. Ces archives brutes sont des films non montés et muets, tournés la plupart du temps en noir et blanc.
On peut y voir par exemple la Fête-Dieu à Cesseras, le carnaval à Laurens ou Boujan, la danse des treilles à Montblanc, la fête à Nissan, des Agathoises portant la coiffe, etc.
Texte de l'épisode 5 :
La porte-fenêtre de la terrasse était ouverte. Cela faisait un bon moment que nous étions assises toutes les deux : les mouches faisaient la ronde autour de la lampe et les moustiques la farandole. Mathilde ouvrit ses lèvres comme pour révéler le secret de sa vie et c'est un sourire qui s’épanouit sur son visage si beau. Je la regardais et j’attendais. Et la soirée semblait s'étirer sans but.
Au bout d'une heure je me suis levée pour prendre le journal et j’ai commencé à le lire – Le Midi Libre -, avec toute la poésie que nous connaissons bien – et alors j'ai entendu :
« Est-ce que je peux vous parler Jeanne ? »
« Bien sûr, rien ne me ferait plus plaisir. »
« Bon : je suis prête et je commence. Je suis née à Béziers il y a 19 ans. Je n'ai jamais vu mon père. Ma mère m'a dit un jour qu'elle l'avait foutu dehors parce que c'était un alcoolique et qu'il rentrait ivre chaque soir. Mais un autre jour, elle m'a dit que c'était lui qui l'avait abandonnée quand il avait appris qu'elle était enceinte. Je ne sais pas la vérité. Mais qu'elle qu'elle soit, ça ne change rien à ma vie : pas de papa ! Et je ne sais rien de lui, de sa vie et de sa famille. Ma mère était très jeune :18 ans. Elle n'avait pas d'argent et devait chercher du travail : j'ai été élevée par ma grand-mère, dans un coin de la ville, derrière la cathédrale. Ma mère trouva un travail à Marseille dans une boutique de vêtements. Le patron était un ami de mon grand-père, Monsieur Chauvet. Peut-être qu'il était amoureux de ma mère... Elle rentrait chaque mois. J'étais heureuse de pouvoir l'embrasser et j'aimais sentir ses mains sur ma peau. Je me rappelle qu'un soir je lui ai dit avant d'aller au lit : « si tu t'en vas demain matin, je ne veux pas le savoir, autrement je ne dormirai pas et je ne veux pas pleurer toute la nuit ! Demain je dois aller à l'école pour voir mes copines». J'aimais l'école et j'ai eu la chance d'avoir des instituteurs formidables. Pour les vacances ma mère m'emmenait, quand elle était avec nous, chaque jour à la mer avec la voiture de mon grand-père. J'aime beaucoup l'eau, la mer, et les mouettes. »
Mathilde commença à pleurer doucement. Je n'osai pas remuer. Le vent de la mer faisait danser le rideau de perles entre le salon et la cuisine. Le chat sauta sur mes genoux.
« Mathilde, tu veux une tisane de verveine du jardin ? » (sans faire attention, je l'avais tutoyée !) »
« Merci bien : je ne suis pas une amatrice de tisane. Un verre de lait plutôt ! »
Elle engloutit le lait sans respirer et puis :
« J'ai été très heureuse pendant des années. Et d'un coup tout a changé. Le malheur est arrivé. Mon grand père est mort quand j'avais 15 ans. Et un jour, il y a 2 ans, Monsieur Chauvet nous a appelé : ma mère n'était pas venue à la boutique depuis une semaine. Elle n'était pas à son studio non plus. La police fit des recherches poussées : rien. Nous sommes allées avec ma grand-mère chercher tout ce qu'elle avait laissé dans sa chambre. Nous avons payé le loyer. C'était l'année du bac. Tout s'était bien passé et j'avais décidé d'aller à l'université de Montpellier. Ma grand-mère, après tout ça, ne voulait pas rester toute seule à Béziers. Elle est allée dans une maison de retraite et elle est vite partie rejoindre son homme, l'an passé. Elle m'a laissé un peu d'argent mais pas beaucoup. Ce n'était pas possible pour moi de continuer l'université : je voulais apprendre la diététique et les études sont chères. »
« Comment es-tu arrivée chez moi ? »
« J'ai un ami dans votre village : nous avons vécu ensemble à Montpellier. Il s'appelle Jacques. Il m'a invité chez lui. Ses parents m'ont très bien accueillie. Mais je ne veux pas rester avec ce jeune : peut-être que dans quelques années nous nous retrouverons. On ne sait jamais. A l'heure d'aujourd'hui ma vie c’est moi qui doit me la choisir ! Après une nuit je suis partie : j'ai bu un café au Printemps et j'ai entendu un homme qui parlait de Jeanne Belcaire, qui était toute seule, qui n'avait pas de mari, pas d'enfants et qui avait un peu d'argent. Je ne savais pas où aller : j'ai réfléchi un moment et me suis dit : peut-être que cette dame a besoin de quelqu'un pour l'aider dans sa maison ? Et comme la vie ne m'a rien donné, mon chemin je dois le creuser toute seule, sans attendre qu'il me tombe du ciel. Et voilà, vous savez tout ! C'est sûr que j'ai un peu menti... »
C'était comme une histoire d'un autre siècle : un conte pour faire pleurer la grand-mère de ma grand-mère, le soir au coin de la cheminée. Mais de toute manière c'était la vie d'une fille d'aujourd'hui et cette fille, assise devant moi, me demandait l'hospitalité.
« Mathilde, tu peux rester chez moi, je suis d'accord. Demain sera un autre jour. J'ai décidé de voyager est-ce que tu veux venir avec moi rendre visite à un ami à Baltimore, USA ? »
Oeuvres publiées conservées aux CIRDOC
Manuscrits de Jules Seuzaret conservés au CIRDOC
- le ms. 173 contenant :- le ms. 634(2) contenant
Manuscrits inédits
Ref. biographiques
Texte de l'épisode 4 :
Et toute la nuit j'ai vu courir des cauchemars à califourchon sur des mules : mes aïeux, communistes du côté de mon père et huguenots des Cévennes du côté de ma mère, étaient furieux. Le matin, mes cheveux étaient dressés sur ma tête : il me fallait réfléchir : comment faire pour ne rien laisser après mon dernier souffle. Je ne pouvais pas digérer la chose entendue chez Maître Bardot : après moi, l'église catholique et romaine allait tout avaler, les papistes !
Puis, il y eut la cérémonie au funérarium : le choix de l'urne, rouge et jaune. Les amis de Vincent qui n'étaient évidemment pas des jeunes ont chanté le « se canta » et leurs petits enfants ont chanté avec eux : le monde changeait, peut-être que les troubadours revenaient, hourra !
Je pense que tout ceci aurait fait plaisir à l'oncle.
Au moment de partir, quand les discours furent terminés, la vieille Julia voulut chanter (certains disent que quand elle était jeune, elle était amoureuse de Vincent) cette chanson cévenole que j'aimais tant :
Quand un jour tu sentiras que l'âge réveille
De plus en plus en toi des souffrances diverses
Las de bêcher ce sol ingrat comme un désert
A l'appel du repos tu tendras l'oreille
Le temps aboutira ton corps devenu trop vieux
Et par dessus ta tombe
Et dominant la plaine
La pointe d'un cyprès
Laissera voir le ciel
Le temps aboutira
Ton corps devenu trop vieux
Alors on t'enterrera dans la terre en friches
Toute fleurie d'immortelles
à deux pas de ton mas
Où l'on entend si fort
Souffler la tramontane
Alors on t'enterrera dans la terre en friches
L'astre qui nous réchauffe et nous ensoleille
Sera ton compagnon
L'été comme l'hiver.....
Nous l'avons laissée terminer la chanson seule et nous sommes partis.
Nous sommes allés tous ensemble avec l'urne et j'ai fait ce que m'avait demandé Vincent : j'ai éparpillé les cendres dans le ruisseau de la Vire. Je ne sais pas si j'avais le droit ! Les gens étaient surpris mais disaient : C'est lui qui l'a voulu. Il est parti tranquille, sans souffrir : aller se coucher le soir, et sans se réveiller le matin, dormir pour l'éternité....Cocagne !
Puis nous sommes rentrés à la maison où Mathilde nous attendait avec l'apéritif. Elle avait une jolie robe grise. Tout le monde m'a demandé qui était cette fille si jolie : j'ai continué d'affirmer que c'était ma filleule, la fille d'une amie d'école, Lucienne. Mathilde ne disait rien, elle faisait simplement des sourires à tout le monde.
J'avais décidé que j'aurais une discussion avec elle dans la soirée.
-« Et que vas-tu faire maintenant que tu as de l'argent, Jeanne : la charité, la vie, l'artiste ? Tu as une jolie voix ! Il te faudrait essayer d'aller au conservatoire de Montpellier. On ne sait jamais.... Il n'y a pas d'âge pour chanter et surtout pour se faire plaisir. » •
Celui qui me disait tout ça était René - mon amoureux! - dont, pécaire, la femme, Rosette était morte l'an passé et qui c'était sûr aurait bien aimé trouver une compagne de son âge, surtout avec un peu d'argent. Souvenir! souvenir : peut-être qu'il me plaisait quand j'étais jeune mais aujourd'hui...
Le cousin Paul et Denise, sa femme, étaient très contents de l'accord que nous avions conclu chez le notaire :
- « Merci Jeanne pour le loyer si bas : avec les problèmes de la viticulture peut-être qu'il me faudra tout arracher et faire un potager. Denise ira vendre sur le marché. » • «
Sûr que ça me plaira plus que de travailler au supermarché ! ».
« On essayera le bio, aujourd'hui il n'y a que ça qui marche, et encore plus pour le vin... Et toi, que vas-tu faire de ton temps, des terres et de la maison de Vincent ? Il t'a laissé de l'argent ? «
"Oui ! Je ne peux rien te dire de plus aujourd'hui. Mais je te promets que si un jour je vends les terres, c’est toi qui seras le premier informé."
« Merci pour tout ! »
À 8 heures tout le monde était parti : le dernier à s'en aller était René. Il vint me faire une bise, il avait bu un coup et me dit sur le pas de la porte :
« Si un jour tu en as assez d'être seule, ça me ferait plaisir de vivre avec toi. Tu sais bien que je t'aime depuis toujours ! » «
Tais-toi grand imbécile ! Une fois ça suffit : c'est ce que j'ai toujours fait dans ma vie ! Adieu ! »
Je fermai la porte sur ce pauvre René. Nous avons fait le ménage et avons mangé un morceau.
« Et maintenant Mathilde, il est temps de parler. Si vous voulez rester avec moi, je dois savoir d'où vous venez et tout ce que vous avez fait dans votre vie. »
« Je ne sais pas si je peux : j'ai peur... » « Vous n'avez pas le choix, sinon demain il me faudra vous demander de partir. »
« Non ! Je veux rester ici. Je me sens si heureuse avec vous. C'est comme si j'étais avec une mère, vous comprenez... »
Pastorale provençale rédigée en 1893 par des membres des Œuvres de Saint-Joseph, rue Puget à Marseille.
Texte de l'épisode 3 :
Qui pouvait bien appeler à cette heure ?
Sur l’écran du téléphone, on pouvait lire : Funérarium. J'avais oublié !
Mathilde était assise sur une chaise de l'autre côté du salon. Elle avait l’air complètement épuisée : bouche ouverte et yeux mi clos. Toujours jeune et belle mais il y avait quelque chose qui ne tournait pas rond chez cette petite jeune fille : peut être avait-elle faim ? C'était l'heure du repas, midi et demi.
Pour le moment, je devais répondre :
- "Allo ! Mademoiselle Belcaire ?"
- "Bonjour ! C'est bien elle !"
- "Vous n'oubliez pas que la cérémonie se tiendra demain à quinze heures. "
- "Oui, je sais"
- "Nous avons besoin de quelques renseignements pour tout organiser."
- "Je vous écoute"
- "Combien de personnes avez-vous invitées – pour les chaises ? Est-ce que vous avez prévu un sermon avec un curé – pour savoir combien de temps ça durera. Vous n'avez pas encore choisi l'urne pour les cendres.... " (La femme ne s'arrêtait pas...)
- "Alors : 25 personnes, pas de curé, deux discours de 5 minutes. Pour l'urne, je la choisirai demain. Nous arriverons aux alentours de deux heures et demie. "(C'était tout, mais la femme continuait et Mathilde était en train de tourner de l'oeil : elle avait besoin de manger.)
- "Bon madame, j'ai un millier de choses à faire : au revoir. Nous reparlerons de tout ça demain. Bonne après-midi ! "
Et cric et crac, je reposai le téléphone.
- "Eh bien ! C'est pas trop tôt!"
Je me dirigeai vers la cuisine.
- "Mathilde, vous avez faim ? "
- "Oui, si vous avez un petit quelque chose à grignoter, ça me ferait plaisir. Je pense qu'il y a longtemps que je n'ai rien mangé."
Je préparai une casserole de pâtes/pesto avec un peu de parmesan. Puis nous avons mangé, ou plutôt, elle a englouti deux assiettes pleines sans prendre le temps de respirer. Je n'osais rien dire et, de toute manière, je ne savais pas ce que j'aurais pu dire : on a le droit d'avoir faim.
- "Merci Mademoiselle Belcaire, c'était bon."
- "Maintenant peut-être que ça vous ferait du bien d'aller vous reposer un peu avant d'aller chez le notaire ?"
- "Est-ce que je pourrais appeler mon ami ? Je ne lui dirai pas où je suis mais j'aimerais savoir comment il va, le pauvre. Il n'est pas loin, ça ne coûtera pas cher !"
- "Si ça vous fait plaisir, prenez le téléphone dans votre chambre : mais j'ai un forfait de deux heures : vous serez bien gentille de faire vite."
- "Merci Mademoiselle"
Elle prît le téléphone, ferma la porte de sa chambre et commença à parler, tellement doucement que je ne pouvais rien entendre. Puis elle revint poser le téléphone sur l'étagère et me dit :
- "Merci, vous êtes bien gentille".
Elle retourna dans sa chambre. J'étais sûre que ses yeux étaient humides : elle avait pleuré, pécaire, que pouvais-je faire ? Si elle ne voulait rien me dire, moi je ne pouvais rien lui demander. Une nuit et demain Mathilde devrait trouver un autre logis : je n'étais pas mère Thérésa ! J'ai travaillé un peu – tellement de papiers à remplir pour l'enterrement!
Puis j'ai enfilé un « jean », une « chemise » - il faisait trop chaud pour s'habiller comme une dame, et je suis allée frapper à la porte de la chambre :
- "Mathilde, il est l'heure de partir !"
- "J'arrive !" Elle sortit de la chambre avec une belle robe rouge, des chaussures d'été, rouges également : elle était jolie et élégante. Le trajet fut court. Et quand je suis entrée chez le notaire, j'étais fière d'être avec une si belle fille. Le notaire vint m'ouvrir la porte :
- "Bonjour Maître, je vous présente ma filleule, Mathilde !"
(Ça m'était venu comme ça : il fallait bien que je dise quelque chose ! Mathilde esquissa un petit sourire et s'assit sur un fauteuil en osier de Vallabrègues )
- "Enchanté, si vous voulez bien attendre ici Mathilde ! Peut- être que ce sera un peu long mais vous avez de quoi lire et si vous avez soif, il y a une bouteille d'eau et un verre."
- "J'ai tout mon temps, merci beaucoup. Je serai bien ici."Nous sommes entrés dans l'étude de Maître Bardot : Paul n'était pas encore arrivé. C'était un beau bureau : deux grandes fenêtres qui donnaient sur un grand jardin avec des palmiers, des cèdres du Liban, des marronniers et j'avais l'impression d'être, assise dans un grand fauteuil vert Napoleon III, dans un roman du Balzac de Rodez.
- "Je vous ai demandé de venir un peu plus tôt parce qu'il y a un petit problème. Bien sûr votre oncle vous a bien légué à peu près tout ce qu'il avait. Mais il y a une chose pas très claire : votre cousin Paul avait un fermage sur la vigne du Clapas, qui fait deux hectares. Et la volonté de votre oncle est que Paul continue de travailler cette vigne c'est à dire que vous ne pourrez pas la vendre et que vous devrez le garder comme fermier. Le loyer n'est pas très élevé."
- "Ne vous faîtes pas de mauvais sang : même s'il la lui avait donnée cette vigne, il n'y aurait pas eu de problème. Je suis seule et j'ai assez d'argent pour vivre et voyager".
- "Autre chose : comme vous n'avez pas d'enfants, quand vous partirez pour l'autre monde, le plus tard possible je vous le souhaite, tout ce que vous aurez gardé, argent, terres et maison iront à l'Eglise catholique."
- "Je n'ai rien à ajouter : la volonté d'un mort dans son testament doit être suivie."
-" Jeanne il faut que je vous dise : j'ai été surpris, je ne savais pas que vous aviez une filleule aussi jolie, ces yeux verts...."
Heureusement la porte s'ouvrit et la secrétaire fit entrer le cousin Paul. Ouf !
Nicolas Saboly est sans conteste le rédacteur de noëls - cantiques en langue vulgaire célébrant la Nativité - le plus connu aujourd'hui. Réputé au XVIIe siècle pour la saveur de ses textes, il apparaît aujourd'hui comme le principal acteur de la tradition provençale autour de Noël.
Le genre des noëls, apparu au XIe siècle, rencontra à l'époque un grand succès. Les noëls étaient alors les seuls chants en langue vulgaire autorisés dans les églises, compréhensibles par le plus grand nombre. Pouvant s'inspirer de sujets d'actualité ou des coutumes locales, ils sortent du champ liturgique pour s'imposer en tant que véritables airs populaires.
Chaque grande ville, chaque région avait dans le courant du XVe et du XVIe siècle son noëlliste attitré qui, chaque année, aux alentours du 25 décembre, publiait ses cantiques. Parmi ces noëllistes, figuraient des membres du corps ecclésiatistique, des organistes mais aussi quelques clercs, souvent compositeurs d'airs populaires.
Nicolas Saboly, est pour sa part un noëlliste provençal. Il naît dans le Comtat Venaissin, à Monteux, le 30 janvier 1614 dans une famille de consuls.
Issu d'une famille d'éleveurs, il grandit au milieu des bergers et des troupeaux de moutons.
Destiné à l'état ecclésiastique, il entre très tôt au collège de Carpentras chez les jésuites avant d'être nommé à 19 ans recteur de la chapellenie de Sainte-Marie Madeleine, fondée au maître-autel de la cathédrale Saint-Siffrein à Carpentras.
En 1635 il est appelé au sous-diaconat, diaconat et prêtrise avant d'être nommé maître de chapelle et organiste de la cathédrale Saint-Siffrein de Carpentras.
C'est à cette date que Nicolas Saboly semble avoir commencé à composer ses noëls, dans un premier temps pour ses intimes, puis publiés plus tardivement.
Il ne nous reste aujourd'hui aucune trace des manuscrits de Nicolas Saboly mais on sait que ses noëls ont été publiés de son vivant entre 1669 et 1674, chaque année sous la forme de petits fascicules. En tout, un peu plus d'une cinquantaine de noëls lui sont attribués, tous écrits en langue occitane.
Nicolas Saboly aurait composé très peu de musiques pour accompagner ses noëls. Il était alors de tradition d'écrire les paroles des chants sur des airs populaires empruntés à d'autres compositeurs ou à des airs d'église. Nicolas Saboly a souvent repris des airs à la mode pour accompagner ses compositions. En témoigne son cantique « La Bona Novela » dont la trame musicale s'appuie sur une gavotte de Praetorius devenue ensuite l'air d'une bourrée à deux temps en Berry : « En passant la rivière ».
Ainsi, seules une dizaine de mélodies auraient été composées par l'auteur pour accompagner ses chants.
Par le biais de ses noëls, Nicolas Saboly déplace la scène de la Nativité en Provence, en lui confiant tous les attributs de la coutume comtadine.
La plupart de ses cantiques font apparaître des bergers, venant des coteaux du Comtat Venaissin. Ce sont ses propres contemporains qu'il met ainsi en scène reprenant dans ses noëls leur parler, leurs moeurs, leurs habitudes mais aussi leurs légendes et des aspects de leur religion populaire.
Dans ses poésies d'inspiration populaire, apparaissent régulièrement des éléments d'actualité. Ses sentiments politiques ont même pu apparaître dans certains noëls, notamment son attachement aux "Pévoulins", gens du petit peuple meneurs d'une révolte en Avignon en 1653 contre les "Pessugaux", soutiens de l'administration pontificale. Un des premiers noëls qui lui est attribué, « Nouvé de l'an 1660 après le mariage de Louis XIV », outre son titre, évoque également dans son contenu le mariage du roi et la conclusion du traité des Pyrénées, marquant la fin de la guerre de Trente Ans. Dans l' «Estrange Deluge » publié en 1674, il fait allusion à la terrible inondation d'Avignon survenue la même année. Enfin, dans « La miejo nue sounavo » publiée en 1672, il fait référence à la Guerre de Hollande commencée la même année.
Enfin, on ne peut pas ignorer l'aspect éminement satirique des textes de Nicolas Saboly, ce dernier dotant souvent ses écrits de traits moqueurs et critiques contres les prêtres, les gens du monde, les nobles et magistrats, les riches et les pauvres. Ainsi un de ses noëls les plus célèbres, « I a proun de gens » (connu aussi sous le titre « La cambo ma fa mal ») aurait été rédigé pour se moquer d'un curé boiteux dans l'entourage proche de l'organiste de Carpentras.
Le dernier recueil de noëls de Nicolas Saboly sera publié en 1674 mais tous ses cantiques se sont largement répandus dans la culture populaire avant d'être transmis jusqu'à nous aux côtés des noëls de Natalis Cordat (1610-1663) ou encore ceux de N.D. Des Doms.
Voir les partitions des noëls de Saboly sur Occitanica.
Voir sur Lo Trobador, toutes les éditions des noëls de Saboly.
Voir sur Lo Trobador tous les ouvrages sur la vie et l'œuvre de Saboly.