mes rencontres font de moi une
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Quand je dis rencontres,
c’est celles provoquées ou celles destinées,
celles avec les paysages, les manières de dire, de voir les choses,
les gens, les animaux, les végétaux,
tout ce qu’on oublie de contempler parce qu’on est
trop pressés trop stressés.
[Source : Alice Traisnel]
Ces trois dernières années, pour ma thèse de doctorat, j'ai arpenté les terres sauvages du Couserans et de la Camargue pour écouter les paysages parler dans leur langue, un occitan parfois maternel, parfois un peu écorché, souvent mêlé de français, mais toujours aussi sensible et poétique, fougueux, toujours aussi malicieux, toujours aussi savoureux.
J'ai partagé le travail et quelques repas (souvent arrosés il faut bien le dire), j'ai appris des milliards de choses sur les pays, sur la vie, sur moi aussi. Ça m'a appris à écouter et à cultiver ma curiosité de l'autre, à respecter ce que je ne comprenais pas. C'était une expérience incroyable, que j'ai photographiée à (presque) toutes les occasions.
Avec l'exposition ethnophotographique sonore L'Ours et le Taureau, Mirages du Sauvage, je vous emmène vers une rencontre avec les éleveurs et bergers en montagne du Couserans, et les gardians et manadiers de Camargue. On y entendra la mer et le mistral, les sonnailles des brebis en transhumance, le nom des montagnes et leur secret, et quelques phrases tirées de mes entretiens avec mes interlocuteurs, avec leurs mots qui deviennent rares... C'est aussi un moyen d'approcher différemment un métier, un savoir-faire et un savoir-vivre qui évoluent très vite et dont on ne connaît que peu les réalités.
[Source : Alice Traisnel]
Chaque rencontre nous ouvre à l'inattendu et, parfois, cet inattendu se révèle inouï. Celui-ci peut nous surprendre au détour d’une lecture, d’un spectacle ou d’un échange. Autant de brèches dans “l’éternel retour” du repli qui enferme, de la colère qui désespère, du rejet qui exclut. Nous en faisons l’heureuse expérience dans la rencontre avec le patrimoine d’“à côté”, la création “d’ici” et les pratiques d’“en bas”, aux interstices d’une culture uniformisée. Le poète provençal Max-Philippe Delavouët a écrit : “il n’existe pas d’autre façon pour comprendre le monde que d’en posséder pleinement un morceau”. C’est un peu l’objectif que s’est donné le CIRDOC, il y a cinquante ans (en 2025), avec sa collection occitane, aujourd’hui labellisée Collection d’Excellence et Ethnopôle. Cinquante ans, c’est déjà inouï !