C’est François Raynouard qui, en l’absence des vers liminaires et finaux dans le manuscrit de Carcassonne, forge le titre Flamenca d’après le nom de l’héroïne du roman2. Flamenca est aujourd’hui accepté comme titre uniforme3 conventionnel même si certains critiques ont plaidé pour des variantes possibles permettant de recentrer le roman sur le personnage du chevalier Guillem (A. Limentani, 1965) ou du jaloux châtié, le seigneur Archimbaut (U. Gschwind, 1971).
Formes rejetées :
< La Dame de Bourbon (Mary-Lafon, 1860)
< Las Novas de Guillem de Nivers (Alberto Limentani, 1965)
< Novas de Guillaume de Nevers (Luciana Cocito, 1971)
< Le Roman de Flamenca (Paul Meyer ; Nelly-Lavaud)
< Le Roman d’Archimbaut (Ulrich Gschwind, 1971)
La seule copie connue du manuscrit a été découverte au début du XIXe siècle dans les collections de la Bibliothèque de Carcassonne.
Localisation actuelle :
Bibliothèque d’agglomération de Carcassonne. Ms. 34 (anciennes cotes : n° 2703 ; n° 2176)
Manuscrit sur parchemin, 140 f. Initiales ornées. 215 × 142 mm. Reliure moderne maroquin.
Le manuscrit est incomplet. Outre des lacunes dans le corps même du volume, le premier feuillet est mutilé et les derniers feuillets ont disparu.
Le manuscrit a été relié avec une lettre autographe de François Raynouard (2 f. à l’entête de l’Institut Royal de France) contenant une « notice sur Flamenca » (Passy-les-Paris, 15 juin 1834).
La reliure originale en bois a disparu, elle a été remplacée par une reliure moderne (fin XIXe-début du XXe siècle).
Texte de 8095 vers octosyllables sur une seule colonne (29 lignes par page).
La copie serait du début du XIVe siècle, Provence (cour angevine d’Aix).
- [Cayrol ?] : sur le fol. 3 r°, en marge du texte, plusieurs occurrences du patronyme « Cayrol » dans une écriture du XVIIe siècle4 qui pourrait signaler un possesseur antérieur aux Murat.
- Collection de Murat : le manuscrit de Flamenca se trouvait dans la bibliothèque de la famille Murat, famille de magistrats carcassonnais sous l’Ancien régime. Les Murat ayant émigré lors de la Révolution française, leurs biens sont confisqués comme biens nationaux en 1792. Le manuscrit de Flamenca avait probablement été acquis par Joseph-Vincent de Murat (1668-1732), érudit et bibliophile5.
- École centrale de Carcassonne (ancien collège des Jésuites) : lors des confiscations révolutionnaires la bibliothèque de la famille de Murat est déposée à l'École centrale de Carcassonne.
- Bibliothèque de Carcassonne : créée en 1804, la Bibliothèque de Carcassonne ne fonctionne vraiment qu’à partir des années 1830. Le manuscrit de Flamenca est signalé en 1834 par Gabriel Delessert préfet de l’Aude6 au philologue François Raynouard7 dans le cadre de la « Commission des travaux littéraires, chargée de surveiller la continuation de la notice des manuscrits, du Recueil des ordonnances des rois de France, et du Recueil des historiens des Gaules et de la France » (Institut de France, Académie des Inscriptions et Belles-Lettres). Celui-ci en publie les premiers extraits dès 18358.
2-1/ « En Bernardet », auteur de Flamenca ?
Le roman contient un court passage dédicatoire (v. 1722-1736) qui fait l’éloge d’un « seners d’Alga » (seigneur d’Algues) et qui contient la mention d’un certain « En Bernardet » qui pourrait désigner l’auteur de Flamenca.
L’auteur de Flamenca « était un Rouergat dont la langue trouve des échos dans celle du troubadour compatriote Daudé de Prades »15. Au vu de sa très grande connaissance de la littérature d’oc et d’oïl, de sa grande culture biblique et de la maîtrise du calendrier liturgique, l’auteur anonyme a le profil d’un clerc lettré. Pour F. Zufferey, plusieurs indices permettent d’aller plus loin en faisant de l’auteur, « En Bernardet », un ancien clerc ayant renoncé à ses vœux
2-2/ La cour de Roquefeuil, refuge des poètes :
Le roman a vraisemblablement été composé dans l’entourage de la cour de Roquefeuil16. C'est Camille Chabaneau qui identifia le « seigneur d'Alga » au baron de Roquefeuil : « Alga, château aujourd'hui détruit, mais dont les ruines sont imposantes, était le lieu de la seigneurie de Roquefeuil qui fut le premier comtor de Nant, mais qui, en 1276, ne prenait encore que le titre de seigneur d'Alga17. »
Algues est un château situé près de Nant en Aveyron, dans la vallée de la Dourbie à 34 km de Millau, à proximité de la chaîne de l’Aigoual.
C’est à la famille rouergate des Roquefeuil, issue des seigneurs d’Anduze, alliée aux comtes de Toulouse et aux Trencavel, qu’appartient le personnage de Raymond IV de Roquefeuil, seigneur de Cantobre et d’Algues, comtor de Nant18, d’abord supérieur du couvent des franciscains de Lunel, relevé de ses vœux en 1287 pour se marier. Il est désigné comme le mécène et le protecteur du narrateur de Flamenca qui en loue la prodigalité19.
La cour de Roquefeuil a été célébrée par le troubadour rouergat Daude de Pradas, contemporain de l’auteur de Flamenca, dans le poème « Ab lo douz temps que renovella / Avec la douce saison qui se renouvelle » :
Lai on es proeza certana,
va salve t’en vai, e no.t trics,
chanssos, que.l seigner t’er abrics
contra la folla gen vilana;
e.ls dos fraires de Rocafuoill,
on fis pretz e jovens s’accuoill,
sapchas a tos ops retener,
si vol en bona cort caber.
(traduction française : Là où se trouve la véritable prouesse, / va chanson vers Sauve20, et ne tarde pas / car le seigneur te protégera / contre la folle gent vilaine ; /et et les deux frères Roquefeuil, / chez qui la vraie valeur et la jeunesse sont bien accueillies, / sache les gagner, / si tu veux trouver place en bonne cour21.)Pour les critiques et éditeurs de l’œuvre, l’étude de la langue de l’auteur de Flamenca ne laisse aucun doute : l’auteur était rouergat et sa langue a de nombreuses similitudes avec celle du troubadour Daude de Pradas, son contemporain.
Le contexte de réalisation de la copie est également identifiable par certains traits linguistiques attribuables au copiste. Le texte a été copié en Provence, peu après la composition de l’œuvre (tout début du XIVe siècle) comme l’avait suggéré le premier Clovis Brunel22.
« Si jamais livre a été pourchassé par les autorités religieuses après 1277, c’est certainement le Roman de Flamenca. Il ne doit d’avoir pu paraître qu’au fait qu’il a été écrit avant cette date. Car à partir de la fin XIIIe siècle on constate, dans tous les ouvrages en langue d’oc, la disparition de toutes les théories érotiques incriminées par l’évêque Tempier et combattues par Jean de Mun. L’amour pur adultère devient pêché ; l’amour conjugal seul est exalté, la jeune fille l’emporte sur la dame, etc… Entre 1277 et 1280 la parution d’un roman comme celui de Flamenca eût scandalisé beaucoup plus de gens pieux que le Roman de la Rose ».
René NELLI, Le roman de Flamenca : un art d'aimer occitanien du XIIIe siècle, Toulouse : Institut d'Etudes Occitanes, 1966.
« A hundred years after Christien, one of his cleverest pupils wrote de Provençal story of Flamenca, a work in which the form of the novel is completely disengaged from the unnecessary accidents of romance, and reaches a kind of positive and modern clearnesse very much at variance in some respects with popular ideas of what is medieval... Flamenca is the perfection and completion of medieval romance in one kind and in one direction... It is perhaps the first complete modern appropriation of classical exemples in literary art ».
W. P. KER, Epic and Romance. Essays on medieval Literature, London, 1897.
« Le roman de Flamenca ne représente pas seulement un intérêt littéraire ; il n’est pas seulement la perle de la poésie narrative du moyen-âge23 ; à sa fiction pleine de fantaisie et riche d’analyses ingénieuses ou profondes, il juxtapose un véritable art d’aimer qui, se développant pour ainsi dire en marge des aventures romanesques, constitue une sorte de somme de l’érotique provençale du XIIIe siècle ».
René NELLI, Le roman de Flamenca : un art d'aimer occitanien du XIIIe siècle, Toulouse : Institut d'Etudes Occitanes, 1966.
« Synthèse de l’érotique et de la poétique troubadouresque, le Roman de Flamenca vient rappeler la dette de la littérature amoureuse occidentale à l’égard de l’Occitanie médiévale ».
Jean-Charles HUCHET, Flamenca, roman occitan du XIIIe siècle, Paris, Union générale d'éditions (10/18), 1989.
« Flamenca n'est pas un roman historique mais un roman psychologique dont les jeux de comédie ont été rapprochés de ceux de l'École des Femmes ou de Tartuffe. C'est une œuvre célèbre, la plus dense que le Moyen Âge ait produite ».
J. FABRE DE MORLHON, « Le roman de Flamenca dans son contexte historique » dans : Mélanges de philologie romane offerts à Charles Camproux, Montpellier : C.E.O. : Université Paul Valéry, 1978.
« Pour l’histoire des sentiments et des mœurs vers l'avènement de Louis IX, le roman de Flamenca est sans contredit, une source incomparable ».
Ch.-V. LANGLOIS, La vie en France au moyen âge de la fin du XIIe au milieu du XIIIe siècle d’après les romans mondains du temps, Paris, 1926-28.
Pour accéder à une bibliographie complète et actualisée sur Flamenca consulter le Trobador (catalogue général de la documentation occitane) : http://lo-trobador.occitanica.eu/cgi-bin/koha/opac-search.pl?idx=&q=flamenca-
(1) François-Just-Marie RAYNOUARD, « Notice de Flamenca : poëme provençal, manuscrit de la Bibliothèque municipale de Carcassonne, n° 681 » dans : Notices et extraits des manuscrits de la bibliothèque du Roi et autres bibliothèques, t. 13/2 Paris, 1835-1838, p. 80-132.
Note : Première édition et traduction de quelques extraits de Flamenca, accompagnée de notes et commentaires.
Réédition : Ce texte sera repris intégralement et publié dans : François-Just-Marie RAYNOUARD, Lexique roman ou Dictionnaire de la langue des troubadours comparée avec les autres langues de l'Europe latine : précédé de nouvelles recherches historiques et philologiques, d'un résumé de la grammaire romane, d'un nouveau choix des poésies originales des troubadours, et d'extraits de poëmes divers, Tome premier, Paris : Silvestre, 1838, p. 1-47.
Compte-rendu dans : Amaury-Duval (Eugène-Emmanuel-Amaury Pineu-Duval, dit), « Le Roman de Flamenca » dans : Histoire Littéraire de La France, Paris 1838, T. XIX, 1838, p. 776-78924.
Localiser le document : requête trobador
Consulter en ligne : http://occitanica.eu/omeka/items/show/10824
(2) Jean-Bernard LAFON dit MARY-LAFON, La dame de Bourbon, Paris : Bourdilliat, 1860. xv, 174 p.
Note : Adaptation romanesque et libre de l’oeuvre dans une édition illustrée de dessins romantiques et lithographies de E. Morin gravés par H. Linton.
(3) Paul MEYER, Le roman de Flamenca, Paris : A. Franck ; Béziers : J. Delpech, 1865. 1 vol. (XLV-427 p.).
Note : Première édition complète du roman de Flamenca qui s’accompagne d’une traduction et d’un glossaire et porte un jugement sévère sur l’édition de Mary-Lafon.
L’édition de Paul Meyer sera très critiquée par Camille Chabaneau (compte-rendu dans la Revue des langues romanes en 187625), qui lui reprochera des erreurs de transcription.
(4) Paul MEYER, Le roman de Flamenca, Paris: Librairie E. Bouillon, 1901.
Note : Deuxième édition de Flamenca entièrement refondue par Paul Meyer, en réponse aux critiques de C. Chabaneau.
Camille Chabaneau reprendra ses critiques à l’encontre de cette nouvelle édition (compte-rendu dans la Revue des langues romanes en 190226).
Réédition : Le roman de Flamenca, publié d'après le manuscrit unique de Carcassonne, traduit et accompagné d'un vocabulaire... par Paul Meyer. [Paris] : [diffusion Champion] ; Genève : Slatkine, 1974. V-416 p.-[1] f.
(5) René LAVAUD, René NELLI, « Flamenca », dans : Les troubadours [I] : Jaufre, Flamenca, Barlaam et Josaphat, [Bruges] : Desclée de Brouwer, 1960.
Note : L’édition du texte suit celui donné par Paul Meyer, seule la traduction française est nouvelle.
Réédition: Les troubadours : texte et trad. de René Lavaud et René Nelli. Paris : Desclée de Brouwer, 2000 (1127, 1085 p.) (Bibliothèque européenne).
Le 1er tome réunit : « Le roman de Jaufre », « Le roman de Flamenca », « Le roman spirituel de Barlaam et Josaphat ». Texte occitan et trad. française en regard. Reprod. photomécanique de l'éd. de Paris, 1966. Contenu : Vol. 1, L'œuvre épique ; Vol. 2, Le trésor poétique de l'Occitanie.
(6) Ulrich GSCHWIND, Le Roman de Flamenca : nouvelle occitane du 13e siècle, Berne : Francke, 1976. 2 vol. (229, 362 p.). (Romanica helvetica ; 86A-B).
Note : Nouvelle édition du texte en ancien occitan avec de nombreux commentaires ; ne contient pas de traduction.
Edition initiale: Vorstudien zu einer Neuausgabe der Flamenca, Ulrich Gschwind. Zürich : Aku-Fotodruck, 1971. xiii, 553 p ; 23 cm. Has been attributed to Bernardet. Includes index. Diss. : Phil. : Zürich : 1971.
(7) Jean-Charles HUCHET, Flamenca, roman occitan du XIIIe siècle. Texte établi, traduit et présenté par J.-Ch. Huchet, Paris, Union générale d'éditions (10/18), 1989.
(8) Flamenca : texte édité d'après le manuscrit unique de Carcassonne par François ZUFFEREY et traduit par Valérie FASSEUR. Paris : Le livre de poche, 2014, (Lettres gothiques, 32551).
Traductions anglaises
W. A. BRADLEY, The Story of Flamenca : The Firts Modern Novel. Arranged form de Provençal Original of the Thirteenth Century. With Woodcuts by Florence Wymans Ivins, Harcourt, Brace and Company (New York), 1922.
Autres éditions :
Flamenca : roman provençal du XIIIe siècle, mis en français moderne par W. et J. BRADLEY ; décoré par Robert Lanz. Paris : G. Crès, 1927.
Flamenca : translated from the thirteenth-century provençal of Bernardet the troubadour, by H.F.M. Prescott.-- London : Constable and Co, 1930.
The Romance of Flamenca : a provençal poem of the 13th century, english verse translation by Merton Jerome Hubert ; revised provençal text by Marion E. Porter. [Princeton] : Princeton University Press, 1962. 1 vol. (456 p.-[4] p. de pl.). Auteur présumé: Bernardet, d'après l'introd. p. 6 et d'après C. Brunel. Bibliogr. p. 449-452. Notes bibliogr. Index
The romance of Flamenca, edited and translated by E.D. Blodgett. New York ; London : Garland, 1995. 443 p. (Garland library of medieval literature ; 101A). Texte en ancien occitan traduction anglaise en regard. Notes bibliogr.
Traductions allemandes
Kurt LEWENT, Bruchstücke des provenzalischen Versromans Flamenca, Halle Niemeyer, 1926 1 vol. (XII-81 p.). (Sammlung romanischer Übungstexte ; 8). Introduction et notes en allemand, texte en ancien provençal. Glossaire.
Flamenca : ein altokzitanischer Liebesroman, übersetzt, mit Einführung, Erläuterungen und Anmerkungen versehen von Fritz Peter Kirsch. Kettwig : Phaidon, 1989. 248 p. (Erzählungen des Mittelalters ; 2, 516638).
"Ab me trobaras Merce" : Christentum und Anthropologie in drei mittelalterlichen okzitanischen Romanen : Jaufré, Flamenca, Barlaam et Josaphat, Imre Gábor Majorossy. Berlin : Frank & Timme, cop. 2012. 1 vol. (254 p.) : couv. ill. en coul. ; 21 cm. (Romanistik, ISSN 1860-1995 ; Bd. 10). Bibliogr. p. 243-250. Notes bibliogr.
Traductions italiennes
Giuseppe G. FERRERO, Flamenca, poema narrativo in lingua d’oc, Turin, Gheroni, 1963.
Las novas de Guillem de Nivers : ("Flamenca") introd., scelta et glossario di Alberto Limentani. Padova : Ed. Antenore, 1965. (Vulgares eloquentes ; 1)
Luciana COCITO, Il romanzo di Flamenca, Gênes, Tilgher-Rozzano, 1971.
Flamenca a cura di Mario Mancini. Roma : Carocci editore, 2006. 1 vol. (311 p.) : couv. ill. en coul. ; 18 cm. (Biblioteca medievale ; 106) Texte en ancien provençal avec traduction italienne en regard. Bibliogr. p. [281]-282. Notes bibliogr
Nouveau tirage : 2007, 2010
Flamenca : romanzo occitano del XIII secolo [a cura di] Roberta Manetti. Modena : Mucchi, 2008. (Studi, testi e manuali. Nuova serie ; 11).
Traduction catalane
Antony ROSSELL, El romàn de Flamenca. Novela occitana del siglo XIII, Guadalajara : Ed. Arlequin, 2009.
Traduction espagnole
Jaime COVARSI CARBONERO, El roman de Flamenca, Murcia : Ed.um, 2010.
> Vidéoguide : Le roman de Flamenca / CIRDÒC Mediatèca occitana
> Cèrqui una edicion de l'òbra medievala "Flamenca" [Question / Réponse]
> Flamenca : Cap d'òbra occitan del sègle XIII / Lo CIRDÒC Tèma(s)
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Accroissement :
“Papiers de Henri GRÉGOIRE, curé d'Embermesnil, depuis évêque de Blois, sur les patois de la France.”
Recueil factice de 121 f. manuscrits contenant une partie des réponses à la circulaire de l’abbé Grégoire sur les “patois” et de nombreuses pièces en langue de France envoyées avec les réponses, notamment la pièce « Jammeto et Ramoun”, comédie en six actes, en occitan, très populaire dans la région de Carcassonne au XVIIIe siècle.
Ce recueil de manuscrits complète la documentation sur l’enquête Grégoire conservée à la Bibliothèque de la Société de Port-Royal (REV 222 et 223). Il était inconnu d’Augustin Gazier, qui publia à partir de 1874 dans la Revue des langues romanes les matériaux rassemblés par l’enquête Grégoire : RLR. t. V, 1874 ; articles rassemblés en monographie : Augustin Louis GAZIER, Lettres à Grégoire sur les patois de France, 1790-1794 : documents inédits sur la langue, les moeurs et l’état des esprits dans les diverses régions de la France au début de la Révolution ; suivi du Rapport de Grégoire à la Convention… Paris : A. Durand et Pedone-Lauriel, 1880 (reprint : Genève : Slatkine, 1969).
Dates extrêmes :
Langues représentées dans le fonds :
Importance matérielle :
Supports représentés :
Instruments de recherche disponibles :
Conditions de reproduction :
La bibliothèque de la Société de Port-Royal est une bibliothèque privée spécialisée dans l’histoire religieuse de la France moderne. La collection est constituée au cours du XVIIIe siècle par des fidèles du jansénisme. Passée de mains en mains, la collection est vendue et dispersée à la Révolution. C’est en 1802 qu’une société est fondée pour faire vivre le patrimoine et le souvenir du jansénisme et de Port-Royal des Champs. L’important fonds de livres et de manuscrits provenant de la collection de l’abbé Henri Grégoire a été transmis par son secrétaire, l’abbé Jean-Louis Rondeau puis par Gabriel Girard, prêtre de la paroisse Saint-Séverin. La Société Saint-Augustin, ancêtre de la Société de Port-Royal l'a reçu en 1840.
Le fonds de l’abbé Henri Grégoire conservé à la Bibliothèque de la Société de Port-Royal rassemble des imprimés et des manuscrits provenant de l'abbé révolutionnaire et représente une importante documentation sur la Révolution française. Les manuscrits du fonds Grégoire comprennent de nombreuses correspondances reçues par l’abbé Grégoire pendant la Révolution, dont une partie concerne l’Enquête sur les patois de 1790-1794, première grande enquête menée en France sur la situation sociolinguistique.
Modalités d'entrée :Legs
Accroissement :Fonds ouvert (le fonds s’accroît régulièrement de documents sur la Révolution française)
La Bibliothèque de la Société de Port-Royal conserve une grande partie des matériaux produits par l’enquête de l’abbé Henri Grégoire sur les « patois » entre 1790 et 1794. L’autre partie est conservée à la Bibliothèque nationale de France (BnF- Dpt des manuscrits - NAF 27981). Contenu :
- Ms. REV 222 : recueil factice contenant les réponses à la circulaire de l’abbé Grégoire.
- Ms. REV 223 : recueil factice contenant des pièces imprimées en « patois » envoyées à Grégoire en même temps que les réponses à la circulaire.
La plupart des documents réunis dans ces deux recueils ont été publiés par Augustin Gazier dans la Revue des langues romanes à partir de 1874 (t. V) puis en monographie : Augustin Louis GAZIER, Lettres à Grégoire sur les patois de France, 1790-1794 : documents inédits sur la langue, les mœurs et l’état des esprits dans les diverses régions de la France au début de la Révolution ; suivi du Rapport de Grégoire à la Convention… Paris : A. Durand et Pedone-Lauriel, 1880 (reprint : Genève : Slatkine, 1969). En revanche, Augustin Gazier n’avait pas connaissance du recueil BnF-NAF 2798, resté inédit.
Dates extrêmes :- réponses à l'enquête de l'abbé Grégoire : 1790-an III
- pièces justificatives : 1687-an II
Langues représentées dans le fonds :français, alsacien, basque, breton, occitan (tous dialectes), dialectes de langue d'oïl (berrichon, bourguignon-morvandiau, franc-comtois, picard, poitevin-saintongeais, wallon)
Importance matérielle :2 recueils factices : 100 + 22 ms.
Supports représentés :Manuscrits, imprimés
Ms. REV
Instruments de recherche disponibles :Sur le site de la bibliothèque
Répertoire national des bibliothèques et fonds documentaires (RNBFD)
Gargantua es aqueste eròi gigantàs e legendari, que percorreguèt França al fial de las cronicas e que Rabelais se n'inspirèt per crear lo personatge de sos recits literaris (La vie très horrifique du grand Gargantua, père de Pantagruel, jadis composée par M. Alcofribas abstracteur de quintessence. Livre plein de Pantagruélisme, 1534).
Aqueste personatge mitic a de caracteristicas que lo rendon aisidament identificable, e que se sarran de las d'una autra figura « d'òme salvatge », Joan de l'ors. Aquestes gigants an un brave apetís e una barba druda. Gargantua se fa tanben remarcar per sa maladreça e son caractèr barrutlaire. La legenda vòl qu'aja percorregut lo campèstre, transformant lo païsatge sus son passatge al fial de sos repaisses (e de sas dejeccions), de sòbras laissadas per sas bòtas, de calhaus escampats per jòc... Li arriba quitament d'agotar de ribièras quand a set ! Aquel apetís insadolable illustrariá l'apetís que marca lo periòde seguent las dificultats de la pèsta e de la guèrra de Cent Ans (fin del sègle XV, debuta del sègle XVI). Malbiaissut, mas pas jamai marrit intencionalament, Gargantua es un eròi popular, un golarut que sas aventuras, de còps escatologicas, fan rire lo grand public de l'epòca. Los recits legendaris sus sa naissença dison que seriá nascut de personas de talha inferiora a la mejana e que, al contrari, el, auriá conegut un creis plan important. Per çò qu'es de Rabelais, afortís que son personatge de Gargantua seriá nascut un tres de febrièr (e d'autres autors o pensan tanben) en sortissent de l'aurelha esquèrra de sa maire. Aquesta data de naissença e son caractèr absurde lo sarran de l'esperit carnavalesc que los recits ne son embugats e que ne partejan ja la foncion catartica.
Se la vila s'atribuís Gargantua coma eròi fondator, en se basant segurament suls prepausses de Felix Viallet, aquò's degut en part a un episòdi legendari que s'i seriá debanat. Fach pro rar, lo sang de Gargantua i auriá rajat, en seguida d'una nafradura al det, colorant aital las tèrras a l'entorn. Mas cal pas doblidar que Langonha, a la fin del sègle XV, es una vila situada a la crosada dels camins de comèrci, amb una fièra famosa e atractiva. Aital, recep aquesta literatura de còlportatge que Gargantua n'es un dels « best-sellers ». Cal pasmens esperar lo sègle XIX per veire aparéisser lo cap gigant de Gargantua que las cartas postalas ancianas de Langonha ne perpetuan lo sovenir. Aqueste es mostrat dins l'encastre del cortègi de carris florits que desfilan per la ciutat. Un cap monumental, que mesura mai o mens tres mètres cinquanta. Amai, es articulat, sos uèlhs e sa boca semblan prene vida e convidar los estajants a la fèsta. Mas doblidem pas que Gargantua es pas l'eròi d'una region en particular, tant los recits de còlportatge li fan percórrer e transformar los païsatges de França.
Amai siá eissida d'una literatura en màger part orala, la legenda de Gargantua contunha de viure encara a l'ora d'ara. Aquò's lo cas, per exemple, en Losera, dins la vila de Langonha (« Lo país de Gargantua ») que i festejan lo gigant dempuèi 1884. E se las sortidas de « Gargantua » del 1èr d'agost s'arrestèron a l'entorn de 1978, son cap tornèt sortir un primièr còp en 2000, e dempuèi, torna participar als passa-carrièras de carris carnavalescs. Se remarca tanben a Langonha la creacion recenta de la confrariá del Manouls Langonais de Gargantua, que met en lum aquesta especialitat culinària de tombadas de moton e de vedèl (los manols) mas tanben la confisariá sonada « La Gargantille ». E dempuèi lo 7 d'abril de 2000, Langonha ten lo recòrd del mond de la salsissa la mai longa : 23 160 m tot bèl just. Un còp de mai en omenatge a Gargantua.
Los primièrs recits de literatura orala sus la figura de Gargantua e dels gigants en general espelisson en França a partir de l'Edat Mejana, per conéisser fin finala una capitada bèla al sègle XVI. Creis lo nombre de cronicas oralas, tan coma aquel dels obratges escriches, a la seguida de Rabelais. En 1675, pareisson aital Les Chroniques du Roy Gargantua, cousin du très redouté Gallimassue e en 1715, es publicada la Vie du fameux Gargantua, fils de Briarée et de Gargantine. D'uèi, la legenda de Gargantua se transmet d'un biais diferent, en acòrd amb las modalitats actualas de partatge de las coneissenças. Se trapan aital de sites internet que li son dedicats, e existís quitament sus Facebook un #Gargantua.
Es amb los gigants del nòrd que lo Polin de Pesenàs foguèt classat a l'UNÈSCO en 2005. Pasmens, es de constatar la frequéncia e l'abondància d'aquestes animals totemics dins lo sud de França en general e dins lo Bas-Lengadòc en particulièr.
L'estructura del polin de Pesenàs es similara a tantes autres exemples de cavals de fusta. Era a l'origina faita de fusta, probablament de castanhièr, cobèrta d'una ampla tela blava que portava d'emblèmas que cambièron en foncion de las evolucions politicas.
La tela blava del Polin afica aital en alternància las colors de la reialtat, de la Republica o las abelhas imperialas. Lo Polin recampant darrièr el la comunautat picenesa (los piceneses son los estatjants de Pesenàs), suscitant a l'encòp paur e atraccion sus la populacion, foguèt d'alhors victima de sa foncion simbolica al moment de la Revolucion Francesa. Alara assimilat a la reialtat (sa legenda lo restacava en efècte a aqueste regim) lo polin foguèt aital cremat en 1789.
L'estructura ela-meteissa a tanben evoluit dins lo temps. A comptar de 1989, l'alumini mai leugièr, remplaça l'armadura de fusta pesuga. Lo polin pren alara lo camin d'Índia al costat d'autras figuras totemicas entre las qualas la Tarasca de Tarascon, per tal de representar las tradicions francesas a Bombay e New Delhi dins l'encastre de l'annada de França en Índia.
Lo Polin figura dempuèi 2005 al classament del patrimòni oral e immaterial de l'umanitat de l'UNÈSCO, dins l'encastre d'una reconeissença comuna a la França e a la Belgica, de lors gigants e figuras totemicas.
Chivalets, chivaus-frus, caval dragon, trèva-caval... son de fait tantas manifestacions de fusta e de tela qu'acompanhan las manifestacions e rituals de lor ciutat, recampant a l'entorn d'eles la comunautat, e que constituisson a aqueste títol un element del patrimòni cultural immaterial.
Ligats a una legenda o a un fach istoric local, l'estacament dels estatjants a aqueles animals de tela remonta de còps la luènh dins lo temps, e subreviu al temps que passa. Aquelas bèstias de tela son aital pauc a cha pauc vengudas emblematicas d'una vila. Demòran lo simbòl dels ligams estreches e sovent complèxes que l'òme entreten amb l'esperit dels Luòcs e sa pròpria Natura. Sens èsser unicament cantonats a las fèstas carnavalescas, aqueles animals-jupons s'intègran frequentament dins aquestas festivitats.
Dins la longa tièra dels animals totemics d'Erau, lo Polin de Pesenàs coneis coma lo Camèl de Besièrs o lo Drac de Bèucaire, una plaça particulara. « Los Polins » coneisson en país picenés un succès real. A l'ainat de la ciutat reala, s'apondèron progressivament aqueles d'Adiçan, d'Alinhan del Vent, Florençac, Montblanc, Sant Tibèri, Viàs... Pasmens, aquel de Pesenàs, possedís una plaça particulara. Constituís a priòri una de las fòrmas mai ancianas conegudas dins la region, que sa legenda lo fariá remontar als temps epics de la Crosada contra los Albigeses.
Lo Polin de Pesenàs auriá per mite original, la venguda en 1226 del rei de França Loís VIII a l'escasença de la Crosada contra los Albigeses. La cavala mai aimada del monarca seriá alara tombada malauta. Confiada a d'unes cònsols de la vila, luènh de defuntar d'una malautiá quina que siá, la cavala polina. En descobrir lo jove polin a son retorn a Pesenàs, lo rei demanda la construccion d'un equivalent de fusta per tal de commemorar l'eveniment. Aqueste modèl de tela e de fusta acompanha dempuèi las fèstas de la ciutat, fèstas religiosas e fèstas calendàrias, coma lo Carnaval.
La legenda coneis una segonda etapa « reala » en 1622, al passatge del rei Loís XIII. Lo marescal de Bassompierre que deviá traversar la Peyne sus son caval, e que crosèt una païsana en dificultat, al faguèt montar amb el, totes dos passèron ensem lo riu. L'anecdòta menèt a la fabricacion de dos manequins de fusta, Estieinon e Estieineta, que se pòdon totjorn veire sus l'esquina de l'animal.
Es tanben a aquesta data e malgrat una legenda que lo voldriá mai ancian, que lo Polin es pel primièr còp mençonat dins los archius de la vila çò que fa d'el un dels mai ancians animals de tela del departament (s'es pas lo mai vièlh). Per çò de sa legenda ela-meteissa, foguèt raportada un primièr còp en 1702 per Le Mercure Galant e aprèp enriquesida pel cronicaire picenés Pierre Poncet. Aquela de Bassompierre seriá estada fargada tardivament, mai o mens al sègle XIX, per Albert-Paul Alliès sus la basa de la venguda dins vila del monarca Loís XIII mentre que d'autres comentators, coma Claude Achard, veson dins aqueste parelh un rampèl de Grandgousier e Gargamelle, los parents de Gargantua que segon la legenda, faguèron tanben un passatge per la ciutat picenesa.
La mencion d'aqueste parelh rampèla que que n'advenga la proximitat entre l'animal totemic e la fèsta de Carnaval, a l'escasença de la que lo Polin se passeja per carrièras, al son dels autbòis e del pifre, e convida la populacion a dançar.
Sant Blasi, protector dels cardaires (artesans del teissut) devenguèt tanben sant patron de la vila que foguèt tre l'Edat Mejana un centre drapièr important. Son culte es celebrat a Pesenàs al mens dempuèi 1299, aprèp la mobilizacion de las corporacions drapièras de la vila. Fèsta patronala la Sant Blasi dobrís tanben a Pesenàs las festivitats de Carnaval, pendent las que apareis guidat pel menaire, lo Polin emblematic.
La sortida del Polin a Pesenàs correspond a un ritual plan precís que mescla dança e musica. Al son dels autbòis e dels tamborins, instruments tradicionals en Lengadòc, lo menaire vestit de roge e de blanc fa sa dança frenetica, lançant lo calivari subrexcitat de l'animal.
Dissimulats jos al pesuga tela blava, los nòu portaires animan l'esqueleta de fusta, li fasent percórrer las carrièras al rencontre de la populacion. Reguitnadas e virolets atisan la curiositat, mas tanben l'afolament de la populacion. Aquestes moviments brusques altèrnan amb los clacaments de la maissa articulada, la nhaca, que se dobrís pontualament per engolir l'obòl dels passants. Lo caminar del polin lo mena successivament, e segon un percors immudable, dins lo centre ancian de la vila : Cors Jean-Jaurès, plaça de la Republica, carrièra Anatole-France, baloard Sarrazin, rota de Besièrs, plaça del Quatorze-Juillet, carrièra François Oustrin, plaça Gambetta, carrièra Alfred-Sabatier, carrièra Emile-Zola.
Parallèlament al Polin, figura al patrimòni cultural immaterial de la vila la dança de las trelhas. Aquesta es menada pel cap de jovent. Tradicionalament, los joves, filhas e dròlles, se recampan e tenon dos per dos un arc de fusta ornat de pampa e de fuèlhs : la trelha. La dança s'articula en un desenat de figuras e un final. Si la musica es comuna a l'ensem de las vilas e dels vilatges del departament que practican aquesta dança, se pòt que las paraulas de cançon cambièsson. Es lo cas de Pesenàs. Lo menaire i pòrta lo nom d'Ortolan, e aquí la cançon entonada per incitar los parelhs a passar jos als trelhas :
"E Ortola, passo se bos passa – E passo jhoust les treios. E Ortola – passo se bos passa – E passo de dela;" (version donada per A.-P. Alliès. Une ville d'états : Pézenas aux XVIe et XVIIe siècles, Molière à Pézenas . Montpellier, Éd. des Arceaux, 1951).
Las trelhas semblan d'èsser estadas dançadas pel primièr còp a Pesenàs en 1564, a l'escasença del sejorn del rei Carles IX dins la vila. Foguèron aprèp associadas a la fèsta de las Caritats, que perdurèt dins la vila fins a la fin del sègle XIX.
L'enquête menée de 1790 à 1794 par l'abbé Henri Grégoire (1750-1831), député de l'Assemblée constituante puis de la Convention nationale n'est pas une enquête administrative de statistique officielle, même si elle est soutenue par les institutions révolutionnaires. L’abbé Grégoire mène un projet à visée politique et dont le but est clairement un « inventaire avant disparition » (Merle, 2010). Le questionnement sur les « patois » s'accompagnait d'ailleurs de nombreuses demandes relatives aux mœurs et à la moralité du peuple. Pour autant, l’entreprise de l’abbé Grégoire est bien la première enquête s’intéressant à la sociologie linguistique de la France, avec un questionnaire comportant quarante-trois rubriques. L'enquête Grégoire sollicitait les sociétés patriotiques des Amis de la Constitution et non les administrations.
Elle donna lieu au Rapport sur la nécessité d’anéantir les patois et d’universaliser l’usage de la langue française, présenté par l’abbé Grégoire au nom du Comité d’Instruction publique devant la Convention nationale le 16 prairial an II.
Les matériaux et documents produits pour l’enquête (réponses à la circulaire de l’abbé Grégoire, envoi d’imprimés en langues de France) sont répartis entre deux fonds documentaires :
- Bibliothèque de la Société de Port-Royal - Fonds de l’abbé Henri Grégoire >> fiche de fonds
- Bibliothèque nationale de France, NAF 2798 >> fiche de fonds
Voir tous les documents sur l’enquête Grégoire disponibles sur occitanica
L'Enquête impériale sur les patois, menée entre 1807 et 1812, est la première enquête de linguistique officielle, organisée par le bureau de la Statistique du ministère de l'Intérieur. Elle a été conduite par le savant Charles-Etienne Coquebert de Montbret et son fils Eugène, grands érudits et spécialistes des langues. La méthode de l'enquête est très différente de celle de l'enquête de l’abbé Henri Grégoire qui poursuivait un but politique plus que sociolinguistique ou scientifique, celui de prouver « la nécessité » et de trouver « les moyens d'anéantir les patois et d'universaliser l'usage de la langue française ». L’enquête impériale met en place une méthode proche de la dialectologie moderne en demandant, commune par commune via l’administration départementale, la traduction systématique d’un même texte, la Parabole de l'enfant prodigue. Interrompue en 1812, elle est resté inachevée.
Une partie des traductions de la Parabole de l’enfant prodigue en langues de France recueillies au cours de l’Enquête impériale a été publiée par Eugène Coquebert de Montbret dans les Mélanges sur les langues, dialectes et patois : renfermant, entre autres, une collection de versions de la Parabole de l'enfant prodigue en cent idiomes ou patois différens, presque tous de France… Paris : Delaunay, 1831.
Les archives de l’enquête ont été dispersées, une partie semble perdue. La documentation sauvegardée se trouve pour une bonne partie au sein du fonds Charles-Etienne et Eugène Coquebert de Montbret à la Bibliothèque municipale de Rouen, à la Bibliothèque nationale de France, aux Archives nationales et dans plusieurs Archives départementales.
- Bibliothèque Municipale de Rouen, Fonds Coquebert de Montbret … >> fiche de fonds
- Bibliothèque nationale de France, Département des manuscrits, « Notes et documents sur les patois de la France » : NAF 5910-5914 >> Fiche de fonds
- Bibliothèque nationale de France, Département des manuscrits, Collection Coquebert de Montbret (volumes « Linguistique ») : NAF 20080-20081 >> Fiche de fonds
- Archives Nationales, F/17/1209 : “Enquête sur les patois”
Voir tous les documents sur l’Enquête impériale sur les patois disponibles sur occitanica
Victor Duruy, ministre de l’Instruction publique sous le Second Empire de 1863 à 1869, lance en 1864 une enquête statistique destinée à mieux connaître la situation de l’enseignement primaire en France. L’enquête de 1864 se démarque des enquêtes précédentes par le degré de précision du questionnaire, destiné à dresser un tableau très précis de la situation de l’enseignement primaire en France. Par la circulaire du 28 mai 1864, le ministre Duruy adresse aux préfets un questionnaire qui devait être renseigné par les inspecteurs primaires, les inspecteurs d’académie et les recteurs, devant y ajouter un rapport d’ensemble concernant leurs circonscriptions scolaires.
Pour la première et la seule fois dans l’histoire de la statistique scolaire en France, le questionnaire comprend une rubrique sur les “idiomes et patois en usage” :
“ Existe-t-il des écoles où l’enseignement est encore donné en patois exclusivement ou en partie ? Nombre des écoles où l’enseignement est donné en totalité en patois ? En partie seulement ? Combien d’enfants savent le parler sans pouvoir l’écrire ? Quelles sont les causes qui s’opposent à une prompte réforme de cet état de choses ? Quels sont les moyens à employer pour le faire cesser. Joindre au rapport un fragment du patois ou de l’idiome avec la traduction littérale.” (circulaire du 28 mai 1864, publiée dans : Bulletin administratif du ministère de l’Instruction publique, nouvelle série, t. I, Paris, 1864).
Les directives données en font une enquête statistique particulièrement précise et développée et surtout, en intégrant dans un questionnaire précis sur les usages linguistiques dans les écoles et parmi les enfants, l’enquête Duruy produit jusqu’à l’enquête INSEE “Étude de l’histoire familiale” de 1999, la seule matière documentaire permettant une connaissance statistique assez précise de la situation sociolinguistique à l’échelle de la France.
Archives Nationales F/17/3160 : Instruction publique : “Statistique. États divers.” Ce dossier donne le résumé par département des réponses données à l’enquête du Ministère de l’Instruction publique de 1864. Les réponses à l’enquête du Ministère de l’Instruction publique de 1864 semblent ne pas avoir été conservées.
En 1873, Charles de Tourtoulon et Octavien Bringuier, deux philologues félibres de l’école de Montpellier entreprennent une mission pour la Société pour l'étude des langues romanes, soutenue par le ministère de l’Instruction publique (arrêtés ministériels du 2 mai et du 11 juin 1873) en vue de déterminer la limite entre la langue française et la langue occitane ou domaine d’oïl et domaine d’oc. La mission Tourtoulon-Bringuier est la première grande enquête linguistique nationale fondée sur une enquête de terrain armée d’une méthodologie scientifique : les études sont menées sur les lieux mêmes, par les mêmes personnes, afin que le même esprit préside à l'ensemble des recherches, et aussi pour que les nuances phonétiques, si difficiles à noter exactement, le soient par les mêmes personnes. Ils mettent au point un alphabet phonétique et des critères linguistiques déterminés par avance.
L’Enquête Tourtoulon-Bringuier est menée au cours de deux missions : la première de l’embouchure de la Gironde jusqu’en Creuse, puis une seconde de la Creuse jusqu’en Allier. Seule la documentation de la première enquête est connue et accessible. Elle concerne 150 communes d’enquête et environ 500 personnes interrogées.
Les résultats de l’enquête Tourtoulon-Bringuier, publiés en 1876 dans un rapport au Ministre de l’Instruction publique intitulé “Étude sur la limite géographique de la langue d'oc et de la langue d'oïl” amèneront à repenser la conception des frontières linguistiques de façon non linéaires mais forcément approximatives.
L’école philologique de Paris dirigée par Gaston Paris et Paul Meyer lancent une contre-enquête dans le département de la Creuse, menée par Antoine Thomas (40 communes du sud de la Creuse).
La mission Tourtoulon-Bringuier, menée sous l’égide de la Société pour l’étude des langues romanes, qui s’oppose à l’école philologique de Paris, et dont les membres étaient proches, voire actifs dans la renaissance occitane félibréenne, se démarque également dans ses motivations idéologiques, comme l’a noté Guylaine Brun-Trigaud : “Son but officiel consistant à déterminer la limite oc-oïl pour toute la France, mais on peut penser qu’il s’agissait par ce biais d’évaluer le territoire que pourraient légitimement revendiquer les félibres, qui, depuis 1854, prônaient un retour de la langue et de la culture occitanes, autour de la personnalité de Mistral” (“Les enquêtes dialectologiques sur les parlers du Croissant : corpus et témoins”, Langue française. Vol. 93, n°1, 1992. En ligne)
Étude sur la limite géographique de la langue d'oc et de la langue d'oïl Premier rapport à M. le Ministre de l'Instruction publique, des Cultes et des Beaux-Arts. Extrait des Archives des Missions scientifiques et littéraires, troisième série - tome troisième, Paris, Imprimerie Nationale, 1876. >> En ligne
Archives nationales F/17/2943 : Ministère de l’Instruction publique : Octavien Bringuier - Dossier sur la mission en France ayant pour but d’étudier la limite entre les parlers d’oc et les parlers d’oïl.
Née à Marseille le 26 janvier 1868, fille de Louise Delort de la Flotte, issue de l'aristocratie corrézienne, et d'un certain Henri Genès qu'elle semble n'avoir pas connu, elle arrive à un jeune âge à Brive-la-Gaillarde, berceau de sa famille maternelle. Elle quitte la Corrèze pour poursuivre ses études supérieures à Paris et revient vers 1890 à Brive, où elle enseigne le français dans une institution privée.
Marguerite Genès publie des textes poétiques, des pièces de théâtre et des études littéraires et de folklore limousin dans Lemouzi, « organe mensuel de l'école limousine félibréenne »,dès les premières livraisons. Ses études d'ethnographie limousine paraissent également dans L'Écho de la Corrèze et la revue mensuelle La Ruche corrézienne des Limousins de Paris. Reconnue localement pour ses capacités littéraires comme pour sa connaissance de l'occitan limousin – elle est nommée « maître en gai savoir du Limousin », elle est également enregistrée en août 1913 par Ferdinand Brunot lors de la campagne de collecte sonore des « Archives de la parole » (1911-1914) –, son œuvre sera cependant peu diffusée en dehors de sa région.
Ecouter l'enregistrement de Marguerite Genès par Ferdinand Brunot sur Gallica
Seules deux de ses pièces de théâtre seront publiées en monographie : Lous Francimans (Les Francimands), comédie en deux actes (Marguerite Genès et Eusèbe Bombal. Brive, impr. catholique, 48p.) en 1924, et les Leis d’Amor (Les Lois d’Amour), un acte en vers (Marguerite Genès et Mathylde Peyre. Brive, impr. de Chartrusse, Praudel et Cie, 32p. et musique) en 1944. Marguerite Genès tient en outre un carnet régulier pendant toute la durée de la guerre de 1914-1918 durant laquelle elle est infirmière bénévole. Conservés aux Archives municipales de Brive-la-Gaillarde, ces manuscrits inédits font l'objet d'une publication électronique dans le cadre du Centenaire de la Première guerre mondiale 14-18.brive.fr. Les archives personnelles et les manuscrits de Marguerite Genès sont aujourd'hui répartis entre les Archives départementales de la Corrèze et les Archives municipales de Brive-la-Gaillarde.
En savoir + : lire l'article biographique sur Vidas
Modalités d'entrée :Documents entrés par voie extraordinaire
Accroissement :fonds clos (dernier ajout le 29/06/1994 )
1825 - 1955
Langues représentées dans le fonds :
Importance matérielle :
3,7 mètres linéaires. 404 articles
Supports représentés :
Sous série 4S (de 4S1/1 à 4S9/24) Le fonds Marguerite Genès appartient à la série S (documents entrés par voie extraordinaire).
Instruments de recherche disponibles :Inventaire détaillé à l'article dans le Catalogue de recherche des Archives municipales de Brive-la-Gaillarde
Fonds communicable sur place
Conditions de reproduction :
La Société Archéologique de Béziers organisa plusieurs concours littéraires, dont celui de Langue Romane de 1838 à 1984, réservé à l'expression en langue d'oc. Pour y participer, il fallait composer un poème en occitan, avec un glossaire ou une traduction. Les compositions en français ou autres langues étaient exclues. Le poème devait rester anonyme et comporter une devise permettant d’identifier son auteur.
Chaque année la Société Archéologique publia dans son bulletin (BSAB), avec la liste des lauréats, le texte de la composition primée. Le premier concours fut organisé peu après la création de la Société Archéologique de Béziers (SAB) en hommage à Pierre-Paul Riquet, personnage tutélaire de la Cité. Suite au succès des premières éditions, le concours fut reconduit, et le thème laissé libre.
Reconnu et suivi dans toutes les provinces méridionales ce concours attira de nombreux poètes de toutes les régions de France ainsi que de l’étranger révélant quelques auteurs depuis devenus célèbres.
Le concours était annuel et la délibération des prix annoncée lors de la séance publique de la Société, le jour de l’Ascension. Un rameau d’olivier était alors attribué au premier lauréat, puis des médailles d’argent, de bronze et des mentions honorables pour les autres lauréats.
Modalités d'entrée :Dépôt de la Société archéologique scientifique et littéraire de Béziers dans le cadre d’une convention de coopération sur la mise en valeur du fonds de manuscrits littéraires liés au Concours de Langue Romane, en date du 28/09/2011.
Accroissement :fonds clos
Cet ensemble regroupe les pièces reçues par la SAB dans le cadre du concours de Langue Romane : principalement des poèmes, mais aussi quelques pièces de théâtre, chansons, contes et nouvelles. Ces textes, généralement accompagnés d'un glossaire ou d'une traduction en français, sont parfois complétés par des documents iconographiques et des correspondances.
Dates extrêmes :1838 - 1984
Langues représentées dans le fonds :Occitan
Importance matérielle :1180 pièces réparties en 16 séries dans 12 boîtes
Supports représentés :manuscrits
SAB-A
Instruments de recherche disponibles :Catalogue des archives et manuscrits du CIRDÒC
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Consultation sur place. Accès indirect.
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