La découverte du manuscrit de Flamenca par les romanistes François-Just-Marie Raynouard et Paul Meyer s'inscrit dans un vaste mouvement de pensée et de revendication culturelle connu sous le nom de « renaissance d'oc » ou « renaissance occitane ». On associe généralement le renaissance linguistique et culturelle occitane à l'action du Félibrige et de son membre le plus emblématique, Frédéric Mistral, récompensé du prix Nobel de littérature en 1904. Mais la prise de conscience de l'unité de la langue occitane, fondée sur un héritage littéraire prestigieux, est un mouvement qui s'amorce dès la première moitié du XIXe siècle dans tout l'espace occitanophone, « des Alpes aux Pyrénées », avec la génération des « poètes-ouvriers » d'expression occitane - Jasmin d'Agen, Gélu de Marseille pour les plus célèbres – et les travaux lexicographiques de Simon-Jude Honnorat (1783-1852) ; et parallèlement, dans le milieu intellectuel français avec le développement des études romanistes et albigéistes.
Le François-Just-Marie Raynouard (1761-1836) est une figure politique et intellectuelle importante de la Révolution et de l'Empire. À partir des années 1810, Raynouard, qui est d’origine provençale, va s'intéresser à l'ancien occitan et à la littérature des troubadours. Il poursuit les premiers travaux sur les troubadours occitans entamés par La Curne de Sainte-Palaye et Rochegude mais sera le premier à révéler l'ampleur de l'héritage littéraire occitan. Il publiera deux œuvres monumentales qui restent aujourd'hui des références : les Choix des poésies originales des troubadours, premier grand recueil de la littérature en ancien occitan, publiés en 6 volumes de 1816 à 1821, lui permettront de réaliser son Lexique roman, en 6 volumes également, de 1836 à 1844. Les travaux de Raynouard dépassent les cercles des philologues : ils ont un impact considérable sur le premier XIXe siècle français, emporté par la mode « troubadour ».
Chez certaines élites des régions occitanophones, les travaux de Raynouard, en établissant la similarité de la grande littérature lyrique des troubadours avec la langue parlée par le peuple en Provence, Languedoc, Gascogne, Limousin, Auvergne, etc., contribuent à l’éveil d'une affirmation identitaire. Parallèlement, les premiers historiens « méridionalistes » – le Quercynois Mary-Lafon et le pasteur ariégeois Napoléon Peyrat en particulier – popularisent la question albigeoise et inventent, après la redécouverte de la Canso de la Crozada par les philologues, le thème d'une civilisation occitane idéalisée, courtoise, laïque, - la civilisation de paratge - anéantie par les barbares du Nord et l'obscurantisme religieux.