Du 22 au 25 février 1848, Paris se soulève et instaure la Seconde République (1848-1851). Ces événements ouvrent la voie à un mouvement de révolutions qui va embraser l’Europe, c’est le “Printemps des peuples”. Mais la situation française est différente de celle des peuples européens qui revendiquent une libération politique par l’affirmation de leurs identités historiques, culturelles et linguistiques. Revenue après la défaite napoléonienne à ses frontières “naturelles”, la France constitue en effet une entité territoriale qui ne fait pas débat. Les progrès de l'industrialisation, le développement du chemin de fer et la politique de scolarisation contribuent à renforcer le sentiment d’unité nationale, dont le centre demeure plus que jamais Paris.
Les langues de France sont les grandes victimes de la centralisation et de l’ordre jacobin qui prévaut depuis la Révolution. Après le fameux Rapport de l'abbé Grégoire (1794) les politiques d’éradication des langues de France ne cessent de s'intensifier.
À rebours de ces courants nationaux d'unification émerge dans les régions occitanophones une prise de conscience vis-à-vis de la langue et de la culture qui entraîne nécessairement une pensée contestataire de l’ordre centralisateur: redécouverte de “l’âge d’or” des troubadours, émergence d’une historiographie méridionaliste et albigéiste, premiers grands succès populaires d’écrivains d’expression occitane. Ce fait “régionaliste” - le terme apparaît à cette époque - ne date pas de Frédéric Mistral. Mais son prestige international va faire du Félibrige un acteur majeur de la renaissance occitane, d’autant mieux acceptée par les élites parisiennes qu’il va savoir articuler défense et promotion des petites patries et attachement sans réserve à la Grande patrie.
La Consécration de cette identité nationale sous la IIIe République ne s'est pas effectuée par la dénégation des identités locales mais au contraire par leur célébration. Loin d'être opposés frontalement, le national et le local ont été désignés comme parfaitement solidaires, le second étant proposé comme fondement du premier. Il s’agissait de donner le sentiment d'appartenance locale comme mode d'accès privilégié à la conscience nationale.