Le provençal Serge Bec est le poète du désir incandescent, nourri autant de la lyrique des troubadours et de Mistral que du surréalisme dont il revendique la filiation. Dans Li Cants de l'Estre fòu / Les Chants de l'être fou qui paraissent en 1957, le jeune Serge Bec ouvre son œuvre poétique occitane par une célébration panique de l'amour et de la femme. Mais c'est la guerre – dont il fait l'expérience comme appelé en Algérie - qui marquera durablement sa création poétique, désormais pleine des violences du monde. Avec Memòria de la car / Mémoire de la chair (1960), le poète-soldat s'adresse à la femme aimée, restée sur l'autre rive de la Méditerranée.
Serge Bec est né en 1933 en Provence, à Cavaillon. Il est l'auteur d'une vingtaine de recueils de poésie.
"Photo Georges Souche, extraite du portfolio fòto-poesia "Arbres" (éditions Cardabelle)"
Mon ponh arranca lo soleu | Mon poing arrache le soleil |
Tancat dins la man dau traitre jorn | Planté dans la chair traître du jour |
Coma fariá d'un pom d'amor | Comme il ferait d'une pomme d'amour |
Dau temps lei paraulas an lo pretz dau sang segat | Pendant ce temps les paroles ont le prix du sang coupé |
La guerra s'es clavelada dins lo bedelet dau pòble | La guerre s'est clouée dans la bedaine du peuple |
La guerra s'enriquesís | La guerre s'enrichit |
E vaga de pipar l'aucelilha de son còs | Et ne cesse d'hypnotiser les oiseaux de son corps. |
Extrait d'Auba / Aube, dins Sèrgi Bec, Òbra poetica 1954-1960, éditions Jorn, 2012.
« La poésie de Sèrgi Bec n'existe et ne perdure que de ces secousses immenses, de ces désespoirs mêlés d'espoirs toujours plus fous. Tout y est passion sismique et déchaînements, et la voix n'y cesse pas de se tordre et de se défaire pour tenter de trouver son paroxysme.»
Philippe Gardy, Une écriture en archipel : cinquante ans de poésie occitane (1940-1990), Fédérop, 1992.
Serge Bec, Morceaux choisis et dits par l'auteur, Vendargues : Occitània Produccions, 2003
Sèrgi Bec, Òbra poetica 1954-1960, Montpeyroux : Jorn, 2012.